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L’Inde Islamique et le Pakistan

De l’Antiquité à la Renaissance

3. Le jardin au Moyen Age et à la Renaissance

3.1. Le Style Arabo-Musulman

3.1.3. L’Inde Islamique et le Pakistan

Les jardins arabes représentent un effort conscient pour la création des conditions les plus parfaites possibles, un paradis sur terre. C’est conçu pour maximiser la beauté pour tous les sens ; avec les parfums des fleurs, les herbes aromatiques, le son de l’eau ruisselante, des oiseaux, le bruissement du feuillage, les fruits délicieux et les brises rafraîchit par la présence de l’eau ; c'est l'abondance et l'intensification maximale du plaisir.

Dans sa conception le paysage environnant est un élément soigneusement inclus pour donner une dimension importante à l’espace et aux distances. A l’intérieur un sens d’ambiguïté entre les espaces ouverts et les espaces fermés a été atteint au travers de la légèreté des colonnes et des arcs et par l’utilisation subtile de la texture nid d’abeille et des voûtes pour moduler les rayons du soleil et leur réflexion, ainsi que l’utilisation de l’eau.

Après une description du jardin arabe, Pechère (1973) comprend qu'il a à faire à une conception du jardin cohérente, savante et qui exprime un art de vivre et une socialisation différente. Quand à Forestier (1997), il nous confie que les arabes n’ont pas laissé que de grandioses jardins mais un savoir, des méthodes et une curiosité qui sont visibles dans les jardins traditionnels.

3.1.3. L’Inde Islamique et le Pakistan

Après les invasions de Gengis Khan et Tamerlan au 14ème siècle, les Mongols ont adopté la culture et l'art Perse. Tamerlan a même ramené les artisans vers sa capitale Samarkand en Ouzbékistan, où ils ont construit des mosquées, des médersas, des palais et des jardins.

Un ambassadeur d'Espagne a vu la splendeur de Samarkand. Il raconte qu’il y avait six éléphants qui se tenaient près de l’entrée de jardin. Une plantation luxuriante composait avec des chevreuils et des faisans. La horde d’or, l’armée, composée de 20.000 guerriers campait dans son jardin. Tamerlan s’asseyait sur un trône devant lequel il y avait une fontaine qui jette une colonne d'eau en l'air vers l'arrière dans un bassin où des pommes rouges flottaient. Les invités de Tamerlan ont bu dans des tasses d'or pour ensuite faire le tour du jardin du palais.

L'ambassadeur d'Espagne qui a beaucoup aimé le nouveau jardin le décrit ainsi: « Ce jardin

était entouré par un haut mur, cloisonné par quatre carrés à ses angles, et dans chacun des quatre coins se trouve une tour ronde assez élevée. Ce jardin avait à son centre un grand palais et devant lui un très grand bassin d’eau avait été creusé. Son grand jardin était bel et bien le plus beau de tous ceux que nous avions visité, et le palais dont l'ornementation est parée d'or et de faïence bleu est de loin le plus somptueux ».

En plus d'être des lieux de plaisir, la couronne de jardins de Samarkand joue un rôle politique, symbolique et cérémonial. Ces jardins ont été nommés d'après les territoires conquis par exemple «Damas» et «Chiraz». Quand la Horde d'Or fait du jardin un camp armé, les canaux d'ornement fournissent de l'eau pour boire, cuisiner et se laver.

A travers une série de conquêtes entre le 16ème et le 19ème siècle, l’empire Moghol s’étendit jusqu’en Inde et au Pakistan. Cette famille de bâtisseurs d'empire est aussi devenue une dynastie de concepteurs de jardins. Babur, un poète et auteur de l'une des premières autobiographies islamiques a créé un empire moghol en Inde et y introduit le même style de jardin. Plus tard, les descendants de ses jardins survivront au Cachemire.

