• Aucun résultat trouvé

PARTIE IV ARCHITECTURE DES MILIEUX POREUX VISUALISATION ET

IV 3.2 Imagerie 3D : La microtomographie RX

Grâce à une bonne connaissance des aspects quantitatifs de l'interaction du rayonnement X avec la matière, la tomographie X est l'une des techniques d'imagerie les plus répandues dans le monde scientifique. Les développements techniques et instrumentaux réalisés dans le domaine médical ont profité à l'industrie pétrolière qui se sert de tomographes médicaux pour caractériser les milieux hétérogènes (Ferreira de Paiva, 1995). Les premières études portent sur des mesures de porosité et de densité, la caractérisation des milieux hétérogènes, la visualisation des déplacements de phases fluides au sein d'une carotte (Wellington et Vinegar, 1987). La trop faible résolution (250 um) des tomographes rend cette technique inapplicable à l'étude de nos faciès. Mais depuis le début des années 1990, une nouvelle technique de visualisation dérivée encore une fois du domaine médical est appliquée au milieu poreux : la microtomographie à source RX laboratoire offre de nombreuses possibilités depuis que sa résolution approche la taille des composants des roches (Van Geet et al. , 2001) mais reste insuffisante en vue d'une observation quantitative du milieu poreux. Seule la microtomographie ayant une source RX synchrotron atteint désormais le micromètre, résolution nécessaire afin de caractériser des roches telles que les grès (Fredrich et al., 1993 ). D'après Co ker et al.

(1996) la résolution va encore s'affiner dans les années à venir mais les principaux inconvénients restent l'accès limité ainsi que les délais d'attente sur ce type de source RX.

Van Geet et al. (2000, 2001) dans de nombreux articles liés à la microtomographie développent les problèmes liés à l'acquisition d'images sur les milieux poreux (bruit de fond, résolution, nature des minéraux, ... ). Ils s'intéressent particulièrement au calcul de porosités globales de l'échantillon et à la reconnaissance de phases minérales en fonction des informations obtenues sur la densité. Connaissant celle d'un minéral et celle obtenue par microtomographie RX (plus faible) ils en déduisent le volume de l'espace poreux. Cependant, ils ne s'intéressent pas directement à la quantification précise du milieu poreux de manière pétrophysique. Le rapport de Dunsmuir (2002) donne une marche à suivre en vue de la quantification du milieu poreux à partir de 1' acquisition en microtomographie RX à source synchrotron (SNLS). C'est une méthode qui ne peut s'appliquer à l'industrie pour des raisons évidentes de logistique. De plus chaque équipe de recherche développe son propre logiciel d'acquisition et de traitement d'images. En effet, de nombreux scientifiques tentent à partir de ces blocs 3D de caractériser les facteurs clefs de la topologie du milieu poreux. Cependant dans la majorité des articles cités seul· un unique type de lithologie a été étudié, les grès, et dans ce type de lithologie les principales études portent sur deux faciès : les grès de Fontainebleau et les grès de Berea.

Aucune étude n'a été recensée sur les carbonates du fait des complexités liées à leur hétérogénéité.

ET DE LA MOUILLABILITE SUR LES ECOULEMENTS DIPHASIQUES DANS LES RESERVOIRS PETROLIERS·

L'acquisition des images microtomographiques s'est effectuée à l'ESRF (European Synchrotron Radiation Facility) sur la ligne 10_19*. La microtomographie RX consiste en un enregistrement d'un nombre défini de projections d'un objet selon différents angles de vue. A l'aide d'un algorithme adapté, une image 3D est reconstruite à partir des projections initiales (Al-Raoush, 2002). L'intensité du flux de photons ainsi que son homogénéité permettent d'obtenir des images d'excellente qualité pouvant atteindre 0.7 um de résolution (seulement deux autres synchrotrons, aux USA et au Japon, permettent actuellement d'atteindre les mêmes résolutions). Afin de conserver un volume élémentaire représentatif une résolution de 4.9 um est utilisée pour le faciès R4 (diamètre de 1' échantillon = 5mm) et une résolution de 0.7 um pour le faciès Orgon (diamètre de l'échantillon=2mm) plus homogène.

