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II – LE TRAFIC DU PORT DANS CE NOUVEAU CONTEXTE

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 176-197)

Comme indiqué plus haut, notre source d’information unique pour suivre année par année le trafic du port de Caen jusqu’à la fin de notre période est constituée par les Bulletins de la Chambre de Commerce de Caen dont nous avons pu disposer à compter de l’année 1877. C’est la raison pour laquelle nos analyses, pour cette période commencent en 1877.

Dans le cas où le bulletin de l’année 1877 rappelle les chiffres pour 1876, nous les citons.

Pour ouvrir ce paragraphe nous reproduisons ci-dessous la situation du bassin Saint-Pierre le 23 juillet 1878. Ce plan, conservé dans le Compte rendu sommaire des travaux de la Chambre de Commerce de Caen permet de se faire une idée de l’encombrement du bassin à cette époque, avec l’importance de la taille de certains navires, représentés à l’échelle. On remarque des amarrages de navires, en double, sur le quai Vendeuvre, comme sur le quai de La Londe.

37 Ibid. p. 160.

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Illustration 15 : Le bassin Saint-Pierre le 23 juillet 187838

Ce plan comporte même le nom des 48 navires stationnés dans le port ce jour-là avec leur tonnage de jauge. En outre les deux voies ferrées du quai Vendeuvre sont indiquées avec les embranchements : celui qui arrive au milieu rejoint la gare par le pont des Abattoirs, l’autre embranchement rejoint le quai de Juillet sur l’Orne. On note aussi les trois docks couverts sur le quai Vendeuvre. Enfin les écluses de la Fonderie, vers le canal et du Rond-Point vers l’Orne sont représentées.

A – Le trafic global du port

Dans le chapitre précédent, nous avons fait ressortir, que durant les années qui suivent l’ouverture du canal de Caen à la mer, le trafic progresse, mais d’une façon limitée, il passe de 169 000 tonnes (en 1859) à 248 100 tonnes (en 1875), soit une progression de 47 %. La situation est différente entre 1875 et 1909 : le trafic passe de 242 700 tonnes (en 1876) à

38 Compte rendu som. trav. CC Caen, 1878, n.p. (la légende du dessin indique la date du 23 juillet 1879, or ce dessin est reproduit dans le bulletin de l’année 1878, il est donc très probable qu’il s’agit du 23 juillet 1878 et non du 23 juillet de l’année suivante).

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812 40039 (en 1909), soit une progression de 335 %. En 1910 Caen occupe le huitième rang parmi les grands ports français, juste après les ports dont le trafic dépasse le million de tonnes 40 devant Sète et Bayonne41.

Le graphique ci-dessous illustre cette progression du trafic sur les 35 années de cette partie. Afin d’en faciliter la lecture, il a été bâti à partir d’une base constituée avec des chif-fres qui retiennent les années de cinq en cinq à compter des « dizaines rondes », on pourra trouver en annexe un tableau du trafic, année par année.

Graphique 8 : Trafic du port de Caen : 1876-1909 (en tonnes)42

39 Toutes ces informations chiffrées sont extraites du Compte rendu som. trav. CC Caen, 1909, p. 119.

40 Les ports de Marseille, Rouen, Bordeaux, Le Havre, Dunkerque, Saint Nazaire et Nantes. L’activité de ces grands ports n’est pas comparable à celle de Caen, Marseille affiche un trafic de 6 400 000 tonnes en 1909, devant Rouen 4 200 000 tonnes. Nantes qui précède Caen affiche un trafic de 1 145 000 tonnes, supérieur de 40 % à celui de Caen, Compte rendu som. trav. CC Caen, Caen, 1911, p. 20.

41 Compte rendu som. trav. CC Caen, 1911, p. 20.

42 Ibid., 1909, p. 119.

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Les courbes des importations et des exportations complètent utilement celle qui repré-sente le trafic global. Les deux graphiques de cette page détaillent le contenu des entrées et des sorties.

Graphique 9 : Trafic importations port de Caen : 1876-1909 (en tonnes)43

Graphique 10 : Trafic exportations port de Caen : 1876-1909 (en tonnes)44

43 Ibid.

44 Ibid.

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Le graphique des entrées fait ressortir leur croissance, sur un trend sensiblement iden-tique à celui du trafic général, et leur dépendance aux importations de houille, on note aussi la tendance à la décroissance des importations de bois, un trafic du port aussi ancien que celui de houille. La situation des sorties marque une même dépendance à un produit unique, le minerai de fer. Comme pour le bois, les envois de produits agricoles stagnent à un niveau faible. Ces constats généraux font l’objet d’une analyse plus détaillée consacrée au contenu du trafic.

