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Durant la période que nous étudions, les registres d’état civil ont été bien tenus et bien archivés. Dans l’ensemble, la qualité est excellente ; en témoigne l’enquête des 3000 familles, dont les premiers résultats ont été publiés récemment (Dupaquier 1993). Les décès et naissances perdus, auxquels se heurtent souvent les monographies, se trouvent généralement dans une autre commune. Le seul soupçon, qui continue à planer sur l’état civil, est celui du sous-enregistrement au premier âge. Nous traiterons ce problème le moment venu.

Nous n’utilisons pas les registres de l’état civil. Etudiant plus de 300 communes sur près de deux siècles, leur volume dépasse nos moyens. Nous nous servons des sources secondaires, établies à partir des registres

- les tableaux sommaires NMD, mentionnant le total des Naissances, Mariages et Décès. Ils forment la série la plus longue, couvrant la période de 1805 à 1990 pour le département, de 1807 à 1905 pour les arrondissements et quelques grandes villes. Le plus souvent, ils précisent le sexe et la légitimité des naissances, parfois l’état matrimonial antérieur des époux, et l’appartenance à la commune des décédés. Malheureusement, les séries des arrondissements et des villes sont très incomplètes ;

- les tableaux détaillés par âge, sexe et état matrimonial pour les décès, par sexe, légitimité et reconnaissance pour les naissances, par âge, sexe et état matrimonial

convenablement que depuis le milieu du XIXe siècle. Leur fiabilité est à l’inverse de leur richesse. Nous constaterons le même phénomène au sujet des recensements plus les tableaux sont détaillés, moins ils sont fiables, et ceci jusqu’à la fin du XIXe siècle.

Comme les tableaux sommaires, ils contiennent de nombreuses erreurs. Des erreurs de calcul et de transcription et des erreurs qui résultent d’une mauvaise interprétation des instructions des mort-nés parmi les naissances, des transcriptions parmi les décès, etc. Les tableaux ne permettent pas de corriger ces erreurs.

- les tables décennales communales. Nous avons privilégié cette source semi- agrégée. En principe, les mort-nés, reconnaissances et légitimations, transcriptions de décès, jugements de rectification ou de divorce etc., sont tous mentionnés dans les tables. Elles seules permettent donc de rectifier les erreurs. Les tables décennales ont d’autres avantages elles sont communales, permettant ainsi tout regroupement ultérieur. Elles sont mieux conservées que les séries de tableaux du XIXe siècle. Elles constituent le corpus principal de notre saisie de l’état civil communal, pour la période 1803-1903. Les tableaux sommaires nous ont servi de contrôle. Pour la reconstitution du département et des arrondissements, par contre, nous sommes partis des tableaux détaillés.35

a - les tables décennales

Les tables décennales ne contiennent pas de données agrégées. Ce sont des listes nominatives semi-alphabétiques, que nous avons agrégées nous-mêmes. Plusieurs facteurs ont rendu l’agrégation difficile l’absence de normalisation des listes pour une partie du XIXe siècle (les pages comptant 23, 24, 25, 32 ou 38 enregistrements, parfois pas de total fixe du tout) ; la présence d’actes de reconnaissances, de légitimation, de rectification, d’adoption et, parfois, de mort- nés parmi les naissances ; celle d’actes de divorce parmi les mariages, celle de transcriptions militaires ou civiles, et de mort-nés parmi les décès. Leur désignation ne répond à aucune règle. Prenons l’exemple des mort-nés. Ils peuvent figurer comme “mortné” sous le M, comme “présenté sans vie” sous le P, comme “un enfant présenté sans vie” sous le U, comme “enfant ...” sous le E, et le plus souvent ils se trouvent sous le nom de famille du père ou de la mère, par exemple “Treilles mortné”, où ils peuvent être mentionnés par le seul nom de famille, comme “Treilles”, ou par une des désignations citées. Quoique généralement

35 Ainsi, un arrondissement reconstruit ne se confond pas avec la somme de ses communes reconstruites. Le département reconstruit ne se confond pas avec la somme de ses arrondissements reconstruits. En effet, plus nous montons l’échelle, plus nous avons pu utiliser de données. Ajoutant à cela que la population est plus fermée et sa taille statistiquement plus significative, on comprend alors pourquoi la qualité de la reconstruction s’améliore. Il aurait été dommage de ne pas tirer profit de ces avantages. Au contraire, l’optimisation de la reconstruction à un niveau supérieur permet de juger de la fiabilité des reconstructions au niveau inférieur, réalisée avec des moyens plus sommaires.

figurant parmi les décès, ils peuvent se trouver parmi les naissances ou aux deux endroits à la fois. Les variations sont infinies, même à l’intérieur de la même table, de la même commune, de la même décennie. Les transcriptions, reconnaissances, légitimations, adoptions, etc. apparaissent sous autant de variations.

