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Introduction des études in vitro

1. INTRODUCTION

1.1. Introduction des études in vitro

Ces études sont réalisées sur différentes lignées cellulaires humaines, pour évaluer l’activité anticancéreuse potentielle.

Toutefois il faut savoir que les concentrations utilisées in vitro sont souvent 10 à 100 supérieures à celles utilisées in vivo. Une extrapolation de l’activité anticancéreuse in vitro à l’homme n’est donc pas possible pour de nombreuses études.

Une remarque importante concerne l’éventuelle interférence des catéchines avec les protéines plasmatiques dans les modèles animaux ou les études humaines, mais absente dans le cadre

d’études in vitro. La concentration réelle de catéchines pénétrant la cellule dans les premières études sera donc certainement assez faible.

Finalement, on a observé pour des études sur certaines lignées cellulaires une auto-oxydation de l’EGCg avec production de radicaux libres et de H2O2, induisant l’apoptose, notamment par inactivation du récepteur du facteur de croissance épidermique. Ce phénomène peut être évité par l’ajout de catalase dans le milieu de culture. Or, les chercheurs ignorent si le même phénomène est susceptible de se produire chez l’animal ou l’homme, sachant que la présence d’enzymes aux propriétés réductrices est naturelle dans les compartiments plasmatiques et cellulaires.

En conclusion, on peut retenir que les mécanismes des catéchines sont complexes et divergent certainement selon qu’on travaille in vitro ou in vivo. Il faudra donc des modèles expérimentaux pertinents pour démontrer les mécanismes, et déterminer si les polyphénols agissent directement au niveau de leur cible ou s’il s’agit d’une activité secondaire. [111].

1.1.1. Rappel sur le cycle cellulaire [133], [153]

Rappelons brièvement le cycle cellulaire des cellules eucaryotes, se divisant en quatre étapes. Le cycle débute par l’interphase, rassemblant les phases G1, S et G2. Le noyau de la cellule est limité par une enveloppe nucléaire.

- La première phase G1 est caractérisée par la croissance de la cellule à ADN monocaténaire, l’intégration des signaux mitogènes ou anti-mitogènes et la préparation de la cellule à l’étape suivante. Elle commence environ 3 jours avant la phase S.

- La phase S dure 6 à 8 heures, au cours de laquelle l’ADN se dédouble.

- La phase G2, pendant laquelle la cellule à ADN bicaténaire se prépare à la mitose, dure 2 à 4 heures.

- La phase M ou mitose, d’une durée inférieure à 2 heures, durant laquelle les chromosomes se partagent rigoureusement entre deux cellules filles. Pour ce faire, l’enveloppe nucléaire disparaît et le génome se concentre pour former des chromosomes. Les deux cellules filles se séparent lors de la cytocinèse.

Après la mitose, soit la cellule repasse en interphase, soit elle entre en phase de quiescence de non division cellulaire ou phase G0.

Les quatre phases G1, S, G2 et M se déroulent toujours selon le même ordre. Seules les phases S et M sont caractérisées par une activité chromosomique, tandis que les phases G1 et G2 représentent des intervalles ou Gap.

Figure 50 : Le cycle cellulaire : ses quatre phases et le stade G0.

Les étapes du cycle cellulaire sont régulées par un ensemble de mécanismes complexes. Lorsque des anomalies de l’ADN sont constatées et si leurs réparations échouent, un programme de mort cellulaire ou apoptose est mis en place.

Cette mort cellulaire programmée est caractérisée par une condensation du cytoplasme, une déformation de la membrane nucléaire et puis une fragmentation du noyau et de son contenu. Les cellules cancéreuses ont acquis des propriétés leur permettant d’échapper à l’apoptose : les cellules sont immortelles.

Nam et al. (2001) [98] ont étudié l’interaction de l’(-)-EGCg avec les protéasomes, dont le résultat est l’arrêt du cycle cellulaire en phase G1.

