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Intensit´e de PL d’un nanotube isol´e et ´ecart d’´energie entre

3.4 Interpr´etation

3.4.3 Intensit´e de PL d’un nanotube isol´e et ´ecart d’´energie entre

Le grand int´erˆet de disposer d’une description de l’inhomog´en´eit´e de l’´echantillon est que l’on peut d´eduire des donn´ees exp´erimentales la r´eponse intrins`eques des nanotubes isol´es. Comme on l’a vu au paragraphe pr´ec´edent, on peut reconstituer l’´evolution avec la temp´erature de l’intensit´e de PL ´emise par un nanotube isol´e `a partir des donn´ees de PL r´esolue en temps. Cette derni`ere est pr´esent´ee sur la figure 3.4.16 pour des 2 chiralit´es de nanotubes HiPco (9,4) et (10,2). Pour confirmer ce r´esultat nous avons effectu´e l’op´eration d’extraction de la r´eponse des nanotubes isol´es `a partir de la mesure de Iens(T ) obtenue sur le montage de PL

stationnaire. Nous avons en particulier reconduit la mˆeme distribution en taille des fagots que celle d´eduite des mesures r´esolues en temps. Les mesures ont ´et´e faites sur le mˆeme ´echantillon (cf. chapitre 2). La comparaison des courbes issues de la PL r´esolue en temps et de la PL stationnaire (figure 3.4.16) montre un bon accord, sauf peut-ˆetre `a basse temp´erature (T < 20 K). A cet endroit l’intensit´e

de PL d´ecroit manifestement rapidement quand la temp´erature diminue ; l’´ecart pourrait alors s’expliquer par un contrˆole un peu moins bon de la temp´erature de l’´echantillon dans le cryostat de PL r´esolue en temps.

0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 (10,2) (9,4) 0 50 100 150 200 250 300 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 I n t e n si t é d e P L ( u n i t é s a r b . ) Température (K)

Fig. 3.4.16 – Intensit´e totale de la PL ´emise par deux chiralit´es de l’´echantillon HiPco en fonction de la temp´erature. Carr´es noirs : intensit´e calcul´ee par int´egration des courbes de PL r´esolues en temps. Pour ces courbes, le contrˆole de la temp´erature est incertain dans la zone hachur´ee. Cercles : intensit´e obtenue directement sur le montage de PL stationnaire. Trait plein : fit des donn´ees exp´erimentales `a partir du mod`ele `a 3 niveaux.

La caract´eristique principale de l’´evolution de l’intensit´e de PL avec T est l’existence d’un maximum vers 40 K, soit 3,5 meV. Deux r´egimes apparaissent distinctement de part et d’autre de ce point. L’intensit´e de PL au maximum est pr`es de 5 fois sup´erieure `a celle `a temp´erature ambiante. Un autre point tr`es frappant de cette courbe est le comportement `a basse temp´erature, entre 10 et 40 K. L’augmentation rapide de l’intensit´e de PL sur cet intervalle ´evoque

un ph´enom`ene d’activation thermique : `a tr`es basse temp´erature la population excitonique se trouverait pi´eg´ee sur un niveau de plus basse ´energie que le niveau brillant. On peut penser `a des niveaux de d´efaut [110]. Mais en fait cette hypoth`ese suppl´ementaire n’est pas n´ecessaire puisque dans la structure intrins`eque mˆeme des nanotubes on trouve un ´etat excitonique noir `a plus basse ´energie que le niveau brillant (voir fin du premier chapitre).

On se place donc dans le cadre d´efini au premier chapitre pour mod´eliser la dynamique excitonique dans une chiralit´e donn´ee. La structure fine de l’exciton 1s (α = 1) singulet correspondant `a la transition S11 comprend un niveau

brillant, not´e |ψ2

ex i dans le premier chapitre, et un niveau noir not´e |ψex1 i

et situ´e `a plus basse ´energie. Pour simplifier, on nomme ici ces niveaux (B) et (D) respectivement. L’´ecart d’´energie entre les deux est ∆. Le mod`ele que nous allons employ´e pour interpr´eter nos mesures se r´esume donc aux deux niveaux excitoniques (B) et (D) et au niveau fondamental (F) (absence d’exciton), repr´esent´es sur le sch´ema de la figure 3.4.17. Il s’agit de bandes d’´energie car le mouvement de l’exciton est libre dans la direction de l’axe du nanotube. Le vecteur d’onde est not´e K.