Nous avons agrégé, pour le seul XIXe siècle, environ 10.000 tables, contenant 2.500.000 enregistrements. Le volume du travail et les difficultés rencontrées nécessitent un premier examen des données. Le tableau 1 permet de comparer le nombre d’enregistrements suivant la source utilisée. Les lacunes dans la série des tables décennales (les communes de l’arrondissement de St-Pons en 1813-1822) ont été comblées par simple interpolation. La série dite “tableau agrégé” a été constituée par les tableaux détaillées, complétée par les tableaux sommaires, là où ceux-ci font défaut.

Naissances vivantes Décès

Période nombre indice nombre indice nombre indice nombre indice

1803-1812 103 269 100 100 330 97,2 80 075 100 79 303 99 1813-1822 106 034 100 102 477 96,6 85 447 100 87 132 102 1823-1832 108 878 100 108 377 99,5 90 098 100 86 465 96 1833-1842 111 045 100 112 363 101,2 98 017 100 100 906 102,9 1843-1852 110 665 100 110 488 99,8 98 055 100 98 397 100,3 1853-1862 108 549 100 107 596 99,1 103 716 100 105 531 101,7 1863-1872 113 080 100 115 316 102 116 418 100 114 605 98,4 1873-1882 110 449 100 110 270 99,8 112 503 100 111 598 99,2 1883-1892 97 093 100 95 294 98,1 110 766 100 113 712 102,7 1893-1902 101 500 100 99 449 98 108 412 100 108 696 100,3 total 1 070 562 1 061 960 99,2 1 003 507 1 006 345 100,3

Tables décennales Tableau agrégé Tables décennales Tableau agrégé

Tableau 1. Naissances vivantes et décès départementaux selon la source utilisée.

L’écart, sur l’ensemble du siècle, de 0,8 % pour les naissances et de 0,3 % pour les décès nous paraît très satisfaisant. Les écarts les plus importants se trouvent en début de siècle. Généralement, les tables décennales conduisent à un nombre supérieur à ceux des tableaux agrégés. Quelques facteurs peuvent expliquer, en partie, la non-concordance des chiffres

- l’écart des naissances en 1813-1822 est dû en partie à l’estimation des naissances pour les communes de l’arrondissement de St-Pons. L’interpolation a conduit à une estimation de 13766 naissances, où les tableaux sommaires en comptent 13 255. Nous avons ré-estimé les naissances pour retrouver le total de 13

- les tableaux agrégés de certaines années sont perdus et ont dû être estimés par nous (voir l’annexe II.2.1) ;

- la première table décennale commence le 21.9.1802, c’est-à-dire en début d’année républicaine ; le passage au calendrier grégorien a fait qu’elle se termine le 31.12.1812 ; nous avons diminué le nombre d’enregistrements de 2,743 %, c’est-à-dire par la portion correspondante à la période de 21.9.1802 à 31.12.1802 ; bien sûr, ceci est une approximation plus ou moins exacte du nombre d’actes de la première table décennale.

Aucun de ces facteurs n’explique la totalité des écarts. Mais ils constituent le contexte dans lequel nous pouvons accepter les écarts constatés.

b - les mort-nés Période Mort-nés 1843-1852 1853-1862 1863-1872 1873-1882 1883-1892 1893-1903 total Tables décenn. 2782 3400 4040 4005 3715 4349 22291 Tabl. agrégés 2573 4374 6520 5144 4789 4561 27961 Ecart en % 8,1 -22,3 -38 -22,1 -22,4 -4,6 -20,3 Tx mortinat. % 2,3 4,1 5,7 4,7 5 4,6

Tableau 2. Mort-nés selon la source utilisée et taux de mortinatalité des tableaux agrégés.

Le tableau 2 montre l’écart constaté entre les mort-nés des tables décennales et ceux des tableaux agrégées (en % des mort-nés des tableaux agrégés). Les écarts sont beaucoup plus importants et semblent systématiques, du moins de 1853 à 1892. Il y a plusieurs explications possibles. D’abord les erreurs d’agrégation ; souvent difficile à reconnaître, les mort-nés ont pu nous échapper en partie. L’explication est simple, mais peu probable. En effet, les mort-nés “cachés” seraient comptés comme décès (les mort-nés parmi les naissances sont exceptionnels). Or, si les tables décennales sous-estiment systématiquement les mort-nés entre 1853 et 1892, les décès sont parfois sur-, parfois sous-estimés. Examinons le détail de quelques grandes communes.

