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Indice Ҟa et directionalité d oxydation : Des simplifications d échelle

5.3 B ILAN GLOBAL

4.2.2 Indice Ҟa et directionalité d oxydation : Des simplifications d échelle

4.2.2.1. De la molécule à l organisme et à l écosystème

Nous avons vu que la valeur de l information est corrélée à la complexité, à la rareté et à l entropie négative, et donc à la distance à l équilibre, et que cela ne dépend pas de la quantité d information.

Nous avons pu mettre en relief un principe de directionalité de réduction qui semble traverser toute la Biosphère depuis les temps les plus reculés, et qui vérifie le premier principe biogéochimique de Vernadsky.

Mais qu en est-il de la seconde directionalité, d oxydation, relative à l intensification énergétique par la respiration ?

Nous revenons à l essence des travaux de Prigogine 8) sur les structures dissipatives. La directionalité d oxydation serait marquée par une propension continue des organismes, en partant toujours des autotrophes, mais en continuant cette fois dans la chaîne hétérotrophe de l Ecosphère, à optimiser, au long de l évolution des espèces, leur niveau d exergie interne par leur production d entropie. Ceci concernant tous types de structures dissipatives, et donc tout aussi bien les organismes individuels que leurs réseaux au sein des cycles biotiques.

Les travaux de Zotin (1978, 1984) sur la thermodynamique des processus biologiques (qui s inscrivent dans la continuité de ceux de Sewertzoff et de Prigogine), ont particulièrement vérifié ce processus d intensification de la dissipation et des capacités respiratoires des hétérotrophes au long de l évolution espèces (figure 28).

Mais comment maintenant « en rendre compte » au moyen de l indice Ҟa ?

4.2.2.1.1 Complexification métabolique et changement d échelle

Nous observions jusqu ici les choses à l échelle de la molécule ou du tissu cellulaire.

Mais en passant de la réduction à l oxydation, la seule observation d un arbre montre que nous passons de tissus cellulaires de stockage relativement homogènes (tiges, troncs, branches et racines), qualifiables et différentiables par leur densité énergétique (MJ/kg ou dm3 de cellulose,

bois,…)40, à des tissus de croissance et de reproduction (feuilles, fleurs, fruits, graines, de toutes

espèces) de plus en plus complexes et diversifiés ; et il devient rapidement impossible d établir à cette échelle une synthèse significative dun état caractérisant la directionalité énergétique de la chaîne d oxydation ; état qui doit forcément pouvoir prendre en compte de multiples tissus de multiples espèces d organismes. Ceci d autant que l humidité intervient de plus en plus au long de cette chaîne.

Et ceci sans même avoir pris en compte les hétérotrophes ; car quand la réduction, au seul sens de la capacité à réduire le gaz carbonique et l eau en molécules de glucose, ne concerne que les autotrophes, l oxydation/respiration concerne maintenant toute la chaîne trophique et introduit de fait la dimension de l évolution des espèces hétérotrophes, dans leur capacité métabolique à intensifier leur énergie interne. Or la complexité des composants et des échanges métaboliques y devient de plus en plus intense jusqu à devenir incommensurable.

En passant de la directionalité de réduction à la directionalité d oxydation, nous traversons en fait cette barrière fondamentale qui il y a environ , milliards d années a séparé la Biosphère de l Ecosphère émergente, en distinguant les eucaryotes des procaryotes, et plus encore les eucaryotes autotrophes des hétérotrophes (figure 24).

40 On verra notamment le rapport de Doat (1977), sur Le pouvoir calorifique des bois tropicaux. Toutes les espèces

tropicales « de bois » sont différentiées par leur « pouvoir calorifique supérieur (pcs) », assimilable à leur contenu en énergie libre, mesuré en MJ/dm . C est à dire par leur « densité énergétique » à volume constant.

Barrière qui introduit le second principe de Vernadsky, et avec lui un processus d intensification énergétique qui passe de la croissance réductive des masses de carbone dans la Biosphère « et » l Ecosphère distance à l équilibre planétaire , à un processus d intensification énergétique qui passe par la complexification des espèces au sein de la seule Ecosphère distance à l équilibre des organismes et écosystèmes).

Ayant changé d échelle d observation du vivant, tout comme nous sommes passés des procaryotes aux eucaryotes, comment dès lors représenter et surtout mesurer cette différence d espèces au long d une même directionalité d oxydation ?

4.2.2.1.2 Les « CHL & GPL » : Une obligatoire simplification des mesures

Les agronomes et spécialistes de l alimentation, obligés de passer des sciences fondamentales aux sciences appliquées, ont été depuis bien longtemps confrontés à une telle problématique. Là ou Zotin et Jørgensen ont mis au point des protocoles de mesure du niveau d oxydation des organismes très complexes à mettre en œuvre, ces agronomes ont dû trouver pour leur part des solutions simples, à même de différentier qualitativement, par des quantités facilement mesurables, la grande variété des espèces d organismes de la chaîne agricole et alimentaire. Ils ont alors élaboré, pour les écosystèmes « sous contrôle économique » (sylviculture, pêche, agriculture, … , depuis les autotrophes jusqu aux hétérotrophes, des tables de valeur fondées notamment sur la composition des organismes et espèces en matières carbonées et azotés. Et parmi lesquelles nous trouverons la composition globale en : matière sèche, matière organique, matières azotées totales, matières protéiques digestibles, matières grasses, cellulose brute, etc. (Soltner, 1978).

Cela représente, certes, une « simplification », car ils positionnent ainsi sur une même échelle de comparaison, des molécules chimio-organiques simples et homogènes, comme la cellulose, et des tissus organiques très complexes, participant d une observation à l échelle d organismes entiers, comme les matières protéiques digestibles.

