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Effet de la densit´e de puissance incidente

3.3 R´esultats

3.3.3 Effet de la densit´e de puissance incidente

Nous avons mesur´e l’influence de la densit´e de puissance incidente sur la dynamique de la PL en observant la chiralit´e (6,5) des nanotubes CoMoCAT, `a 15 K. La grandeur qui importe dans les exp´eriences r´esolues en temps est la fluence, c’est-`a-dire le nombre de photons incidents par unit´e de surface dans

chaque impulsion du laser d’excitation, que nous noterons F. On l’exprime aussi parfois en joules par impulsion et par unit´e de surface.

-100 0 100 200 300 400 500 600 1E-3 0,01 0,1 1 tau = 120 ps I n t e n si t é d e P L ( n o r m a l i sé e ) Temps (ps) tau = 76 ps

Fig.3.3.10 – Evolution de la dynamique de la PL de la chiralit´e (6,5) en fonction de la densit´e d’excitation, en ´echelle log (Elaser = 1, 59 eV). La temp´erature est 15

K. Fluence incidente : 0,4 (trait noir), 1,6 (trait gris) et 4 (pointill´e noir) µJ/cm2,

soit respectivement 1,6 , 6,3 et 16 × 1012 photons/cm2.

Comme on le voit sur la figure 3.3.10, la dynamique de la PL est la mˆeme pour F = 1, 6 et 6, 3 × 1012 photons/cm2. Par contre `a F = 16 × 1012 photons/cm2 la

recombinaison est plus rapide, en particulier dans l’intervalle t=50 – 300 ps, le temps caract´eristique de la composante lente diminuant de 120 `a 76 ps environ.

Plusieurs exp´eriences montrent que sous le r´egime des fortes fluences (F > 1014photons/cm2) la dynamique des excitons d´epend fortement de la fluence [111,

112, 113, 114]. Les conditions exp´erimentales de Ma et al. (r´ef´erence [111]) d’une part, et de Wang et al. (r´ef´erence [112]) d’autre part, sont particuli`erement int´eressantes car proches des nˆotres. Ces deux groupes ont mesur´e la PL r´esolue en temps sur des suspensions de nanotubes HiPco isol´es `a temp´erature ambiante, sur les 40 premi`eres ps au plus. En r´egime de forte fluence, ils observent que

la recombinaison est d’autant plus rapide que la fluence est ´elev´ee et que l’amplitude totale de la fluorescence d´epend non lin´eairement de la densit´e d’excitation. L’interpr´etation est la suivante : si la fluence est suffisamment ´elev´ee, l’impulsion d’excitation peut cr´eer un nombre moyen d’excitons dans chaque nanotube sup´erieur `a 1. Deux excitons pr´esents dans un mˆeme nanotube interagissent fortement `a cause du confinement unidimensionnel et se recombinent non radiativement dans un processus d’annihilation exciton-exciton [114]. C’est un ph´enom`ene ´evidemment non lin´eaire avec la puissance d’excitation.

Dans nos exp´eriences, la densit´e optique de l’´echantillon est suffisamment faible (inf´erieure `a 0,15) pour estimer que la densit´e d’excitation est homog`ene dans tout le volume ´eclair´e de l’´echantillon et pour n´egliger la r´eabsorption. Il est alors possible d’estimer quantitativement le nombre moyen d’excitons cr´e´e dans un nanotube par chaque impulsion, qui peut s’´ecrire :

N = F × σNT

o`u F est la fluence incidente et σNT la section efficace d’absorption du

nanotube `a la longueur d’onde d’excitation. σNT peut ˆetre calcul´ee `a partir

des mesures en polarisation de Islam et al., effectu´ees sur des ensembles de nanotubes orient´es dans une mˆeme direction [115]. Ainsi, pour une lumi`ere polaris´ee lin´eairement, la section efficace d’absorption moyenne est 1, 3×10−4 nm2

par atome de carbone. Comme la densit´e surfacique d’atomes de carbone sur un nanotube est 37 atomes / nm2, il suffit de connaˆıtre le diam`etre et la longueur

moyens des nanotubes observ´es dans l’´echantillon pour en d´eduire une valeur moyenne de σNT.