Période Agde Béziers Bédarieux Pézenas Lodève Clermont Montpell. Sète 1803-12 8 35 6 44 2 0 19 15 1813-22 40 13 22 45 0 0 10 11 1823-32 57 25 28 49 0 5 26 24 1833-42 47 23 56 35 28 19 manq. 37 1843-52 20 21 70 25 49 26 61 50 1853-62 7 19 7 43 68 48 76 29 1863-72 0 13 53 46 81 31 74 63 1873-82 12 6 29 61 83 21 71 40 1883-92 41 0 47 54 73 37 74 30 1893-02 41 18 50 40 63 47 76 31

Tableau 3. Taux de mortinatalité (pour 1000) des tables décennales quelques communes.

On s’attend à voir le taux de mortinatalité s’élever au cours du siècle, grâce à une meilleure déclaration des mort-nés à l’état civil. Eventuellement, on le verrait décliner légèrement vers la fin du siècle. Or, ce dessin général ne s’observe que dans deux communes sur huit Montpellier et Lodève. Les autres communes montrent des variations considérables d’une décennie à l’autre, qui ne s’expliquent pas par une évolution de la déclaration à l’état civil. C’est l’inscription des mort- nés sur les tables décennales qui est en jeu. Celles-ci ne permettent donc pas d’étudier la mortinatalité. Mais les tableaux agrégés, le permettent-ils ?

0 10 20 30 40 50 60 70 1840 1845 1850 1855 1860 1865 1870 1875 1880 1885 1890

Graphique 1. Taux de mortinatalité départemental (pour 1000) selon les tableaux agrégés.

qui importe surtout à la bonne exécution de ce travail, c’est le relevé exact des enfants mort-nés, en évitant soigneusement d’y comprendre les enfants morts avant la déclaration de naissance. Ceux-ci ne doivent point être séparés des enfants nés-viables. Il importe que vous insistiez sur l’exécution rigoureuse de ces dispositions, afin que désormais dans les tableaux destinés à la continuation de la statistique générale de France, les enfants mort-nés ne soient plus confondus, d’une part, avec les décès communs, et, de l’autre, avec les enfants nés vivants, mais décédés avant la déclaration de naissance.”

Cette insistance à la bonne exécution n’a pas empêché les mort-nés de figurer, de 1847 à 1851, également parmi les nés vivants. Le graphique montre clairement les fluctuations, et surtout les paliers (dont le premier coïncide avec le double enregistrement des mort-nés), qui ne peuvent être le fait de l’évolution de la déclaration. La répétition des valeurs traduit plus probablement la non-exécution de l’état plutôt que la stabilité du phénomène. Les autres périodes ne sont, par conséquent, pas plus garanties et le critère de 4 %, qu’utilise Van de Walle pour considérer la déclaration des mort-nés comme satisfaisante, se trouve perturbé par des problème d’ordre administratif.

L’information principale, qu’on doit tirer du graphique, est l’incertaine inscription des mort-nés sur les tableaux agrégés. Nous ne disposons d’aucune source qui nous permet d’étudier la mortinatalité. Les mort-nés, étaient-ils bien déclarés (et depuis quand) à l’état civil mais mal inscrits sur les listes nominatives et les tableaux agrégés ? Seul un comptage sur les registres de l’état civil permettrait de répondre à cette question. Pour la reconstitution des sous-populations, cette question peut rester sans réponse (voir le chapitre II.5).

c - le XXe siècle

Le vingtième siècle voit les sources secondaires d’état civil des collectivités locales s’appauvrir considérablement. Dès 1888, la SGF tente de centraliser la constitution des statistiques. Les tableaux par arrondissement doivent désormais être établis par la préfecture. Résultat ceux de 1890 à 1895 n’ont pas été archivés (ont-ils été faits ?). Dès 1896, on supprime la distinction entre population rurale et urbaine, ainsi que les tableaux par commune. Ensuite, disparaît la distinction par état matrimonial. Enfin, après 1906, ne subsiste plus que le tableau départemental. Toutes les statistiques seront désormais réalisées à Paris. On rentre dans l’ère de la statistique nationale abondante, riche, fiable à l’échelle nationale, pauvre à l’échelle départementale, quasiment inexistante à l’échelle sub-départementale. Les tables décennales n’échappent pas à cet appauvrissement. La série de la préfecture (la seule série complète du XIXe siècle) s’arrête en 1902. Celle des communes est difficile à exploiter, puisqu’elle est conservée dans 330 communes séparément. Celle du Greffe, enfin, n’a été réalisée que très partiellement. A partir de 1936, nous disposons de tableaux sommaires communaux. Mais une autre difficulté rend leur utilisation délicate la croissance des naissances et des décès

ayant lieu en dehors de la commune de domicile.

