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L’ ILLUSTRATION DE LA TECHNIQUE INDUSTRIELLE COMME INCONTOURNABLE PAROLE DU MODERNE

1.4) Aux amateurs professionnels, Camille Flammarion

2. L’ ILLUSTRATION DE LA TECHNIQUE INDUSTRIELLE COMME INCONTOURNABLE PAROLE DU MODERNE

Pour répondre aux ambitions didactiques qui gouvernent le siècle, des poèmes puis des illustrations vont accompagner le processus de vulgarisation scientifique désormais à même de séduire le lecteur et de prouver que la science, puisqu’elle inspire l’art, peut être une délicate compagne plutôt qu’une austère préceptrice. Ils remplissent la même fonction que les textes qu’ils accompagnent : offrir au lecteur une vision globale et raisonnée de l’ensemble des connaissances scientifiques et technologiques acquises sur le cosmos.

2.1) Une forme optique de la pensée

99

En 1824, l’astronome et mathématicien Pierre-Simon de Laplace commande une œuvre sur l’astronomie au poète Pierre Daru car, précise-t- il,

« Dans notre siècle, où tous les esprits tendent vers l’étude des choses positives, la littérature semble appelée à parcourir une carrière nouvelle. Son rôle est de populariser les sciences, de les

99 « Le vers est la forme optique de la pensée. […] Fait d’une certaine façon, il communique son relief à des choses qui, sans lui, passeraient pour insignifiantes et vulgaires. Il rend plus solide et plus fin le tissu du style. C’est le nœud qui arrête le fil. C’est la ceinture qui soutient le vêtement et lui donne tous ses plis. Que pourraient donc perdre à entrer dans le vers, la nature et le vrai ? », Hugo Victor, Cromwell, Paris : Ambroise Dupont, 1828, p.xlv.

présenter dépouillées des formes qui les rendent inaccessibles à un si grand nombre d’intelligences »100.

A son tour la poésie tente sa chance dans la vulgarisation de la science et Pierre Daru chante passionnément la beauté de l’Univers :

« Quel mortel, vers l’Olympe élevant ses regards, N’a demandé les noms de tant d’astres épars ? A contempler leur cours qui n’a donné des veilles ? J’entreprends de chanter leurs brillantes merveilles, Les lois que leur fixa l’arbitre souverain,

Et que l’homme a su lire en ce livre divin. Vous, qui de l’univers maintenez l’harmonie, O, puissance ! ô lumière ! ô sagesse infinie ! Donnez-moi d’entrevoir vos sublimes secrets, Et qu’une voix mortelle annonce vos décrets. Je les confie au rythme, ami de la mémoire

Les cieux de leur auteur nous racontent la gloire : L’homme sort du néant, quand il sait l’admirer. Astres majestueux, c’est à vous d’éclairer

L’atome intelligent, si grand dans sa faiblesse : Le spectacle du ciel prépare à la sagesse »101.

Cette introduction lyrique aux beautés des savoirs célestes et aux vertus de la connaissance intègre harmonieusement les idéaux positivistes du XIXe siècle. Du premier au dernier chant, Pierre Daru poursuit dans son poème un déroulement didactique ordonné. Son chant inaugural exalte les bienfaits des sciences cosmiques pour donner tout d’abord au lecteur le sentiment de la nature et lui ouvrir les yeux sur l’opportunité que représentent pour lui les progrès de l’astronomie (son importance pour la navigation et la culture agricole est mentionnée dès les premières strophes). Avec grandiloquence,

100 L’éditeur de Daru raconte avec fierté cette anecdote qu’il nomme l’ « appel de la science à la poésie ». Voir : Daru Pierre, L’Astronomie, poème en six chants, Paris : Firmin Didot, 1830, préface, p.iii.