Les trois niveaux excitoniques sont coupl´es entre eux. On consid`ere des taux de recombinaison non radiatifs a priori diff´erents pour les deux niveaux, et bien entendu un taux de recombinaison radiatif pour le niveau brillant (cf. figure 3.4.17).

L’´evolution de la population des ´etats noirs (nD) et brillants (nB) dans ce

mod`ele `a trois niveaux est gouvern´ee par les ´equations cin´etiques suivantes :    d dtnB(t) = − (γR+ γN R+ γ↓) nB(t) + γ↑nD(t) d dtnD(t) = − (γN R′ + γ↑) nD(t) + γ↓nB(t)

Equilibre thermique entre les niveaux noir et brillant

Comme on l’a vu au premier chapitre, seul le niveau (B) est en principe coupl´e au rayonnement pour des raisons de sym´etrie de parit´e. Dans nos exp´eriences de PL r´esolue en temps, l’exciton est cr´e´e par l’impulsion d’excitation dans un ´etat singulet brillant de S22. Il relaxe ensuite en quelques centaines de fs jusqu’`a S11.

Cette relaxation se fait par interaction avec des phonons de la structure. Nous faisons l’hypoth`ese que l’exciton conserve son spin et reste dans l’´etat singulet, ce qui peut ˆetre justifi´e par la faiblesse de l’interaction spin-orbite dans les nanotubes de carbone (cf. chapitre 1).

Par contre, au cours des processus de diffusion avec les phonons acoustiques de la structure, l’´energie et le vecteur d’onde K de l’exciton sont modifi´es [52]. D’autre part il est tr`es probable que la sym´etrie de parit´e de l’exciton soit en fait bris´ee dans un nanotube de notre ´echantillon, `a cause de la pr´esence de d´efauts

(D) (F) (B) γ γ γ N R γ′ N R γR

Fig. 3.4.17 – Sch´ema `a 3 niveaux qui mod´elise la recombinaison des excitons dans un nanotube. (F) est l’´etat fondamental. (B) et (D) sont respectivement les niveaux excitoniques brillant et noir. L’´ecart d’´energie entre (B) et (D) est not´e ∆. Les deux niveaux sont coupl´es par les probabilit´es de transitions γ et γ. γR

est le taux de recombinaison radiatif. Des pertes non radiatives existent sur le niveau brillant avec un taux γN R et sur le niveau noir avec un taux γ′N R. Comme

la recombinaison radiative se fait dans une fenˆetre tr`es ´etroite par rapport `a la dimension de la PZB, on n’a pas repr´esent´e la dispersion des bandes excitoniques.

localis´es ou de l’environnement pr´esentant des inhomog´en´eit´es spatiales. Tout ceci conduit `a un couplage entre le bande (D) et la bande (B), repr´esent´e par les taux γ et γ. Si le temps caract´eristique des processus de diffusion est petit devant le temps de vie des niveaux noir et brillant, alors la population excitonique est thermalis´ee `a tout instant et le rapport des populations est ´egale au facteur de Boltzmann :

nB(t)

nD(t)

= e−∆/kBT

o`u kB est la constante de Boltzmann.

L’hypoth`ese de thermalisation est coh´erente avec le fait que les exp´eriences sur nanotube unique montrent une dynamique de PL monoexponentielle (cf. figure 3.1.2) [110]. Si le couplage entre les 2 niveaux (B) et (D) n’´etait pas tr`es efficace, c’est-`a-dire dire si on n’avait pas γ, γ ≪ γN R, γN R′ , alors la dynamique

associ´ee serait visible dans P L(t). Intensit´e de PL

La condition d’´equilibre de Boltzmann des deux populations permet de r´esoudre simplement les ´equations cin´etiques. La population de l’´etat brillant s’´ecrit ainsi :

nB(t) =

C

1 + e∆/kT exp(−γ0t)

et celle de l’´etat noir :

nD(t) =

C

1 + e−∆/kBT exp(−γ0t)

o`u C est une constante qui traduit les conditions initiales, c’est-`a-dire la probabilit´e de pr´esence d’un exciton sur les ´etats S11 `a t = 0, apr`es relaxation

assist´ee par phonons depuis les ´etats S22. Si on applique cette mod´elisation `a

notre cas exp´erimental, C prend donc en compte le coefficient d’absorption de la transition S22 et le rendement de la relaxation S22→ S11. Il est donc raisonnable

de consid´erer que C est ind´ependant de la temp´erature.