La plus grande partie des mémoires de Babur décrit en détail ses campagnes militaires et ses activités de loisirs : la conception des jardins. Dans les contreforts de Kaboul par exemple, il en a compté 32 variétés de tulipes. Il écrit qu’en matière d’architecture, il prisait plus que tout l’harmonie et la symétrie et souligne sa prédilection pour les eaux vives. Il aimait les jardins autant pour son plaisir personnel que comme décors de cérémonials ; il y organiser des audiences publiques, des remises de titres honorifiques et des fêtes (Hattstein et Delius, 2004, p.464). Son premier jardin conçu en 1508, surplombe le fleuve Jumna à Agra, qui coule le long de la forteresse et qui donne beaucoup d'oranges, de citrons et grenades. Il est constitué d’un espace

gazonné avec les arbres de tamarin, d’un bassin octogonal, d’un édifice en pierre et de la salle du trône, ensuite d’un jardin privé et ses dépendances, et après cela d’un pavillon pour les bains. C’est ainsi que de merveilleux jardins, de formes géométriques régulières, ont été introduits en Inde. Dans tous les coins ont jaillis de belles parcelles, et dans chaque parcelle ont été plantées dans des arrangements réguliers des roses et des narcisses.

Les descendants de Babur sont devenus aussi de grands concepteurs de jardins. La tradition moghole de célébration des ancêtres a fusionnée avec la tradition persane de la conception des jardins. Cela a créé une autre variante de jardin-paradis qui représentait un lieu de villégiature pendant la vie du propriétaire et un lieu de repos après sa mort : le jardin-tombeau.

Babur se rendit ensuite au Cachemire où il créa un nombre important de jardins. Magnifiquement situés et dans un paysage de qualité superbe, les jardins du Cachemire ont été d’un impact sans pareil.(Hattstein et Delius, 2004, p.490).

Le fils de Babur, était moins intéressé par l’art des jardins que son père, mais son petit-fils a créé à Fatehpur Sikri, le Fort d'Agra. « Chah Bordj » et le temple funéraire d'Akbar à Sikandra qui est plus grand que celui de son père, mais partage avec lui son plan carré et sa rigueur symétrique. Ce somptueux monument ainsi que les jardins qu’il fit aménager à Agra et dans sa résidence d’été du Cachemire témoigne de ses grandes qualités d’architecte.

Son arrière petit-fils, Chah Jahan fut un maître d’œuvre plein de largesse. Il s’adonna à cette passion avec plus d’énergie encore que ses prédécesseurs. A Lahore, les nouveaux appartements du souverain furent réalisés en marbre blanc, leurs plafonds à caissons étaient dorés et ornés de verre d’Alep. La ville, que l’on appelait déjà la cité des jardins, fut encore embellie par l’aménagement de somptueux jardins, le Chalimar-Bagh, (voir la figure n°10), d’Achabal, de Vernag et de Nishat-Bagh. Les quatre jardins sont traversés chacun par un canal central et alimentés par une source abondante.

Fig.10. Chalimar Bagh à Lahore Source : www. Philipsgardenblog.com

Quand à son deuxième arrière petit-fils, partageant l’intérêt de son père pour l’architecture et l’art des jardins, fut à l’origine de la conception du plus célèbre de tous les jardins moghols: le Taj Mahal, (voir la figure n°11). Il l’a aménagé comme un jardin-tombeau pour son épouse favorite, Mumtaz-Mahal. Le Taj Mahal est l’expression la plus parfaite de la métaphore du paradis créée par les Moghols. C’est un exemple incomparable et parfait du style savant persan du Chahar-Bagh.

Fig. 11. Le Taj Mahal à Agra

Source : www.taj -mahal.net

Le temple mausolée, au lieu d'être au centre, se dresse sur le bord du jardin sur la rive de la rivière Yamunâ et non pas au centre du parc, dont il est séparé par une haute estrade (Hattstein et Delius, 2004, p.480). Des deux côtés, une mosquée et une maison d’invités se font face. Le

jardin suit le plan de Chahar-Bagh de l’époque moghole avec une répartition en quatre parties ; mais l’intersection médiane est occupée par un bassin.

A Lahore, il a conçu des jardins à l'intérieur de la vieille ville et à Delhi, le Fort Rouge, un palais a été conçu comme une ville-forteresse avec de nombreuses cours intérieures. Le troisième petit-fils a construit la mosquée impériale de Lahore comprenant une grande cour donnant sur un jardin paradisiaque.

La composition était destinée à faire passer le message implicite, que ce soit dans la forme du bâtiment ou de son emplacement, que le tombeau était une représentation allégorique du trône de Dieu par-dessus les jardins du Paradis lors du Jour du Jugement.