• Aucun résultat trouvé

Discours et écriture hétérogène

3.2. L’analyse du texte littéraire

Il ne va pas sans dire que le roman comme production littéraire a connu différents courants. Le roman du 19eme siècle est passé dřun objet de partage intime dans un engagement dialectique entre lřauteur et la société à un roman contemporain qui ne répondait presque plus aux critères traditionnels de lřécriture de son époque. Lřéclosion du nouveau roman remettra en cause les fondements des écritures modernes, postmodernistes.

Sřen suit le triomphe du courant structuraliste des pays de lřest. Des chercheurs comme Kristeva et Bakhtine se sont installés dans des pays capitalistes et ont entrepris des traductions pour faire évoluer les choses permettant ainsi à la linguistique mais aussi à lřanalyse du discours de se développer. Dans les années 90

102

93

nous assistons à la domination de lřAD qui coïncide avec la post modernité, le poste structuralisme.

Les critères de manifestations artistiques sřaffichent à travers des éléments récurrents comme la discontinuité. La mise en abyme en est un exemple concret. Dřautres éléments tels que

- le phénomène de lřintertextualité, - la métatextualité à travers le roman, - lřessai et le commentaire

- la renarrativisation, qui représente la réécriture de ce qui déjà été écrit, ne manquent pas à lřappel.

Apportant une littérature pas comme les autres, avec une écriture où il y a un renouvellement esthétique, une écriture singulière, spécifique à travers une langue quřon ne peut juger fixe et figée dans la mesure où elle évolue perpétuellement, ce que Kristeva nommera une langue en devenir ou Productivité dite texte. Mais également la caractéristique de la multi culturalité que lřon peut également attribuer au romn algérien contemporain.

Le roman algérien est multiculturel, et non post moderne, car il subit des influences universelles103. Lřoccasion de faire le point sur certaines mouvances de la fiction narrative contemporaine en langue française.

Ceci dit, il est important de rappeler que la littérature nřest quřun long engendrement et un renouvellement continuel. On ne trouve chez un auteur que ce quřy ont laissé les auteurs précédents. Le mérite consiste moins à apporter du nouveau quřà mettre en valeur ce quřon vous lègue.

José Dominique de Almeida est lřun des chercheurs qui a abordé le statut de la littérature française contemporaine. Il y problématise au profit dřune question centrale qui ne cesse de tourmenter professeurs et critiques de ce domaine, et qui se rapporte dřune manière intéressante à lřessor de cette littérature dite contemporaine.

103

94

Pour saisir le parcours littéraire proposé dans son article, il est nécessaire survoler le panorama chronologiquement littéraire. Son questionnement aborde ainsi la possibilité dř « une vie en littérature française après le Nouveau Roman.

Dřaprès José D. de Almeida104

« Lřécriture française contemporaine nřest pas uniforme ou monolithique, elle sřopère selon plusieurs filières, groupes hétérogènes dont le classement obéit à des critères élastiques, à des symptômes qui se recoupent çà et là : écriture blanche, minimalisme, nouveau roman, nouvelle fiction, retour du/au récit, écriture postmoderne. Cela montre lřincapacité où nous sommes « …sortir » d un monde historique dřappréhension de lřhistoire »105

À nouveau, la critique sřaperçoit que ses grilles de lectures, si elles sont encore valables, doivent être élargies ou réévaluées. Elle se rend compte du tournant stylistique où elle se trouve.

Au départ, le projet moderne avait pour visée de réaliser lřuniversalité des communautés à travers une émancipation progressive de lřhumanité pour tenter de résoudre tous les problèmes par lřuniversalisation. Pour atteindre cet objectif idéalisé, lřuniversel a été pris comme loi suprême. Cřest dans ce sens que la modernité fut bâtie sur des critères dřexclusion du dissemblable et de ce qui ne pouvait la refléter comme telle.

Comme nous lřavons appris, le paysage littéraire dominé par les écoles qui imposent leurs tendances étroites, doit son changement au Nouveau Roman et la revue Tel quel. En effet, cřest au début des années 80 que lřindividu a acquis un statut primordial.

Dans son texte, José. D. Almeida compare lřaprès nouveau roman au passage à lřan 2000 où lřon croyait quřil y aurait discontinuité, rupture numérique, cřest lřindividu qui prime et lřactivité romanesque ressemble à un vaste chantier difficile à organiser.