Dans ces expressions apparaˆıt le taux de recombinaison de la PL γ0, inverse

du temps de vie, qui vaut :

γ0(T ) = [γR(T ) + γN R(T )] 1 1 + e∆/kBT + γ ′ N R(T ) 1 1 + e−∆/kBT

Les taux de recombinaison sont en quelque sorte pond´er´es par le facteur d’occupation de l’´etat auquel ils sont attach´es [63]. Tous les termes de γ0

d´ependent a priori de la temp´erature.

L’intensit´e de PL ´emise par ce nanotube isol´e `a tout instant est ´egale `a la population de l’´etat brillant multipli´ee par le taux de recombinaison radiatif de l’exciton. En int´egrant en temps, on obtient l’intensit´e totale de PL ´emise par le nanotube en fonction de la temp´erature (en nombre de photons) :

INT isol´e(T ) =

γR(T )

γ0(T )

C 1 + e∆/kBT

Taux de recombinaison radiatif

Dans le premier chapitre, nous avons consid´er´e que le vecteur d’onde du photon ´emis au cours de la recombinaison est n´egligeable devant la taille de la PZB du nanotube : la conservation de la quantit´e de mouvement impose alors que seuls les excitons en bas de bande (B), de vecteur d’onde K nul, peuvent se recombiner radiativement. Ceci nous a permis de simplifier la discussion sur les sym´etries des ´etats excitoniques en se limitant strictement `a l’´etat de bas de bande. Dans cette hypoth`ese, le taux de recombinaison radiatif, calcul´e `a partir de la r`egle d’or de Fermi, est ind´ependant de la temp´erature.

Prenons maintenant en compte le fait que les niveaux excitoniques sont des bandes pr´esentant une certaine dispersion. La condition de conservation de la quantit´e de mouvement impose que le vecteur d’onde du photon le long de l’axe −

z du nanotube soit ´egal `a K. Ainsi, l’´emission de la PL met en jeu non seulement les excitons de bas de bande mais aussi ceux d’´energie l´eg`erement sup´erieure et vecteur d’onde suffisamment faible. On appelle ce domaine fenˆetre radiative. Le calcul du taux de recombinaison radiatif doit prendre en compte toute la distribution des excitons dans la fenˆetre radiative [52].

Pour cela, on calcule tout d’abord le taux de recombinaison radiatif Γ(K) d’un exciton de la bande (B) de vecteur d’onde K. La dispersion en ´energie de la bande est not´ee EB(K). Nous reprenons ici le r´esultat de Spataru et al.

obtenu en n´egligeant la r´eponse du nanotube pour les champs ´electriques polaris´es perpendiculairement `a l’axe du tube (effet de d´epolarisation du chapitre 1) [63] :

Γ(K) = ( 2πe2E B(0)2 ~3c2 χ EB(K)2−~2c2K2 EB(K)2 si |K| ≤ K0 0 si |K| ≥ K0

o`u χ est le carr´e de l’´el´ement de matrice de transition dipolaire de l’exciton par unit´e de longueur du nanotube. K0 est le vecteur d’onde maximal que peut avoir

un exciton se recombinant radiativement. Comme on le voit sur la figure 3.4.18, il est d´efini par : EB(K0) = ~cK0.

