En conclusion de cette première étape de la NFT, la NEB « messagerie » apparaît comme un Système d’Information tentant de fédérer ses SIOC pour atteindre une certaine cohérence d’emploi. On parle de systèmes fédérés, ou de métasystème, lorsque l’intégration visée est une intégration a posteriori. Pourtant, la vision technocentrée est encore au cœur de la problématique, notamment à cause d’une interopérabilité technique impossible à obtenir et d’une organisation historique en Armes monofonctionnelles en silos, ce qui va conduire à l’arrêt de l’Opération d’Ensemble SIC TERRE en 2009. Son remplaçant, SI TERRE cherche à atteindre un dernier niveau d’interopérabilité (Nci+ puis NC1) pour 2015 afin de valider quelques évolutions indispensables demandées par les opérationnels. Toutefois, le programme SCORPION, avec l’intégration d’un SIOC unique, souhaite faire table rase de ces premiers errements et éviter ainsi une balkanisation des SIOC au sens de Besson (1999).
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Figure 15. La NEB « messagerie » (image SIRPA Terre).
Figure 16. Architecture schématisée de la NEB « messagerie ».
4.2.3. L’infovalorisation
Malgré certains gains réels comme la capacité au combat en zone lacunaire (zone d’action dans laquelle les zones d’engagement sont disjointes ou comportent des espaces vides de forces70) et une meilleure conscience de la situation des décideurs, la NEB, dans son
70 Le Général Yakovleff (2006) ajoute à ce concept l’idée de la plasticité d’un front lacunaire qui est la « capacité à maintenir un dispositif cohérent, apte au combat, en acceptant toutes les déformations géographiques et toutes les reconfigurations fonctionnelles ».
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acception de première étape de la Numérisation des Forces Terrestres, n’a pas connu le succès escompté.
Les causes majeures souvent évoquées à juste titre sont des problèmes d’interopérabilité, d’ergonomie des dispositifs de contrôle, d’une diminution de la qualité de visualisation sur écran et du manque de spécialistes. Nous ajouterons trois aspects :
- l’absence de certains équipements qui nécessitent par exemple de réaliser le travail
selon les deux logiques : analogique et numérique. Cette remarque a malheureusement été souvent synonyme, à tort, de résistance culturelle au changement ou de critique d’infobésité c'est-à-dire de surcharge de travail due à une surcharge informationnelle ;
- une administration informatique trop lourde et trop présente : certains dispositifs
doivent être paramétrés à chaque mise en route des systèmes d’armes car ils n’ont pas les capacités de s’autoconfigurer en fonction des missions et des moyens engagés ;
- un compromis mal étudié entre des outils complexes et puissants et des outils simples
et génériques. Le « curseur » penche clairement du côté de la première solution.
La seconde étape de la NFT se nomme l’infovalorisation. Elle n’est pas née « from
scratch » puisqu’elle et souhaite abattre les barrières listées supra en proposant, au niveau du
Groupement Tactique InterArmes ou GTIA (figure 17), un Système d’Information (toujours au sens de SIOC) commun apportant des capacités de combat collaboratif en temps réflexe et une accélération du tempo de la manœuvre : le Système d’Information et de Combat de Scorpion (SICS). Le GTIA est le premier niveau de conception et de conduite de l’action interarmes. Il est composé de plusieurs Sous Groupement Tactique InterArmes ou SGTIA. Il peut être engagé au sein d’une brigade et a la capacité de mener des actions autonomes. C’est le « module de base d’emploi tactique » qui remplace la notion de régiment lors des crises.
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Figure 17. NEB et périmètre du programme SCORPION (image SIRPA Terre).
Commentaire de la figure 17 : le terme NEB placé en haut et à gauche de l’image concerne le concept NEB générique incluant l’ensemble des forces armées et l’étape de l’infovalorisation.
a. SCORPION, le programme d’ensemble des 20 prochaines années
Le programme SCORPION, ou Synergie du Contact Renforcée par la Polyvalence et l’InfovalorisatiON, fait suite au Plan d’Étude Amont (PEA) portant sur la Bulle Opérationnelle Aéroterrestre (BOA) débutée le 06 décembre 2005 et notifiée contractuellement jusqu’en 2013 à l’Équipe Intégrée de Maîtrise d’Ouvre TGS (EIMO Thales Communications, Giat Industries et Sagem DS71). Les PEA sont conduits suivant les mêmes méthodes que les programmes d’armement et « sont des recherches et études exclusivement appliquées. Elles couvrent un domaine allant de la recherche scientifique ou technique jusqu’à la réalisation de maquettes ou la mise au point de démonstrateurs, expérimentations comprises » (Foray & Guichard, 2001).
