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Interf´erences lumineuses et champ de tavelures

2.2 Les tavelures, un champ d’intensit´e lumineuse al´eatoire

2.2.1 Interf´erences lumineuses et champ de tavelures

On d´esigne par le terme ”tavelures” ou ”champ de tavelure” la distribution spatiale al´eatoire d’intensit´e qui r´esulte de la diffusion d’une lumi`ere laser coh´erente sur une surface rugueuse (fi- gure 2.1). Cette diffusion de la lumi`ere laser par une surface rugueuse peut se faire en r´eflexion ou en transmission selon le montage et, dans les deux cas, elle consiste en une modulation spa- tiale de la phase et de l’amplitude du champ ´electrique de la lumi`ere incidente [120–122]. Dans notre exp´erience, ces modulations de la phase et de l’amplitude du champ ´electrique viennent des variations locales de l’´epaisseur d’un verre d´epoli. Remarquons que dans ce m´emoire nous

limitons notre ´etude `a celle d’une surface rugueuse qui est identique au cours du temps, nous obtenons ainsi une distribution de tavelures temporellement invariante.

σep

k

Laser r

z

y

x

δverre

Fig. 2.1 – Diffusion d’une onde plane incidente coh´erente par un verre diffuseur. Les asp´e- rit´es du verre diffuseur engendrent des ondes partielles qui interf`erent au point ~r et dont les diff´erences relatives de marche en ~r peuvent ˆetre grandes devant la longueur d’onde.

La distribution spatiale d’intensit´e al´eatoire1 ainsi engendr´ee poss`ede un contraste ´elev´e.

Deux images de tavelures dont la forme des grains est diff´erente sont pr´esent´ees sur les figures 2.2a et 2.2b. Une coupe montrant les variations spatiales de l’intensit´e des tavelures selon une direction est pr´esent´ee sur la figure 2.2c. Le caract`ere al´eatoire des variations de l’intensit´e et l’´echelle spatiale de modulation apparaissent sur ce profil unidimensionnel.

Notre verre d´epoli

Dans notre exp´erience, le diffuseur est un verre d´epoli. Il s’agit d’une lame de verre atta- qu´ee chimiquement. La lame de verre poss`ede l’avantage d’avoir une transmission proche de l’unit´e. Le produit chimique plac´e sur le verre pour l’attaquer cr´ee des variations al´eatoires de l’´epaisseur du verre d’un point `a l’autre de ce dernier. Nous avons caract´eris´e le r´esultat de l’attaque chimique de la lame de verre en tra¸cant le profil de la surface du verre `a l’aide d’une pointe en contact avec le verre. L’amplitude typique des variations d’´epaisseur du verre, d´efinie comme la d´eviation standard de l’´epaisseur du verre, est ´egale `a σep ' 3.5 µm. La fonction

d’auto-corr´elation de ces profils d’´epaisseur permet d’´evaluer l’´echelle de variation spatiale sur le verre. Nous obtenons2 δ

verre'0.3 mm.

Mod´elisation et propri´et´es statistiques des tavelures

Afin de comprendre et de d´ecrire le ph´enom`ene de tavelures, la surface rugueuse du diffuseur peut ˆetre mod´elis´ee comme une assembl´ee de N centres diffuseurs ponctuels ind´ependants. Cette image est valide lorsque l’´echelle spatiale δverre de variation de l’´epaisseur du verre (dans

le plan de la surface rugueuse, voir Fig. 2.1) est grande devant la longueur d’onde, chaque

1Notons que l’on parle souvent de ”taches de lumi`ere”, ou ”grains de tavelure” pour d´ecrire cette distribution

spatiale de l’intensit´e.

z

I(z)

c)

b)

a)

Fig. 2.2 – a) Image de tavelures avec des grains isotropes. b) Image de tavelures avec des grains anisotropes. c) Coupe d’une image de tavelures montrant les variations spatiales de l’intensit´e selon une direction de l’espace.

diffuseur ponctuel ayant pour taille typique la longueur de corr´elation δverre de la surface du

diffuseur. En effet, sur une taille inf´erieure `a la longueur de corr´elation δverre, les variations

de l’´epaisseur sont faibles et la diffusion de l’onde incidente peut ˆetre consid´er´ee uniforme en premi`ere approximation. Au contraire, deux points de la surface rugueuse s´epar´es d’une distance plus grande que la longueur de corr´elation δverre sont par d´efinition d´ecorr´el´es. Ils diffuserons la

lumi`ere incidente ind´ependamment l’un de l’autre, en particulier les amplitudes et les phases diffus´ees par ces deux points seront ind´ependantes.