Dans le cadre de notre étude, l'analyse d'images 3D a été effectuée uniquement sur les faciès R4 et Orgon, c'est à dire sur un faciès présentant un double réseau macro et microporeux et sur un faciès présentant un unique réseau microporeux. Les très faibles dispersions des résultats entre les blocs d'un même faciès (2 à 3) permettent de s'assurer d'une représentativité optimale au niveau du volume de matière choisi.

*http://www.esrf.fr/exp facilities/ID 19/homepage/id 19homepage.html

IV 3.2.1

Extraction à partir d'une image microtomographique

Les traitements majeurs effectués sur l'image initiale à partir du logiciel 3DMA développé par Brent Lindquist sont succintement développés (1996, 1998). Afin d'extraire la maximum d'informations nécessaires à la caractérisation du milieu poreux, il est nécessaire de segmenter l'architecture de ce dernier en ensembles cohérents et homogènes. Généralement, les ingénieurs conceptualisent donc un milieu poreux en un réseau défini comme un assemblage de pores (zone de stockage) reliés par des connexions (perméabilité) selon une connectivité donnée (Z). Utilisée depuis les années 50 (Fa tt, 1951) dans les premières simulations cette vision schématique, simplifiée mais quantifiée semble rendre compte convenablement des contraintes liées à la morphologie. La difficulté majeure est donc de transformer, ou de dégrader, l'information originelle fournie par un ensemble de voxels en un réseau quantifié, composé de pores et seuils de pores représentatif du milieu originel : alléger les calculs tout en préservant l'information minimale nécessaire à la caractérisation de l'objet. Il apparaît que le code source 3DMA développé par Brent Lindquist fournit des algorithmes relatifs à la présente recherche permettant une analyse statistique de la distribution géométrique des phases présentes au sein d'une image tridimensionnelle. Les trois sous-chapitres suivants vont décrire les étapes majeures nécessaires à l'obtention de cette carte descriptive de nos milieux poreux. Pour tout complément d'information il faudra se référer au manuel d'utilisateur* (Lindquist et al., 1999).

*http://www.ams.sunysb.edu/~lindquis/3dma/3dma rock/3dma rock.html

Segmentation par kriegeage

Une image est composée d'un ensemble de pixels (2D) ou de voxels (3D). Mais contrairement à un simple seuillage à partir d'une certaine teinte de gris permettant de distinguer la phase solide de la phase vide nous utiliserons un seuillage par kriegeage. En effet, les images tomographiques sont souvent extrêmement bruitées et il nous faut différencier le bruit induit par la technique d'acquisition et celui d'une variation de densité réelle au sein du milieu poreux. La méthode développée par Brent Lindquist consiste à donner un niveau de seuillage pour la phase solide et un autre pour la phase vide.

L'intervalle entre ces deux limites est soumis au kriegeage comparant le voxel analysé à ses voisins et lui associant la valeur la plus proche par rapport à la moyenne de ses voisins. A la fin de cette étape, l'image est binarisée, les voxels de la phase solide s'attribuant la valeur 1 et ceux de la phase vide la valeur 0 (Fig. 34). L'image est donc séparée en régions homogènes. La segmentation par kriegeage apparaît comme le plus performant des 5 algorithmes de 3DMA dévoués à la segmentation. Les choix de l'utilisateur sont principalement liés aux deux valeurs de seuillage ainsi qu'au choix de la méthode

-CARBONATES MICROPOREUX: INFLUENCE DE L'ARCHITECTURE DU MILIEU POREUX

d'estimation de la fonction de la covariance spatiale liée au kriegeage. La Fig. 34 révèle l'excellente qualité des images segmentées obtenues. Une ultime fonction est utilisée afin d'éliminer les voxels (pores et grains) isolés du reste du réseau.

