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3.4 Complexe dans une catégorie additive

3.4.5 La catégorie homotopique

Dans cette section, on définit la catégorie homotopique à partir de la cohomologie (en degré 0) des complexes Hom. Cette définition permet, grâce aux propriétés de la cohomologie, de faire descendre rapidement (on applique juste le foncteur H0) au niveau de la catégorie homotopique les constructions effectuée au niveau de la catégorie

des complexes (voir la proposition 3.93 et la remarque 3.94).

La catégorie homotopique : une catégorie triangulée

On commence par définir la catégorie homotopique. Un nouveau type de complexes et un nouveau type de morphismes de complexes apparaissent alors : les complexes contractiles et les équivalences d’homotopie. On définit ensuite, grâce à la notion de cône, les triangles standards puis la structure triangulée sur la catégorie homotopique. On finit par le corollaire 3.91 et la proposition 3.92 qui serviront dans la chapitre 4.

Définition 3.86 Catégorie homotopique. Soit C une catégorie R-linéaire. On définit la catégorie Com(C )ht

de la façon suivante. Les objets de Com(C )ht sont les complexes de C ; pour (X, d

X) et (Y, dY) deux complexes

de C , on pose

HomCom(C )ht(X, Y) = H0(Hom (X, Y)) .

La catégorie Com(C )ht (notée Cht pour simplifier) est une catégorie R-linéaire à translation. Le foncteur de

passage au quotient de Com(C ) dans Cht est un foncteur R-linéaire de catégories à translation.

Preuve. Soient (X, dX), (Y, dY), (X′, dX′) et (Y′, dY′) quatre complexes de C et f : X′→ X, g : Y → Y′ deux

morphismes de complexes. On considère le morphisme de complexes Hom (f, g) : Hom (X, Y) → Hom (X′, Y)

(voir la définition 3.63). D’après l’exemple 3.75 et les définitions de Z et B, on a le diagramme commutatif suivant B0Hom (X, Y)  // HomCom(C )(f,g)  HomC(X, Y) HomCom(C )(f,g)  B0Hom (X, Y) // HomC(X′, Y′)

ce qui montre que si u est une homotopie de X dans Y alors guf est une homotopie de X′ dans Y. Ainsi, on

peut bien définir, par passage au quotient, une loi de composition R-bilinéaire ◦ :

(

HomCom(C )ht(X, Y) × HomCom(C )ht(Y, Z) −→ HomCom(C )ht(X, Z)

(g, f ) 7−→ gf .

On obtient ainsi sur Com(C )ht une structure de catégorie et un foncteur R-linéaire de passage au quotient de

Com(C ) dans Com(C )htdonné par



X −→ X f −→ π(f )

où π : HomCom(C )(X, Y) → HomCom(C )ht(X, Y) désigne la surjection canonique. On en déduit ainsi que l’image

d’un objet nul de Com(C ) est un objet nul de Cht. De même, la somme directe de deux objets de Com(C ) est

aussi la somme directe de ces deux objets dans Cht. Ainsi Cht est une catégorie R-linéaire.

Il s’agit à présent de définir le foncteur de translation T sur Cht. Pour un objet X, on pose TX = X[1] et pour

un morphisme de complexes f : X → Y, on pose T(π(f)) = H0(α)(π(f )) = π(f [1]) (voir la proposition 3.66 pour

la définition de α). Comme α0(gf ) = α0(g)α0(f ) et α0(id

X) = idX[1], on en déduit que T est bien un foncteur

(qui est, de plus, R-linéaire). On définit aussi le foncteur de translation inverse T−1sur Cht. On note pour cela β

l’inverse de la transformation naturelle α de la proposition 3.66. Pour un objet X, on pose T−1X = X[−1] et pour

un morphisme de complexes f : X → Y, on pose T−1(π(f )) = H0(β)(π(f )) = π(f [−1]) (puisque X = X[−1][1]

et Y = Y[−1][1]). Comme β0(gf ) = β0(g)β0(f ) et β0(id

X) = idX[−1], on en déduit que T−1est bien un foncteur

(qui est bien sûr R-linéaire). Enfin, on a évidemment TT−1= id

Cht et T−1T = idCht. Ainsi T et T−1 sont bien

des équivalences de catégories R-linéaires. De plus, la définition de T (c’est-à-dire la relation Tπ(f) = π(f[1])) montre que le foncteur de passage au quotient est bien un foncteur de catégories à translation.

Définition 3.87 Équivalence d’homotopie. Soient C une catégorie R-linéaire et (X, dX), (Y, dY) deux

complexes de C . On dit qu’un morphisme f : X → Y est une équivalence d’homotopie si f est un isomorphisme dans Cht.