Daru affirme donc à son tour que les sciences célestes ne doivent plus être obscures pour les hommes. L’œuvre du poète prend toutefois une tournure assez rigoriste pour répondre aux impératifs pédagogiques qui lui incombent. Le poète choisit en effet de retracer l’histoire des sciences invoquées et dresse, au fil des deuxième et troisième chants, l’inventaire des connaissances anciennes – le mythe d’Orphée, les constellations connues dans l’Antiquité, les systèmes de Pythagore, Thalès, Ptolémée, les découvertes égyptiennes. Les travaux plus récents de Kepler, Galilée, Descartes, Cassini, Haley et Newton sont mentionnés dans le quatrième chant tandis que le cinquième a pour but de décrire le monde planétaire et le système solaire. Enfin, le dernier chant est consacré à l’astronomie moderne. Ses racines antiques donnent un glorieux pedigree à la science du XIXe siècle qui, ainsi, ne peut être perçue comme une science nouvelle et potentiellement effrayante par conséquent. Le récit limpide de ses derniers progrès renseigne avec précision le lecteur juste converti. Ainsi le poème se termine-t-il par l’exposé des éléments récemment acquis par les astronomes modernes, principalement occupés à décrire l’aspect de la Lune, des étoiles et des comètes. Le propos d’ensemble est tout à fait sérieux et ne néglige pas son savant dessein. L’esthétique versifiée ne doit jamais masquer la précision érudite souhaitée par Laplace et, pour cela, chaque chant s’achève sur un bouquet de notes scientifiques. Ainsi lorsque Daru déclare :

« Soit qu’échappé du sein d’un orbe étincelant Un débris enflammé s’en éloigne en roulant,

Soit, et j’en crois Herschel, que dans son atmosphère Le soleil ait produit une vapeur légère

Qui, d’atômes flottant attirant le concours, Obéit à cet astre et le suit dans son cours. »102,

il renvoie immédiatement son lecteur aux déclarations du Comte de Buffon qui, au XVIIe siècle, avait soumis l’hypothèse que la Terre serait un débris

du Soleil détaché de ce dernier par les répercutions de l’impact d’une comète103. De même, à la lecture d’une strophe consacrée à l’astronome

John William Herschel, une note technique rappelle les travaux effectués par ce dernier sur les nébuleuses ainsi que leur validité auprès de la Société royale de Londres en 1811 sans oublier l’estime de Laplace envers elles104.

Grâce à ces notes, le contenu savant est complet. La légèreté poétique de l’œuvre s’en trouve en revanche quelque peu alourdie car le lecteur doit souvent interrompre sa lecture pour se tourner vers les précisions qu’elles apportent. Chaque fois, les images mentales qu’il se construit sur l’Espace se rompent en partie. Le poète, à cet égard, a pris toutes les précautions car nul ne doit se laisser détourner de la science en s’abandonnant aux dérives de l’imagination ou en se satisfaisant d’un apprentissage sentimental de la nature considéré comme rétrograde.

Existe-t-il une réelle compatibilité entre la mélodie de la strophe et le didactisme du XIXe siècle ? La poésie, utilisée depuis le XVIIIe siècle pour satisfaire le caractère mondain de la diffusion scientifique n’est-elle pas devenue, au XIXe siècle, un contresens au positivisme ? L’interrogation est d’autant plus légitime que si Daru et plusieurs auteurs s’y sont essayés au cours des premières décennies du siècle, la poésie scientifique comme genre littéraire devient rapidement anecdotique en leur temps105. Pourtant, la

conviction d’un avenir pour le couple attrayant que forment l’astronomie et l’art ne s’éteint pas. Reste à trouver la bonne formule. Diverses énonciations sont alors proposées par les principaux vulgarisateurs de l’époque, et dans un premier temps, le recours à la poésie reste fréquent. Il s’agit le plus souvent de poésie ancienne utilisée symboliquement afin de ponctuer les

103 Leclerc de Buffon Georges Louis, Histoire naturelle, Paris : Imprimerie royale, 1749. 104 Daru, Pierre, op.cit. p.37-38.

105 Dina Cosmin, « Astronomie et poésie didactique en France. Enquête sur la disparition du genre ». In : Louâpre Muriel, Marchal Hugues et Pierssens Michel (dir.), La Poésie

écrits savants. Dans sa fameuse Astronomie populaire, François Arago cite par exemple Jean-Baptiste Rousseau :

« Quel plus sublime cantique Que ce concert magnifique De tous les célestes corps ! Quelle grandeur infinie, Quelle divine harmonie Résulte de leurs accords ! »106