B – Le contenu du trafic

Le démarrage des exportations du port, que nous venons de constater, est dû principa-lement au développement, à compter de l’année 1887, des exportations de minerai de fer qui montent en puissance, (elles passent de 600 tonnes en 1887 à 230 000tonnes en 1909).

La photo ci-dessous illustre cette nouvelle activité exportatrice à Caen.

Illustration 16 : Chargement d’un bateau de minerai pour l’Angleterre45

45 Photo du chargement d’un train de minerai pour l’Angleterre, Collection particulière.

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Outre le chargement du minerai dans les sacs à l’arrière-plan gauche, cette photographie avec les wagons sur le quai, montre les voies de chemin de fer installées sur les quais pour la vie économique du port. On apprend également qu’une partie du minerai était destinée à l’Angleterre comme l’indique la légende. Enfin la tenue du douanier qui regarde le charge-ment, sur le devant de la photo, peut laisser supposer qu’elle date de la fin du XIXe siècle ou du début du XXe siècle, à une époque où ce trafic avait pris un certain développement.

L’analyse détaillée, année par année sur la période 1876-1910, des exportations de minerai de fer, montre une activité très erratique. Elles atteignent un bas entre 1884 et 1887, elles sont inférieures à 1 000 tonnes. C’est à compter de l’année 1888 qu’elles démar-rent réellement. La croissance du trafic tient certainement à l’octroi de nouvelles conces-sions (après celle de Saint-Rémy accordée en 1873) à compter de l’année 1884 à Halouze dans l’Orne comme l’écrit la Chambre de Commerce en 1907 « Les minerais ont pris un développement de plus en plus grand, suite à l'ouverture de nouvelles mines qui est venue accroître le trafic du port de Caen »46. L’autre raison tient à la demande de fonte et d’acier qui s’accentue. À titre de comparaison, entre 1891 et 1913 la production de fer en Lorraine française passe de 3 millions de tonnes à 21 millions de tonnes47. Le minerai de fer bas-nor-mand alimente en priorité le port de Rotterdam. Ces expéditions vers la Hollande apparais-sent en 1888 pour seulement 2 183 tonneaux. Dès l’année 1890 elles atteignent 18 550 ton-neaux contre 1 978 tonton-neaux pour l’Angleterre. En 1909, à la fin de notre période, les expor-tations vers Rotterdam atteignent 130 368 tonnes contre 95 300 tonnes pour l’Angleterre via trois ports : Grangemouth (le plus important), Ardrossan en Écosse et Swansea en Angleterre48. En réalité les expéditions vers Rotterdam sont destinées à l’Allemagne comme l’indique Alain Leménorel dans son ouvrage L’impossible révolution industrielle ? Économie et sociologie minières en Basse-Normandie, 1800-1914. Il y explique en détail comment des investisseurs hollandais et français masquent des achats de concession des mines de fer, à la fin du XIXe siècle, par des allemands. Les achats sont effectués par une firme allemande, sous

46 Compte rendu som. trav. CC Caen, 1907, p. 153.

47 René BOUR, « Cent ans d’industrie mosellane. Un siècle de transformations économiques continues ont fait de la Moselle un des plus grands complexes industriels mondiaux », op. cit. p. 42.

48 Comptes rendus sommaires des travaux de la Chambre de Commerce de Caen, 1888, p. 67, 1890, p. 67 et 1909, p. 97-98.

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raison sociale hollandaise, qui « se charge d’acheter le minerai normand pour l’expédier en Allemagne, via Rotterdam »49.

Au niveau mondial, l’ère de l’acier s’affirme après 1880 : « la production des quatre prin-cipales puissances industrielles (États-Unis, Allemagne, Grande-Bretagne et France) fait plus que septupler entre 1880 et 1913, passant de 8,2 à 61,4 millions de tonnes, sur une produc-tion mondiale proche de 72 millions de tonnes »50.