Fig. 34: Segmentation par kriegeage sur une image microtomographique bruitée issue du faciès R4 (image de gauche). L'image centrale représente la zone où le kriegeage est appliqué. L'image de droite est l'imagefinale

binarisée.

Squelettisation filaire ou axe médian

L'analyse de corps tridimensionnels est une entreprise souvent ardue du fait de la complexité des morphologies présentes. Les algorithmes de squelettisation filaire (ou axe médian) fournissent une représentation du même objet en une seule dimension et de ce fait donc plus aisée à analyser (Lindquist et aL, 1996, 1999). L'information est simplifiée selon un algorithme dit de "feu de forêt"

(burning algorithm), où le squelette correspond à l'ensemble des points où se rencontrent les fronts de feu se propageant à une vitesse uniforme depuis les contours de l'ensemble (Fig. 35 et Fig. 36). Bien que l'information soit fortement dégradée entre l'objet initial et le squelette, ces derniers gardent un lien étroit au niveau des propriétés géométriques. Une description précise de la squelettisation est fournie par Lee et aL (1994), Lindquist et aL (1999), Al-Raoush (2002). L'algorithme calculant l'axe médian a été légèrement modifié par rapport à 1' original développé par Lee et aL (1994 ). Ces modifications concernent principalement les problèmes liés aux bordures du volume analysé spécifiques à un milieu poreux ainsi qu'à la séquence d'érosion choisie lors de l'analyse. En effet, la topologie de l'objet devrait idéalement être la même lorsque celui-ci est présenté sous la forme de son axe médian ou sous sa forme originelle. Les choix de l'utilisateur sont liés à la connectivité entre les voxels (6 ou 24), ainsi qu'aux limites et bordures du volume analysé. Un second traitement permet d'élaguer le squelette par élimination des bras morts, redondants ou modifiés par la présence de la frontière du volume étudié.

Fig. 35: Exemple représentant le squelette en deux dimensions (traits pointillés) d'un rectangle.

ET DE LA MOUILLAB!LITE SUR LES ECOULEMENTS D!PHAS!QUES DANS LES RESERVOIRS

PETROLIERS-Fig 36: Représentation graphique du squelette d'un sous- bloc 3D du faciès R4.

Labellisation des pores et des seuils de pores

A partir de l'axe médian, l'algorithme utilisé au sein du logiciel3DMA fut développé par Ventkaragan et aL (2000) afin de déterminer la morphologie des pores, des canaux les reliant ainsi que des relations existantes entre pores, seuils de pores, ____ L'enjeu majeur de l'algorithme est donc de séparer le milieu poreux en un ensemble de pores reliés par des seuils. Pour chaque chenal, la section présentant la surface minimale connectant deux nœuds (points de liaisons du squelette) est déterminée comme un seuil de pore (Fig. 37). Le pore est donc spatialement limité par un nombre défini de seuils égal à sa connectivité. A partir de cette étape, une dilatation (croissance) du squelette définissant le pore précédemment délimité va permettre de quantifier l'ensemble de ses caractéristiques morphologiques.

L'utilisateur doit décider des types ou des limites de longueur d'axe ou de bras sur lesquels doivent s'effectuer la labellisation. En effet, cette dernière n'a pas réellement de sens sur des distances de quelques voxels ou sur un bras s'approchant des limites du volume étudié. Des exemples de pores isolés par l'algorithme de labellisation sont proposés dans les Fig. 52 et Fig. 53 pour le faciès R4.

Fig 3 7 : localisation des minima entre 4 sphères individualisant un pore et lui associant 4 seuils d'entrée.

