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Il est intéressant de se pencher sur les concepts qui composent la compréhension en lecture.

Cet apprentissage clé de la discipline « français » touche l'ensemble des disciplines scolaires puisqu'il offre un accès aux savoirs et aux contenus des multiples matières enseignées. Une fois l'étape du décodage franchie, les élèves ont affaire à la compréhension. C'est à travers ce processus cognitif qu'ils vont devoir mettre un sens sur ce qu'ils lisent, être amenés à réaliser des opérations mentales plus ou moins complexes, travaillées tout au long de la scolarité, en particulier à l'école primaire. Soulignons que certaines recherches conduites (Deheaneet al., 2012 ; Colé & Sprenger-Charolles, 2013) « montrent l'influence déterminante de la qualité du décodage sur la compréhension. » (Goigoux & Cèbe, 2013, p. 8). En effet, l'élève qui n'a pas automatisé le décodage peinera à mettre un sens sur ce qu'il lit. De plus, la compréhension en lecture n'est pas un objet d'enseignement immuable. Maîtriser la capacité de comprendre l'écrit relève de compétences complexes qui se construisent progressivement et comme le souligne Rémond (2007), « la compréhension des textes se travaille en engageant les élèves à traiter des questions qui mettent en jeu des activités de raisonnement, un contrôle métacognitif pour s'assurer de la qualité de sa lecture […]. » (p. 67). Les recherches menées actuellement tombent à peu près toutes d'accord sur le modèle contemporain de compréhension en lecture.

Pour comprendre en quoi consiste l'enseignement de la compréhension de textes, il est nécessaire d'appréhender les composantes qui entrent en jeu dans la compréhension en lecture. Pour cela, le modèle contemporain de la compréhension de textes sera présenté avant de parler de l'enseignement explicite de ce savoir-faire ainsi que des stratégies d'enseignement de cet d'apprentissage.

1.1.1. La compréhension en lecture selon le modèle contemporain

La compréhension dépend, selon Thorndike (1917) « de l'élaboration de relations significatives au sein d'un texte [...] » (Lafontaine, 2003, p. 1). On peut également parler d'un processus dans lequel sont réalisées des habiletés en interaction les unes avec les autres et qui ne peuvent être exécutées de manière isolée pour qu'il y ait « lecture » (Giasson, 2011). Aeby Daghé et Dolz-Mestre (2007) parlent d'une « interprétation dynamique [qui] peut se concevoir comme une décision provisoire susceptible d'être modifiée ou révisée […]. » (p. 44). Chaque habileté (exemples : le décodage, identifier l'idée principale, etc.) « exerce un effet sur les autres habiletés et [elle] est modifiée par ces dernières. » (Giasson, 2011, p. 4). Si l'on ajoute à ce processus interactif qu'est la lecture, la compréhension, dont une définition tirée du dictionnaire Le Petit Robert (1993), explique que c'est la « Faculté de comprendre, de percevoir par l'esprit, par le raisonnement » (p. 246), cela donne le modèle contemporain de compréhension en lecture.

Le texte, le lecteur et le contexte

Les grandes composantes de ce modèle sont le texte, le lecteur et le contexte.

Giasson (2011) définit le texte ainsi : il « concerne le matériel à lire et peut être considéré sous trois aspects principaux : l'intention de l'auteur, la structure du texte et le contenu. » (p. 7). Le texte est en effet écrit par l'auteur, qui poursuit un certain but. Celui-ci organise le texte en structurant les idées qui y sont présentes. Le contenu représente les idées en elles-mêmes que l'on retrouve dans le texte, les « concepts, […] connaissances, [le] vocabulaire que l'auteur a décidé de transmettre. » (Giasson, 2011, p. 7).

Le lecteur comprend les structures et les processus. Par structure, on entend ce qui fait

« référence à ce que le lecteurest (ses connaissances et ses attitudes) » (Giasson, 2011, p. 7).

Les processus « font référence à ce qu'ilfait durant la lecture (habiletés mises en œuvre). » (Giasson, 2011, p. 7). Cela signifie que ce sont les connaissances personnelles du lecteur et les mécanismes qu'il met en place lorsqu'il lit qui entrent en jeu.

