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L’approche comportementale de détermination du niveau optimal de

2.3. LE NIVEAU OPTIMAL DE TRÉSORERIE À DÉTENIR PAR LES

2.3.2. L’approche comportementale de détermination du niveau optimal de

Nous ne prétendons pas vouloir faire une étude approfondie des modèles existants d’estimation du niveau optimal de trésorerie et des paramètres de calculs qui y sont associés. Soulignons que les modèles d’estimation de seuil optimal de trésorerie à détenir fondés sur les modèles classiques de régressions mathématiques, malgré leur capacité prédictive de niveau de trésorerie nécessaire, sont très normatifs. En effet, le niveau optimal de trésorerie est ou doit être le résultat des équations ou formules mathématiques qui laissent très peu de place aux variables subjectives comme les préférences ou le sentiment qui peuvent plutôt aboutir à une formulation de niveau de trésorerie désirée. Par exemple, un gestionnaire pourrait choisir de rapatrier les profits étrangers malgré l’impôt à payer sur les revenus étrangers lors du rapatriement de la trésorerie (réduisant ainsi la trésorerie nette) juste pour jouir de la sécurité que lui procurent la détention et le contrôle directs de la trésorerie. Le modèle classique d’estimation du niveau de trésorerie optimal pourrait être inadapté pour tenir compte des aspects subjectifs. Cette inadéquation témoigne les limites des modèles classiques selon Dittmar et Mahrt-Smith (2007) et l’attrait d’approche tenant compte de l’attitude, du comportement ou des perceptions face à la rétention de la trésorerie que nous présentons dans la prochaine section.

2.3.2. L’approche comportementale de détermination du niveau optimal de trésorerie

Diemer (2002a, 2002b) nous indique que le niveau d’encaisse optimal dépendra du degré de préférence des gestionnaires pour les actifs liquides par rapport aux actifs non liquides. Contrairement à l’approche classique fondée sur le principe de rationalité et d’objectivité, le niveau de trésorerie optimal selon l’approche comportementale serait plutôt subjectif, complexifiant ainsi sa modélisation comme dans l’approche classique. Ainsi pour Diemer (2002a, 2002b), l’approche comportementale s’intéresse aux anticipations et aux préférences (pour les actifs liquides versus actifs non liquides) des

agents économiques, pour comprendre les déterminants du niveau optimal de trésorerie. Diemer (2002a, 2002b) nous indique que la préférence des gestionnaires pour les actifs liquides serait fonction de leurs anticipations par rapport à certains facteurs comme les variations des taux d’intérêt et les variations des prix des titres. Théret (2011) nous informe que les anticipations des agents seront influencées par les perceptions, les comportements, le niveau de confiance et les préférences individuelles, ce qui nous éloigne de la maxime d’anticipation rationnelle, optimisateur et omnisciente qui semble être privilégiée dans l’approche traditionnelle classique ne tenant pas suffisamment compte de certaines déficiences affectant le processus de décision des agents dont un sommaire est présenté au tableau 2.1.

Tableau 2.1

Sommaire des déficiences affectant le processus de décision des individus

a. La surabondance des données : Capacité limitée par rapport à la quantité de données qui peuvent être traitées (trop à recevoir, à traiter et à mémoriser).

b. La première impression : Les premières informations intégrées donnent une plus grande impression provoquant une certaine résistance à une révision ultérieure face aux nouvelles données.

c. La disponibilité d’informations : On accorde moins d’attention aux informations difficiles à obtenir par rapport à celles qui sont plus faciles à obtenir.

d. Pensée positive : Il y a une tendance à ignorer les informations rentrant en conflit avec les hypothèses déjà préconçues et de vouloir mettre l’accent sur les informations qui les confirment.

e. Cohérence interne : L’humain a une tendance à accorder moins d’importance ou à diminuer la valeur de quelque chose de nouveau ou d’inhabituel.

f. Fiabilité inégale des sources : Le fait que certaines sources d’informations soient plus fiables que d'autres ont tendance à être ignorées.

g. L’information manquante : quelque chose pour laquelle l'information est incomplète a tendance à être dévalorisée.

h. Révision d’hypothèses : Il y a une tendance à réagir de manière excessive ou insuffisante face à de nouvelles informations.

i. Base fictive : c’est la tendance à comparer quelque chose avec la moyenne lorsqu'aucune autre base de données comparative n’est disponible.

j. L’excès de confiance accordé à son propre jugement : Une fois établi, l’excès de confiance est gravé à notre jugement. Lorsqu’elles sont prises, l’être humain reste excessivement ancré à ses décisions à cause de l’excès de confiance accordé à son propre jugement.

k. La Co-occurrence : La co-occurrence tend à être interprétée comme étant une preuve solide de corrélation.

l. L’inconsistance : Les évaluations répétées des mêmes données ont tendance à différer.

Face à l’incertitude et en lien avec la pensée positive ou l’excès de confiance, les valeurs futures du taux d’intérêt n’étant pas connues à l’avance avec certitude, certains gestionnaires feront de la spéculation et vont chercher à tirer parti du fait qu’ils croient connaître mieux que les autres ce que seront, à l’avenir, les taux d’intérêt. Les positions qu’ils prendront face à l’incertitude sur les taux futurs commanderont un niveau d’actifs liquide à détenir au détriment des actifs non liquides. L’on assistera ainsi à une transformation des actifs liquides en actifs non liquides ou vice versa selon les décisions des gestionnaires en fonctions de leurs anticipations de l’évolution future des taux. Les anticipations et les décisions inhérentes de ces gestionnaires seront influencées par leurs comportements. Leurs comportements seront influencés par les traits personnels individuels tels que la confiance ou les préférences. Les décisions influencées par les biais comportementaux peuvent s’écarter des prévisions d’une anticipation rationnelle qui semble être privilégiée dans l’approche traditionnelle. À titre d’illustration, le niveau de prêts accordés par les banques aux entreprises dépend entre autres du degré de confiance qu’ont les banques aux gestionnaires de l’entreprise demandant le financement et de la perception des perspectives économiques futures.

Selon cette perspective comportementale, le niveau d’encaisse optimal ne serait pas seulement fonction de la nécessité des gestionnaires de maximiser la création de valeur pour les actionnaires, mais aussi de la préférence de ces gestionnaires pour les actifs liquides en fonction de facteurs tels que les variations du taux d’intérêt et des prix. On pourrait s’attendre à parler d’un niveau satisfaisant contrairement à un niveau optimal de trésorerie selon notre interprétation des deux perspectives. À cause de la difficulté de modélisation des facteurs comportementaux, il ne semble pas y avoir une formule mathématique standard de détermination du niveau satisfaisant de trésorerie à détenir qui s’appliquerait à tous comme dans le courant classique.

Malgré les capacités cognitives illimitées et d’agent optimisateur qu’on reconnait à l’humain selon l’approche classique, nous constatons qu’à cause des biais comportementaux affectant le processus de décision des dirigeants, il est difficile de

déterminer avec certitude le niveau optimal de liquidité à détenir pour maximiser la création de la valeur, ce qui pourrait être à la base des déviations observées telles qu’abordées dans la prochaine section.