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Activité unitaire et conditions physiologiques

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Le système noradrénergique du Locus coeruleus

D. Activité unitaire et conditions physiologiques

1. Etats de vigilance

Chez l'animal non anesthésié, l'activité des neurones NA du LC varie suivant l'état de vigilance (Figure 11) (Aston-Jones et Bloom, 1981a; Jacobs, 1986; Aston-Jones et coll., 1991a). Au cours de l'éveil cette activité est tonique, régulière et de l'ordre de 2 PA/sec, avec parfois des bouffées spontanées. Lors de l'endormissement, l'activité unitaire des neurones NA du LC décroît progressivement. Au cours du SL elle est en moyenne de 0.5 PA/sec. Pendant les épisodes de SP, de rares PA sont observés et la fréquence de décharge est quasiment nulle (Tableau 2).

Figure 11. Activité d'un neurone NA du LC au cours du cycle veille-sommeil chez le rat non anesthésié (D'après Aston-Jones et Bloom, 1981a). Enregistrements polygraphiques continus de l'activité unitaire intégrée (LC Integrated Single Unit Activity), de l'EEG et de l'EMG.

Tableau 2. Taux de décharge des neurones NA du LC chez le rat libre de ses mouvements (D'après Aston-Jones et Bloom, 1981a).

Stage Mean Rate ± SEM

Hz

Mean Sample Time ± SEM

sec Number of cells

SI 2.15 ± 0.16 54.0 ± 5.7 31

SII 1.45 ± 0.14 74.0 ± 12.2 32

SIII 0.68 ± 0.12 111.1 ± 9.3 33

SIV 0.22 ± 0.05 46.6 ± 8.0 22

PS 0.02 ± 0.01 187.4 ± 32.6 9

SI=Active Waking, SII=Quiet Waking, SIII=Light Slow Wave Sleep, SIV=Deep Slow Wave Sleep, PS=Paradoxical Sleep

Selon l'hypothèse actuelle, l'activité tonique et régulière des neurones NA au cours de l'éveil résulterait uniquement des propriétés intrinsèques, impliquant donc qu'un mécanisme actif d'inhibition assure la diminution progressive de la décharge neuronale au cours du sommeil (Williams, 1999).

L'activité unitaire des neurones NA au cours de l'éveil n'est cependant pas constante et peut varier significativement suivant le niveau d'attention de l'animal. Chez le singe, il a été montré que lors de mouvements d'orientation à la suite de la présentation d'une seringue contenant sa boisson favorite, les neurones NA du LC ont une décharge accrue (Foote et coll., 1980). En revanche, lorsque l'animal se nourrit ou effectue des gestes de toilettage, les neurones NA diminuent sensiblement leur fréquence de décharge (Aston-Jones et coll., 1981a). On peut noter également que les neurones NA du LC cessent de décharger au cours de la catapléxie (Wu et coll., 1999b).

L'ensemble de ces données suggère un rôle important des neurones NA du LC et de la noradrénaline dans les mécanismes de la vigilance et de l'attention. (Foote et coll., 1980; Aston-Jones et coll., 1981a; Jacobs, 1986, 1987; Aston-Jones et coll., 1991a, 1991c; Rajkowski et coll., 1994).

2. Activité unitaire et stimulations sensorielles

Les neurones NA du LC chez le chat ou le rat non anesthésiés présentent des activités phasiques en réponse à une grande diversité de stimuli sensoriels simples (Aston-Jones et Bloom, 1981b; Rasmussen et coll., 1986; Abercrombie et Jacobs, 1987a). Ainsi, la présentation d'un flash lumineux, ou d'une stimulation sonore induit avec une latence comprise entre 15 et 50 ms une bouffée de 2 à 4 PA immédiatement suivie d'une inhibition (inhibition post-activation). L'excitation produite met en jeu le glutamate (Ennis et coll., 1992) et l'inhibition consécutive met en jeu les collatérales récurrentes et les autorécepteurs NA (Cedarbaum et Aghajanian, 1976, 1978b; Ennis et Aston-Jones, 1986). Des stimuli plus complexes induisent également ce type de réponse. Ainsi, chez le chat, la présentation d'un rat, de nourriture inaccessible ou même l'entrée de l'expérimentateur dans la pièce d'enregistrement induisent une activation transitoire des neurones NA du LC (Rasmussen et coll., 1986; Abercrombie et Jacobs, 1987a).

