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II B) D’où viennent les inégalités et la vulnérabilité ? Plusieurs professionnels ont données leur point de vue sur les origines de la

vulnérabilité. De ce qui ressort de notre lecture, le contexte est la principale source de facteurs de vulnérabilités évoquée par les professionnels.

La zone d’habitat est pour certains à l’origine d’inégalités. Notamment le fait d’habiter en milieu rural a plusieurs fois été pointé comme source potentiel de vulnérabilité. Les deux exemples ci-dessous évoquent les difficultés induites par la vie en zone rurale :

« C’est vrai qu’ici on rencontre aussi des des, des situations difficiles. Dues à l’éloignement de beaucoup de choses. […] Ben c'est-à-dire que nous on est, j’pense qu’on est bien pourvu en… en j’dirais médecins généralistes, dentistes, euh j’dirais les soins de base. Avec qui enfin on peut communiquer facilement mais dès, dès qu’on rentre dans…quand on a besoin de faire à des spécialistes, je dirais euh ben, ben les centres médico psychologiques, les orthophonistes… » (AT1 07 CCL IS)

Cet infirmier par exemple évoque la difficulté pour les habitants de zones rurales pour consulter des médecins spécialistes et avoir accès aux soins.

« Nous oui la difficulté sur le territoire c’est vraiment euh… C’est vraiment très récurrent. C’est ce problème de transport. Voilà. Oui par exemple si je prends les activités jeunesse ben l’animateur jeunesse pareil. Il se déplace. Il a en fait des jeunes sur euh…sur par exemple quatre cinq communes et c’est lui qui se déplace sur les quatre cinq communes. Les jeunes ne peuvent pas se déplacer et faire vingt kilomètres à chaque fois… » (AT1 08 CSM CEJ)

Dans cet exemple, le coordinateur de centre social souligne la difficulté lié à l’éloignement et la faible concentration de population pour la mise en place de projets.

122 Bien que beaucoup moins évoqué comme source de difficulté, le milieu urbain a aussi été cité comme une source directe de vulnérabilité par un professionnel :

« Les parents qui emmènent leur enfant aux urgences dès qu'il est malade. Certains ont de grosses difficultés à trouver un médecin. En effet, beaucoup refusent d'avoir de nouveaux clients. » (AV1 20 CMS PUE).

Dans cet exemple, malgré la situation en zone urbaine, la question de l’accès aux soins est encore soulevée, comme pouvant poser problèmes pour certaines familles.

Le contexte social a plusieurs fois été mentionné par les professionnels comme lié à la vulnérabilité. Tout d’abord, certains professionnels regrettent une stigmatisation de leur public et le rejet par d’autres dont ils peuvent être victimes. Les trois exemples ci-dessous font ressortir différentes formes de stigmatisation. Le premier est lié à la réputation du quartier dans lequel vivent les enfants. Le second – qui concerne des enfants d’école primaire – et le troisième – qui concerne des jeunes sortis du système scolaire – sont directement liés à leur personne.

« Voilà, beaucoup de racisme, beaucoup de... le fait d'habiter dans ce quartier, ils ont l'impression c'est de la ségrégation encore. "Bon voilà, on est parqués comme des animaux", "Tu viens d'où ? Tu viens des XXX (nom du quartier), ah d'accord, ok, vous êtes des voyous, vous êtes ci, vous êtes ça". Ouais, y'a des espèces de, en fait les préjugés, les à priori, tout, ça les suit, ça les poursuit tout le temps quoi. » (AV1 23 CSB AN)

« Et c'est des enfants qui, il y a beaucoup d'inégalités sociales, des enfants de différents milieux. Donc il y a quand même des enfants qui sont assez facilement stigmatisés. Parce qu'ils sont différents des autres. » (AV1 12 EPB PE)

« Et en plus c’est des jeunes qui sont un peu rejetés ici par la population. » (AT1 16 CG AS)

Le milieu familial est lui aussi souvent évoqué par les différents acteurs comme cause pour la vulnérabilité des enfants et les inégalités dont ils peuvent être victimes36.

