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L'engagement des étudiants dans leur apprentissage est caractérisé ici par trois dimensions, l'une cognitive mesurée par les approches de l'apprentissage, l'une comportementale mesurée par la régulation des ressources disponibles et la dernière émotionnelle avec l'anxiété face aux évaluations. Pour l'engagement cognitif, les approches de l'apprentissage en profondeur ou stratégique influencent peu ou pas la moyenne de fin d'année alors que l'apprentissage en surface garde une influence persistante, significative (quoiqu'en tendance en seconde année p=.101) et négative sur la moyenne en première comme en seconde année. Cette dernière dimension n'explique des différences de progression qu'au deuxième semestre. Ainsi, l'influence de l'engagement cognitif sur la moyenne passe par l'évitement d'une approche en surface plus que par l'adoption d'une approche en profondeur ou stratégique. Cette absence de significativité des approches en profondeur ou stratégique a déjà été relevée dans de nombreuses études (Cf supra), notamment parce que l’efficacité d’une approche de l'apprentissage est dépendante du champ disciplinaire auquel elle s'applique et du mode d'évaluation utilisé (Vermunt, 2005). Il n'existe pas de stratégies d'apprentissage efficaces du point de vue de la réussite académique en tout lieu et en toute occasion. Or, la moyenne de fin de semestre est un indicateur composite, issu d'un ensemble de matières distinctes avec des modes d'évaluation variés. On pourrait donc émettre l'hypothèse qu'une approche en profondeur ou stratégique, employée de manière trop systématique, serait tantôt efficace tantôt inefficace, d'où un effet globalement très faible. Le corollaire d'une telle hypothèse serait de donner un rôle primordial à la capacité de changer d'approche en fonction de la situation. Ce serait donc la capacité à autoréguler son approche de l'apprentissage entre apprentissage stratégique et apprentissage en profondeur, tout en évitant systématiquement l'écueil de l'apprentissage en surface, qui influencerait positivement la moyenne. En intégrant cette autorégulation de l'approche de l'apprentissage, l'engagement cognitif serait ainsi mieux évalué. Cette dimension supplémentaire pourrait alors expliquer une part des différences de progression entre les individus qui échappe à notre modèle. En seconde année, l'influence de l'engagement cognitif tel que mesuré ici est faible sur la moyenne de fin d'année et nul sur la progression en seconde année comme au quatrième semestre. L'effet de l'engagement semble donc s'être sédimenté durant la première année et ne permet plus d'expliquer les différences de progression en seconde année. La hausse ou la baisse des résultats s'effectuant dans un intervalle borné, il est possible que des causes exogènes au système approche de l'apprentissage – résultat viennent freiner la progression dans un sens ou dans l'autre. Les différences de progression ne sont pas étirables à l'infini. Par exemple, si les résultats baissent trop, l'étudiant échoue et sort de l'échantillon d'étudiants pris en compte. À l'opposé, Un étudiant évitant systématiquement l'apprentissage en surface ne peut pas espérer voir sa moyenne augmenter indéfiniment. La progression peut être vue comme plus difficile lorsqu'un certain niveau de résultat est atteint : il peut être plus difficile de passer de 15 à 16 sur 20

I - L'engagement : une clé proximale de la réussite

que de 10 à 11. Pour employer une terminologie habituellement réservée à l'économie, l'élasticité de la moyenne de fin de semestre rapportée à la variation de l'approche de l'apprentissage semble décroissante en fonction du temps. Les deux années de préparation du DUT formeraient un système dans lequel les interactions continues entre des règles, des habitudes, les objectifs et les croyances des acteurs amèneraient progressivement les étudiants à une position académique « optimale » du point de vue de ce système et expliqueraient l'aspect décroissant de cette élasticité.

