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Deuxième partie : Co-écrire l’identité

2 Deuxième chapitre : Polyphonie ou la parole multiple pour dire l’identité

2.2 L’ironie : expression des paradoxes de l’identité dans Outremer

Si O. Ducrot considère que l’ironie est un procédé de la polyphonie énonciative, c’est parce qu’elle met en œuvre plusieurs voix, sinon deux voix au minimum, celle d’un locuteur L qui présente un énoncé comme étant celui d’un énonciateur premier E, énoncé auquel il n’adhère pas ou même qu’il prend pour absurde171

. L’ironie est donc une figure de distanciation puisque le locuteur ne prend pas l’énoncé à son compte. Elle est une disqualification puisqu’elle remet en cause le dire de l’autre pour son manque de pertinence ou son incongruité172. Mais si l’ironie n’engage pas le locuteur par rapport au discours qu’il tient, elle participe néanmoins de l’identité « interne »173 du sujet dans la mesure où elle fait référence à l’attitude de celui-ci face au discours. Elle décrit non seulement la manière dont le narrateur utilise ce discours, mais elle révèle aussi la manière avec laquelle il fait référence à l’autre et l’appréhende dans la relation discursive. Cette première remarque peut éclaircir

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Genette, que cite Lutas, met aussi ce franchissement de frontières sur le compte d’une vision moderne de la personnalité, plus libre et plus complexe, qui abolit toute frontière et rompt avec les attributs classiques du personnage. Voir Gérard Genette, Figures III, op, cit., p. 254.

170 Claire Stolz, La polyphonie dans belle du seigneur d’Albert Cohen. Pour une approche sémiostylistique, Paris, Honoré Champion, 1998, p. 261.

171 Oswald Ducrot, Le dire et le dit, Paris, Éd. de Minuit, 1984, p. 211.

172 Dans l’ironie en tant que trope ou l’ironie en tant mention, il y a ce désaccord exprimé entre le signifiant et le signifié de l’énoncé, entre le sens littéral et le sens recherchée. Voir Caroline Masseron, Agnès Auricchio et Claude Perrin-Schimer, « La polyphonie des discours argumentatifs : propositions didactiques », Pratiques, n° 123-124, Metz, CRESEF : Collectif de recherche et d'expérimentation sur l'enseignement du français, 2004, p. 195-203.

173 P. Charaudeau parle d’identité interne au sujet énonciateur, elle peut être décrite par le mode de prise de parole et le positionnement du sujet énonciateur. Voir Patrick Charaudeau (dir.) et Dominique Maingueneau (dir.), Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Seuil, 2002, p.300.

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l’attitude du narrateur, par exemple, vis-à-vis des personnages ou celle même de ces derniers. Mais revenons au sens premier de l’ironie. Selon Le Petit Robert, l’ironie vient d’eirôn, l’« action d’interroger en feignant l’ignorance », ce qui veut dire qu’ avant d’être une forme de discours, l’ironie est une activité de pensée. Cette première définition résume fort bien l’action du récit d’Outremer qui est une suite d’interrogations du narrateur-personnage Morgan. Ces interrogations peuvent être d’ordre intime et personnel en rapport avec ses origines, comme elles peuvent relever d’un ordre plus large concernant les événements qui ont marqué sa vie et spécialement son enfance liée à cette conjoncture de la France coloniale. Interroger en feignant l’ignorance suppose aussi la présence d’une personne qui formule ces interrogations. Il est question à ce moment de son attitude vis-à-vis du monde. Cette personne est en l’occurrence le narrateur ou un personnage. Dans Outremer, ces interrogations sont, dans la majeure partie du récit, celles du narrateur-enfant. Sans doute sont-elles présentes dans le but de justifier cette « ignorance », qui pousse ce dernier au questionnement bien que les commentaires soient l’œuvre de l’adulte qu’il est devenu. Si pour F. Mercier-Leca « l’ironie renvoie d’abord à un comportement174

», dans ce travail, elle représente une stratégie avant tout, elle est l'expression du projet du narrateur qui traduit son incompréhension du monde et de son identité insaisissable. C’est, en partie, pour cela que nous avons distingué deux instances du je dans Outremer. Un je qui raconte sa propre histoire et un je qui porte des jugements sur ces mêmes faits. En somme, un je « raconté » et un je « racontant » qui vise « à dénoncer les fausses valeurs175 ».

