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Impact de la saisonnalité sur les reconstitutions de température

Matériels et Méthodes : du signal isotopique des coccolithes aux reconstitutions de températures

IV. 4). Bien que comprenant des coccolithes ces fractions ne seront pas interprétées en

1. Biais possibles sur les reconstitutions de température et de pCO 2 à partir de la géochimie des coccolithes

1.2. Impact de la saisonnalité sur les reconstitutions de température

δes températures proposées dans cette thèse sont basées sur l’hypothèse d’une production des coccolithes répartie de manière homogène sur l’ensemble de l’année et représentent donc, comme les valeurs proposées par les modélisations, des moyennes annuelles pour la région considérée. Toutefois, si la température des eaux de surface varie significativement au cours d’une année, la saisonnalité de la production des coccolithes peut alors impacter les températures reconstituées à partir de notre marqueur. La température estimée sera ainsi plus chaude que la moyenne annuelle réelle si la production des coccolithes a lieu en été. Inversement les températures seront biaisées vers les températures froides si la production a lieu majoritairement en en hiver.

δ'étude d’échantillons d’eaux de mer, de pièges à sédiment ou d’images sattelites a montrés que dans l’Océan Atlantique la production actuelle des coccolithes n’est pas constante au cours de l’année selon les espèces et les provinces biogéographiques (Okada et McIntyre, 1979; Holligan et al., 1983; Ziveri et al., 1995) (Figure V.4). En effet si la production de C. pelagicus est cyclique pour la province subarctique avec une production à la saison chaude, au niveau des autres provinces géographique la production n’est pas cyclique ou alors les enregistrements disponibles ont été réalisés sur des durées trop courtes pour identifier une cyclicité annuelle de production (Figure V.4). A titre d’exemple aux basses latitudes une seule année ou moins est documentée dans l’étude de Okada et McIntyre (1979).

Ces résultats fragmentaires ne permettent donc pas de trancher clairement sur une saison préférentielle de production des assemblages pour ces latitudes. Même si la production de C. pelagicus est actuellement estivale aux hautes latitudes, cette espèce est cantonnée à ces provinces froides depuis 2,74 Ma seulement (Sato et al., 2004) et était présente à toutes les latitudes au Paléogène. Il est donc impossible de transposer la saisonnalité actuelle certainement contrôlée par les températures froides de l’Océan Arctique à notre période d'étude.

En conclusion selon le site étudié la distribution saisonnière de la production de coccolithophoridés peut varier et les données disponibles dans la bibliographie ne permettent pas de dégager une réponse claire et surtout transposable pour le Paléogène aux taxons

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Figure V.4 : (A) Carte des sites étudiés dans l’étude d’Okada et McIntyre (1979) et répartition annuelle de l'abondance relative des principales espèces de coccolithophoridés au site Bravo (B) et au site Charlie (C) (Okada et McIntyre, 1979). La production des C. pelagicus se fait actuellement de manière préférentielle à la période chaude aux hautes latitudes. Aux plus basses latitudes aucune cyclicité claire ne se dégage.

Afin de tester quand même l’impact de la saisonnalité de production des coccolithes sur nos SSTs, il est possible d'utiliser les différentiels de températures actuels entre les moyennes annuelles locales et les températures maximales et minimales à chaque site qui sont accessibles grâce aux bases de données océanographiques (World Ocean Atlas 2013) (Tableau V.1). En considérant une saisonnalité de température identique entre le l’actuel et le Paléogène les différentiels de températures (ΔT°CMoyenne-Extrème) pourront ensuite être appliqués à nos échantillons fossiles. Cette approche purement actualiste maximise l'impact possible de la saisonnalité puisque les différences de température entre saisons chaudes et froides pendant les périodes greenhouse était plus faible qu'à l'actuel (Pagani et al., 2014).