Arago constitue entièrement son chapitre consacré à la « Musique Céleste » à partir de cette courte églogue. L’astronome ne veut sans doute pas décrire lui-même le son de l’Espace au risque de s’aventurer vers une prose spéculative qui ne lui convient pas. Si la poésie lui permet de concéder une part de son ouvrage au goût populaire pour les hypothèses concernant certains aspects merveilleux du ciel, il s’en sert aussi pour extraire sa signature de telles images. Arago utilise le poème pour son pouvoir évocateur de figurabilité107, sa capacité à suggérer des sensations et à dessiner

des situations visualisables qui aideront son lecteur à se familiariser avec le sujet de son étude. Il ne néglige donc pas la charge enrôleuse que doit contenir une astronomie populaire ; il la convoite discrètement. On sent chez l’auteur une forme de résignation le forçant à admettre que si la science du ciel n’est pas seulement mathématique, elle passe aussi par un rapport de connaissance sensible du monde. Alexandre Humboldt le revendique lui aussi dès le milieu des années 1840 en affirmant :

« Qu’on oppose la nature au monde intellectuel, comme si ce dernier n’était pas compris dans le vaste sein de la nature, ou bien qu’on l’oppose à l’art, envisagé comme une manifestation de la puissance

106 Arago François, Astronomie populaire, op.cit, p.246.

107 Les notions de « figurabilité » et de « situations visualisables » sont emprutées à l’analyse du rêve par la psychanalyse freudienne. Voir : Freud Sigmund, Sur les rêves, Paris : Gallimard, 1988 [1901].

intellectuelle de l’humanité, ces contrastes, reflétés dans les langues les plus cultivées, ne doivent pas pour cela conduire à un divorce entre la nature et l’intelligence, divorce qui réduirait la physique du monde à n’être plus qu’un assemblage de spécialités empiriques. […] Les phénomènes extérieurs, dit Hegel dans La Philosophie de l’histoire, sont en quelque sorte traduits dans nos représentations internes. Le monde objectif pensé par nous, en nous réfléchit, est soumis aux formes éternelles et nécessaires de notre être intellectuel. L’activité de l’esprit s’exerce sur les éléments qui lui sont fournis par l’observation sensible. Aussi, dès la jeunesse de l’humanité, se découvre, dans la simple intuition des faits naturels, dans les premiers efforts tentés pour les comprendre, le germe de la philosophie de la nature. Ces tendances idéales sont diverses et plus ou moins fortes, selon les races, leurs dispositions morales et le degré de culture qu’elles ont atteint, à la faveur de la nature qui les entoure »108.

Marqué par les petites perceptions leibniziennes et les théories sur la vision subjective formulées par Goethe et Schopenhauer, l’astronome confère un rôle substantiel nouveau aux visions mentales ainsi qu’aux affiliations disciplinaires pour former le néophyte aux savoirs sur le monde109. La

psychologie, l’optique et les sciences de la communication viendront renforcer cette tendance mais l’on comprend déjà, grâce à l’argumentaire d’Humboldt, que le récit mythique sous la forme d’une cosmogonie a toute sa place dans les traités d’astronomie populaire. Ce genre littéraire confère à la science pour tous un ancrage intellectuel qui façonne sa portée universelle. La revue historique des grands textes sur l’univers est elle aussi récurrente – on l’a vu dans le chant de Paul Daru – et chacun peut reconnaître Aristote, Pline l’Ancien, Pythagore, Ptolémée, Buffon, Fontenelle ou Herschel qui composent ensemble le topos invariable des parutions astronomiques. Même le sérieux Arago fait appel aux anciens

