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Chapitre 2 : la recension des écrits sur le concept d’autonomie

2.2 L’autonomie et les théories éducatives

Les sous-sections qui suivent proposent un lien entre les deux théories d’apprentissage, le constructivisme et le socioconstructivisme selon Kamii (2003).

2.2.1 Lien entre l’autonomie de l’apprenant et le

constructivisme de Piaget vu par Kamii (2003)

L’autonomie est selon Piaget (1932) le but de l’éducation. Mais comme le sens du concept d’autonomie varie en fonction des finalités et des contextes, il va falloir prolonger cette assertion de Piaget par deux questionnements : la représentation de l’autonomie pour Piaget et la signification qu’il donne à « l’autonomie est le but de l’éducation ».

Selon Kamii (2003), l’autonomie, dans la théorie piagétienne, veut dire la capacité de se gouverner soi-même aussi bien au plan moral qu’au plan intellectuel. Une personne moralement autonome est celle qui défend une valeur morale sans se laisser influencer ni par la récompense, ni par la punition. Kamii, rapportant une expérience menée par Piaget, nous propose un exemple qui nous éclairera plus encore. À des enfants à qui on demandait s’il est plus grave de mentir à des enfants ou à des adultes, ils dirent qu’il leur semblait plus grave de mentir à des adultes. Pour expliquer leur choix, les enfants soutinrent que les adultes sont plus susceptibles de s’apercevoir qu’on leur ment. Il s’agit là d’une attitude d’enfants non autonomes.

Des enfants plus grands auxquels la même question a été posée tendaient à répondre qu’il est quelques fois nécessaire de mentir à des adultes, mais qu’il est moche de mentir à des enfants. Ces enfants démontrent ainsi leur autonomie. À la question de savoir comment un enfant devient autonome, Piaget soutient que les adultes aggravent le manque naturel d’autonomie des enfants en recourant à des récompenses ou à des punitions alors qu’ils stimulent l’autonomie en recourant à des échanges francs. Lorsqu’un enfant ment, l’adulte peut, par exemple, le punir en le privant de dessert, il peut aussi lui demander de rejoindre sa chambre et revenir faire une proposition sur ce qu’il aurait dû faire.

En définitive, conclut Kamii (2003), s’agissant de l’acquisition des valeurs morales, les théories constructivistes de Piaget diffèrent des théories traditionnelles. Selon Piaget,

l’enfant construit les valeurs morales de l’intérieur à travers ses interactions avec d’autres personnes proches et importantes pour lui au lieu de se les voir imposées par l’extérieur.

Le second domaine d’autonomie qui influence l’éducation, selon la théorie piagétienne, est l’autonomie intellectuelle. Pour comprendre l’autonomie intellectuelle dans la vision de Piaget, l’exemple de Copernic que nous propose Kamii (2003) nous semble bien inspiré. Copernic annonça la position centrale du soleil à un moment où tout le monde croyait que c’est le soleil qui tourne autour de la terre. Malgré les menaces, Copernic resta suffisamment autonome pour rester convaincu de la véracité de son idée. Une personne intellectuellement non autonome croit tout ce qu’on lui dit, même les informations les plus illogiques, sans se poser des questions.

S’agissant de l’autonomie en tant que but de l’éducation dans la théorie piagétienne, il existe un décalage important entre l’autonomie en tant que but de l’éducation et les pratiques éducatives aujourd’hui (Kamii, 2003). Les pratiques éducatives actuelles donnent trop d’importance à la mémorisation et utilisent également les punitions et les récompenses qui stimulent tout sauf l’autonomie morale. Toutefois, certaines activités éducatives comme apprendre à écrire et à lire, à lire une carte constituent des apprentissages stimulant l’autonomie de l’apprenant. Or, malheureusement, fait remarquer Kamii, la plupart des enseignants n’ont jamais entendu parler d’autonomie et font usage de pratiques contre- indiquées comme moyen de motivation de l’apprentissage sans savoir qu’ils en éloignent les enfants.

2.2.2 Lien entre l’autonomie de l’apprenant et le

socioconstructivisme de Vygotsky vu par Kamii

(2003)

La théorie de l’apprentissage développée par Vygotsky (1997) cité par Kamii (2003) repose sur le principe qui veut que l’apprentissage précède le développement. L’auteur révèle que les conduites supérieures humaines, c’est-à-dire le développement, émergent de l’intériorisation des construits et des procédures élaborées socialement, c’est-à-dire de l’apprentissage. Cette intériorisation procède de la différentiation progressive des fonctions psychiques intellectuelles.

En rapport avec l’apprentissage, Vygotsky (1997) introduit une des idées fortes de sa théorie : l’étayage. L’apprentissage précède le développement, la notion d’étayage

indiquant le fait que l’individu apprend avec l’aide d’autrui. La notion d’apprentissage employée ici suppose un parcours entre deux stades de développement de l’apprenant : un stade de développement de départ où l’individu ne peut faire face seul à un problème et un autre stade de développement où l’individu peut résoudre seul le problème. Entre les deux, il bénéficie de l’appui de l’enseignant. Vygotsky introduit alors la notion de zone proximale de développement [ZPD] qui est l’intersection entre les zones de développement où l’apprenant ne peut résoudre seul un problème donné et les zones où il peut résoudre le même problème avec l’aide d’autrui. Pour résumer, retenons que le processus apprentissage et développement part d’un stade de développement (ZPD).

L’autonomie prend deux significations dans la théorie socioconstructiviste de Vygotsky (1997). Une de ces significations est relevée par Kamii (2003). L’auteur écrit en effet que c’est la dynamique entre inter et intrapsychique qui permet de construire l’autonomie de l’apprenant selon la théorie socioconstructiviste ; le concept d’autonomie est associé, dans ce cas, à celui de développement. La seconde signification que la théorie de Vygotsky donne au concept d’autonomie est rapportée par Caetano-Rousselot (2005) : cet auteur défend un concept d’autonomie lié à la liberté pour l’apprenant de réaliser ses propres expériences à partir de celles proposées par l’enseignant ; on note qu’ici le concept