d - la domiciliation

Jusqu’en 1951, les données de l’état civil, aussi bien des tables décennales ou annuelles que des tableaux agrégés, concernent les actes enregistrés dans la commune. Ils correspondent aux naissances, décès et mariages intervenus sur le territoire de la commune, sans tenir compte de la résidence habituelle des personnes concernées. Depuis 1952, nous disposons d’une deuxième série, celle des actes domiciliés, c’est-à-dire comptabilisés selon le domicile habituel de la personne concernée. On aurait tort de considérer la domiciliation avant 1951 comme un facteur négligeable. Même à l’échelle départementale. Le graphique 2 montre le taux de sur-enregistrement (défini comme le nombre d’actes enregistrés par acte domicilié) de 1952 à 1975.

0.96 0.98 1 1.02 1.04 1.06 1.08 1.1 1952 1955 1958 1961 1964 1967 1970 1973 TxenrNV TxenrD

Graphique 2. Actes enregistrés par acte domicilié naissances vivantes et décès départementaux.

On note, après deux années irrégulières, probablement suite à la mise en place de la double comptabilité, que les taux évoluent très progressivement, avec, pour les naissances, une rupture en 1956-1957. Elle correspond à l’ouverture d’un service de maternité à Ganges, faisant basculer le canton de Ganges du sous- au sur- enregistrement.

Il naît et il meurt plus de non-héraultais dans l’Hérault, que de héraultais dans d’autres départements. Le sur-enregistrement est assez faible pour les décès (de 1 à 2 %), mais devient rapidement important pour les nouveaux-nés (de 6 à 8 %). Il va de soi qu’il est beaucoup plus important à l’échelle des cantons et des sous- populations. Le graphique 3 montre le sur(sous)-enregistrement là où il est le plus

0 0.5 1 1.5 2 2.5 1952 1954 1956 1958 1960 1962 1964 1966 1968 1970 1972 Mpl1NV Mpl2NV MplvilleNV BÚz1NV BÚz2NV BÚzvilleNV Mpl1D Mpl2D MplvilleD BÚz1D BÚz2D BÚzvilleD

Graphique 3. Actes enregistrés par acte domicilié naissances (NV) et décès (D) à Montpellier, Béziers et dans les cantons ruraux limitrophes.

Le détail des différentes populations ne ressort par très clairement du graphique, mais la tendance est évidente. Dès 1952, la migration de naissance est importante ; en 1960, les naissances ont quasiment disparu des cantons ruraux autour des deux grandes villes. La migration de décès, elle, est beaucoup moins importante, sans pour autant être négligeable. Et celle-ci semble stable, indiquant que son origine se trouve dans un passé lointain.

e - les décès

Il est certain, qu’avant 1952, les naissances et décès enregistrés faussent les indicateurs démographiques. Mais depuis quand ? Pour les décès, nous avons une première indication dans les décès transcrits de la période 1803-1902. Elle ne montre qu’une face du phénomène l’accueil dans les communes de domicile. Elle correspond au sous-enregistrement, là où l’on ne compte pas de décès enregistrés de non-résidents, ce qui est le cas général des communes rurales. Par contre, le sur-enregistrement ne se reflète pas dans les décès transcrits. Le tableau 4 résume les deux indices l’un, de 1957 à 1961, donne la part du sur-enregistrement relative aux décès domiciliés. L’autre, de 1893 à 1902, donne le nombre de décès transcrits, c’est-à-dire, le nombre de décès domiciliés, relatif au nombre de décès enregistrés dans le canton. Malgré le caractère différent des indices, le tableau montre l’importance de la migration de décès au milieu et sa quasi-absence en début du siècle.

canton 1957-61 1893-1902 canton 1957-61 1893-1902 Agde -0,04 0,005 Castries -0,07 0 Bédarieux 0,01 0,004 Claret -0,12 0 Béziers-ville 0,03 0,006 Frontignan -0,1 0,002 Béziers1 -0,06 0,002 Ganges -0,03 0 Béziers2 -0,05 0,004 Lunel -0,04 0,002

