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Identité et Représentations Sociales et professionnelles

1. LA CONSTRUCTION MEDIATIQUE DES OBJETS

1.2. L A CONSTRUCTION DE L ’ AGENDA MEDIATIQUE

1.3.3. Identité et Représentations Sociales et professionnelles

Le psychologue social, Tajfel (1970) est le premier à s'être intéressé à l'étude de l’identité sociale. Pour lui, cette identité est créée à partir des connaissances et croyances qu’ont les individus en correspondance avec leurs catégories sociales. En fait, il la définit comme « la connaissance qu’on a d’appartenir à certains groupes sociaux, et la signification émotionnelle et évaluative qui résulte de cette apparte-nance » (1972, p. 296 dans Cohen-Scali et Moliner, 2008). Vu que le fait de nous sentir inclus dans une catégorie sociale, va forger certainement une tranquillité et un sentiment de sécurité. De même, l'idée d’être protégés socialement et d’avoir un sen-timent d’appartenance à un groupe (avec les mêmes valeurs et des croyances proches) la garantit. En considérant que chaque individu aura un nombre indéfini d’appartenances (selon son âge, son sexe, son état civil…), et chaque catégorie d’appartenance doit avoir une validation institutionnelle (Rouquette, 1998, p. 62).

C'est précisément la création de groupes d’appartenance, comme l’assurait Tajfel, qui va former des catégories sociales, en faisant une certaine hiérarchie et organisation de la société. De ce fait, des mécanismes à la fois perceptifs, affectifs et de motivation expliquent la saillance d’une catégorie sociale pour un ou plusieurs individus (Sedikides & Brewer, 2001 dans Cohen-Scali et Moliner, 2008).

Rouquette (1998, p. 67) souligne les trois dimensions que doit avoir une com-munauté, à savoir : la valeur, le partage et la limite. « Je valorise ce qui m’identifie, je m’attache à ce qui me fait reconnaître, je me reconnais moi-même dans l’institution d’une valeur », de manière que, si le sujet ne s’identifie pas à un objet, il ne va pas le valoriser.

D’ailleurs, Morin (2001, dans Garcia, 2008) estime que c’est grâce à la relation avec le monde et l’existence que l’individu peut prendre conscience de soi-même et définir son identité. Pour répondre à la question « qui suis-je ? », il faut se demander

aussi : « quelles sont mes relations avec les autres ? », « Comment je me place dans le monde ? ».

Par rapport à l’importance du contexte dans les représentations sociales, Jo-delet (2008) remarque qu'un même événement peut mobiliser différentes variantes, qu’elle appelle « représentations transubjectives », selon les appartenances sociales, idéologiques, les systèmes de référence…, et qui placeront l’événement dans des horizons différents. Par exemple, et selon Jodelet, dans le cas des caricatures de Ma-homet qui ont été publiées au Danemark, puis par le journal hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, il y a différentes interprétations et différents horizons, selon les sujets qui les regardent et leur propre contexte : les personnes qui s’y opposent auraient un horizon religieux Pour lequel il s’agirait un acte blasphématoire, et un horizon com-munautaire où tout ce qui est contraire ou atteint l’un de ses éléments, est considéré comme un attentat contre la communauté dans son ensemble. Et de l’autre côté, les personnes qui défendent les caricatures sont dans l’horizon de la démocratie et de la déclaration des droits de l’homme de 1948, la caricature illustrant la liberté d’expression doit prévaloir sur la croyance religieuse, et aussi dans un horizon poli-tique où l'on fait attention à la manipulation, le journal danois étant d’orientation d’extrême droite.

Par conséquent, cet exemple nous montre que les horizons ne sont pas forcé-ment compatibles face au même fait, et qu'ils dépendent du groupe social auquel ils appartiennent, ainsi que du contexte.

De plus, Moscovici (1961), ajoutait que les RS sont à la fois comme des mar-queurs et des modulateurs de l’identité sociale. A propos de cela, Markus (1977) ajoutait qu’elles permettent aussi aux individus de créer leur moi personnel.