Le port de Caen est aussi le débouché des productions agricoles de la plaine de Caen, en fonction des récoltes. Le poids de ces exportations agricoles diminue fortement, elles pas-sent de 26 700 tonnes en 1875 (orge principalement) à 9 000 tonnes en 1909 (produits agricoles divers, l’orge a disparu) ; en pourcentage, elles passent de 26 % des exportations en 1877 à 3 % en 190951. L’analyse détaillée des différentes marchandises exportées montre un port (en début de période) avec une triple activité d’exportation : en premier lieu le minerai qui s’affirme comme nous l’avons expliqué plus haut, en second lieu essentiellement quelques produits agricoles, mais dont la part relative s’amenuise avec les années, enfin les pierres et les pavés, une activité très ancienne (elle remonte à la période médiévale) qui représente 18 % du trafic en 1877 pour passer à 1 % en 1905. Durant les 35 années de notre période, le port de Caen – hérité de la première moitié du XIXe siècle et même d’avant – disparaît pour se préparer à devenir le port industriel qu’il est tout au long du XXe siècle après les investissements initiés par le baron Thyssen.

Enfin la structure générale du trafic évolue favorablement : le poids relatif des exporta-tions passe de 20 % en 1875 à 36 % en 1910.

La structure du trafic des importations reste comparable à celle de la période précédente.

La part de la houille prend de l’ampleur : elle atteint 85 % des importations en 1909 contre moins de 60 % au début des années 1880.

Le bois passe de 15 % en 1876 à 3 % en 1909. Plusieurs raisons expliquent cette évolution.

Jusqu’à la Grande Guerre, le charbon reste la principale source d’énergie utilisée dans le monde52. Les importations de bois sont certainement affectées par la fin des constructions

49 Alain LEMÉNOREL, L’impossible révolution industrielle ?…, op. cit., p. 166.

50 Serge BERSTEIN, Pierre MILZA (dir.), Histoire du XIXe siècle, Paris, Hatier, 2005, p. 247.

51 Compte rendu som. trav. CC Caen, 1909, p. 119.

52 Serge BERSTEIN, Pierre MILZA (dir.), Histoire du XIXe siècle, op. cit., p. 247.

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de voiliers à Caen. À compter des années 1870, plus aucun voilier n’y est bâti. Les constructions navales ne continuent à exister qu’à Ouistreham et uniquement des picoteux.

Enfin l’approvisionnement en bois ne vient plus seulement des pays scandinaves et de la Russie mais également du Canada et des États-Unis : en 1877, sur les 27 900 tonnes de bois importées, 3 020 tonnes viennent du Canada53. Le Compte rendu sommaire des travaux de la Chambre de Commerce de Caen pour l’année 1882 précise : « Autrefois les arrivages venaient presque toujours du Nord, de la Suède et de la Norvège. Maintenant les bois d’Amérique viennent prendre leur part dans nos approvisionnements »54. La carte postale ci-dessous illustre ce trafic.

Illustration 17 : Arrivée des Bois du Nord55

53 Compte rendu som. trav. CC Caen, 1877, p. 45.

54 Ibid., 1882, p. 112.

55 Arch. mun. Caen, carte postale mise à disposition par Mme Dordron, directrice des Archives de la ville de Caen.

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Outre l’intérêt de montrer les pièces de bois sur le navire, on peut noter sa longueur.

Enfin le tampon de la poste (1905) indique que la photo date du début du XXe siècle ou de la fin du XIXe siècle.

Nous n’avons retenu ici que les principales marchandises importées : la houille et le bois.

Elles représentent 78 % des importations en 1876 et 88 % en 1909. La structure des expor-tations, beaucoup plus éclatée en 1876, les produits agricoles et le minerai ne représentent que 42 %, se concentre au fur et à mesure des années. En 1909, le minerai constitue 89 % de toutes les exportations du port.

L’affirmation de la houille (signalée plus haut) répond, avec quelques années de latence, aux travaux d’amélioration du canal et du port dont nous parlerons plus longuement dans le chapitre suivant. Nous noterons simplement qu’en 1880 le canal passe de 4,50 mètres de tirant d’eau à 5,22 mètres puis à 5,72 mètres en 1899. En outre un second bassin est amé-nagé par un élargissement de la rive droite du canal à 580 mètres du pont de la Fonderie et par l’aménagement d’un quai en maçonnerie. Une partie du trafic de charbon est reporté sur ce nouveau quai56. Les évolutions du trafic, suivent, avec un décalage de quelques années, les améliorations du tirant d’eau du canal ainsi que des aménagements portuaires.

Ce constat illustre le bienfondé de la « logique de l’adaptation permanente » exposée plus haut. Il montre également la réussite de sa mise en œuvre dans le port de Caen. Cette réussite est particulièrement flagrante dans l’exhaussement du tirant d’eau du canal à 5,72 mètres, en 1899, le charbon atteint 83 % des importations, durant les 10 années suivantes il continue à progresser pour atteindre 85 % en 1909.