36 Dans le discours des différents acteurs, nous soulevons plusieurs fois le rôle des parents comme source

de vulnérabilité pour les enfants, voire comme cause. Notre méthodologie de recueil ne nous a pas fait relever les verbatim en lien avec les relations positives que les professionnels entretiennent avec les parents (qui sont

123 Parmi les exemples ci-dessous, le premier concerne la difficulté qu’ont les parents à assumer leur rôle, le second souligne le rôle d’exemple des parents pour leurs enfants, le troisième indique un regret de la part de l’enseignant d’un manque d’investissement des parents dans la scolarité de leur enfant :

« Au niveau du contexte, on a de plus en plus de familles défaillantes au niveau, qui dysfonctionnent, je ne sais pas trop comment dire, au niveau éducatif. Les parents sont dépassés. […]Voilà c'est vraiment le gros point noir depuis 2, 3 ans. C'est pour ça qu'on oriente des enfants, des jeunes enfants qui n'ont aucun cadre à la maison. Aucun cadre. Et ça, c'est tout les milieux. » (AV1 01 PRE COO)

C’est la génération aussi RMI, donc. Y en a qui n’ont jamais vu leurs parents travailler de leur vie, la valeur travail c’est très loin. Ben le RMI, le RSA, les aides financières ben c’est le quotidien aussi. Justement ces jeunes qui viennent du Nord et de Paris, machin, y en a beaucoup qui sont là-dedans, qui n’ont jamais vu leurs parents travailler, qu’ont une certaine éducation, c’est pas leur faute hein, je veux dire, je les accuse pas. Mais voilà… (AT1 16 CG AS)

« Des parents qui sont... qui suivent pas forcément la scolarité de leurs enfants. Et ça, ça se ressent surtout sur les élèves en difficultés, qu'il faut toujours pousser en avant, enfin les parents n'appuient pas derrière, donc toi tu dois redoubler d'efforts pour ça justement. Euh, tu sens que ces élèves sont quand même, euh, des élèves défavorisés, ça se sent beaucoup. » (AV1 10 EPB PE)

Enfin, un dernier exemple a attiré notre attention. Si il semble difficile de comparer l’importance de cette situation par rapport aux autres situations évoquées par les différents acteurs, nous pouvons reconnaître ici la présence du contexte comme source de vulnérabilité et d’inégalités :

« Y’a des petits qui n’ont pas l’habitude de marcher […] Et ça c’est marrant. On voyait la différence entre les petits parisiens par exemple et les petits euh du coin […] des fils d’agriculteurs ou les gens de la campagne qui ont l’habitude de faire du vélo, de marcher… […] Des petits citadins qui marchent jamais où on va, pour aller d’un

courantes), notamment comme éléments moteurs et de coopération. Par conséquent, si le lecteur a le sentiment en nous lisant que les relations professionnels/familles sont plutôt négatives, c’est plus dû à notre choix de recueil qu’à la réalité du terrain.

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point à un autre, mettre vingt minutes des petits campagnards tu mets à peine dix minutes et pfft t’es arrivé quoi ! »

Quant aux difficultés scolaires évoquées précédemment, certains professionnels de l’éducation nationale les relient avec le contexte de vie de l’enfant. C’est le cas notamment dans les deux exemples ci-dessous :

« Parce que l'élève de SEGPA, officiel, dans lequel on a un élève en difficulté uniquement scolaire, ça n'existe pas. » (AV1 25 CJF PE)

« Et donc nos élèves, ce sont des élèves qui sont en difficulté scolaire et euh… Par contre, on se rend compte, bon ça fait une dizaine d’années que je travaille ici, on se rend compte que…souvent vont, va de paire avec la difficulté scolaire, la difficulté sociale, c’est-à-dire qu’on a beaucoup d’élèves qui sont placés en famille d’accueil, en foyer, qui ont été enlevés de leur famille pour être replacés ailleurs, c’est pas du tout une généralité, mais on se rend compte qu’il y en a quand même beaucoup, une forte proportion dans nos classes. » (AV1 26 CJF PE)

Pour aller un peu plus loin, certains professionnels de l’éducation donnent les raisons des inégalités scolaires comme issues des causes externes. Que se soit en tant que cause d’une culture plus pauvre, ou d’une ouverture culturelle moindre :

« Moi je crois vraiment que tout ce qui est ce contexte justement... (interruption) Non je crois que c'est ce qui est lié au contexte social des gamins qu'on accueille quoi. Donc tout ce qui est ouverture un peu culturelle, tout ce qui est de les amener à se responsabiliser plus. » (AV1 05 CJR CPE)

« […] des enfants qui ont un bagage culturel moins important. » (AV1 11 EPB PED)

Cette répercussion du milieu familial est aussi évoquée en tant que cause pour une moins grande richesse de vocabulaire des élèves. Citons par exemple :

« Ba, sur le plan du niveau scolaire ça se voit, enfin au niveau du vocabulaire par exemple » (AV1 09 EMA PED)