Pour l'engagement comportemental, l'aspect négatif de l'apprentissage avec l'aide des pairs peut paraître relativement contre intuitif. Confronter son point de vue avec d'autres étudiants devrait permettre une mise à distance des connaissances et des compétences, pourrait susciter un conflit socio- cognitif propice à une compréhension plus profonde. Cependant l'interaction entre les individus n'a pas systématiquement des conséquences positives sur l'apprentissage. C'est bien le mode de structuration des interdépendances sociales qui va conditionner les interactions entre les individus, et par conséquent, déterminer le résultat de cette interaction (Johnson & Johnson, 2002). Le cadre théorique de l'interdépendance sociale considère les groupes comme des ensembles dynamiques où l'interdépendance peut être positive (coopération), négative (compétition) ou inexistante (efforts individuels). La coopération (interdépendance positive) advient lorsque les buts des individus sont positivement corrélés ; les individus perçoivent qu'il peuvent atteindre leurs buts à la condition nécessaire et suffisante que les autres atteignent les leurs. La compétition (interdépendance négative) est le résultat d'une corrélation négative entre les objectifs des individus du groupe. Dans cette situation, les individus perçoivent la réussite des autres comme une menace pour leur propre réussite. Enfin, les efforts sont strictement individuels (interdépendance inexistante) lorsque les buts des individus ne sont pas corrélés entre eux. Chacun est persuadé qu'atteindre ses propres objectifs ne dépend en rien du fait que les autres membres du groupe atteignent les leurs. De la sorte, l'influence négative de l'apprentissage avec l'aide des pairs pourrait être interprétée comme le signe d'un mode d'interaction pas suffisamment coopératif pour que les conflits sociocognitifs puissent se dérouler et porter leurs fruits. Interroger les étudiants sur les raisons qui motivent leur apprentissage avec des pairs et les modalités de ce travail serait une voie pour approfondir cette question et un complément utile pour l'interprétation de cet effet négatif.

La régulation des ressources (efforts, temps et environnement) montre un effet positif et significatif sur la moyenne et la progression au second semestre et ne conserve qu'un effet en tendance sur la moyenne en seconde année. Ceci conforte l'idée qu'être capable de gérer ses efforts face aux difficultés ou aux distractions, de gérer son temps et son environnement de travail permet effectivement de progresser durant la première année, mais l'effet de cette régulation semble s’atténuer en seconde année, une fois sédimentée dans la moyenne de fin de première année ou de fin de troisième semestre. Cette variable produirait donc ses effets en première année, sans permettre de réels progrès durant la seconde année. On retrouve ici, l'hypothèse d'un effet conjugué d'une perte des étudiants les plus faibles pour des raisons académiques et d'une élasticité décroissante de la moyenne.

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niveau individuel. Cependant, l'éventail des émotions possibles est large, il se pourrait qu'une autre caractérisation de l'engagement émotionnel montre bien un lien avec la réussite académique au niveau individuel.

Regardé globalement, l'engagement possède donc un effet positif sur la moyenne et sur la progression au deuxième semestre pour peu qu'il soit bien orienté. Lorsqu'il s'exprime par la régulation des efforts et de son environnement, l'engagement permet d'obtenir de meilleurs résultats et de mieux progresser au second semestre. Lorsque cet engagement est orienté vers des approches inadaptées (l'apprentissage en surface), il peut amener les individus à être moins performants voire à expliquer des différences de progression entre les individus. Cette dichotomie pourrait amener à privilégier l'hypothèse formulée par Skinner et al. (2008) d'une structure des indicateurs de l'engagement en deux catégories : « […] « good news » should be differentiated from « bad news » [...] » (p.766, Ibid). Cependant leur modélisation insiste sur la participation active dans les activités académiques en classe. Ainsi définie, elle ne laisse pas de place à la dimension cognitive, singulièrement à l'approche de l'apprentissage. Il paraît donc plus pertinent, comme il a été fait pour l'autorégulation, d'envisager qu’un apprentissage inefficace résulte d’une mauvaise orientation de l'engagement. Pour l'engagement dans l'apprentissage en surface, nous l'avons rappelé supra, la conception que les individus possèdent de l'apprentissage est particulièrement déterminante (Dart et al., 2000; Rogaten et al., 2012). Elle marquera ainsi la tendance d'un individu à s'engager dans un apprentissage en surface, engagement qui produira des conséquences négatives en termes de performance.

II - La motivation, le sentiment d'efficacité personnelle prépondérant

II - La motivation, le sentiment d'efficacité