D’après un rapport de l’ingénieur ordinaire rédigé en 1893, une partie des importations de houille et de bois est expédiée par chemin de fer vers l’arrière-pays du port à savoir, pour la houille, les départements du Calvados, de l’Orne, de la Manche, de la Sarthe, de l’Eure, et de l’Eure et Loir, pour le bois, les départements du Calvados, de l’Orne, de la Sarthe, de la Mayenne, de l’Eure et Loir, du Maine et Loire, de l’Ille et Vilaine et de la Seine. Pour ces deux marchandises le département du Calvados est le premier acheteur57. Caen n’est qu’un port à

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dimension régionale avec un arrière-pays qui se limite aux départements proches. Enfin une partie significative de ces importations est travaillée par les opérateurs économiques qui y sont installés.

En dehors des deux importations phare, le port importe, mais pour des quantités assez faibles, comparativement au trafic de houille et même de bois, du ciment, de la fonte, du sel, et du vin (à compter de l’année 1890) pour 1 150 tonnes par an. Enfin le port reçoit des pro-duits agricoles, du blé, à hauteur de plus de 10 000 tonnes par an jusqu’en 1880, les arrivées des années suivantes sont beaucoup plus faibles ; de l’avoine, entre 5 et 8 000 tonnes, jusque dans les années 1885, puis le niveau de cette importation baisse sensiblement. Enfin les entrées de graines oléagineuses diminuent au début du XXe siècle, en 1907 elles dépas-sent à peine 1 200 tonnes. La Chambre de Commerce écrit à ce sujet « la fabrication des huiles constitue en industrie un mouvement d'affaires moins considérable que jadis (bien qu’il y ait eu une reprise assez sensible) »58 . Ce commentaire apparaît à compter de l’année 1907.

D’une manière générale, le poids de ces importations de produits agricoles est très dépendant des cours et de l’importance des récoltes en France, comme l’indique le contenu des Comptes rendus sommaires de la Chambre de Commerce jusqu’au début du XXe siècle avec le commentaire suivant « quant aux graines et aux céréales, les importations et expor-tations sont soumises à des variations qu'expliquent les différences de cours avec le marché anglais ou les insuffisances de récoltes qui obligent à recourir à l'étranger dans l'intérêt de l'alimentation publique »59.

À compter de l’année 1890 un nouveau trafic d’importation apparaît dans le port : le pétrole. Cette année-là il reste modeste : 760 tonnes, 0,2 % des entrées de 1890. Il progresse faiblement, en 1895 il atteint 1 040 tonnes. En 1896 le préfet autorise le déchargement dans le port de Caen de matières dangereuses suite à la publication en 1894 d’un décret fixant la nomenclature des matières dangereuses, dont le pétrole fait partie. Ces matières doivent être stockées dans un endroit spécifique et entourées d’un barrage d’isolement.

58 Compte rendu som. trav. CC Caen, 1907, p. 151.

59 Ibid., 1897, p. 147.

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Les commentaires ci-dessus sur le détail des importations et des exportations du port de Caen ont été bâties à partir des Comptes rendus sommaires des travaux de la Chambre de Commerce de Caen que nous avons consultés, année par année, à la Bibliothèque Nationale de France. Cependant, à compter de l’année 1906, le tableau donnant le détail des marchan -dises change et la nouvelle forme, ne permet pas des comparaisons aisées, c’est la raison pour laquelle ces analyses s’arrêtent en 1905.

La structuration des importations n’est pas seulement liée aux évolutions du tirant d’eau du canal ainsi qu’à la qualité des aménagements portuaires, elle répond aussi à la vie écono-mique du port et de son arrière-pays. Nous en parlerons dans un prochain chapitre. Nous pouvons néanmoins noter qu’à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, avant les inves-tissements massifs initiés par le baron Thyssen, que nous étudierons dans la seconde partie, il existe à Caen, quatre entreprises de charbon, (elles ont été créées dans les années 1860), deux armements ont neuf cargos à vapeur, attachés au port de Caen, de nombreuses huile-ries travaillent le colza (produit dans la plaine de Caen) mais s’approvisionnent également à l’étranger, en fonction des besoins et surtout des cours.

