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Identification des neurones NA et 5-HT

Dans le document en fr (Page 187-191)

Les caractéristiques électrophysiologiques des neurones NA enregistrés correspondent à celles décrites chez le rat libre de ses mouvements (Aston-Jones et Bloom, 1981a), tête- fixée (Koyama et coll., 1994) et chez le rat anesthésié (Svensson et coll., 1975; Cedarbaum et Aghajanian, 1976, 1977; Koyama et Kayama, 1993).

Les neurones monoaminergiques enregistrés se caractérisent par des potentiels d'actions biphasiques, d'une durée supérieure à 1.5 ms et présentent le plus souvent un épaulement dans la partie descendante. Le tracé du PA extracellulaire dans sa modalité filtrée est très similaire à la dérivée seconde du tracé du PA intracellulaire (Geddes, 1972; Grace et Bunney, 1983b). L’épaulement dans la partie descendante du PA extracellulaire reflèterait ainsi la présence de deux composantes de la repolarisation et de la longue post- hyperpolarisation mises en évidence in vitro (Henderson et coll., 1982; Williams et coll., 1984; Masuko et coll., 1986).

Les neurones NA enregistrés dans notre étude présentent une activité de type tonique corrélée à l'état de vigilance de l'animal. Les fréquences de décharge mesurées sont identiques à celles observées par Aston-Jones et Bloom (1981a) chez le rat libre de ses mouvements: 2.15 ± 0.16 Hz pendant l'éveil actif, 1.45 ± 0.14 Hz en éveil calme, 0.68 ± 0.12 Hz et 0.22 ± 0.05 Hz respectivement au cours du SL léger et du SL profond et enfin 0.02 ± 0.01 Hz

au cours du SP. L'arrêt de décharge des neurones NA du LC a également été observé au cours de la cataplexie chez le chien narcoleptique (Jacobs, 1987; Wu et coll., 1999b), suggérant que les neurones NA du LC pourraient contribuer au maintien du tonus musculaire pendant l'éveil et jouer un rôle dans l'atonie musculaire du SP et de la cataplexie.

En accord avec les données obtenues chez le rat anesthésié, nous avons vérifié sur un petit nombre de neurones que l'application iontophorétique de noradrénaline inhibe les neurones NA du LC (Svensson et coll., 1975; Cedarbaum et Aghajanian, 1976; Arima et coll., 1998). L’ensemble de ces données suggère que les neurones enregistrés dans notre étude sont bien de nature noradrénergique.

Les neurones 5-HT dans notre étude présentent également toutes les caractéristiques décrites chez le rat anesthésié (Aghajanian et coll., 1968, 1972; Hajos et coll., 1995) ou tête- fixée (Kayama et coll., 1992; Koyama et coll., 1994). D’une durée toujours supérieure à 1.5 ms, le PA extracellulaire des neurones 5-HT est très proche de celui des neurones NA du LC (Vandermaelen et Aghajanian, 1983). Les neurones 5-HT du NRD sont en outre inhibés par l'application d'agonistes 5-HT1A (Aghajanian et coll., 1972; Sprouse et Aghajanian, 1986;

Hajos et coll., 1996). En accord avec ces données, nous avons observé que l'application micro-iontophorétique de 8OH-DPAT induit une inhibition complète et réversible des neurones enregistrés en éveil et en SL.

Dans notre étude, les neurones 5-HT du NRD enregistrés présentent une activité corrélée à l'état de vigilance de l'animal avec une fréquence de décharge plus élevée pendant l'éveil et quasiment nulle au cours du SP. En dépit d'un nombre important d'études électrophysiologiques, à notre connaissance aucune étude de l'activité spontanée des neurones 5-HT du NRD au cours du cycle veille-sommeil n’a été réalisé chez le rat libre de ses mouvements. La plupart des données ont été obtenues chez le chat non anesthésié (McGinty et Harper, 1976; Trulson et Jacobs, 1979; Shima et coll., 1986; Lydic et coll., 1987a, 1987b; Levine et Jacobs, 1992; Wu et coll., 1999a). Seul le groupe de Kayama (Kayama et coll., 1992; Koyama et coll., 1994) a décrit chez le rat une variation d’activité des neurones présumés 5-HT au cours du cycle veille-sommeil, sans toutefois préciser leur fréquence moyenne pour chacun des trois stades.

Nous avons fait l'hypothèse que l'activité spontanée des neurones 5-HT du NRD serait modifiée du fait de la contention. En effet, il a été montré que des neurones de la formation

réticulée pontique présentent une activité différente selon que l'animal est libre ou non de se mouvoir (Siegel et McGinty, 1977). Si, comme nous l'avons vu précédemment, ce n'est pas le cas pour les neurones NA du LC, il paraît essentiel de vérifier ce qu'il en est pour les neurones 5-HT.

