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CROISSANCES ET DECROISSANCES

LA TRANSITION RECONSTITUEE

CROISSANCES ET DECROISSANCES

Jusqu’ici nous avons suivi l’évolution du peuplement en nombre absolu. Il est évidemment tout aussi intéressant d’étudier les taux de croissance. Contrairement aux nombres absolus, ils ne montrent pas le déplacement du peuplement départemental, mais ils reflètent la croissance telle qu’elle est vécue au niveau des sous-populations.

Les graphiques suivant présentent les taux de croissance de toutes les sous- populations départementales à toutes les périodes. Ils permettent de vérifier visuellement trois hypothèses concernant la croissance l’influence de l’altitude

(graphique 3), de l’axe Est-Ouest (graphique 4) et de la taille de la population (graphique 5). Pour cela, chaque graphique a classé les sous-populations selon l’un des facteurs nommés. L’altitude et la longitude sont fixes dans le temps, les sous- populations occupent donc des lignes fixes sur les graphiques 3 et 4. La taille des sous-populations n’est pas fixe. Le rang de chaque sous-population ne l’est donc pas non plus. Les lignes correspondent au rang constaté à chaque époque individuellement. On trouve toujours la plus grande ville en 1 et la sous-population rurale contenant les villages les plus petits en 100. Le graphique visualise donc le facteur “taille”, mais ne permet pas, théoriquement, de suivre une population particulière le long d’une ligne. En réalité, les sous-populations changent très peu de rang. Les trois premières villes sont toujours, dans l’ordre, Montpellier, Béziers, Sète. Les mêmes villes moyennes occupent toujours les rang 4 à 15. Dans les petites villes (de 15 à 27 ou 40, suivant la période), les mêmes villes sont présentes sur toute la période, mais elles sont rejointes, depuis 1970 environ, par quelques communes de la banlieue de Montpellier. Les mêmes bourgs occupent les rangs de 30 ou 40 à 62 environ, eux aussi bousculés après 1970. Les sous-populations rurales, enfin, restent longtemps cantonnées à leur rang entre 62 et 100, même si là aussi le rang a été bousculé depuis 1970.

Une première conclusion s’impose à l’observation des trois graphiques ils sont caractérisés par des lignes horizontales principalement, ce qui veut dire que le

temps a bien plus d’influence sur la croissance que chacune des trois autres variables. La plus marquée des lignes horizontales est la ligne bleue (décroissance)

du milieu du XXe siècle, précédée par une bande blanche (stabilité) qui couvre la première moitié du siècle. On distingue également une bande rouge (croissance) à la première moitié du XIXe siècle, et une deuxième bande de croissance - même si elle est plus différentiée - depuis 1971. Par contre, on ne distingue aucune différence - ou presque - entre populations urbaines et populations rurales durant tout le XIXe siècle. Comme si l’urbanisation n’avait pas eu lieu ! Comme si elle se limitait à la décroissance plus longue et plus forte des populations rurales au milieu du XXe siècle. (Voir plus loin pour une analyse spécifique de l’urbanisation.) On verra que ceci n’a pas été tout à fait le cas. Toujours est-il que le comportement principalement solidaire de toutes les sous-populations départementales mérite d’être souligné, car il s’oppose à l’image reçue d’un peuplement en constante dé-construction.

La population départementale de 1801 à 1990 apparaît être, globalement, une unité démographique relativement solidaire, même si les sous-populations peuvent être différenciées parfois selon l’altitude du peuplement, selon la taille et selon la position longitudinale.

Examinons les différentes périodes séparément

1) 1801-1870. Si la croissance est quasiment générale en début du siècle, elle cède progressivement la place à la stabilité quand on s’approche du milieu du

localiser la stabilité au centre longitudinal du département, c’est-à-dire dans la plaine de l’Hérault et celle de la Lergue. La relative stabilité de cette partie de l’Hérault confirme l’analyse de la carte 6. Poursuivons notre regard sur le graphique 4 au-delà de 1860 pour constater que cette partie du département, anciennement peuplé et urbanisé, reste constamment en deçà de la croissance de l’Est et de l’Ouest (exception faite de l’extrême Ouest) et ce jusqu’en 1970. Pendant près de deux siècles, les bassins fluviaux du Lez et de l’Orb s’accroissent plus vite que celui de l’Hérault. Toutefois, il ne s’agit pas d’un exode. Sa relative stabilité fait suite à une plus forte densité au début du XIXe siècle. La révolution viticole y attire moins de population nouvelle que dans les deux autres bassins.

Le graphique 5 montre durant la première moitié du XIXe siècle une plus faible tendance à la croissance pour les villes que pour les bourgs et les villages. Béziers et Sète font exception. Leur croissance est constante, forte et se poursuivra jusqu’à la fin du siècle. Montpellier restera longtemps en retrait derrière elles. Les villes moyennes et petites connaissent une forte progression au cours des années 1810 et 1820, puis elles stagnent jusqu’au milieu du siècle. Il s’agit des villes du piémont notamment, dont une bonne partie est située au centre longitudinal du département, où l’industrie de textile a connu son dernier essor au début du XIXe siècle.