Dans la partie consacrée à la période allant de l’ouverture du canal à l’année 1875 nous avions présenté le trafic de voyageurs du port avec le bateau « passager » entre Caen et Le Havre, cette activité se poursuit entre 1875 et 1909. En 1877, 17 109 voyageurs ont utilisé ce bateau sur un total de plus de 320 000 passagers, soit 5 % environ. Ce bateau est utilisé pour les « trains de plaisir »60 comme pour les affaires. En 1909 ce service existe toujours, mais son trafic a diminué : 14 611 voyageurs ont fait le trajet dans les deux sens. Trois bateaux à aubes font la traversée : la Dives, l’Hirondelle et la Gazelle. Ils ont assuré 706 voyages et ont transporté 23 204 tonnes de marchandises, soit 3 % du trafic en 190961. À compter de 1875, la compagnie des bateaux à vapeur entre Le Havre et Caen est même autorisée « à circuler

60 Durant la seconde moitié du XIXe siècle, la Compagnie de l’Ouest développa le voyage d’agrément en chemin de fer. Ce fut l’invention des « trains de plaisir » non seulement vers les rivages normands mais aussi vers les villes touristiques de l’Ouest comme Caen. On quittait Paris le samedi soir et on rentrait le lundi matin.

Ces explications sont tirées de Suzanne VERGEADE, « Un aspect du voyage en chemin de fer : le voyage d’agrément sur le réseau de l’Ouest des années 1830 aux années 1880 » Histoire, économie et société, 1990, numéro 9-1, pp. 113-134.

61 Compte rendu som. trav. CC Caen, 1909, p. 113.

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sur le canal avec sa propre vapeur » sous réserve de la présence d’un pilote à bord qui doit s’assurer du respect de la règle relative à la vitesse maximale fixée à 6 kilomètres à l'heure62. Même si le bateau "passager" entre Le Havre et Caen peut, à partir de 1875, naviguer sur le canal, le trafic maritime sur l’Orne n’a pas totalement disparu. En 1877 environ 7 % des navires (qui entrent dans le port) transitent par le fleuve, en 1905 (dernière année où cette information est répertoriée) la part est tombée à 3 %63.

Cette ligne régulière n’est pas la seule à avoir existé à Caen quelques lignes permanentes relient l’Angleterre.

En 1893 la London Brighton and South Coast Railway lance une ligne régulière de trans-port, exclusif, de marchandises entre Caen et le port de Newhaven en Angleterre. La ligne est assurée par trois vapeurs anglais : « les Rennes (143 tonneaux de jauge), Viking (90 ton-neaux de jauge) et Honfleur (190 tonneaux de jauge) au rythme de tous les 2-3 jours. Ils séjournent à Caen, suivant les marées, entre 24 et 36 heures. Les statistiques font état de 159 entrées (dont cinq chargées et 154 sur lest) et 158 sorties chargées »64. À compter de 1894, la ligne exploite deux nouveaux bateaux le Trouville et le Calvados. Ils complètent l’activité des vapeurs cités plus haut. Ces deux nouveaux bateaux ont aussi la particularité d’accepter des voyageurs. En 1894, 3 108 voyageurs ont utilisé cette ligne. Ce transport de voyageurs se développe les années suivantes pour atteindre 4 702 clients en 189765. C’est le maximum, l’activité voyageurs diminue ensuite, et en 1906, « la Chambre de Commerce écrit dans son compte rendu annuel (p. XCVIII) : "la ligne Caen-Newhaven : un service direct pour marchandises. Deux steamers à hélice y sont affectés, le Trouville et le Calvados à raison de trois départs par semaine. Les passagers n’embarquent plus" »66. Malgré une tentative de relance en 1911, la ligne disparaît totalement le 31 mai 1912. Dans l’étude (parue en 1914) qu’il rédige sur le port de Caen, Marcel Hérubel écrit, à propos de cette ligne qu’elle « a

62 Arch. dép. Calvados, S 1490, Canal de Caen à la Mer – Navigation à vapeur.

63 Les archives de douanes, utilisées pour le trafic jusqu’en 1876, n’indiquent pas la part du trafic qui transite par l’Orne et celle qui transite par le Canal de Caen à la mer, c’est la raison pour laquelle nous ne nous sommes pas intéressées à cet aspect du trafic jusqu’en 1877.

64 Arch. mun. Caen, carton n° 5 : Port – Car-Ferry Ouistreham : plaquette d’André Girault (vice-président

64 Arch. mun. Caen, carton n° 5 : Port – Car-Ferry Ouistreham : plaquette d’André Girault (vice-président

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