Dans l’exp´erience de Wang et al., le diam`etre moyen est de l’ordre de 1 nm et la longueur 380 nm. Le seuil d’apparition de la composante rapide de la dynamique de la PL reli´ee `a l’interaction exction-exciton est F = 1, 2 × 1014 photons/cm2,

soit ¯N = 2, 2. De leur cˆot´e, Ma et al. ont observ´e la chiralit´e (9, 5), et affirment que le seuil est inf´erieur `a F = 3 × 1014 photons/cm2, soit N = 1, 4 pour des

nanotubes de 100 nm de long (cette grandeur n’est pas pr´ecis´ee ; on a pris pour ce calcul la valeur typique mesur´ee sur nos propres ´echantillons, fabriqu´es par un protocole analogue : cf. chapitre 2). Sup´erieures `a 1 sans ˆetre identiques, ces deux valeurs de N sont du moins tout `a fait coh´erentes avec leur interpr´etation.

Dans notre propre exp´erience sur la chiralit´e (6,5) (diam`etre 0,757 nm), nous estimons que la longueur moyenne des nanotubes est de l’ordre de 100 nm (cf. mesures AFM du chapitre 2), soit σNT = 0, 36 nm2. Cette estimation est aussi

valable pour les nanotubes HiPco pr´epar´es avec le mˆeme protocole. Les valeurs de N pour les diff´erentes fluences de la figure 3.3.10 sont r´ecapitul´ees dans le tableau 3.1. Dans tous les cas on constate que le nombre moyen d’exciton par nanotube est tr`es inf´erieur `a 1 : il est donc improbable que les interactions exciton- exciton jouent un rˆole dans la dynamique mesur´ee.

F (photons/cm2) 1, 6× 1012 6, 3 × 1012 16 × 1012

N 0,006 0,023 0,058

Tab. 3.1 – Nombre moyen d’excitons cr´e´es dans un nanotube par chaque impulsion dans les conditions exp´erimentales de la figure 3.3.10.

Nous attribuons finalement la modification de la dynamique de PL quand la fluence augmente `a une autre origine : un ´echauffement local de l’´echantillon `a cause de l’absorption de la matrice de g´elatine. La conductivit´e thermique de la g´elatine est sans aucun doute tr`es m´ediocre compar´ee `a celle du substrat de quartz ou du doigt froid. Or nous avons vu que la dynamique aux temps longs est pr´ecis´ement tr`es sensible `a la temp´erature, en particulier `a basse temp´erature, en devenant plus rapide quand T augmente. Cette dynamique `a forte fluence est tr`es semblable `a celle observ´ee `a faible fluence et `a une temp´erature de 100 K . L’´echauffement local induit par l’absorption de l’excitation par la matrice serait donc de 85 K par rapport `a la temp´erature du doigt froid. En outre, la composante rapide ne semble pas modifi´ee, ce qui est `a nouveau coh´erent avec les donn´ees en fonction de la temp´erature. Ce ne serait pas le cas dans la situation d’interactions `a plusieurs excitons.

En conclusion, nous choisissons donc une valeur mod´er´ee de la fluence, ´egale `a 6, 3 × 1012 photons/cm2, pour l’ensemble de nos mesures de PL r´esolue en

temps en fonction de la temp´erature. Cela nous assure un bon contrˆole de la temp´erature locale de l’´echantillon, mˆeme `a basse temp´erature. L’intensit´e de PL des ´echantillons en matrice de g´elatine est donc suffisante pour qu’on puisse se placer dans des conditions exp´erimentales assurant un cadre d’interpr´etation clair : le r´egime de recombinaison est celui d’un exciton unique dans un nanotube, excluant tout effet `a plusieurs excitons.