Les ondes partielles issues des diff´erents centres diffuseurs de la surface rugueuse poss`edent donc des amplitudes et des phases al´eatoires et interf`erent constructivement ou destructivement lors de leur propagation en un point r de l’espace (voir Fig. 2.1).

Consid´erant que la transmission de l’onde incidente polaris´ee lin´eairement selon Oy (voir Fig. 2.1) `a travers le diffuseur n’affecte pas sa polarisation, nous ne consid´ererons dans la suite que son amplitude complexe A(~r). L’expression compl`ete du champ ´electrique s’´ecrit alors

~ E(~r, t) = 1 2A(~r)ejωlasert + c.c.  ~ey. (2.7)

L’amplitude complexe A(~r) du champ ´electrique r´esulte de la diffusion sur la surface ru- gueuse, c’est `a dire de la diffusion par les N centres diffuseurs ponctuels. A chaque centre diffuseur k sont associ´ees une amplitude ak/

N et une phase φk du champ ´electrique partiel

diffus´e. L’amplitude complexe A(~r) s’´ecrit alors : A(~r) = Eejφ = √1 N N X k=1 akejφk. (2.8)

Lorsque la rugosit´e de la surface du diffuseur est telle que les d´ephasages des ondes partielles diffus´ees sont uniform´em´ent distribu´es entre 0 et 2π, toute la lumi`ere incidente est diffus´ee. Dans ce cas, les tavelures sont dites ”pleinement d´evelopp´ees”. Dans notre cas, les variations de l’´epaisseur du verre d´epoli sont `a l’origine de la modulation du champ ´electrique incident. Ainsi, la condition sur la rugosit´e de la surface du diffuseur s’exprime en comparant la variance de l’´epaisseur du verre d´epoli σep(voir Fig. 2.1) avec la longueur d’onde de la lumi`ere incidente

λlaser. En effet, lorsque σep λlaser les phases acquises localement par la lumi`ere incidente lors

de sa diffusion sur chaque point diffuseur de la surface sont uniform´ement distribu´ees dans [0, 2π] et la composante de l’ordre z´ero ne se distingue pas des autres composantes de la diffu- sion.

En supposant que les amplitudes ak et les phases φk du champ ´electrique diffus´e sont in-

d´ependantes3 et que les phases φ

k sont uniform´ement distribu´ees sur l’intervalle [0, 2π]4, il est

possible d’utiliser le Th´eor`eme de la Limite Centrale pour les parties r´eelles et imaginaires de l’amplitude complexe du champ A(~r) d`es lors que le nombre de diffuseurs est grand, N  1. L’amplitude complexe du champ ´electrique diffus´e r´esulte alors d’une marche au hasard dans le plan complexe.

Avec les hypoth`eses pr´ec´edentes, les parties r´eelle et imaginaire de A(~r) sont des variables gaussiennes al´eatoires ind´ependantes et la distribution de probabilit´e au point ~r de l’amplitude et de la phase du champ diffus´e s’´ecrit [120] :

p(E, φ) = 1 πE2

0

eE2/E0. (2.9)

Il est alors possible d’´etablir les propri´et´es statistiques de l’intensit´e des tavelures I = |E|2 `a

partir de celles de l’amplitude du champ ´electrique E [120]. En particulier, nous pouvons ´etablir les propri´et´es statistiques ”du premier ordre” (`a un point) qui correspondent `a la distribution d’intensit´e des tavelures et les propri´et´es statistiques du ”second ordre” (`a deux points) qui d´ecrivent notamment la fonction de corr´elation en intensit´e et donnent la taille typique des grains de tavelures.

Dans les paragraphes qui suivent nous d´ecrivons ces propri´et´es statistiques des tavelures qui sont ´egalement les propri´et´es statistiques du d´esordre vu par les atomes (voir Eq. 2.5).