Il faut toutefois distinguer l’ironie verbale de l’ironie situationnelle ou « référentielle »176 comme l’appelle Kerbrat-Orecchioni, où cette seconde catégorie fait référence à la situation ou au référent extralinguistique qui présente des caractéristiques ironiques. Nous citerons plus bas quelques exemples du texte.

Par ailleurs, si l’ironie est une figure de pensée qui se laisse voir par le sens de l’énoncé, la présence d’indices apparents aide cependant le lecteur à la saisir. Ces indices sont semés dans le texte même ou l’accompagnent. L’auteur brandit ainsi sa stratégie d’ironie177

174 Florence Mercier-Leca, L’ironie, Paris, Hachette Supérieur, 2003, p. 10.

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Ibid ., p. 12.

176 Catherine Kerbrat-Orecchioni, « Problèmes de l’ironie », dans Catherine Kerbrat-Orecchioni et al., L’ironie, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 1978, p. 15-18.

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L’ironie est même une « figure perpétuelle de [son] style », comme le dit l’auteur. Voir Morgan Sportes, « Morgan Sportes, par Morgan Sportes (ou du dialogisme) », L’infini, Été 1987, n° 19, p. 189.

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avant même d’entamer le récit. Il s’agit d’une citation de Kierkegaard qu’il donne en épigraphe du texte :

Tout comme la philosophie commence par le doute, de même une vie digne, celle que nous qualifions d’humaine, commence par l’ironie.

Au-delà de l’insensé, du paradoxe et de la duplicité sur lesquels toute une vie repose, et que cette citation résume, l’auteur nous présente la démarche qu’il suivra pour réécrire son histoire. En effet, tout au long du récit, le narrateur ne prend pas seulement en charge de livrer les contradictions qui s’agglutinent autour de sa vie, mais il adopte en plus un procédé en adéquation avec ces paradoxes, il se sert d’un regard oblique pour les considérer et les transmettre. L’incipit du récit confirme et révèle également la tonalité du texte. Celui-ci débute par une interrogation et une recherche, celle de la ville d’Alger sur la carte de France. La ville introuvable va rendre le personnage perplexe. Et la perplexité est encore plus grande lorsqu’il découvre qu’Alger se trouve ailleurs, sur un autre continent. Il ne comprend pas pourquoi cette ville où habitent des Français, et dont on dit qu’elle est française ne se trouve nulle part sur la carte de France. La situation n'est pas seulement obscure mais elle est dramatique aussi pour Mo (Morgan) qui cherche cette Atlantide pendant des heures, en vain. L’incipit annonce l’insensé, il dit le doute et le désarroi dans lesquels le personnage est plongé. Cette situation présente aussi le genre de personnage auquel nous aurons affaire. Personnage que nous découvrirons au fil du texte, curieux, obstiné et moqueur (se moquant parfois de lui-même). Pour dénoncer le chaos qui l’entoure, il se sert de l’ironie, à la fois refuge et expression de l’incompréhension et du trouble qui le hante.

