CHAPITRE III LA SITUATION DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DES FORMATEURS AU CAP
3. La formation des formateurs
3.1 La formation des enseignants
Le Statut du personnel enseignant
73au Cap Vert leur permet de participer au
fonctionnement du système éducatif dans son ensemble, y compris l’orientation et l’innovation
pédagogiques des établissements. C’est pourquoi, la formation continue de ce groupe vise une
meilleure « articulation entre les besoins organisationnels et les besoins sociaux ». Il est par
ailleurs primordial de souligner qu’au Cap Vert, le système de formation professionnel et le
système éducatif constituent un ensemble indissociable. Alors que le secteur de l’enseignement
général a connu de nombreuses réformes, la formation professionnelle, domaine considéré
comme secondaire, a été peu développée. Comme alternative aux formateurs, les enseignants,
73 Le statut du personnel enseignant du 2004 (décret-législatif n.2 de 2004) actualisé en 2015 par le
décret-législatif n. 69/2015. Ce statut prévoit les mécanismes de promotion et évolution professionnel des enseignants de l’enseignement de base et du secondaire ainsi que les enseignants de l’enseignement technique.
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dont on a renforcé les compétences, participent activement à la formation, notamment dans les
lycées techniques. Ceux-ci, en bénéficient d’un statut reconnu au sein de l’administration
publique, jouent, en effet, un rôle très important de socialisation professionnelle.
La Loi de base du système éducatif (LBSE, 2010) impose à l’État l’obligation de
développer et de diversifier la formation, d’assurer l’actualisation et le perfectionnement des
connaissances et de favoriser la mobilité professionnelle des enseignants. Toutefois, cette
législation limite la formation aux institutions spécifiques (aux institutions de l’enseignement
supérieur quand il s’agit de l’enseignement secondaire) en précisant que « la formation continue
est de l’initiative des institutions responsables de la formation initiale, des enseignants
eux-mêmes et des structures représentatives » (Art. 75, n. 3).
La LBSE
74(2010) encadre tant la formation initiale que la formation continue, dont les
fonctions diffèrent à plusieurs niveaux. Selon cette loi, « la formation initiale doit être intégrée
soit dans les plans scientifiques, techniques et pédagogiques, soit à l’articulation théorique
pratique », tandis que « la formation continue des enseignants doit permettre
l’approfondissement et l’actualisation des connaissances et des compétences
professionnelles », (Art. 75, n. 2). En outre, l’objectif commun de ces deux axes d’enseignement
consiste à constamment adapter les enseignants « aux évolutions pédagogiques, scientifiques et
technologiques, ainsi qu’aux transformations sociales et culturelles ». À cette fin, « les
méthodes et les contenus de la formation devront être en rénovation permanente ». Au-delà de
cette législation, les Délégations régionales du Ministère de l’Éducation sont chargées, par le
décret qui en réglemente les actions, d’aider à la formation en cours de service
75et à la
formation permanente du personnel enseignant et non enseignant .
Le système de formation des enseignants s’organise autour de deux modèles
institutionnels : les instituts pédagogiques (IP) d’une part, et les instituts et les centres de
formation d’autre part. Les instituts pédagogiques nationaux destinés aux enseignants de
l’éducation de base, et l’Institut supérieur de l’éducation (ISE) consacré aux enseignants du
cycle secondaire, offrent un formation académique et pédagogique. Les IP, établis dans l’île de
São Vicente et de Santiago, jouissent de l’autonomie administrative, financière et pédagogique,
74 Lei de base do sistema educativo, 2010 - (Loi d’Orientation du Cap Vert).
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tandis que la gestion dépend d’un président nommé par le ministre de l’Éducation. L’ISE offre
par ailleurs le diplôme de maîtrise dans plusieurs domaines.
