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PARTIE I : L’ « Atelier Climat », forme d’acquisition de « bonnes pratiques »

Chapitre 2 : L’Atelier Climat de Nantes Métropole : description de l’aspect organisationnel

B. Présentation des participants, de nos interviewés et de la méthodologie

2) Nos interviewés et les entretiens réalisés : l’étude qualitative

Nous avons inscrit notre enquête dans une démarche qualitative, dans l’objectif de mettre en exergue, notamment, les effets de situation, les interactions sociales sous contraintes, et la place de l’imaginaire. A cette fin, sur les 150 ménages de l’Atelier Climat, nous en avons interviewé 37. Nous les avons choisis selon six critères : leur âge, leur situation géographique (Nantes centre versus communes de Nantes Métropole), leur nombre d’enfants à charge, leur statut (propriétaire ou locataire), leur lieu de vie (habitat collectif ou individuel) et enfin, leur catégorie socio-professionnelle.

Leur âge

Pour ce faire, nous avons interrogé quatorze personnes entre 22 et 40 ans (la plus jeune personne inscrite, en tant qu’adulte, à l’Atelier Climat avait en effet 22 ans). Nous avons fait le choix d’étendre cette première tranche d’âge jusqu’à 40 ans, en considérant qu’il s’agissait éventuellement de la période des premiers enfants, des premières installations, des premiers achats d’appartement ou de voiture, notamment. Nous avons interrogé quinze personnes entre

86 40 et 60 ans, tranche d’âge qui correspondrait à des individus qui seraient déjà installés (appartement et équipement), avec des enfants grands (adolescents ou jeunes adultes). Et enfin, notre échantillon d’étude se compose de huit personnes de plus de 61 ans, et qui, de par leur maturité et expérience, pourrait avoir des valeurs et des pratiques différentes des autres tranches d’âge. Nous avons pu, en outre, interroger, en entretien, une personne de plus de 80 ans.

Leurs enfants à charge

Nous avons considéré que le fait d’avoir des enfants à charge pouvait être également une variable explicative des comportements, notamment dans le cadre du réchauffement climatique (assurer un meilleur avenir à ses enfants). Cette variable pouvait conditionner également certaines pratiques alimentaires, ce qu’il nous restait à définir. Nous avons pu interviewer vingt-deux personnes ayant des enfants à charge, et quinze personnes sans enfants à charge, dont sept individus sans enfants à charge, mais avec des enfants vivant hors du domicile familial.

Leur situation géographique

Nantes Métropole est composée de la ville de Nantes, mais également de vingt-trois autres communes, formant la métropole nantaise. Nous avons donc interrogé dix-huit personnes résidant à Nantes ville, et dix-neuf autres des communes de la métropole nantaise (CMN), afin de voir s’il y avait éventuellement des pratiques différentes, entre ceux qui habitent dans le centre même de l’agglomération, et ceux en périphérie (notamment pour les déplacements ou l’alimentation).

Leur statut propriétaire/locataire

Une autre variable pouvait être intéressante à analyser concernant les pratiques liées à l’habitat, à savoir celle liée au statut de propriétaire ou de locataire. Elle pouvait nous permettre de voir si, oui ou non, les actes d’économie d’énergie étaient plus faciles à réaliser quand on était locataire. A cette fin, nous avons interrogé vingt-deux propriétaires, quatorze locataires et un individu vivant encore chez ses parents.

Leur lieu de vie

De même que le critère propriétaire/locataire, le type d’habitat dans lequel nos participants vivaient pouvait être une piste intéressante à analyser. Nous avons donc questionné vingt-six

87 personnes vivant en habitat individuel, dont dix-neuf en maison individuelle et sept en maison mitoyenne, et onze personnes habitant en habitat collectif (en appartement).