108 Humboldt Alexandre, Cosmos, Essai d’un description physique du monde, Paris : Gide & Baudry, 1855 p.76.

109 Crary Jonathan, L’art de l’observateur. Vision et modernité au XIXe siècle, Nîmes : Jacqueline Chambon, 1994.

dans son Astronomie populaire pour aborder une à une les grandes questions qui concerne l’Espace. Décrire une nomenclature, composer une bibliographie, raconter l’origine de l’univers deviennent les nouvelles figures de style littéraires qui se répètent d’auteurs en ouvrages et qui bâtissent les lieux communs nécessaires au sentiment de familiarité que doit ressentir le lecteur pour adhérer au contenu savant. Son caractère universel et humaniste institue avec sérieux le socle moral de l’astronomie vulgarisée qui, si elle paraît trop secrète ou trop mystérieuse, si elle n’est faite que d’une accumulation de propos inconnus et de théories qu’il ignore, lui restera inaccessible. Lorsqu’Arago invoque Rousseau sans se référer à la moindre source précise de parution ou d’édition, il livre un modèle topique qui se veut généralisant. La date ou le livre dont le poème est issu importent peu tant Rousseau appartient à la culture générale française et l’évocation de son nom suffit pour toute caution. C’est la représentation mentale que son texte propose qui prime sur la citation elle-même. Son poème devient un lieu commun, dont le recours, loin d’amoindrir l’œuvre du poète, est un outil redoutable pour l’appropriation intellectuelle du lecteur à la leçon d’Arago. Ce procédé est repris plus tard par ses disciples vulgarisateurs comme Amédée Guillemin (1826-1893) et Camille Flammarion. Ainsi retrouve-t-on un poème d’Alfred de Musset dans le chapitre consacré à la Lune par Flammarion dans Les Merveilles Célestes. Comme son maître, l’auteur ne donne ni la date ni le nom du recueil dont le poème est tiré, suggérant soit qu’il fait partie de la culture collective que partagent ses lecteurs, soit que cette information importe moins que l’image mentale qu’il aide à formuler :

« Parmi les montagnes annulaires, on peut citer celle d’Aristillus […]. De cette montagne, prise pour centre, partent cinq ou six lignes de ramifications rocheuses dirigées vers l’est et vers le sud. Ce sont ces ramifications qui donnent lieu au rayonnement d’Aristillus. Elles sont garnies d’une énorme quantité d’aiguilles ou de colonnes basaltiques qui s’élèvent de leurs sommets et les font ressembler de loin à cette multitude de clochetons que l’on voit sur quelques cathédrales gothiques. Ainsi la Lune serait fort inhospitalière pour

nous. Le sens de la parole comme le sens de l’ouïe ne sauraient y jouer aucun rôle, et par conséquent en sauraient y exister. A la privation de ces deux sens, peut-être faudrait-il encore joindre une infériorité dans les jouissances que la vue nous procure, attendu que partout où le regard s’abaisse, il ne rencontre que des montagnes blanches, escarpées et stériles, que des crêtes sourcilleuses et dénudées. Ces campagnes solitaires et desséchées donnent raison à Alfred de Musset :

Va, Lune moribonde,

Le beau corps de Phoebé La blonde

Dans la mer est tombé. Tu n’en es que la face, Et déjà tout ridé,

S’efface

Ton front dépossédé »110.

Le caractère général et commun de l’astronomie populaire se trouve renforcé par le recours à la poésie qui apporte au lecteur la possibilité de s’offrir une image mentale, esthétique et lyrique d’un savoir savant. L’insertion dans le texte se fait sans emphase et avec une simplicité qui adoucit la lecture et la métaphore en un divertissement intellectuel. Au cœur des démonstrations, de telles incursions permettent aussi de rapprocher les interrogations légitimes du lecteur à des raisonnements de poète. Ici encore, la généralité prime, et plus précisément l’universalité des sentiments de l’homme face à la connaissance de la nature. Le néophyte et le poète sont finalement deux êtres qui regardent le ciel et tentent de le déchiffrer chacun à sa manière.

Amédée Guillemin use également de cet artifice lorsque, empli d’ambitions humboldtiennes, il veut amener son lecteur à partager l’admiration qu’il porte à l’égard de la nature céleste. Si ce dernier se donne la peine de s’intéresser aux sciences de l’astronomie telles que Guillemin les décrit, il ne sera plus engourdi par les mathématiques ou les croyances obscures. Il verra

110 Flammarion Camille, Les Merveilles Célestes, Lecture du soir, Paris : Hachette, (5ème édition), 1875, pp.322-323.

le ciel comme un « spectacle dans toute sa magnificence »111, semblable « à

une mer immense, dont la surface serait toute parsemée d’une poussière d’or et de diamant »112. L’auteur affirme :

« Qu’en présence d’une telle splendeur, les sens, l’esprit, l’imagination sont ravis à la fois. L’impression qu’on ressent est une émotion profonde, religieuse, indéfinissable mélange d’admiration, de calme et de douce mélancolie. Il semble que ces mondes lointains, en rayonnant vers nous, se mettent en communication intime avec notre pensée »113