196 Sites DSDP 549 ODP 925/929 ODP 865 DSDP 516 ODP 511 ODP 689/690 Zone géographique Océan Atlantique Nord Océan Atlantique équatorial Océan Pacifique équatorial Océan Atlantique subtropical Océan Atlantique Sud Partie australe de l’Océan Atlantique SST moyenne annuelle 13,5°C 27,4 °C 26,8°C 21,1°C 4,7 °C -0,4°C SST saison froide 11,1°C 26,4 °C 25,9°C 19,4 °C 2,3°C -2°C ΔTmoyenne-froid 2,4°C 1°C 0,9°C 1,7°C 2,4°C 0,6°C SST saison chaude 16,6°C 27,8°C 28°C 24,4°C 5,7°C 0,6°C ΔTmoyenne-chaud -3,1°C -0,4°C -1,2°C -3,3°C -1°C -0,4°C Tableau V.1 : Valeurs de SSTs moyenne, de la saison froide et de la saison chaude aux différents sites d’étude (Données issues de : Ocean Data View, http://odv.awi.de). δes ΔT°CMoyenne-Extrème

représente le décalage à la moyenne annuelle.

A partir de ces températures et en considérant qu'une part de la production est faite pendant la saison chaude (ou froide), il est possible de recalculer la moyenne annuelle théorique pour chaque site. Six cas ont alors été envisagés avec X = le pourcentage de la production qui a lieu au cours des différents extrêmes thermiques. La température moyenne annuelle est donnée par l'équation : TMoyenne = Tfraction + X *(ΔTMoyenne-Extrème)

 Cas (1) : X = 100 % de la production a lieu au cours de la saison chaude  Cas (2) : X = 100 % de la production a lieu au cours de la saison froide

 Cas (3) : X = 60 % de la production a lieu au cours de la saison chaude et le reste au cours de l’année

 Cas (4) : X = 20 % de la production a lieu au cours de la saison chaude et le reste au cours de l’année

 Cas (5) : X = 60 % de la production a lieu au cours de la saison froide et le reste au cours de l’année

 Cas (6) : X = 20 % de la production a lieu au cours de la saison froide et le reste au cours de l’année

197 Actuellement le différentiel de température (ΔT°CMoyenne-Extrème) étant plus important aux moyennes latitudes, c’est aux sites DSDP 549 et 516 que la saisonnalité a la plus grande influence sur nos estimations de SSTs. Une différence d’environ 5°C y est observée entre les deux cas extrêmes (1) et (2). A l’inverse l’impact de la saisonnalité est faible aux sites de basses latitudes (ODP 925/929 et 865) avec un écart maximum de 2,4°C entre les cas (1) et (2) (Figure

V.5). De même aux hautes latitudes sud (Sites ODP 511 et 689/690) l’écart de température reconstitué entre températures maximum est minium est très faible. Il est également à noter que ces différentiels de température représentent des valeurs maximales possibles pour le Paléogène. En effet la saisonnalité climatique était plus faible pendant les périodes greenhouse

(Pagani et al., 2014), ainsi les différences de température entre saisons chaudes et froides était réduites. De plus l’impact de la saisonnalité étant particulièrement faible aux sites ODP 925/929 et ODP 689/690 (Figure V.5), ce phénomène n’impactera pas la reconstitution du gradient latitudinal de température pour le Paléogène

Ainsi même si la production des coccolithes peut être marquée par une saisonnalité importante et impossible à déterminer pour le Paléogène, l'impact maximal déterminé par une approche actualiste reste mineur sur l'enregistrement des températures proposé dans ce travail. On peut donc considérer que la production des assemblages de coccolithes est constante au cours de l’année sur tout le Paléogène. δes températures présentées pourront alors être directement interprétées comme des valeurs moyennes annuelles de SSTs régionales.

Figure V.5 : Impact de la saisonnalité sur les températures des eaux de surface reconstituées aux différents sites étudiés. Plusieurs cas ont été testés à chaque site : une production uniquement estivale ou hivernale, ou une production annuelle avec un pic de production supplémentaire de 20% ou 60% en été ou en hiver. Les températures corrigées ne sont pas très différentes de celles estimées initialement en prenant en compte une production annuelle constante. Les sites de moyennes latitudes à la saisonnalité actuelle plus importante sont plus impactés par la prise en compte de ce biais sur les températures.