À ce premier constat, viennent s’ajouter d’autres situations aussi complexes et incongrues les unes que les autres comme l'union des parents de Morgan : un juif et une catholique qui se présente comme antisémite. Cette union fait référence à une absurdité existentielle selon le narrateur-personnage qui se chargera de l’écrire, de la transcrire à travers un discours qui dépasse le simple persiflage pour s’inscrire dans la critique profonde d’une condition, d’un destin et d’un sort où il n’y a pas de possible rencontre ou de réconciliation. L’absurde ne réside pas dans l’union elle-même entre deux êtres de confessions, d’opinions et de cultures différentes, mais il le devient quand l’un des deux refuse la différence de l’autre dans cette union. Le narrateur exploitera cette situation pour insister sur l’étrange et l’incroyable union de ses parents en revenant sans cesse sur le dénigrement dont fait objet le père, et sur la persistance de la mère dans le rejet de son mari. L’ironie nait de cette situation

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que le narrateur-personnage dramatise en quelque sorte au niveau de l’écrit en insistant sur l’incompatibilité de la réunion de ses parents. Le titre également ne laisse pas indifférent, dans Outremer se combinent plusieurs significations. Il s’agit d’abord de l’« outre-mer », ou ce qui se trouve au-delà de la mer, ce qui est lointain et étranger. Ce terme suggère ensuite l’« autre mère », une mère autre en somme qui défie tous les stéréotypes et valeurs traditionnels liés au seul substantif de « mère », et pareillement à l’« outre-mer », elle est une mère étrangère. Le titre suggère également de passer outre la mère, lui faire face et s’opposer à elle. En somme, ce jeu d’homonymes peut être une façon de considérer le sens global du texte.

Ces indications résument les niveaux de conflits sur lesquels se joue la trame du récit, car à bien considérer le texte, nous constatons qu’il s’agit de tout cela. Il est question des relations au sein de la famille et de celles liées à l'espace géographique de l'outre-mer. Ces premières remarques ne sont certes pas suffisantes pour conclure à la convergence vers une stratégie d’ironie discursive, car si l’ironie discursive peut être justifiée par l’ironie situationnelle, toute situation ironique n’aboutit pas forcément à un discours ironique. Il en est ainsi de ce retournement de situation de la mère, réduite à son arrivée en France à faire des ménages pour survivre. Elle sera à la merci de ces employeurs comme elle l’a été, elle, avec ses « Fatmas ». Même si cette nouvelle situation fait dire à la mère qu’elle est la fatma des autres, le narrateur ne semble pas tirer profit de ce renversement pour la railler. Le fait est intégré dans le processus de décadence de la mère, et le commentaire qui l'accompagne donne au contraire une vision tragique du sort qu’elle connut. Le narrateur se désole de cette terrible fin de Rolande :

Et c’était comme si la fragile porcelaine du temps se fût brisée, il y avait longtemps, très longtemps, et que l’un de ses immortels fragments eût échoué là entre les quatre murs immémoriaux de ce réfectoire d’hôpital où, assise sur une misérable chaise en formica, comme sur un trône glorieux, elle continuait de toute éternité et pour les siècles des siècles de voir autour d’elle graviter l’Algérie. (OU, p. 325-326)

Cependant, si le narrateur a choisi la critique et la mise en cause de ce qui est à l’origine des situations invraisemblables auxquelles il été confronté, il faut, à ce moment, voir comment l’ironie se manifeste, et chercher les indices laissés dans le texte.

Ce sont d’abord les signes formels liés à l’écriture, que l’auteur sème tout au long du texte, qui trahissent cette ironie. Il s’agit de la typographie inhabituelle où les majuscules, les italiques, les parenthèses et autres clausules et paraphrases en latin, anglais ou dans une autre langue qui appellent à une lecture autre que celle littérale des énoncés. En effet, le récit

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d’Outremer déborde de majuscules et de mots en capitales comme : « nom », « vérité », « réalité », « juive », « exode », « exil » ou « légende » qui reviennent régulièrement dans le texte. Nous remarquons que ces substantifs ont un lien direct avec l’identité.