Le graphique 3 montre qu’à partir de 1851 les populations au-dessus de 250 m d’altitude commencent leur décroissance, qui durera jusqu’à 1970. Un exode “montagnard” sur 120 ans, qui connaîtra sa plus grande intensité en 1951-1970. 2) 1871-1885. Fortes croissances et décroissances se côtoient. L’altitude et la taille sont indifférentes, par contre, c’est à nouveau la longitude qui départage la croissance (à l’Ouest) de la décroissance (à l’Est). La conclusion est évidemment la même que celle de la carte 10 la crise du phylloxéra fait “fuir” la population de l’Est du département, aussi bien des villes que des campagnes. A l’Ouest, cette population est reçue dans la plaine viticole et dans le bassin minier de Graissessac. On note par ailleurs que, vers 1886-1890, quelques poches de décroissance apparaissent dans la plaine biterroise. La ligne bleue, venant de l’Est, s’infléchit légèrement, mais régulièrement, vers le haut en arrivant à l’Ouest, traduisant ainsi la progression lente du phylloxéra. Mais la décroissance dans l’Ouest n’atteindra jamais les proportions qu’elle a connues à l’Est.

3) 1886-1900. Une nouvelle phase de croissance concerne la plupart des sous- populations. La taille de la population est relativement indifférente, mais l’altitude et la longitude départagent assez bien la croissance de la décroissance ; la dernière se trouve en très grande partie au dessus de 130 m d’altitude, à l’Ouest de la ligne Capestang - St-Gervais-sur-Mare, c’est-à-dire très précisément dans l’arrondissement de St-Pons.

Toutes les tailles de population ne participent pas de la même façon à la croissance. Les petites villes et les bourgs s’accroissent de façon solidaire avec Montpellier et Béziers ; les villes moyennes et les villages, par contre, restent un peu en retrait.

4) 1901-1930. Stabilité quasi-générale. Les exceptions sont clairement identifiables les grandes et moyennes villes de la basse plaine et du littoral continuent leur croissance ; les populations rurales au dessus de 200 m d’altitude, principalement situées dans l’arrondissement de St-Pons, continuent leur décroissance. Tout ceci confirme l’analyse de la carte 8.

Il est intéressant de noter que la stabilité de la croissance durant cette période contraste fortement avec les grandes fluctuations des mouvements naturels et migratoires durant cette même période. Elles feront l’objet d’analyse dans les chapitres suivants.

Dans les collines de l’arrondissement de St-Pons la décroissance n’est ni plus forte, ni moins forte que les périodes précédentes. Elle ne s’intensifiera qu’après 1951. Ailleurs, on est passé progressivement de la stabilité à la décroissance. Ce n’est que dans les villes de la plaine Est qu’on est passé brusquement de la croissance à la décroissance. C’est là aussi qu’on retrouvera le plus vite la croissance après 1946.

6) 1946-1970. Très fortes croissances et décroissances se partagent le territoire départemental. Simultanément, les deux atteignent leurs plus fortes valeurs. La décroissance touche la majorité des populations situées au-dessus de 80 m d’altitude, les populations situées en dessous de 80 m sont presque toutes en croissance ; la coupure des 80 m d’altitude est particulièrement nette. La longitude est également déterminante, même si la coupure est moins nette à l’Est de la ligne Montoulieu-Loupian, toutes les populations sont en forte croissance ; à l’Ouest de la ligne Capestang-St-Gervais-sur-Mare toutes les populations sont en décroissance, souvent forte. Entre les deux lignes, c’est-à-dire dans la plaine de l’Orb, de l’Hérault et de la Lergue, croissance et décroissance se partagent sur les populations. L’information du graphique 3 permet de situer - toujours entre les deux lignes Capestang-St-Gervais et Montoulieu-Loupian - la croissance dans les plaines, la décroissance dans les hautes vallées, le piémont et les avant-monts. La taille de la population apporte moins de détermination certes, les dix plus grandes villes sont en croissance et les dix populations rurales le plus faiblement peuplées sont toutes en décroissance. Mais entre ces deux extrêmes, la croissance et la décroissance se partagent indifféremment villes, bourgs et villages.

7) 1971-1990. Croissance générale mais inégale. L’événement le plus spectaculaire de cette dernière période est l’arrêt de la décroissance des collines. Toutes les populations, ou presque, ont retrouvé la stabilité ; environ une sur deux, au-dessus de 80 m d’altitude, a même retrouvé la croissance. Leur croissance est plus faible que celle de la plaine et du littoral, mais le retour de tendance a été général, et extrêmement rapide. Le graphique 4 nous apprend que ce sont les collines de l’extrême Ouest qui sont passées d’une forte décroissance à une stabilité, tandis que les collines du centre longitudinal sont passées d’une plus faible décroissance à une croissance. Dans les plaines de l’Orb, de l’Hérault et du Lez, la forte croissance d’après 1970 ne fait que prolonger celle de la période précédente.

Le graphique 5 situe les quelques populations stables tout en bas de l’échelle de taille. En effet, les populations rurales de l’arrondissement de St-Pons sont devenues, après 120 ans de décroissance continue, les populations les plus faiblement peuplées du département. L’avenir dira si leur croissance est simplement en retard par rapport au reste du département, ou si elle restera durablement en deçà du niveau de croissance départementale.

9

CHUTE FATIDIQUE DE LA MORTALITE :

ETAPES ET GEOGRAPHIE DE LA TRANSITION