Quant au contexte, cela sous-tend les « éléments qui ne font pas partie littéralement du texte et qui ne concernent pas directement les structures ou les processus de lecture, mais qui influent sur la compréhension du texte. » (Giasson, 2011, p. 7). Le modèle contemporain de

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compréhension en lecture fait la distinction entre le contexte psychologique, le contexte social et le contexte physique. Le contexte englobe tout ce qui intervient au moment de la lecture et qui entoure le sujet lecteur. Cela peut correspondre à son état d'esprit, sa motivation, le but qu'il attribue à la lecture du texte, le bruit qui l'entoure, les consignes de l'enseignant, ses interventions, etc. Certains travaux menés (Holmes, 1985) montrent l'impact du contexte social sur la compréhension. « Il a été démontré, par exemple, qu'un élève qui lit un texte à voix haute devant un groupe a beaucoup moins de chances de bien comprendre ce texte que s'il en fait une lecture silencieuse […]. » (Giasson, 2011, p. 24). De plus, et comme déjà mentionné, Dansereau (1987) dans ses recherches montre les effets bénéfiques qu'engendrent les travaux de groupe sur la rétention d'informations en comparaison aux travaux réalisés individuellement (Giasson, 2011, p. 24).

1.1.2. L'enseignement explicite

Giasson (2011) dans son ouvrage fait référence à l'enseignement explicite. Elle souligne que l' « on admet maintenant que l'élève doit être actif : aucun apprentissage ne se fait sans la participation de l'apprenant » (p. 27), cette remarque rejoint l'une des idées phares de la pédagogie coopérative selon laquelle « l'enfant développe des habiletés à travers ses interactions avec les membres de la communauté qui possèdent ces habiletés. » (Giasson, 2011, p. 27). Le modèle d'enseignement explicite de la compréhension en lecture, dont

« l'objet [sont] les stratégies de compréhension » (Giasson, 2011, p. 28), suit l'idée que l'enseignant va faire en sorte de s'adapter aux situations d'enseignement et aux élèvesin situ, ce qui se traduit par un détachement de sa planification. « L'enseignement explicite de la compréhension en lecture se caractérise également par un souci de toujours placer l'élève dans une situation de lecture signifiante et entière. » (Giasson, 2011, p. 28). De plus, l'élève doit être capable, grâce à l'aide fournie par l'enseignant, de réaliser la tâche dans son entier.

L'enseignant, de son côté, a une fonction « explicative », « il doit dire aux élèves pourquoi une réponse n'est pas adéquate et comment on peut utiliser des stratégies pour arriver à des réponses meilleures. » (Giasson, 2011, p. 27). Le rôle de l'enseignant ne se cantonne pas à cette seule fonction explicative mais passe par cinq étapes distinctes : définir la stratégie et préciser son utilité, rendre le processus transparent, interagir avec les élèves et les guider vers la maîtrise de la stratégie, favoriser l'autonomie dans l'utilisation de la stratégie et assurer l'application de la stratégie (Giasson, 2011, pp. 27-28). Ce modèle accorde de l'importance au

développement de l'autonomie de l'élève. Il offre une entrée sur les stratégies de lecture sur lesquelles nous reviendrons plus tard. Il existe un large choix de propositions d'enseignement, d'interventions possibles et adaptables selon le contexte et les élèves. Lectorino &

Lectorinette (Goigoux & Cèbe, 2013) en est un exemple. L'emploi de l'enseignement explicite a un double avantage dans ce travail puisqu'il est « approprié dans l'enseignement des stratégies […] [et] pour cohabiter avec l'apprentissage coopératif […]. » (Giasson, 2011, p.

34). Toutefois, Giasson (2011) met en évidence que « les problèmes de compréhension de textes sont fort complexes » (p. 1), cet apprentissage est un processus long, composé de plusieurs étapes et il n'existe pas de « recette miracle » applicables telles quelles par les enseignants. Ces derniers doivent mener des interventions à plusieurs niveaux pour viser une amélioration et/ou une atteintes des compétences propres à la compréhension en lecture.