Les majuscules sont employées dans un but emphatique exagérant le sens d’une situation pour donner ainsi dans le ridicule. Aussi quand le narrateur parle de la veuve (sa mère) et de ses orphelins, il dit :

Maman allait hurler, c’était inévitable, se lancer dans une vaste scène tragique où, innocente victime d’une conjuration internationale, elle ne faisait, elle, la Veuve et ses Trois Orphelins, que s’affronter une énième fois à l’une des innombrables mesures vexatoires que ces Messieurs–qui–dirigent–le–monde lui réservent à chaque instant depuis qu’elle a quitté sa Bretagne natale (OU, p. 80)

« Veuve » fait référence, en situation ordinaire, à la privation de l’être cher, du mari ou du conjoint avec qui la mère a partagé la vie. Cependant, quand nous faisons la liaison avec le type de rapport qui unissait la mère et le père, et avec le sentiment que celle-ci nourrit à son égard, et surtout à sa réaction après la mort du père, nous constatons que le mot « veuve » devient impropre à qualifier la mère. Être veuve, dès lors, signifie la perte d’une source de revenus, la perte d’un certain confort et non plus d’un mari aimé. De même pour « Trois Orphelins », non seulement la mère se montre peu affectueuse avec eux, mais le statut d’« orphelins » était bien le leur avant même que ce père ne disparaisse, parce que la mère s’est arrangée pour réduire les liens qui les unissaient à ce dernier. En considérant donc le contexte, nous comprenons que le dessein du narrateur est de mettre en cause la parole de la mère. Celle-ci utilise dans ses lettres aux notaires, aux avocats et autres administrateurs, ces mêmes termes pour se qualifier et qualifier ses enfants dans le seul but de les amadouer. Le narrateur veut dénoncer la sournoiserie de la mère. Il reprend les mots de celle-ci pour signaler leur sens inapproprié quand ils sont prononcés par elle. La parole maternelle est une violation de ces qualificatifs presque sacrés qui font référence à la famille idéale, sinon ordinaire. La mère ne les utilise que pour attirer la compassion des autres et avoir gain de cause.

Ailleurs, c’est le mot même de « mère » qui suggère d’autres connotations, comme dans les passages qui suivent:

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 « mais dans quel but cette provocation […] pour […] lancer contre elle l’ultime offensive, et définitivement la supprimer, hop, rayée de la carte ! la Bretonne, la Mère : Jeanne d’Arc ! » (OU, p. 268).

 « je devais moi, la Mère, incarner la figure même du malheur, afin que tous, oui, même le dernier des plus misérables fellahs du bled, pussent s’identifier à moi, Jeanne d’Arc » (OU, p. 314).

La majuscule signale que les mots sont ceux de la mère, du moins ses pensées, car elle ne se considérait pas comme toutes les autres mères, elle est la Bretonne. La comparaison avec Jeanne d’Arc vient accentuer l’emphase au point de la rendre ridicule par l’effet contraire que cette expression suggère. Rolande est comparée à l’héroïne, non pas pour son courage et ses qualités de guerrière, mais parce que, comme elle, la mère entend des voix. Mais contrairement à Jeanne d’Arc qui entend des voix divines, les siennes sont celles de ses prétendus espions, celle de ses démons en somme. Ils annoncent sa folie et sa fin proche.

D’autre part, la répétition, à dessein hyperbolique des mots, accentue l’effet ironique. Ainsi d’« Exode », qu’il faut relier à l’exode des Juifs d’Égypte, qui prend son sens dans le contexte de l’exode des Français d’Algérie, donc de celle des Juifs d’Algérie, c’est l’éternel recommencement. L'ironie est certes situationnelle, mais ce leitmotiv en est sa transcription, une indication au lecteur pour qu’il puisse faire le lien. À l’« Exode » est rattaché l’« Exil » qui a d’ailleurs la même assonance et relève du même champ sémantique.