De leur côté, les centres et les instituts de formation couvrent les domaines des sciences
de la mer, des sciences économiques, de l’administration et de la santé. Le Centre de Formation
des Enseignants de l’Enseignement Secondaire (CFEES), (actuel ISE) créé en 1979, assure la
préparation scientifique, psychopédagogique et didactique des enseignants du cycle secondaire.
Le CFEES a longtemps proposé le diplôme de Bacharelato
76qui certifie un cursus en trois
(après la fin des études secondaires) dont la dernière année est dédiée aux stages pédagogiques
dans les lycées, aux séminaires scientifiques et à l’élaboration d’un mémoire pédagogique.
Parallèlement au système national, de nombreux cadres du corps enseignant ont suivi
des formations dans des universités étrangères. En dépit de leurs spécialisations multiples, la
majorité d’entre eux n’ont pas bénéficié de formations pédagogiques.
Cependant, si la formation des enseignants est considérée comme essentielle à une mise
en œuvre réussie de la politique éducative, elle présente de nombreuses lacunes. En réalité, les
instituts pédagogiques nationaux présentent des compétences trop limitées pour répondre à tous
les besoins de la formation pédagogique. Alors que le secteur souffre d’une insuffisance
pénalisante d’actions de formation, les deux Instituts pédagogiques de Praia et de Mindelo
montrent quant à eux de nombreuses faiblesses, notamment en ce qui concerne la formation
pédagogique continue.
En effet, Le Statut du personnel enseignant (2004) indique que le concours est la
procédure de sélection « normale et obligatoire » du personnel enseignant. Ce concours est
ouvert à tous les individus qui possèdent une aptitude professionnelle pour enseigner.
Cependant, le système permet « quand la satisfaction des nécessités du système éducatif
l’exige », le recrutement de personnes n’ayant pas la qualification professionnelle pour exercer
la fonction d’enseignant voire même aucune formation professionnelle ». (Art. 10). De ce fait,
le Ministère de l’Éducation a été longtemps contraint de recruter de jeunes bacheliers, et en
dépit des dispositions légales prévoyant des schémas d’intégration professionnelle, le suivi et
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la formation de ces jeunes restent défaillants. Ces lacunes sont d’une proportion telle que toute
tentative d’améliorer la qualité d’enseignement s’est souvent soldé par un échec.
Dans un domaine où l’hétérogénéité des cursus est la règle, aucun diplôme n’est exigé
au Cap Vert pour exercer le métier de formateur, que ce soit en entreprise ou dans les
organismes de formation. À partir de 2008 des formations à la carte de quelques heures, ont
été organisée par l’IEFP
77, et plus tard d’autres formations de la même nature destinées aux
formateurs ont été organisées par l’IEFP à Praia. L’IEFP, qui centralise les informations
relatives aux formateurs (à travers la « bolsa de formadores do IEFP », une liste de formateurs),
offre une « formation de formateurs » d’environ 40 heures dont le contenu est uniquement
pédagogie, mais qui n’est toutefois pas indispensable à l’exercice du métier. En ce qui concerne
la formation permanente, aucune obligation légale ou institutionnelle n’est imposée aux
personnes qui s’orientent vers ce métier, et dont le sens d’appartenance au groupe des
formateurs reste interrogeable. En dépit de son importance reconnue pour tous, pendant
longtemps on ne trouvait paradoxalement aucune offre de formation spécialisée destinée aux
formateurs et aux animateurs des actions de formation.
En outre, on constate un manque de coordination entre la formation initiale et la
formation continue destinées au personnel enseignant. D’ailleurs, le système n’offre qu’un
faible soutien en termes d’aide pédagogique ou d’orientation car les actions de formation restent
ponctuelles et fragmentées. De ce fait, les enseignants doivent assumer eux-mêmes la
responsabilité de construire leur profession.
Dans le document
RÔLES ET COMPETENCES DES FORMATEURS DANS LA PROFESSIONNALISATION DES FONCTIONNAIRES AU CAP VERT
(Page 105-108)