Définition 3.88 Complexe contractile. Soient C une catégorie R-linéaire et (X, dX) un complexe de C . On

Définition 3.89 Triangle standard. Soit C une catégorie R-linéaire. On considère (X, dX) et (Y, dY) deux

complexes de C et f : X → Y un morphisme de complexes. On appelle triangle standard de base f le triangle de Com(C ) donné par

X f // Y i // C(f ) π // X[1] où i et π sont donnés dans la définition 3.61.

On appelle triangle standard de base f dans Cht

l’image dans Cht du triangle précédent.

Proposition 3.90 Catégorie triangulée. Soit C une catégorie R-linéaire. On note T l’ensemble des triangles de Cht isomorphe à un des triangles standards. Le triplet (Cht, T, T ) est une catégorie R-triangulée.

Preuve. Voir [K-S, Théorème 11.2.6].

Corollaire 3.91 Équivalence d’homotopie et complexe contractile. Soient C une catégorie R-linéaire et (X, dX), (Y, dY) deux complexes de C et f : X → Y. Alors f est une équivalence d’homotopie si et seulement si

C(f ) le cône de f est contractile.

Preuve. Il s’agit du corollaire 3.47 appliqué au triangle X f // Y i // C(f ) π // X[1] .

Proposition 3.92 Homotopie et complexe contractile. Soient (X, dX) et (Y, dY) deux complexes de C

et f : X → Y un morphisme de complexes. Alors f est une homotopie si et seulement si f se factorise par un complexe contractile.

Preuve. On suppose que f = (fn)

n∈Z est une homotopie. Par hypothèse, il existe sk : Xk+1→ Yk tels que

fk= skdk

X+ dk−1Y sk−1pour tout k ∈ Z. On considère alors le complexe X′ défini par X′n= Xn et dnX′ = 0 pour

tout n ∈ Z puis le complexe C(idX′). Comme idX′ est un isomorphisme, le corollaire 3.91 assure que C(idX′)

est contractile. Montrons que f se factorise par C(idX′). On définit pour cela g = (gn)n∈Z : X → C(idX′) et

h = (hn) n∈Z: C(idX′) → Y en posant gn=  idXn dn X  et hn=dn−1Y sn−1 sn  Vérifions que g et h sont bien des morphismes de complexes. On calcule pour cela

dn C(idX′)g n− gn+1dn X=  0 idXn+1 0 0   idXn dn X  − id Xn+1 dn+1X  dn X= 0 et hn+1dn C(idX′)− d n Yhn =  dn Ysn sn+1 0 idXn+1 0 0  − dn Y  dn−1Y sn−1 sn  = 0 . On calcule ensuite hg. En degré n, on obtient (hg)n= sndn

X+ d n−1

Y sn−1= fnpour tout n ∈ Z.

Réciproquement, si f se factorise par un complexe contractile alors f = gh où la source de g est contractile. Comme les complexes contractile sont les objets nuls de la catégorie homotopique, on en déduit que f = 0 dans la catégorie homotopique. Ainsi f ∈ B0Hom (X, Y) c’est-à-dire que f est une homotopie.

Prolongement de foncteurs et catégorie homotopique

Ici, on prolonge l’extension aux catégories de complexes d’un foncteur entre deux catégories R-linéaires jusqu’aux catégories homotopiques. Il ne reste plus qu’à assembler les ingrédients qui ont été présentés dans cette section (notamment la proposition 3.81 et la remarque 3.85). Dans la remarque 3.94, on montre que cette extension de foncteurs aux catégories homotopiques conserve l’adjonction ce qui servira pour les contre-exemples de la section 4.1.

Proposition 3.93 Extension de foncteurs. Soient C et C′ deux catégories R-linéaires et M : C → Cun

foncteur R-linéaire. Le foncteur M : Com(C ) → Com(C′) qui prolonge M (voir la proposition 3.81) passe au

quotient et définit un foncteur R-triangulé (qu’on note encore M) M :      Cht −→ C′ht X 7−→ MX π(f ) 7−→ π(Mf ) .

où π désigne la surjection canonique de la catégorie des complexes dans la catégorie homotopique.

Par ailleurs, si N : C → C′ est un foncteur R-linéaire et α : M → N une transformation naturelle. On note

encore α la transformation naturelle prolongeant α au niveau des complexes. En considérant l’image de α dans la catégorie homotopique, on obtient une transformation naturelle entre M et N.

On note FctT(Cht, C′ht) l’ensemble des foncteurs R-triangulés de Chtdans C′htet Fct(C , C) l’ensemble des

foncteurs R-linéaires de C dans C′. On a ainsi défini un foncteur R-linéaire d’extension

Extension:      Fct(C , C′) −→ FctT(Cht, C′ht) M 7−→ M α 7−→ α .