De même, « Légende » qui revient plus de vingt fois, signe d’un côté le détachement apparent du narrateur de sa propre histoire, surtout quand il est précédé de la préposition « selon », où ce n’est plus le personnage qui parle, mais le narrateur qui rapporte les dires d’autrui. D’un autre côté, il marque une emphase de cette même histoire comme si elle était unique, mais la répétition de ce terme marque une certaine autodérision et finit par dénoncer le caractère peu convaincu et convaincant de l’histoire qu’il raconte. Elle finit même par donner dans le ridicule, car la légende maintient un certain mystère autour des êtres qui la constituent, elle sert à les magnifier. Or, la mise en relief de ce terme et sa redondance, ainsi que le contenu de cette légende qui ne raconte finalement que des faits banals, oriente la compréhension vers le sens contraire. La cible n’est plus la mère, mais le narrateur lui-même qui considère son histoire comme une espèce de fable parce que ne ressemblant à aucune

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autre. Ainsi, si le narrateur se dit être monstre ou une espèce de créature étrange, son histoire ne peut être qu’une légende et il ne peut être qu’un être de légende.

L’autodérision se réalise aussi à travers la description physique de certaines parties de son corps. Le narrateur se fait passer, à chaque fois, pour un être hybride où les gènes de la mère ont mal cohabité avec ceux du père. Cette identité physique est en partie la cause de ses malheurs.

Ailleurs, ce sont des énoncés qui sont répétés, repris sans cesse pour signifier leur sens dérisoire, sinon l’incrédulité du narrateur à croire aux « mots » quand ces derniers, comme il le dit : « [vivent] séparément » des choses. Quand le narrateur affirme qu’il a longtemps cherché Alger sur la carte de France ou qu'il répète ce slogan: « la Méditerranée traverse la France comme la seine traverse Paris », ou encore « tous Français de Dunkerque à Tamanrasset », il veut simplement mettre en cause le sens de ces déclarations et signaler le peu de crédibilité de celui à qui on les impute. Le pays qui est en feu justifie l'abus de ces déclarations, car la Méditerranée est sur le point de devenir le gouffre qui séparera les deux rives. La phrase qui clôt le récit fait écho à son incipit ; « Je ne chercherais plus Alger sur la carte de France » (OU, p. 332). Le narrateur se résout à cette perte, signe d’une maturité et d’une prise de conscience. Nous remarquons cependant que dans ces derniers cas où le narrateur reprend le discours d’un tiers, il s’agit de ce que Sperber et Wilson appellent « l’ironie comme mention »178, le narrateur reprend un énoncé pour s’en désolidariser et marquer son opposition ou du moins exprimer une opinion différente de ce qu’il rapporte.

Dans un autre exemple où le narrateur décrit le mouvement des voisins qui vont et viennent, celui-ci dit :

Je les observais.

Avec des yeux de pauvre. Ils étaient heureux. (OU, p. 160)

La qualification de ces gens d’« heureux » n’a rien en soi d’inhabituel, mais si nous mettons en relation ce terme avec l’état personnel du narrateur qui se sent enfermé chez lui, sans autre distraction que la lecture imposée par la mère, nous pouvons déduire que le regard posé sur ces gens « heureux » est celui du dépit et de la jalousie. La jalousie vient de ce qu’il n’a pas et ne possède pas. Il se sent malheureux parce qu'il est privé du bonheur auquel les autres ont

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Voir Dan Sperber et Deirdre Wilson, « Les ironies comme mentions », Poétique, n° 36, Paris, Seuil, Novembre 1978, p. 399-412.

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droit. La mise en évidence du terme « heureux » par l’italique est un signal suggérant cet état contraire dans lequel se trouve le narrateur. La suite de la phrase aurait dû être « j’étais malheureux », mais présentée ainsi elle révèlerait le vrai sentiment d’envie qui torture le personnage. Le terme « heureux », suggère au contraire le sentiment opposé, celui d'être malheureux car privé de choses simples mais essentielles. Le contraste est d’autant plus frappant qu’il met en scène un personnage qui observe, non avec des yeux d’un voyeur envieux, mais avec ceux d’un enfant privé du bonheur auquel tout autre a accès. Le lecteur ne peut éprouver, face à un tel tableau, que de la compassion, et le narrateur aura réussi ainsi à