Capestang -0,07 0,001 Les Matelles -0,1 0

Florensac -0,04 0 Mauguio -0,07 0 Montagnac -0,01 0 Mèze -0,07 0,001 Murviel -0,05 0,001 MTP-ville 0,21 0,001 Pézenas 0,01 0 MTP2 -0,12 0 Roujan -0,04 0 MTP3 -0,07 0,001 St-Gervais -0,06 0,001 St-Martin Lo -0,05 0,001 Servian -0,05 0 Sète -0,01 0 Le Caylar 0,08 0,002 Olargues -0,09 0,001 Clermont -0,04 0 Olonzac -0,04 0,004 Gignac -0,03 0,002 St-Chinian 0 0,001 Lodève 0 0 St-Pons 0,07 0,005 Lunas -0,07 0,005 La Salvetat -0,05 0,003

Tableau 4. Sur-enregistrement proportionnel des décès en 1957-1961 et décès transcrits (proportionnel au décès enregistrés) en 1893-1902.

f - les naissances

La migration à la naissance est la plus visible. Nous pouvons tenter de retracer son point de départ. Puisque nous ne disposons pas de données domiciliées avant 1952, nous construisons, sur la base des naissances enregistrées seulement, deux indices couvrant 1936-1973. L’évolution vers la concentration des naissances dans quelques grandes villes a deux conséquences statistiques sur les taux de natalité des cantons premièrement, l’écart entre ceux des villes et ceux des cantons ruraux s’agrandit ; deuxièmement, la carte de la natalité a tendance à se figer, car les mêmes cantons ont plus de chance de se retrouver, d’une année à l’autre, à la même place dans la hiérarchie de la natalité. Le premier élément se reflète dans la croissance de l’écart type des taux de natalité cantonaux de l’année en cours ; le deuxième dans celle de la corrélation entre les taux de natalité d’une année donnée et ceux de l’année suivante.

0 2 4 6 8 10 12 1936 1941 1946 1951 1956 1961 1966 1971 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1

Úcart type corrÚlation

écart type corrélation

Graphique 4. Ecart type des taux de natalité cantonaux, et corrélation entre deux années successives.(naissances enregistrées, l’année 1938 est manquante)

Nous retrouvons la date charnière de 1957 ; l’ouverture de la maternité à Ganges perturbe la corrélation entre les taux de 1956 et ceux de 1957, mais elle ne change en rien la progression de la corrélation. Le décrochage des années 1943-1944 s’explique par des erreurs qui figurent dans les chiffres publiés par l’INSEE (et repris ici sans correction), notamment concernant les naissances de Sète. Les chiffres de 1944 étant erronés, la corrélation s’en ressent deux années de suite. La corrélation devient ainsi un indicateur d’erreurs. Les années de 1936 à 1941 semblent également incohérentes, mais la perte de l’année 1938 ne nous permet pas de trouver l’erreur avec certitude.

A partir de 1957 on peut considérer que la migration à la naissance est pleinement installée. L’écart-type cesse son ascension quelques années plus tard. Sa progression constante depuis 1936 traduit une mise en place lente, mais constante, de la migration à la naissance, depuis avant 1936. Nous ne disposons pas des taux de natalité cantonaux annuels avant 1936 pour retracer son point de départ. Mais nous savons, que les taux décennaux communaux en 1893-1902 ne comportent aucune trace de cette migration. Même les villages les plus proches des grandes villes ne montrent aucune désaffection d’enregistrement de naissances. Pourtant, la migration d’accouchement existait. Pour les périodes de 1907-1910 et 1911-1913, les Statistiques du Mouvement de la Population publient le nombre d’accouchements hors domicile (à l’hôpital ou chez la sage-femme) ; il s’élève respectivement à 4,1 et 5,3 % des naissances départementales. Bien sûr, une partie de ces naissances hors domicile se sont déroulées dans la commune du domicile et ne constitue donc pas une migration intercommunale. D’autre part, les 2 ou 3 % de migrés peuvent avoir été concentrés dans quelques communes (nous n’avons pas le détail par commune), agissant ainsi de façon significative sur les statistiques de naissances. On pense d’abord aux communes autour des grandes villes. Nous n’apercevons aucune anomalie dans leur taux de natalité en 1893-1902, ce qui rend l’hypothèse d’une importante perturbation improbable.

g - conclusion

L’appauvrissement des statistiques et le phénomène croissant des migrations de naissance et de décès, entre 1903 et 1952, nous obligent à ré-estimer les naissances vivantes et les décès des sous-populations durant la période 1903-1952. La méthode d’estimation sera développée au chapitre II.5.