À l’origine distincte de SCORPION, la BOA est devenue une étape à part entière a
posteriori de SCORPION. Certaines logiques sont semblables et convergentes comme la mise
en place d’une CP pour l’ensemble des participants. La BOA propose notamment :
71 Respectivement en 2012 Thales Communications & Security (depuis 2011), Groupe Nexter (depuis 2006) et Sagem Groupe SAFRAN (depuis 2005). L’armée de Terre et la DGA en sont les maîtres d’ouvrage.
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- la notion de Système de Système Infovalorisé, l’expression du besoin ne se fait pas sur le contenu mais sur les performances globales des systèmes de combat ;
- l’acquisition du Laboratoire Technico-Opérationnel (LTO, Battlelab français) ;
- la réalisation du démonstrateur de combat collaboratif TACTIC (Technologies et Architectures de Combat aéroTerrestre Infovalorisé au Contact) intégrant entre autres le
Logiciel Opérationnel de Conduite du Combat (LOCC) et un ensemble de moyens
radio haut débit (Système de Communication du Contact). Un exercice réalisé en juin 2012 au Centre d'Entraînement aux actions en Zone Urbaine (CENZUB) de Sissone72 a mis en œuvre ce démonstrateur TACTIC au sein d’une première expérimentation de SCORPION dénommée Démonstration du Combat Collaboratif (DCC) ;
Tableau 6. Différence d’objectifs entre le DCC et TACTIC. Objectifs du DCC
Montrer ce que pourrait être SCORPION
Objectifs de TACTIC
Évaluer des concepts et technologies
Convaincre de la pertinence de la démarche capacitaire SCORPION
Évaluer près de 50 services innovants Contribuer à l’appropriation de SCORPION
par l’armée de Terre
Montrer les plus-values dont bénéficie un SGTIA infovalorisé
- la réalisation du démonstrateur de combat collaboratif franco-allemand ARTIST
(Architecture Real Time Integration System Testbench) ;
- l’étude d’impact des nouvelles technologies sur le système de contact futur.
SCORPION correspond au renouvellement optimisé et cohérent des moyens de combat du GTIA, c’est-à-dire des niveaux 4 à 7 : le niveau 4 correspond au Régiment (environ 1000 personnes) et le niveau 7 correspond au groupe de combat (environ 10 hommes) ou à la plateforme (véhicule).
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SCORPION est un programme structurant pour l’armée de terre de plus de 5 milliards d’euros qui se poursuivra jusqu’aux années 2025 – 2035 (Direction Générale de l'Armement, 2010b). L’architecture générale du système, d’un coût de 21 millions d’euros, est actuellement élaborée par la société Mars, consortium regroupant Thales, SAGEM et Nexter. Il s’agit de :
- renouveler ou moderniser les véhicules blindés de combat datant des années 70, 80 et
90 ;
- améliorer la protection des combattants et des matériels ;
- accroître l’efficacité des soldats et des systèmes d’armes par la mise en réseau des
systèmes de combat et l’intégration d’une vétronique avancée.
Ces futures possibilités se retrouvent parfois sous l’acronyme 4D : Durée des engagements, Durcissement des opérations, Diversification des missions et Dispersion des moyens. Il comprend de nouveaux véhicules lourds comme l’Engin Blindé de Reconnaissance et de Combat (EBRC) et le Véhicule Blindé MultiRôles (VBMR), mais aussi des dispositifs originaux ou revalorisés comme l’emblématique FÉLIN (dans sa version 2 SCIV « Système Combattant Info Valorisé ») pour Fantassin à Équipement et Liaisons Intégrés (Chareyron, 2011), le char Leclerc rénové XLR, des micros drones et robots, des possibilités de Tir Au-delà de la Vue Directe (TAVD). En dernier lieu, le Véhicule Blindé de Combat de l’Infanterie (VBCI), même s’il ne fait pas partie du contour programmatique de SCORPION, peut y être inclus car sa jeunesse opérationnelle scelle sa présence dans le futur champ de bataille infovalorisé.
SCORPION poursuit donc trois axes d’effort majeurs : la maîtrise de la force, la souplesse d’emploi et la protection. Ces axes reposent sur deux facteurs clés que sont l’intégration de la numérisation et la conception de nouveaux véhicules.