Pour pouvoir comprendre les effets du contexte dans les représentations so-ciales, Rouquette (1996) a souligné trois théories, celle de l’identification person-nelle, laquelle prend en compte la relation entre l’individu et un autre individu ou le groupe, l’évaluation sociale, c’est-à-dire la valeur que l’individu donne à l’objet et la possibilité de prendre des mesures concernant l’objet. Une autre c’est l’implication,

c’est une condition indispensable pour la transformation des représentations et l’adhésion aux croyances connexes ; il y a différents niveaux d’implication, dépen-dant du degré d’accord ou de désaccord par rapport à l’objet. Et la troisième est l’identité sociale, où les représentations sociales jouent un rôle important, comme le disaient Dechamps et Moliner (2008 dans Wachelke, 2010) « les RS sont le produit final de l’action des processus identitaires impliquant l’interaction de la représenta-tion auto, intergroupe et collective avec les processus de catégorisareprésenta-tion, de compa-raison et d’attribution. »

En somme, les RS vont contribuer à la construction identitaire des groupes : il existe une interdépendance entre les deux. Doise (1999) propose de considérer le soi comme une représentation sociale, puisque la construction de l’identité va s'élaborer en tenant compte des normes existantes dans la société (Cohen-Scali et Moliner, 2008).

Etant donné les différents facteurs qui vont contribuer à la constitution identi-taire, Blandin (2010) ajoute que « les médias ne sont donc pas considérés comme de simples reflets ou miroirs des réalités sociales mais en ce qu’ils contribuent à forger l’identité des groupes, nourrissent leurs dynamiques et pèsent sur leurs transforma-tions ». Ils sont un support pour véhiculer les informatransforma-tions et à la fois un moyen par lequel les individus prennent conscience d’une réalité dans un contexte déterminé.

Plus précisément, les journalistes évoquent leur professionnalisme, en appelant leur capacité à remplir un rôle social. « Se positionnant à la fois comme central (droit des citoyens à l'information pour exercice de leur devoir démocratique) et périphé-rique (quatrième pouvoir, œil extérieur surplombant). Un groupe n'existe pas tant par sa fonction sociale que par sa capacité à maîtriser les éléments constitutifs de son espace social, en particulier, la formation, le contrôle de l'activité et de son mar-ché de travail, et les relations avec les groupes périphériques ou concurrents. » (Ruel-lan, 1992).

Dans ce sens, les médias vont avoir aussi un rôle important, puisque comme distinguent Cornu et Ruellan (1993) dans le terme professionnalisme il y aura une

modalité technique et plus rationnelle et une autre qui découle de l’expérience, donc là vont interférer les attitudes et les comportements dont le journaliste a éprouvé l’efficacité précédemment dans ce genre de situations. « Le journaliste a les moyens de préciser que l'outil n'est rien sans l'homme, que la technique n'est pas sans le créateur ».

Nous trouvons une idée similaire dans la notion de « représentation profes-sionnelle ». Selon Bataille (2000, p. 181), il s’agit de représentations sociales qui sont « construites, dans le cadre des actions et des interactions professionnelles par des acteurs dont elles fondent les identités professionnelles correspondant à des groupes du champ professionnel considéré, en rapport avec des objets saillants pour eux dans ce champ... » (Bataille, 2000, p. 181).

Dans le cas la profession journalistique, Ruellan (2005) affirme que nous assi-tons à une expansion du nombre de journalistes précaires, dû à la tendance de faire du journalisme à la pige, à travers lequel il n’est pas possible d’appliquer la loi de 1935 (qui regroupe la réglementation du travail journalistique). Or, il est remar-quable que, depuis le début du siècle jusqu'à aujourd'hui, le groupe des journalistes n’a cessé de s'interroger sur son identité professionnelle et les manières de la proté-ger (Ruellan, 1992).