Les différences observées par Siegel et McGinty sont en rapport avec l'activité motrice de l'animal et les neurones 5-HT du NRD sont potentiellement impliqués dans le contrôle du tonus musculaire (White et Neuman, 1980; Vandermaelen et Aghajanian, 1982; Jacobs et Azmitia, 1992; Jacobs et Fornal, 1993). En effet, chez le chat au cours de l'atonie induite par l'injection de carbachol dans le tegmentum pontique ou par l'injection systémique d'un agent myorelaxant à action centrale (méphénésine), le taux de décharge des neurones 5-HT du NRD est fortement réduit (Steinfels et coll., 1983; Jacobs, 1987; Woch et coll., 1996). En revanche, au cours du SP sans atonie, induit par la lésion du péri-LCα, les neurones 5-HT du NRD présentent une activité accrue. Ces données montrent qu'une modification du tonus musculaire peut affecter l'activité spontanée des neurones 5-HT du NRD. Nous avons observé une diminution du tonus musculaire au cours de l'éveil chez le rat en contention par rapport au rat libre de se mouvoir. L'immobilisation dans l'appareil de contention serait donc à l'origine d'une diminution de la fréquence de décharge des neurones 5-HT du NRD. Cependant, chez le chat tête-fixée, Shima et coll. (1986) ont observé des fréquences de décharge spontanée au cours de l'éveil et du SL similaires à celles mesurées par Lydic et coll. (1987a, 1987b) chez le chat libre de se mouvoir. Dans les deux études, les neurones 5-HT du NRD présentaient une quasi cessation d'activité au cours du SP. Chez le chat, la contention ne semble donc pas affecter la fréquence basale des neurones 5-HT du NRD.

Dans notre étude, les taux de décharge des neurones 5-HT sont inférieurs à ceux mesurés chez le chat. Au cours du SL par exemple, la fréquence des neurones 5-HT chez le chat est deux fois plus élevée que chez le rat. Au cours du SP cependant, en accord avec les données obtenues chez le chat et les observations faites chez le rat (Koyama et coll., 1994), nous avons observé une cessation d'activité des neurones 5-HT du NRD. Faute de pouvoir comparer avec le rat libre de ses mouvements, on ne peut pas éliminer définitivement la possibilité d'un effet de la contention. Du fait de la similitude des taux de décharge observés chez le chat tête-fixée et le chat libre de ses mouvements, il paraît néanmoins plus vraisemblable que des mécanismes de régulation de l'activité des neurones 5-HT propres au rat et au chat soient à l'origine des différences de taux de décharge entre les deux espèces.

En accord avec les études de Kayama et coll. (1992), nous avons observé que la reprise d’activité des neurones 5-HT après un épisode de SP ou de SL, contrairement à celle des neurones NA du LC, survient dans certains cas (35 à 40%) de 0.5 à 1 seconde après la désynchronisation corticale de l’éveil. Ceci suggère que la reprise d’activité des neurones 5- HT du NRD, qui contribuent à l’activation corticale (Polc et Monnier, 1970; Jacobs, 1987), serait précédée (voire dépendrait) de l'activation d’autres neurones, en particulier des neurones NA et histaminergiques, eux aussi toniquement actifs pendant l'éveil (Lin et coll., 1996; Vanni-Mercier et coll., 1984, 1994a). Il paraît donc essentiel de déterminer précisément la chronologie des activations des différentes structures responsables de la désynchronisation corticale et de l'éveil. Dans ce but, des enregistrements unitaires simultanés de plusieurs neurones de ces structures, couplés à une pharmacologie des neurotransmetteurs qu'elles contiennent, seraient particulièrement appropriés.

L'activité des neurones 5-HT du NRD est généralement décrite comme tonique et très régulière (neurones "clock-like"), ce qui suggère que ces neurones convoient peu d'information. En outre, peu de facteurs environnementaux ou physiologiques peuvent affecter cette régularité. Le rôle dévolu aux neurones 5-HT du NRD a par conséquent été restreint à la neuromodulation d'autres systèmes (Jacobs, 1987; Jacobs et Azmitia, 1992).

En réalité, le NRD contient également des neurones 5-HT moins réguliers. Ces neurones qui déchargent en trains de potentiels et en bouffées ont été mis en évidence chez le chat non anesthésié (Nakahama et coll., 1981; Shima et coll., 1986) et chez le rat anesthésié (Hajos et coll., 1995). Pour la première fois chez le rat non anesthésié, nous avons observé des neurones moins réguliers semblables à ceux décrits par Hajos et coll. (1995). Dans nos conditions expérimentales, ces neurones ont une activité corrélée à l’état de vigilance et sont également inhibés par l’application iontophorétique de 8OH-DPAT. De plus, la lésion sélective des neurones 5-HT par la 5-7 dihydroxytryptamine entraîne une diminution de leur nombre (Hajos et coll., 1996). Ces données suggèrent que ces neurones irréguliers seraient bien de nature sérotoninergique. Du fait de leur mode de décharge, ces neurones particuliers du NRD pourraient, en plus de la neuromodulation des structures cibles, exercer un rôle important dans des fonctions cognitives (Hajos et Sharp, 1997). Leur identité neurochimique demande néanmoins à être définitivement confirmée. Nous envisageons pour cela de procéder à l'enregistrement et au marquage juxtacellulaire par la biocytine (ou la neurobiotine) de ces neurones. Cette technique, mise au point par Pinault et Deschesnes (1996, 1998) a notamment permis de confirmer la nature neurochimique de neurones du LDT/PPT (Koyama et coll.,

1998) et de neurones du télencéphale basal (Manns, 2000). La double immunohistochimie de la 5-HT et du marqueur devrait nous permettre de déterminer si les neurones irréguliers que nous avons enregistrés sont effectivement de nature sérotoninergique.

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