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La chronoséquence événementielle et la datation relative

CHAPITRE 4. Les sites : contextes, résultats et discussions

4.1 Le site Hector-Trudel

4.1.4 Discussion pour le site Hector-Trudel

4.1.4.3 La chronoséquence événementielle et la datation relative

L’établissement d’une association stratigraphique entre des événements botaniques et des concentrations d’objets archéologiques est intéressant dans la mesure où nous pouvons maintenant proposer une datation relative basée sur nos trois diagrammes polliniques régionaux de référence (Annexe V). Cependant, compte tenu de la cohorte taxonomique que nous avons dans nos diagrammes polliniques et des contextes de dépôt et de conservation pollinique du site, le seul référent qui nous semble utilisable est Tilia americana (tilleul d’Amérique). En effet, sur les trois diagrammes polliniques de référence (figure 3.1 et annexe V), ce taxon est le seul à accuser durant la période préhistorique des deux derniers

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millénaires une augmentation puis une diminution significatives de représentation pollinique (1 à 2 %) qu’il est possible de dater. Les autres taxons directeurs ne montrent pour l’essentiel que de grands mouvements continus d’augmentation, de diminution ou de stabilité dans la représentation pollinique, qui ne varient véritablement qu’à l’approche de la période historique. En regard aux deux diagrammes polliniques du site, les variations de représentation pollinique de la plupart des taxons directeurs suivent de fait les mouvements locaux plus abrupts d’éclaircies forestières et les grandes tendances plus légères des mouvements régionaux sans qu’il soit possible toutefois de fixer un repère entre les profils du site et ceux de référence, sauf pour Tilia americana.

Le tableau 4.5 présente les dates de début et de fin de la dernière augmentation significative de représentation pollinique régionale de Tilia americana, pour la période préhistorique récente, que nous avons pu interpoler à partir des dates calibrées des trois diagrammes polliniques de référence. La moyenne des dates pour le début et la fin de cet événement botanique indique une fourchette de temps de près de 600 ans qui s’étire plus ou moins du milieu de la période du Sylvicole moyen ancien jusqu’au milieu de la période du Sylvicole moyen tardif.

Sites/Datation interpolées Dernière augmentation de représentation pollinique de Tilia Dernière réduction de représentation pollinique de Tilia BP AD BP AD Le bog3 de Mirabel 1740 210 1135 815

Le bog de Large Tea Field 1864 86 1278 672

Le bog de Ormstown 1742 208 1217 733

Moyenne/écart type 1782 ± 71 168 ± 71 1210 ± 72 740 ± 72 Tab. 4.5 – Dates interpolées de la dernière période d’augmentation significative de représentation pollinique de Tilia americana, d’après les diagrammes polliniques régionaux de références (Annexe V).

À l’étude de la courbe pollinique de Tilia americana du profil OH36-P (figure 4.5a), on constate que le maximum de représentation pollinique en zone 2 est constant entre l’avant et l’après éclaircie forestière de cette zone, mais qu’il est nettement plus élevé que le maximum observable en zone 3, qui est déjà lui plus élevé que celui de la période historique en zone 4.

3 Un bog est une tourbière ombrotrophe, c.-à-d. qui n’est pas alimentée par les eaux de ruissellement. Un bog est

Pour nous, ce maximum de représentation en zone 2 serait corrélatif de la dernière période d’augmentation pollinique régionale de ce taxon que nous indiquent les trois diagrammes polliniques de référence. Il est à noter que les différences importantes de variations de représentation entre les diagrammes du site et ceux de référence tiennent ici à la nature et à la provenance des différents milieux de dépôt pollinique.

La période de réduction terminale de Tilia americana, évaluée autour de 740 ± 72 AD selon les dates interpolées (tableau 4.5), se situe sur le profil OH36-P (dépotoir 6, figure 4.5a) à l’interface des zones polliniques 2 et 3, directement sous la plus grande concentration d’os frais et de tessons de céramique du Sylvicole moyen tardif. Cette indication d’âge au niveau du spectre pollinique 16, sous le dépotoir 6, placerait donc ce dernier durant la seconde moitié du Sylvicole moyen tardif. En regard du profil OZ61-B (talle d’impatiente du Cap, figure 4.5b), l’absence d’une variation significative de Tilia americana, entre les spectres polliniques 24 et 29, indiquerait même que le début de l’éclaircie forestière de la zone pollinique 3 serait plus tardive que la période de réduction terminale de ce taxon, plaçant ainsi l’aménagement du dépotoir probablement plus près de la fin de la période du Sylvicole moyen tardif que de son centre, comme l’indiquent d’ailleurs les dates radiométriques qui lui sont associées (figure 4.1). C’est donc maintenant avec un peu plus d’assurance que nous proposons une appartenance culturelle de notre complexe de cultigènes le plus ancien au Sylvicole moyen tardif, et plus précisément à la fin de cette période, soit entre 900 et 1000 AD.

Pour l’éclaircie forestière de la zone pollinique 2, il est plus difficile de proposer une association à une période culturelle en particulier, vu l’absence de précision sur la profondeur d’un foyer (carré OI-33) et d’une vidange de foyer (carré OG-38) périphériques à notre carré de fouille et datant du Sylvicole inférieur (échantillons datés récoltés entre 15 cm de profondeur et la surface de l’horizon B). En effet, la proximité de ces éléments fait qu’il n’est pas certain que la concentration d’os blanchis sous le dépotoir 6 n’en fasse pas partie. Toutefois, la conjonction des trois éléments qui suivent fait qu’il y a une forte probabilité de contemporanéité entre cette seconde période d’éclaircie forestière et la première moitié du Sylvicole moyen tardif (entre 500 et 750 AD).

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1- La courbe pollinique générale de Tilia americana, où l’on voit que l’éclaircie se situe durant la seconde moitié de son épisode d’augmentation.

2- Les distributions céramiques, qui indiquent que le Sylvicole moyen tardif (N = 28) est nettement mieux représenté que le Sylvicole moyen ancien (N = 11) pour la deuxième période d’éclaircie forestière et qu’il l’est nettement moins après (Smt, N=15 ; Sma, N=12).

3- La pratique sur ce site de récolte en profondeur à l’intérieur de niveaux arbitraires pour les éléments à dater (Pierre Corbeil, comm. pers.),

Pour la période de l’éclaircie forestière potentielle de la zone pollinique 1, il semble plus que probable qu’elle soit antérieure au Sylvicole moyen tardif, sans qu’il soit toutefois possible de préciser s’il s’agit du Sylvicole moyen ancien ou du Sylvicole inférieur. Dans un cas nous avons une concentration relativement élevée de tessons de céramique alors que dans l’autre nous avons à peu de distance des éléments de foyers plus anciens.

4.1.5 Apports anthropologiques, archéologiques et archéobotaniques de l’étude du site