Mais qui donc fera les équations stœchiométriques vérifiant les lois de conservation de la masse et de l énergie pour mesurer l exergie de telles matières protéiques ?

Car on ne saurait les déduire des travaux fondamentaux sur l exergie, aussi précis qu ils soient, comme ceux de Szargut, Valero et autres (2005) et de Valero (2008). Ces auteurs ne se sont absolument pas risqués à un tel exercice, restreignant leurs calculs aux seuls molécules chimiques et à leurs composés, comme l atmosphère et l eau de mer.

C est comme si nous voulions traduire des transformations bien plus complexes que celles de la figure 19 en équations aussi précises que celles du tableau 10.

Ce fut ainsi une simplification d échelle, mais qui s avéra obligatoire et incontournable. Et comme elle « fonctionne » ainsi depuis des décennies à l échelle entière de la planète économique, en ayant été éprouvée par des millions d agronomes, de techniciens agricoles et d agriculteurs/éleveurs, c est bien la preuve de sa justesse et de son « utilité ».

Et dans tous les cas une simplification qui n a rien à envier à cette simplification dont Jørgensen et ses partenaires firent usage en considérant que (paragraphe 4.1.3) : « … des organismes plus évolués ou plus élémentaires ont approximativement la même stœchiométrie ; ainsi leur exergie sera égale, ce qui est en contradiction avec le contenu en information de l exergie. »

Car elle a au final a un grand avantage : elle nous permet de traduire directement la composition en glucides, protides et lipides des différents organismes/aliments, en niveau d exergie ce que nous avons nommé « exergie-GPL », cf. tableaux 7 à 9), ce qui nous fournit une « densité énergétique » facilement mesurable et bien étalonnée depuis des décennies.

Elle rend du coup parfaitement simple et faisable la différentiation des organismes par leur niveau d énergie et, sauf à en déduire un différentiel de complexité/distance-à-l équilibre,

devrait nous permettre de vérifier le réalisme d une conjugaison de l indice Ҟa avec une énergie à l échelle des organismes et de leurs réseaux.

Entre deux simplifications nécessaires, nous avons donc retenu la plus simple et utile.

Car nous n avons point la prétention « scientifique » de différentier les espèces jusqu à l homme du singe) par un niveau exergétique, comme ont cherché à le faire par l ADN les biologistes des années 50 ; mais de rendre la « qualification différentielle » des écosystèmes aussi simple à mettre en œuvre et « utile » que les outils mis au point par les agronomes, nutritionnistes et … énergéticiens, au long des décennies, dans leur pratique quotidienne de la matière agricole et économique.

Ce qui nous pousse à passer du scientifique au technique, afin notamment de permettre, le plus simplement et justement possible, les « bilans écologiques » qui s imposent à l ensemble d une économie désormais confrontée aux dramatiques effets environnementaux de ses prétentions de domination sur la nature.

Nous ne mesurerons donc plus une quantité (ou poids) d information du génome corrigée (facteur ), mais la simple qualité de cette information, à travers les produits (GPL notamment) et résultats obtenus en termes d intensification énergétique à l intérieur d un écosystème. Pour peu que nous démontrions que cela, aussi, « fonctionne ».

Quelle que soit la masse de l information, nous ne mesurerons ainsi la complexité/biodiversité d un organisme ou écosystème, que dans sa capacité à générer une intensité énergétique dans l étendue d une échelle de à qui peut compter des milliards de subdivisions) engendrant une plus ou moins grande distance à l équilibre.

L indice Ҟa n a pas vocation à « mesurer » (quoique) la biodiversité, mais à en « rend compte » ! Tout comme la spécificité de Bonsack (1961) ne mesure pas une quantité d information, mais rend compte de sa valeur.

La biodiversité n est pas une masse, mais une intensité, ce qui nous ramène aux grandeurs extensives et intensives de la thermodynamique (paragraphe 1.2.1.2).

La seule différence entre une molécule, un ensemble de cellules ou un écosystème naturel deviendra alors leur masse énergétique (variable extensive) conjuguée à leur distance à l équilibre (variable intensive), qui nous donnera cette fameuse énergie structurée par de l information qualitative , que nous pourrons nommer une « complexité énergétique ».

Les comparaisons entre ensembles ou communautés se feront alors au seul niveau de l échelle observée, en ramenant la complexité énergétique totale à l unité de masse.

4.2.2.1.3 Indice Ҟa et « exergie CHL-GPL » des organismes et écosystèmes

Cest à l échelle d observation des organismes autonomes au sein de leur écosystème, que Jørgensen et ses partenaires ont mis au point le facteur , supposé conjugable avec une énergie. Cest à cette même échelle que nous allons tenter de vérifier l utilisation des GPL pour mesurer l indice Ҟa d un écosystème, et sa conjugaison avec son exergie globale.

La question est ici de savoir si l exergie-GPL spécifique à quelques organismes est suffisante à les différentier, et à nous fournir ainsi un indice d information de l écosystème mesurable au moyen de l indice Ҟa, qui serait comparable avec le même indice obtenu via le facteur .

Pour pouvoir établir cette comparaison, nous avons retenu ici un ensemble de données de mesure d un écosystème marin (grandeur réelle) fournies par Jørgensen et ses partenaires. Elles proviennent de l écosystème marin de l estuaire de Mondego Portugal , o‘ Jørgensen et ses partenaires ont effectué de nombreuses études comparatives dans les années 2000.

4.3 Distance à l équilibre thermodynamique d un écosystème : Etude de cas

4.3.1 Données de référence : Communautés benthiques de l estuaire de Mondego