104

José Dominique de Almeida est Maître de Conférences à la Faculté des Lettres de l'Université de Porto. Il est également Docteur en Littérature Française contemporaine depuis lřannée 2005. Il sřintéresse dans sa recherche à la littérature française et francophone contemporaine, aux études francophones ainsi quřà la culture et pensée française

contemporaines. Membre de l'Instituto de Literatura Comparada Margarida Losa depuis 2007, il intègre la ligne de recherche sur les inter/transculturalités.

105

95

Il faut donc opérer par regroupements prudents, se méfier des Familles, des tendances, et assumer plus que jamais la vulnérabilité des critères ainsi que la nécessité pressante et parfois vaine de rectifier constamment le point de vue sur cette matière vivante quřest la fiction. La chute du nouveau roman se produira vers les années 1970.

Au 20ème siècle, nous assistons à la libération des mœurs. Cette situation coïncide avec la parution dřécrits hors normes. Le roman qui était plus au moins linéaire prendra forme dřun héritage en harmonie avec la société de son temps. Ce genre littéraire dans lequel on ne percevait presque plus lřidentité psychologique des personnages, les émotions devenaient autres, la trame textuelle changeait.

Il ne sřagit plus dřun roman classique où la chronologie du récit est cohérente mais plutôt de récit fracturé, dřentailles dans lřhistoire, qui apportent un sentiment de perdition au lecteur à travers des thèmes pertinents mais opaques à la fois. Dans la même époque, lřarrivée de lřAnalyse du discours littéraire comme branche de lřAD dřun héritage linguistique anglo-saxon sřest penchée sur la mouvance et lřinstabilité dans le texte littéraire.

Dans cette première démarche, nous nous sommes intéressée aux travaux du linguiste Dominique Maingueneau à fin dřexposer sa théorie au sujet de lřanalyse du discours littéraire. Littéraire, car nous avons pris comme corpus, un roman littéraire. Nous nous proposons dřanalyser le discours dans le roman Rue Darwin, que nous voudrions aborder à travers une étude analytique. Dans cette optique, il sera question dřillustrer nos dires à travers les exemples possibles qui revoient aux concepts clés de la pensée de ce dernier.

De part son statut de professeur chercheur à lřuniversité de Paris, Dominique Maingueneau sřengage à parcourir un terrain en voie de construction : celui de lřanalyse du discours littéraire.

Ayant pour objectif apparent un « ré- aiguillage » des études littéraires, il sřadonne au développement dřun cadre théorique de lřADL (analyse du discours littéraire). Ce dernier cadre théorique dont lřapproche serait spécifique à la littérature, sřinscrit dans un appareil conceptuel et méthodologique plus vaste pour ainsi permettre lřétude du texte littéraire.

96

Selon la théorie de Maingueneau, lřanalyse du discours littéraire se construit sur « le rejet de la topique même qui oppose un intérieur et un extérieur du texte » ; en dřautres termes un texte et un contexte. En vue dřun dépassement des théories littéraires antérieures, il adopte une position qui nřest ni contextualiste, ni textualiste et dont lřobjectif sřavère être une sorte de « reconfiguration du savoir ».

En ce sens, lřensemble des recherches qui prétendaient rompre avec lřhistoire littéraire et considérer les œuvres dřune façon immanente perdent toute crédibilité.

Dans son intention de réunifier lřapproche des textes en développant une analyse du discours littéraire comme domaine à part entière, Dominique Maingueneau sřattache à mettre en évidence : « la relation constitutive qu’entretient l’œuvre

littéraire avec la configuration dont elle émerge, les relations que noue le processus créateur entre subjectivité, institutions littéraires et fonctionnements textuels »106.

Cela veut dire, quřune analyse du discours propre à la littérature ne peut se faire quřen fonction de ces paramètres. Dans le cadre théorique proposé plus haut pour son étude du texte littéraire, Maingueneau fait appel à des concepts connus, déjà établis au paravent tels que genres du discours, inter-discours et énonciation linguistique, sřadditionnent à ceux la, des notions désormais à la une comme : institution discursive, scène dřénonciation, éthos, paratopie ou encore code langagier.

Ces dernières interviennent de façon récurrente dans les travaux du linguiste, cřest pour cette raison quřon ne pourrait en faire abstraction.