Des stimuli intéroceptifs, comme une hypotension artérielle (Valentino et Wheby, 1988; Curtis et coll., 1993; Page et Valentino, 1994), une distension de la vessie (Page et coll., 1992) sont capables d'induire une activation des neurones NA au même titre que des stimuli extéroceptifs (Aston-Jones et coll., 1991c, Stanford, 1995). Cette capacité du LC d'intégrer des stimulations sensorielles multi-modales serait une propriété du réseau comprenant les neurones NA du LC et les neurones glutamatergiques du LPGI. Chez le rat anesthésié, seuls

des stimuli douloureux (pincement de la patte ou de la queue) induisent une réponse des neurones NA (Cedarbaum et Aghajanian, 1976, 1978b).

Ces données suggèrent par conséquent un rôle important des neurones NA du LC dans le traitement des informations sensorielles et douloureuses.

3. Activité unitaire et stress

L'activité unitaire des neurones NA du LC est particulièrement affectée dans les situations de stress (Valentino et Aston-Jones, 1995). Des études neurochimiques et de microdialyse intracérébrale montrent en effet une augmentation de la libération de noradrénaline dans certaines structures du SNC en réponse à une grande variété de stimuli stressants (Thierry et coll., 1968; Iimori et coll., 1982; Kawahara et coll., 1999a; Valentino et coll., 1993; Foote et Aston-Jones, 1995; Bremner et coll., 1996).

Les effets du stress, aigu ou chronique, se traduisent généralement par une forte augmentation de l'activité unitaire des neurones NA (Abercrombie et Jacobs, 1987a, 1987b; Brady et coll., 1994; Stanford, 1995; Valentino et Aston-Jones, 1995). Ainsi chez le chat, la présentation d'indices menacants comme la venue d'un chien près de la cage (Rasmussen et coll., 1986), la présentation d'un bruit blanc aversif de 100 dB ou une immobilisation (Abercrombie et Jacobs, 1987a) induisent une augmentation importante (d'un facteur 2 à 5) et durable de la décharge des neurones NA. Chez le rat en revanche, un stress aigu d'immobilisation ou un choc électrique inévitable induirait une diminution de la décharge basale des neurones NA (Pavcovich et coll., 1990; Pavcovich et Ramirez, 1991). Il faut noter cependant que dans ces deux études chez le rat, l'activité unitaire était enregistrée sous anesthésie après l'exposition au stimulus stressant.

Dans les situations de stress chronique, les études s'accordent pour montrer une élévation de la décharge tonique des neurones NA du LC. Ainsi, lors de l'exposition à une intense stimulation sonore répétée chez le chat (Abercrombie et Jacobs, 1987b), après 17 à 28 jours d'exposition au froid (Mana et Grace, 1997) ou une immobilisation quotidienne de 2 heures pendant 7 jours (Pavcovich et coll., 1990) chez le rat, la décharge spontanée des neurones NA reste significativement plus élevée par rapport à celle d'animaux témoins non stressés.

Cette activation des neurones NA du LC serait due notamment à la libération de CRF (corticotropin releasing factor), principal neurotransmetteur dans la réponse au stress

(Valentino et Wehby, 1988; Dunn et Berridge, 1990). En effet, la concentration de CRF dans la région du LC double après un stress aigu ou chronique (Chappell et coll., 1986). En outre, il a été montré que le CRF augmente l'activité unitaire des neurones NA par une action directe (Valentino et coll., 1993) et une action indirecte via les acides aminés excitateurs (Singewald et coll., 1995, 1996) et les glucocorticoïdes (Thoenen, 1970; Richard et coll., 1988).

Les neurones NA du LC joueraient par conséquent un rôle important dans la réponse au stress. Si les propriétés intrinsèques permettent d'expliquer en partie la décharge régulière des neurones NA du LC, le stress est un facteur susceptible d'augmenter de façon importante leur activité tonique.

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