De telles idées sont comparables aux « belles strophes du plus harmonieux de nos poètes » qu’il cite derechef sans prendre la peine de donner de nom114. La poésie pare l’astronomie populaire d’attributs profanes qui

deviennent mondains et flattent l’ego de celui qui pourra citer les auteurs illustres vantant les bienfaits des connaissances acquises à la lecture de la littérature scientifique. Grâce à la poésie, l’astronomie populaire se fait l’égérie du gai savoir. Elle crée une image mentale, ouvre une fenêtre sur l’imagination et place le lecteur dans un état mental réceptif aux voyages intellectuels de la connaissance.

Cette vision est encore accentuée par Camille Flammarion qui jalonne l’ouverture des chapitres sur Les Merveilles célestes de références poétiques. L’image n’est plus au cœur du texte mais devient un captatio benevolentiae qui

111 Guillemin Amédée, Le Ciel, op.cit, p.3. 112 Idem

113 Idem

114 « Doux reflet d’un globe de flamme, Charmant rayon, que me veux-tu ? Viens-tu dans mon sein abattu Porter la lumière à mon âme ? Descends-tu pour me révéler Des mondes le divin mystère, Ces secrets cachés dans la sphère Où le jour va te rappeler ? Une secrète intelligence T’adresse-t-elle aux malheureux ? Viens-tu, la nuit, briller sur eux Comme un rayon de l’espérance ? Viens-tu dévoiler l’avenir Au cœur fatigué qui t’implore ? Rayon divin, es-tu l’aurore Du jour qui ne doit pas finir ? », (Guillemin Amédée, Le Ciel,

doit séduire le lecteur d’emblée et l’aider à poursuivre sa lecture avec plaisir. Il ouvre par exemple son premier chapitre consacré à « L’espace universel » en citant le poète Roucher :

« Insensé, je croyais embrasser d’un coup d’œil Ces déserts de Newton, où l’aile du génie Planait, tenant en main le compas d’Uranie. Je voulais révéler quels sublimes accords

Promènent dans l’éther tous les célestes corps ; Mais devant eux s’abîme et s’éteint ma pensée »115

L’auteur offre à son lecteur une petite récréation mentale, quelque chose de plaisant. Souvent, c’est le caractère merveilleux de la nature céleste qui est mis en lumière par ces courts passages : ils formulent le pouvoir de fascination qu’a eu le ciel sur les hommes dans le passé et suggèrent celui qu’il a sur le lecteur contemporain. Ensemble ils concrétisent l’abîme de l’infini et le vertige qu’il impose lorsqu’il reste inconnu116. Les poèmes

dévoilent le nom romantique des étoiles117 et rappellent la force créatrice du

monde céleste118. Les Merveilles célestes appartiennent à la Bibliothèque des

Merveilles, lancée comme une collection de vulgarisation scientifique à la portée de tous et des portemonnaies les plus modestes. L’ouvrage est peu illustré, la poésie en constitue donc la partie oisive, plaisante. L’idée selon

115 Flammarion Camille, Les Merveilles Célestes, op.cit., p.17.

116 « Oh ! depuis cette terre où rampent les mortels, De l’espace fuyant les vides éternels, Qui sondera des cieux l’insondable distance, Quand après l’infini, l’infini recommence !... 1859 », Flammarion Camille, Ibid., p.9

117 « Là, l’antique Orion, des nuits perçants les voiles, Dont Job a le premier nommé les sept étoiles ; le Navire fendant l’éther silencieux, Le Bouvier dont le char se traîne dans les cieux, La Lyre aux cordes d’or, le Cygne aux blanches ailes, Le Coursier qui du ciel tire des étincelles, La Balance incitant son bassin incertain, les blonds Cheveux livrés au souffle du matin, Le Bélier, le Taureau, l’Aigle, le Sagittaire […] Lamartine », Ibid, p.63. 118 « Mais à ce cercle étroit de la terre où nous sommes Garde-toi de borner tant de bienfaits

divers. Et de ne voir en toi que le Seigneur des hommes, Quand tu créas mille univers. Pope, Universal prayer », Ibid, p.351.

laquelle il faut offrir un support de visualisation des idées savantes est