Pour d´ecrire la dispersion de l’exciton, nous utilisons l’approximation de la masse effective : EB(K) = EB(0) + ~2K2/2M, o`u M est la masse effective de

exciton (B) 0 Energie K photon K = |−→kp.−→z | kp K0 EB(K0) EB(K < K0)

Fig. 3.4.18 – Courbes de dispersion du niveau excitonique (B) (trait gras) et du photon (droite d’´equation E = ~cK) au voisinage du centre de la zone de Brillouin. La condition de conservation de la quantit´e de mouvement impose que la composante −→kp.−→z du vecteur d’onde −→kp du photon ´emis est ´egale au vecteur

l’exciton [63, 62]. Le taux de recombinaison radiatif effectif du niveau (B) `a temp´erature finie peut alors s’estimer par une moyenne statistique sur l’ensemble des excitons dans la fenˆetre |K| < K0. Comme la population des excitons est

thermalis´ee, le facteur d’occupation est donn´e par la statistique de Boltzmann. Il faut aussi prendre en compte la densit´e d’´etats qui est en 1/√E dans une structure unidimensionnelle, avec l’approximation de la masse effective. Il s’en suit que : γR(T ) = Γ(0) Rδ 0 dE 1 √ Ee(−E/k BT ) (EB(0)+E)2−2Mc2E (EB(0)+E)2 R∞ 0 dE 1 √ Ee(−E/kB T )

o`u E = ~2K2/2M est l’´energie cin´etique de l’exciton et δ la valeur maximale

de cette ´energie pour les excitons pouvant se recombiner. Comme le vecteur d’onde du photon est faible devant la taille de la PZB du nanotube on a pour toutes les temp´eratures explor´ees dans nos exp´eriences :

δ = ~ 2K2 0 2M ≈ EB(0)2 2Mc2 ≪ kBT

L’int´egrale au d´enominateur de γR(T ) vaut √πkBT de sorte qu’en se limitant

au premier terme du d´eveloppement [63] : γR(T ) ≈ 4 3√π r δ kBT Γ(0) A temp´erature ambiante, le facteur qkBT

δ vaut `a peu pr`es 100 selon l’hy-

poth`ese faite par Spataru et al. sur la masse effective de l’exciton [63]. Il vaut encore plus de 18 `a 10 K. Ainsi, seule une tr`es petite fraction des excitons ther- malis´es se trouve dans la fenˆetre de recombinaison radiative.

La dimension de la fenˆetre radiative est petite devant le dimension de la PZB. Ceci justifie que dans le calcul pr´ecdent on ait implicitement consid´er´e que la sym´etrie des excitons de la fenˆetre raditaive est la mˆeme que celle discut´e au premier chapitre pour les excitons en K = 0.

Pour la suite, le point important `a retenir est que dans l’hypoth`ese d’un exciton libre, le taux de recombinaison radiatif varie comme T−1/2.

D´etermination de ∆

Revenons `a l’expression de l’intensit´e totale de PL ´emise par le nanotube donn´ee par notre mod`ele :

INT isol´e(T ) =

γR(T )

γ0(T )

C 1 + e∆/kBT

La valeur de γ0(T ) nous a donn´ee par les fits de P L(t) d´ej`a d´ecrits ; nous

pouvons donc essayer de reproduire pour chaque chiralit´e la variation de l’intensit´e totale de PL avec la temp´erature. Les seuls param`etres `a ajuster sont l’amplitude globale et surtout l’´ecart d’´energie noir-brillant ∆. Comme on le voit sur la figure 3.4.16, les fits sont tr`es satisfaisants. Le mod`ele permet en particulier de bien reproduire le maximum de la PL vers 40 K ainsi que la d´ecroissance douce jusqu’`a la temp´erature ambiante. Il reproduit un peu moins bien le comportement `a basse temp´erature, mais l’intensit´e de PL varie alors rapidement avec T et un meilleur contrˆole effectif de la temp´erature de l’´echantillon sond´e serait sans doute n´ecessaire.

Cette proc´edure nous permet donc de d´eterminer la valeur de l’´ecart d’´energie entre le niveau excitonique noir et le niveau brillant. Comme il s’agit de reproduire la position d’un maximum, la pr´ecision obtenue sur la valeur de ∆ est bonne (un peu plus de 10 %). Les r´esultats, tr`es similaires entre les deux chiralit´es, sont pr´esent´es dans le tableau suivant :

Classe de chiralit´e (9,4) (10,2) Ecart noir-brillant ∆ (meV) 4, 2 ± 0, 5 3, 8 ± 0, 5