Leur catégorie socio-professionnelle

Enfin, il nous semblait important de diversifier les catégories socio-professionnelles de nos interviewés, afin d’avoir un spectre d’étude le plus large possible, au sein des participants de l’Atelier Climat. Notre échantillon est donc composé de vingt-sept actifs et de dix retraités. Il y a ainsi neuf cadres (un chargé d’études EDF, un analyste, un consultant en organisation et systèmes d’information, une cadre en ressources humaines, une comptable, une chargée de mission dans les collectivités publiques, un responsable d’opérations en bâtiment, un cadre SNCF et un cadre commercial (dont deux retraités)), huit professeurs/enseignants/formateurs (dont trois retraités), cinq employés (une documentaliste, une assistante maternelle, un technicien en chauffage-couverture-plomberie, un chef de cuisine et un agent commercial (dont un retraité)), cinq femmes au foyer (dont trois retraitées et une animatrice en congé parental prolongé), quatre demandeurs d’emploi (dont deux secrétaires, une animatrice périscolaire et une gestionnaire TPE-PME), trois affiliés au monde de la recherche universitaire (une chercheuse en chimie, une doctorante en physique, un étudiant en master de mathématiques), un chef d’entreprise (auto-entrepreneur), une journaliste, et un agriculteur (à la retraite).

Par ailleurs, si cette variable n’était pas déterminante dans notre recrutement, nous avons voulu également alterner les interviewés en fonction des deux formules d’engagement qui leur étaient proposées. En effet, une formule dite F7, comprenait trois réunions climatiques associées à quatre réunions thématiques, et supposait un investissement plus important dans le temps. Une formule dite F3 n’impliquait les participants qu’aux trois réunions climatiques. Il pouvait être intéressant de voir en quoi le choix des formules avait, ou non, des répercussions sur les comportements des participants. Nous avons ainsi interrogé 23 participants de la formule F7 et 14 interviewés de la formule F3.

Le recrutement

Pour les recruter, nous avons pris comme point d’appui le fichier central des 150 participants de l’Atelier Climat. Nous avons fait une présélection de cinquante personnes, selon les six critères que nous venons d’énoncer, via l’élaboration d’un tableau. Nous avons ensuite contacté les participants par téléphone, pour leur proposer un entretien individuel, et

88 en fonction de leur réponse, nous avons essayé de maintenir une certaine proportionnalité des différents critères de sélection. Si nous avons pu le faire pour la situation géographique, le statut locataire/propriétaire, et pour la catégorie socio-professionnelle (à noter néanmoins que nous n’avons qu’un seul agriculteur et pas d’ouvrier), ce fut plus difficile pour le type d’habitat (où l’habitat individuel est plus présent, à vingt-six contre dix-neuf), mais également pour les plus de 60 ans, en moins grand nombre que les 22-40 ans ou les 40-60 ans, et pour ceux ayant des enfants à charge, nettement surreprésentés. Nous avons fait le choix de conserver cet échantillon d’étude malgré certaines surreprésentations, pour des raisons de contraintes temporelles, mais également parce que nous ne recherchions pas, par la forme même des entretiens qualitatifs, une régularité statistique des résultats. Nous voulions également voir si, dans ces grandes tendances, pouvaient se dégager des différences de comportements entre les participants qui avaient pourtant les mêmes critères.

Nous avons réalisé avec chacun un entretien semi-directif approfondi de 1h à 3h, avec une grande majorité des entretiens entre 2h et 2h30, soit un volume total de 58 heures d’entretiens que nous avons réalisés. Ils se firent chez les interviewés (quand nous en avions la possibilité, les entretiens étaient enrichis par la confrontation dires et pratiques des interviewés, notamment pour les achats et pour le tri des déchets), mais également dans les locaux de Nantes Métropole, sur demande d’une salle, ou dans des cafés de Nantes. Nous avons interrogé les interviewés à partir d’une liste de thèmes et de questions ouvertes, avec la volonté de privilégier la relance pour éviter d’imposer nos catégories d’analyse. Nous voulions également explorer le sens que l’entretenu attribuait à ses pratiques. Le guide d’entretien était structuré en trois parties : une première centrée sur leurs représentations liées aux questions environnementales, la deuxième consacrée à leurs pratiques (notamment sur leur consommation et la gestion de leurs déchets), et une troisième sur leur participation à l’Atelier Climat (ce qu’ils en attendaient, ce qu’ils ont vécu, et ce qu’ils attendent après l’atelier).

