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IV - Passage des étudiants en deuxième année

Avant d'entamer la démarche de spécification des modèles, il apparaît indispensable de questionner l'articulation entre les deux années de préparation au DUT. En effet, la nature plus ou moins continue de cette transition influencera l'organisation globale de notre travail. Ces deux années forment-elles un continuum de quatre semestres avec un niveau de validation à la fin de chacun d'eux ? Auquel cas, il conviendrait de ne pas privilégier l'une ou l'autre moyenne de fin de semestre et de considérer l'obtention du DUT comme un processus en quatre étapes. À l'opposé de ce cas de figure, ces deux années pourraient former deux épisodes très distincts où il conviendrait de réussir la première année pour passer dans une seconde année, en tout point différente de la première. Dans ce cas, il faudrait spécifier deux modèles, un pour chaque année, pour marquer le caractère indépendant de ces deux années d'étude. La situation intermédiaire se caractériserait par un passage entre les deux années marqué par une rupture plus importante que le passage entre les autres semestres ; cet aspect plus marqué du passage en deuxième année s'accompagnant tout de même de certaines formes de continuité. Le passage en deuxième année ne serait pas une séparation nette avec l'expérience antérieure mais resterait plus déterminante que le passage du premier au deuxième semestre ou du troisième au quatrième. Dans ce cas intermédiaire, il faudrait spécifier un modèle pour la première année, modèle qui pourrait être repris pour analyser la deuxième année.

Dans la filière GEA uniquement, la deuxième année est divisée en deux ou trois options suivant les départements : GCF (Gestion Comptable et Financière), GMO (Gestion et Management des Organisations) et GRH (Gestion des Ressources Humaines). Dans tous les cursus, les programmes pédagogiques nationaux préconisent la mise en place de parcours diversifiés. En GEA, ces parcours pourraient donc s'ajouter à la différenciation en options. L'objectif de ces parcours est de spécifier la formation de l’étudiant par des modules complémentaires suivant qu’il s'oriente vers une insertion professionnelle ou une poursuite d’études. La mise en œuvre de ces modules complémentaires est laissée à la discrétion des départements même si un certain nombre d'entre eux sont présentés de manière détaillée dans les différents programmes nationaux.

La réalité de ces parcours pour les départements suivis est assez hétérogène. Quelques départements ne mettent pas de parcours en place, le programme est commun à tous les groupes de deuxième année. Aucun des départements GEA étudiés n'a ajouté à son organisation en options des différentiations en parcours. Lorsque des options ou des parcours existent, une grande partie des matières sont communes à toutes les options ou à tous les parcours. D'un point de vue curriculaire, la différence entre les options ne semble pas très importante et tendrait plutôt à émettre l'hypothèse d'une deuxième année sans rupture significative avec l'organisation de la première année.

Mais, à y regarder de plus près, ce changement d'année s'apparente pourtant à un véritable palier d'orientation. L'ensemble des départements font le choix pratique de constituer les groupes-classes de

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deuxième année sur le choix de ces parcours ou options et ce choix n'a rien d'aléatoire. La plupart des chefs de départements, interrogés sur les choix des parcours et des options, rapportent que les meilleurs vont dans tel parcours ou telle option, réputée plus difficile alors que les bacheliers technologiques sont majoritaires dans tel autre parcours. Le chef d'un des rares départements sans parcours en deuxième année précise que l'un des groupes est constitué des meilleurs étudiants, sur la base du volontariat. Dans un autre département où le chef de département estime que les meilleurs étudiants ne se dirigent pas spécialement vers l'un ou l'autre des deux parcours, on observe pourtant que la différence des moyennes de fin de S2 calculées pour chaque parcours est très significative. Enfin, la directrice des Études d'un département rapporte un choix délibéré des enseignants « d’appâter » les meilleurs étudiants dans telle ou telle option. L'ensemble de ces témoignages semble bien indiquer que la logique des précédents niveaux d'orientation est également à l'œuvre lors du passage en deuxième année : l'organisation par option n'est pas neutre vis-à-vis de la réussite académique et n'est probablement pas neutre du point de vue de l'origine sociale des étudiants. On peut supposer qu'ici aussi, trois familles de facteurs viennent s'ajouter aux inégalités de réussite liées à l'origine sociale (Landrier & Nakhili, 2010). Le premier de ces mécanismes relèverait des choix des individus marqués par leur origine sociale. Le deuxième viendrait du traitement de ces choix par les acteurs de l'orientation (ici ce sont essentiellement les enseignants lors des jurys), traitement qui ne serait pas toujours purement méritocratique. Le troisième, lié à l'établissement fréquenté, s'expliquerait par l'offre faite aux individus souvent marquée par la culture de l'établissement. L'effet cumulatif de ces différents facteurs sera de renforcer la concentration dans les mêmes filières des étudiants en difficulté académique et ceux d'origine sociale modeste.