Pour Maingueneau, lřénonciation ne revoit pas uniquement à un sujet, mais aussi à un ensemble de conditions qui accompagnent la production du discours. Dans cette perception, il introduit le concept de scènes dřénonciation. Nécessaire pour aborder les textes dans le but dřen étudier les procédés de légitimation et de création de valeur littéraire dans un état de société, il en propose une analyse en pôles, trois scènes : La scène englobante, considérée comme scène de base équivaut au type de discours.

A lřintérieur, se trouve la scène générique dont chaque genre de discours impliquerait une scène spécifique. Quant à la troisième, il sřagit de la scénographie. Concept clé de la démarche de Maingueneau cette dernière concerne les scènes

106

97

dřénonciation validée ; c'est-à-dire, installées au préalable dans la mémoire collective dřune société. Celle-ci a pour effet de passer le cadre scénique regroupant les deux scènes (englobante et générique) au second plan ; dans la mesure où le lecteur est censé recevoir le texte comme une lettre.

Un autre concept accrocheur mis en place par Maingueneau ; celui de Paratopie qui désigne une « localisation paradoxale (...) qui nřest pas lřabsence de tout lieu, mais une difficile négociation du lieu et du non lieu, une localisation parasitaire » celle-ci comprend champ et société. On y retrouve la paratopie de lřidentité, la paratopie spatiale et la paratopie temporelle.

De là sřouvre pour lřanalyse du discours un programme de recherche qui prend en charge la mise à jour du mouvement paratopique qui anime une entreprise créatrice et ce, en montrant de quelle manière les « contenus » des textes le réfléchissent. Quant à lřEthos : ton employé par lřénonciateur par lequel on accède à lřimage de ce dernier, est un autre concept développé dans la théorie de Maingueneau. Pour lui, le ton sřappui sur une double figure de lřénonciation, à savoir : caractère et corporalité. Lřexemple cité par le chercheur, est celui du « franc parler » qui caractérise « les tragiques » dřAgrippa dřAubigné, caractère et corporalité puisés dans lřimage du « Paysan du Danube ».

La notion de code langagier nřen reste pas moins citée dans ses travaux. Usage de la langue autrement dit, il sřélabore dans une interlangue à travers lřespace de confrontation des variétés langagières quelles soient internes par exemple : niveaux de langues ou dialectes ou encore externes comme les idiomes étrangers.

Selon Dominique Maingueneau pour rendre possible lřétude des textes littéraires et en dégager leurs contenus ; il ne suffit pas de les traverser. Car le sens même sřélabore dans lřépaisseur du discours.

Quant à la signification du discours, elle peut sřavérer différente, et ce, en fonction de lřauditoire auquel les textes sont destinés mais également selon la façon dont ils sont formulés sans oublier pour autant les conditions dans les quelles ils ont été élaborés. Dans cette perspective, il faudrait donc disposer de cadres et instruments qui permettent de les analyser dřune manière minutieuse.

98

Les travaux et recherches de ce linguiste incontournable (Maingueneau) , rassemblant ainsi ses efforts poursuivis dans le domaine de lřanalyse du discours littéraire comme branche de lřAnalyse du discours. Ces concepts abordés feront parti intégrante de notre étude analytique du roman Rue Darwin, en ce sens, nous nous proposons de les appliquer sur notre corpus afin de répondre à nos questionnements.

Selon Dominique Maingueneau, lřanalyse du discours représenterait lřanalyse de lřarticulation du texte et du lieu social dans lequel il est produit.Dans notre corpus, plusieurs discours se rapportant à une institution littéraire : lřœuvre de fiction qui est un roman littéraire, se rencontrent.

Le discours littéraire étant celui qui engloberait les autres discours, à savoir : le discours historique, socioculturel, religieux ou encore philosophique, apparaissent comme éléments essentiels à la transcription de lřidéologie de lřauteur dans ses écrits, nous y retournerons dans le 2ème chapitre qui suit et qui retrace entre autres lřhétérogénéité discursive pour en repérer les traces et en dégager le sens.

Dans le même cours dřidées, celui de la dimension hétérogène, nous survolerons également une écriture hétérogène mais qui prend sens au niveau de la forme dřécriture. Ainsi nous nous proposons de reprendre lřécriture en italique dans le roman Rue Darwin. Lřobjectif étant de démontrer une autre configuration de lřhétérogène à travers lřécriture et dřarriver à soulever un sens implicite qui justifie le choix de cette utilisation par lřauteur.

99