Les entretiens « supplémentaires » auxquels nous avons eu accès :

Nous pûmes également analyser dix-neuf entretiens qui furent réalisés par les membres de Missions Publiques. Nous eûmes directement accès à leur retranscription, ce qui nous permit de les traiter et de les inclure dans notre analyse. En effet, même si nous sommes vite arrivés à une saturation théorique avec nos 37 entretiens, il nous semblait intéressant de

89 compléter notre analyse par des entretiens qui suivaient, dans les principales trames, le même guide, mais qui avaient été menés par d’autres sociologues du cabinet Missions Publiques.

Ces dix-neuf entretiens « supplémentaires » respectent les six critères que nous avons définis pour notre échantillon, avec toutefois une légère surreprésentation des personnes âgées de plus de 61 ans, des propriétaires et des personnes vivant en habitat individuel. En effet, six participant ont entre 24 et 40 ans, cinq ont entre 41 et 60 ans, et huit ont 61 ans et plus. Douze n’ont pas d’enfants à charge, et sept en ont. Onze interviewés habitent à Nantes et huit dans les communes périphériques. Quatorze sont propriétaires et cinq sont locataires. Sept interviewés habitent en appartement et douze en habitat individuel (dont onze en maison individuelle et un en maison mitoyenne). Cinq sont employés (deux techniciens, un agent technique, une aide-soignante et un tapissier en ameublement, dont trois retraités), cinq sont cadres (deux architectes, un cadre dans une société, un cadre en assurance, un cadre dans l’administration, dont un retraité), trois sont enseignants (dont deux à la retraite), deux sont intérimaires, deux sont fonctionnaires au Conseil Général et au Ministère des affaires étrangères (dont un retraité), une participante est mère au foyer (à la retraite), et une participante est chimiste (en congé parental). Douze sont de la formule 7 et sept de la formule3.

Ce choix d’un échantillonnage raisonné dans une enquête qualitative, par rapport à un échantillonnage représentatif statistique dans une enquête quantitative, cherche à révéler et à étudier la diversité des pratiques des participants interviewés. En effet, par l’usage de l’échantillonnage raisonné dans notre enquête qualitative, nous souhaitons faire apparaître des dimensions qui ne sont pas directement visibles par le biais de l’approche quantitative, comme la diversité des pratiques sociales notamment. Ainsi, il ne s’agit pas de mesurer ou de faire une observation sur la fréquence des diverses opinions exprimées, à titre d’exemple, mais de recueillir des témoignages individualisés, précis et détaillés, afin de comprendre les logiques qui sous-tendent les pratiques. L’intérêt principal de l’enquête qualitative pour notre recherche est qu’elle fait apparaître de façon compréhensive les contraintes qui pèsent sur les décisions d’acheter, de changer, de s’engager, ou de résister, et ce, au-delà des motivations individuelles.

De plus, cette démarche suit les encouragements méthodologiques formulés dans la théorie ancrée, et développés par Barney G. Glaser et Anselm A. Strauss (1967 rééd. 2010), où il est écrit que l’on « construit un échantillonnage théorique pour élaborer des catégories

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et leurs propriétés et pour suggérer des interrelations dans l’optique de bâtir une théorie. On élabore un échantillonnage statistique pour déterminer précisément la distribution des individus à l’intérieur des catégories utilisées dans les descriptions ou les vérifications »146

. Ainsi, l’approche qualitative « met l’accent sur la diversité, en démontrant l’existence de

différentes pratiques ou représentations, et, ce faisant, permet notamment d’identifier des éléments parfois marginaux en termes quantitatifs, mais néanmoins décisifs en termes opérationnels, prospectif et stratégique »147. On recherche le sens que le sujet donne à son action, même si le sens ne peut constituer que l’un des éléments du système de causalité, s’intégrant dans le jeu des contraintes de l’action collective, où se trouve inséré l’individu148

.