IV 3.2.2 Analyse statistique de la distribution géométrique des pores et de leur environnement

Après avoir discrétisé le milieu poreux en un assemblage de pores connectés entre eux par des seuils il est désormais possible d'en extraire des facteurs descriptifs. Ces derniers vont être traités de la façon suivante afin d'offrir une carte d'identité descriptive du milieu poreux adaptée aux besoins de la pétrophysique : nous présenterons les résultats sous forme de courbes de distribution (x) et par la moyenne associée (x). Les éléments composant le milieu poreux, c'est-à-dire les pores, sont décrits selon les facteurs descriptifs suivants (Fig. 38) :

- CARBONATES MICROPOREUX : INFLUENCE DEL' ARCHITECTURE DU MILIEU POREUX

..,.le volume (V, V) correspondant au nombre de voxels composant le pore multiplié par le volume d'un voxel. V est dépendant de la résolution de l'image .

..,.le rayon équivalent (rp, rP) défini comme le rayon d'une sphère de volume V équivalent. Le facteur rp permet donc de comparer des pores de différentes géométries à partir de leur volume initial.

..,.les surfaces de ses sections minimales le reliant à d'autres pores (A, A ). Définies lors de la labellisation, les surfaces minimales sont obtenues par croissance uniforme du squelette jusqu'au premier point de contact avec la surface du milieu poreux .

..,.le rayon équivalent des seuils de pores (rsp, ~P ). Il correspond au rayon d'un disque de surface équivalente à la section A.

Nous ajouterons une description prenant en compte les facteurs environnementaux liant chaque pore avec ses voisins (Fig. 38):

..,.la connectivité (Z, Z ), correspondant au nombre de liaisons reliant chaque centre de pores . ..,.la longueur de canaux reliant chaque centre de pores (L, L )

..,.la tortuosité (T, T ), rapport de la longueur de l'axe filaire entre deux centres de pores sur la distance minimale linéaire.

L'évaluation et la précision de l'ensemble de ces facteurs sont soumises à la résolution de l'image. Il apparaît clairement que si l'image 3D ne représente pas entièrement le réseau poreux du fait du manque de résolution, les facteurs morphologiques extraits en seront modifiés. La connectivité en particulier ne pourra être que sous-estimée (cas d'Orgon).

La source:

uri pore et ses connexions.

Facteurs extraits sur chaque pore

Caractéristiques internes du pore

Volume (V)

Rayon de pore équivalent (rp)

Facteurs extraits à partir des relations géométriques entre les pores La source:

uri milieu poreux associant pores, seuils de

pores et le squelette.

Camctéristiques environnementales du pore Surface du seuil de pore (A)

Rayon du seuil de pore équivalent (rsp) Connectivité (Z)

Longueur des canaux (L) Tortuosité (T=L /1)

A, 'sp

Fig. 38: Schéma récapitulatif des différents facteurs morphologiques extraits de l'analyse 3D.

ET DE LA MOUILLABILITE SUR LES ECOULEMENTS DIPHASJQUES DANS LES RESERVOIRS PETROLIERS

-Les résultats de l'extraction des facteurs descriptifs sont présentés sous la forme de courbes de distribution résumées en plusieurs tableaux comprenant les caractéristiques principales suivantes:

~ Le coefficient de Skewness (S): Il mesure le degré d'asymétrie de la distribution et est défini comme le moment d'ordre trois centré sur le cube de l'écart-type. Si S est égal à 0, la distribution est symétrique. Si S est plus petit que 0, alors la distribution est asymétrique vers la gauche. Si S est plus grand que 0, la distribution est asymétrique vers la droite (Gujarati, 1995).

~ Le coefficient de Kurtosis (K): Il mesure le degré d'aplatissement de la distribution. Il se définit comme le rapport entre le moment d'ordre quatre centré et le carré de la variance. Lorsqu'il est positif, cela indique que la distribution est« pointue». Lorsqu'il est négatif cela signifie que la distribution est relativement aplatie (Gujarati, 1995).