Preuve. En appliquant le foncteur B0 au morphisme de complexes M : Hom (X, Y) → Hom (MX, MY) de la

remarque 3.83, on obtient, grâce à l’exemple 3.75, que M passe bien au quotient et définit un foncteur R-linéaire de Cht dans C′ht.

Montrons que M est bien un foncteur triangulé. On note T (resp. T′) le foncteur de translation de Cht(resp.

C′ht), On a MTX = M(X[1]) = (MX)[1] = TMX (voir la proposition 3.81). De plus, pour f = (fn)

n∈Z : X → Y,

on a, par définition du foncteur de translation sur Chtet C′ht,

M(T(π(f ))) = M(π(f [1])) = π(M(f [1])) = π((Mf )[1]) = T′π(Mf ) .

Ainsi M est bien un foncteur de catégories à translation.

Si X f // Y i // C(f ) π // TX est un triangle standard de base f dans Cht alors, d’après la re-

marque 3.85, MX Mf // MY Mi // MC(f ) Mπ // T′MX est un triangle standard de base Mf dans C′ht.

Par ailleurs, si X f // Y g // Z h // TX est un triangle distingué dans Cht alors il existe un triangle

standard X′ f

// Y′ i′ // C(f) π′ // TXet un isomorphisme de triangles donnant le diagramme commu-

tatif X f // u  Y g // v  Z w  h // TX Tu  X′ f ′ // Y′ i′ // C(f) π′ // TX′

En appliquant le foncteur M, on obtient que MX Mf // MY Mg // MZ Mh // T′MX est isomorphe au triangle

MX′ Mf

// MY′ Mi′ // MC(f) Mπ′ // TMXqui est distingué d’après ce qui précède. On en déduit que M est

bien un foncteur R-triangulé.

Passons à l’étude des transformations naturelles. Soient (X, dX), (Y, dY) deux complexes de C et f : X → Y

un morphisme de complexes. Comme αYMf = Nf αX (voir la proposition 3.81), en passant au quotient, on

obtient

π(αY)M(π(f )) = π(αY)π(Mf ) = π(αYMf ) = π(Nf αXn) = π(Nf )π(αX) = N(π(f ))π(αX).

Ainsi α est bien une transformation naturelle. De plus, comme αTX = π(αX[1]) = T′αX, on a le diagramme

commutatif M(TX) αTX // id  N(TX) id  T′(MX) T′αX // T′(NX)

puisque, c’est l’image d’un diagramme commutatif dans Com(C′).

Il reste les propriétés de fonctorialité et la R-linéarité. Soit P : C → C′ un foncteur R-linéaire et β : N → P

une transformation naturelle. Comme les relations (β)(X,dX)◦ (α)(X,dX) = (β ◦ α)(X,dX) et (idM)(X,dX) = idM

sont vraies dans la catégorie des complexes, elles donnent le résultat souhaité en prenant leur image par π. Les propriétés de R-linéarité sont évidentes.

Remarque 3.94 Adjonction et extension de foncteurs. Soient C , C′ deux catégories R-linéaires et M :

C→ C, N : C→ C deux foncteurs R-linéaires. On suppose que (M, N) est une paire adjointe.

L’adjonction entre les foncteurs M : Com(C ) → Com(C′) et N : Com(C) → Com(C ) passe au quotient et

définit une adjonction entre les foncteurs M : Cht→ C′ht et N : C′ht→ Cht.

En appliquant le foncteur B0 au morphisme de complexes ϕ

X,Y : Hom (MX, Y) → Hom (X, NY) de la re-

marque 3.84, on obtient, grâce à l’exemple 3.75, que l’adjonction Z0ϕ

X,Y passe bien au quotient et définit un

Vérifions à présent la naturalité de la transformation. Soient (X′, d

X′) un complexe de C , (Y′, dY′) un

complexes de C′ et f = (fn)

n∈Z : X′→ X et g = (gn)n∈Z : Y → Y′ deux morphismes de complexes. En

appliquant le foncteur H0 au diagramme commutatif

Hom (MX, Y) ϕX,Y // Hom(Mf,g)  Hom (X, NY) Hom(f,Ng)  Hom (MX′, Y)ϕX′,Y′ //Hom (X′, NY)

qui provient la remarque 3.84, on obtient la naturalité souhaitée (car H0Hom (Mf, g) = Hom

Cht(Mπ(f ), π(g))

et H0Hom (f, Ng) = Hom

C′ht(π(f ), Nπ(g))).

L’isomorphisme donnant l’adjonction étant H0ϕ

X,Y, la counité et l’unité de la paire adjointe (M, N) (au

niveau des catégories homotopiques) sont respectivement l’image par π de la counité et de l’unité de la paire adjointe (M, N) (au niveau des complexes).