Néanmoins, les données recueillies ici ne permettent pas de mettre en œuvre la modélisation logistique qui permettrait de confirmer (ou d'infirmer) ces hypothèses. Il serait nécessaire pour cela d'avoir un recueil de données qui cumulent les choix d'orientation dans un même département sur plusieurs années consécutives.

Outre les différents témoignages recueillis, il est tout de même possible de déceler des preuves d'une organisation tendant à constituer des groupes de niveaux en deuxième année. La redistribution des étudiants par parcours/options augmente notablement la part de variance intergroupe de la moyenne du second semestre. Avec l'organisation des groupes du semestre 2, 2,2 % de la variance est due à des différences entre les groupes (tableau 38). Avec l'organisation des groupes des semestres 3 et 4, c'est 10,5 % de la variance qui est due à des différences de moyennes entre les groupes (tableau 39).

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Tableau 38 : Modèle vide pour la moyenne de fin de deuxième semestre avec les groupes de deuxième semestre (*p<.05, **p<.01, ***p<.001)

Variable modélisée S2

Paramètres Mod. S2.0 (vide)

Effets fixes

Constante 11.401***

Effets aléatoires Niv 2 (Groupe) :

Variance des constantes 0.102*

Niv 1 Variance inter-étudiants 4.459***

-2 log V 5308.4

Tableau 39 : Modèle vide pour la moyenne de fin de deuxième semestre avec les groupes de deuxième année (*p<.05, **p<.01, ***p<.001)

Variable modélisée S2

Paramètres Mod. S2.0 (vide)

Effets fixes

Constante 11.936***

Effets aléatoires Niv 2 (Groupe) :

Variance des constantes 0.291***

Niv 1 Variance inter-étudiants 2.479***

-2 log V 3825.3

La nouvelle organisation des groupes de deuxième année marque donc bien une rupture vis-à-vis de l'organisation de la première année et oblige à considérer le DUT comme la somme de deux années plutôt que la somme de 4 semestres. Cependant, le contexte académique change peu et l'organisation préconisée par les programmes nationaux amène une réelle continuité entre la première et la deuxième année avec beaucoup de cours communs en deuxième année. Nous nous situons bien dans une situation intermédiaire entre une formation composée de 4 semestres équivalents et un dispositif en deux étapes successives très distinctes. De ce fait, nous privilégierons une première spécification du modèle à partir des données de première année. Ce modèle, une fois spécifié, sera utilisé pour interpréter les données de la deuxième année. Pour mémoire, l'introduction des variables se fera par bloc dans l'ordre indiqué dans le tableau 40.

IV - Passage des étudiants en deuxième année

Tableau 40 : Récapitulatif des variables construites pour la spécification du modèle de première année

Famille de variable Catégories Détails

Profil initial Passé scolaire Type de baccalauréat Nombre de redoublements Ancienneté du baccalauréat Mention au baccalauréat Contexte familial

Catégorie socio-professionnelle du père Catégorie socio-professionnelle de la mère Plus haut niveau de diplôme obtenu par le père ou la mère

Identité Sexe

Âge

Projet initial

Rang de l'IUT dans les vœux post- baccalauréat

Le niveau de définition du projet professionnel

Intention de poursuivre des études

Perception du contexte académique

Intégration sociale

Climat enseignant

L'implication enseignante perçue

La structuration de l'enseignement en termes de lisibilité

La structuration de l'enseignement en termes d'étayage

La perception du soutien à l'autonomie

Motivation

Auto-détermination Interne, introjectée et externe.

SEP Global vis-à-vis du semestre

Moyen vis-à-vis des UE du semestre

Buts d'accomplissement

But de maîtrise approche But de maîtrise évitement But de performance approche But de performance évitement

Valeur Moyenne vis-à-vis des UE du semestre

Engagement dans l'apprentissage Engagement cognitif Apprentissage en profondeur Apprentissage stratégique Apprentissage en surface Engagement comportemental

Gestion du temps et de l'environnement Gestion des efforts face aux distractions

Apprentissage avec l'aide des pairs

V - Construction d'un modèle de la réussite académique en première année

V - Construction d'un modèle de la réussite