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Chapitre 2 : Présentation et analyse des résultats

3. L’Arctique et les compagnies de vrac : propositions et théories

3.4 Les facteurs stratégiques d’attraction et de répulsion / deuxième partie

3.4.2 Influences internes : les enjeux administratifs et économiques

Avant de s’attarder davantage sur la catégorie des Influences internes, qui se voudra par ailleurs succincte, il importe de souligner que les compagnies maritimes de vrac associées aux opérations et à la gestion commerciale ont établi consensuellement que leurs opportunités et décisions d’affaires étaient largement tributaires de leurs clientèles qui, selon l’industrie, assument une large portion des risques encourus face aux aléas de la navigation arctique. Dans la même lignée, les coûts afférents qui incombent aux compagnies maritimes, tels que ceux de la main-d’œuvre, du soutien technologique et des brise-glaces, etc. sont, au final, défrayés par les clients : « […] pour nous vous savez, en bout de ligne, c’est l’utilisateur qui paye »175. C’est-à-dire que l’ensemble des frais supplémentaires que suppose la navigation en zone arctique, parfois considérés comme onéreux par certaines compagnies, est facturé aux clients. Ainsi, bien que de prime abord la question des coûts puisse sembler relevée des compagnies à l’étude, il n’en est rien, et, par conséquent, cela ne semble pas influencer la position des compagnies concernées face à l’Arctique (8 mentions).

En contrepartie, l’approche face aux coûts fixes, plus spécifiquement ceux associés à l’achat de navires, se distingue quelque peu. Bien que ces montants se répercutent inévitablement sur les taux de fret, les compagnies maritimes ayant fait référence à cet élément soulignent majoritairement (6/8) l’importance d’obtenir des contrats à long terme afin d’assurer la rentabilité du navire et, ainsi d’amoindrir les risques financiers des transporteurs : « […] le facteur principal c’est l’habilité à

175 Traduction libre de l’anglais provenant de l’entretien avec Canartic, filiale de Fednav Group : « […] to us you know, to the end, it’s the user who pay ».

obtenir des contrats à long terme pour payer l’équipement »176. Cette tendance se veut exacerbée au niveau des tankers (4 mentions), notamment en ce qui a trait aux transporteurs de GPL et GNL, ces navires étant souvent plus onéreux à l’achat que les vraquiers : « […] ce type de navire est très, très dispendieux; donc vous devez avoir un bon contrat pour les construire »177.

Il importe également de s’attarder sur les compagnies (2/8) pour lesquelles les contrats à long terme ne sont pas nécessaires. L’entreprise Knutsen AOS Shipping considère d’abord le type de marché : « Les navires de GNL sont sur l’affrètement à temps à long terme, les tankers pour les produits pétroliers et chimiques sont, pour le moment, sur de l’affrètement à temps à court terme ou sur le marché à voyage unique. Ça varie, mais ça n’a pas d’importance lorsqu’on se demande si on emprunte les routes nordiques ou pas ». Le discours de cette entreprise est directement conséquent avec leur approche globale de la situation, compte tenu du fait qu’elle possède déjà une expérience en zone englacée et, par conséquent, qu’elle ne considère pas, comme il a été mentionné précédemment, l’environnement glaciel comme une barrière à l’entrée sur le marché arctique; l’influence étatique russe et l’absence de demande pour cette région, sujets qui seront approfondis ultérieurement, représentent davantage un handicap à ce niveau.

Pour la seconde entreprise, Maritramp shipping services, « […] ça peut être des voyages uniques [… les frais variables] tombent dans les dépenses […] la logistique est là, les options sont là, c’est juste une question de paiement à la fin de la journée »178. Pour ce transporteur, cela fait donc directement référence à la capacité de paiement des clients potentiels telle que vue précédemment; si ces derniers ont la capacité de payer les frais encourus, rien n’empêcherait une compagnie comme Maritramp shipping services d’effectuer un voyage dans la zone arctique. Cependant, il ne s’agit pas d’une approche qui vise réellement l’intégration et le développement du marché arctique, mais davantage à répondre à une demande unique, à un spot voyage.

Sans abonder spécifiquement dans le même sens que Maritramp shipping services, plusieurs entreprises mentionnent les taux de fret comme élément d’influence central à l’intégration au marché arctique (6 mentions), et ce, afin de couvrir les frais encourus. Incidemment, les compagnies

176 Traduction libre de l’anglais provenant de l’entretien avec Northern transportation Company Ltd. (NTCL) : « […] the main factor is the ability to get long-term contracts to pay for the equipment ».

177 Traduction libre de l’anglais provenant de l’entretien avec Hoëgh GNL, filiale de Hoëgh : « […] those kinds of ships are very, very expensive, so you need a good contract at the bottom to built them ».

178 Traduction libre de l’anglais provenant de l’entretien avec Maritramp shipping services : « […] it can be spot voyages [... variable costs] it’s in the expenses [...] the logistics are there, the options are there, it’s just a matter of payment at the end of the day ».

qui sont déjà positionnées sur ce type de marché possèdent majoritairement l’expertise et l’équipement nécessaire à la navigation en zone englacée et, conséquemment, peuvent amortir leur frais sur une période plus importante.

Il se dessine ainsi un tableau de plus en plus précis du profil des compagnies étant favorables, voire même favorisées, en ce qui concerne la navigation commerciale dans l’Arctique; alors que l’intégration des éléments propres à chacune des compagnies permet de mieux saisir les nuances dans l’approche face à la navigation arctique. Ainsi, les Influences internes sont le reflet de l’identité des entreprises qui, combinées aux autres facteurs d’attraction et de répulsion, permettent aux décideurs d’établir des stratégies en fonction de leur environnement.