Les protéasomes S26 des cellules eucaryotes, constituants du noyau, du cytoplasme et du réticulum endoplasmique interviennent dans la protéolyse des protéines mal repliées et obsolètes. Un protéasome est formé de 4 anneaux dont les deux internes sont formés de 7 sous-unités β contenant une protéase, et les 2 externes sont constitués de 7 sous-unités α permettant de garder le protéasome ouvert et de reconnaître les ubiquitines.

Dans un premier temps les protéines sont dégradées par des protéases en petits peptides de 7 à 9 acides aminés. Des enzymes spécifiques greffent 4 ubiquitines hors du protéasome sur ces résidus, permettant au protéasome de reconnaître ces derniers.

Selon Nam et al. l’(-)-EGCg inhibe cette dernière activité du protéasome in vitro aux concentrations plasmatiques d’un buveur de thé vert. Il s’ensuit l’accumulation de deux substrats naturels du protéasome (p27/Kip1 et un inhibiteur du facteur de transcription nucléaire κB, IκB-α), provoquant l’arrêt du cycle en phase G1.

1.1.2. Rappel sur la néovascularisation [86], [93]

Pour assurer une croissance optimale d’une tumeur, il est nécessaire qu’elle soit largement approvisionnée de tous les nutriments nécessaires à la survie d’une cellule. Pour perfuser la totalité de la masse tumorale, divers facteurs de croissance stimulent la formation de nouveaux vaisseaux sanguins, processus appelé « angiogenèse » ou « néovascularisation ». On en déduit que ces facteurs de croissance font partie des cibles privilégiées dans le développement de traitements anticancéreux, aboutissant à la mort cellulaire par défaut de nutriments.

Dans une étude de 2008 [110], confirmée par une étude animale, les chercheurs ont évalué l’action de l’EGCg et de l’ECg sur le bFGF ou basal Fibroblast Growth Factor, un facteur de croissance fibroblastique situé dans la membrane basale de la matrice extracellulaire des vaisseaux.

Quatre lignées cellulaires humaines colorectales ont été utilisées pour cette étude, dont seules les lignées HCT-116 et LoVo expriment le bFGF.

En utilisant des doses de 50 µmol/L d’EGCg ou d’ECg, bFGF de la lignée LoVo est supprimé. Les résultats sont évalués à partir de RT-PCR (Reverse Transcriptase Polymerase Chain Reaction : réaction d’amplification d’un brin d’ADN complémentaire à partir de son ARN) et Western Blot (électrophorèse faisant migrer des protéines) du gène de bFGF : on observe une diminution des deux bandes du facteur de croissance après action des catéchines. Cette inhibition est temps-dépendante.

L’étude montre les mêmes résultats pour la lignée HTC-116, même si les taux de bFGF sont plus bas au niveau de ce type de cellules.

Par ailleurs, en utilisant d’autres types cellulaires, les chercheurs ont pu confirmer que bFGF est présent au niveau de la plupart des cellules.

A côté de bFGF, le facteur de croissance vasculaire endothélial ou VEGF (Vascular

Endothelial Growth Factor) joue un rôle majeur dans la néovascularisation. Dans l’étude

le VEGF, en utilisant les lignées cellulaires HUVEC et MDA-MB231. On observe une diminution dose-dépendante de la sécrétion de VEGF dans le milieu de culture après addition de 40 mg/L d’extrait de thé vert ou d’EGCg.

Parallèlement, les taux d’ARNm du VEGF diminuent, par action des catéchines au niveau de la régulation de la transcription. Il semble que les extraits du thé vert diminuent également la transcription des proto-oncogènes c-jun et c-fos. Les transcrits vont se dimériser comme une « fermeture éclair » par une liaison constituée d’une leucine, formant ainsi le complexe transcriptionnel AP-1. Celui-ci interagit avec certains sites de promotion du VEGF, favorisant l’expression de ce dernier dans les conditions normales. Le thé vert permettrait donc de freiner la néovascularisation par diminution de la promotion du VEGF.

D’autre part, l’extrait de thé vert diminue l’expression de la protéine kinase C (PKC), un modulateur de la transcription de VEGF dans les cellules cancéreuses du sein.