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H. Leclerc1,2†, D. Duclos1, A. Barbat1 et V. Ducrocq1

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INRA, UR337, Station de Génétique Quantitative et Appliquée. 78352 Jouy-en-Josas

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Institut de l’Elevage, Département de Génétique, INRA-SGQA, 78352 Jouy-en-Josas Courriel : helene.leclerc@jouy.inra.fr

Résumé

Les facteurs de variations des caractères de production laitière sont nombreux. A travers l’étude des millions de lactations recueillies par le contrôle laitier et stockées depuis les années 1990 à des fins d’évaluations génétiques, il a été possible de modéliser l’impact des principaux facteurs que sont la race, le numéro de lactation, la région, le stade de lactation, l’âge au vêlage, le mois de vêlage, la durée de tarissement et la gestation sur la quantité de lait, les taux butyreux et protéique ainsi que la numération cellulaire. Compte tenu de la quantité de données disponible, il a été possible de définir finement l’ensemble des facteurs de variation et de les modéliser sous forme de courbes. L’évolution des caractères en fonction du stade de lactation est ainsi prise en compte. L’effet du mois de vêlage se révèle être prééminent sur la quantité de lait et le taux butyreux, alors que l’effet de la gestation est conséquent sur la quantité de lait produite surtout en fin de gestation. Par contre, pour l’âge au vêlage et la durée de tarissement, seules les classes fortement pénalisantes comme un vêlage précoce et une durée de tarissement très courte se démarquent fortement et modifient la trajectoire de la courbe de lactation. Le taux protéique et la numération cellulaire présentent quant à eux des formes de courbes de lactation plus homogènes entre classes. Les perspectives de valorisation des courbes de lactation, définies en fonction des caractéristiques propres à l’animal sont nombreuses, notamment pour la prédiction de la production à venir.

Les effets environnementaux comme la région, le rang de lactation, l’âge de l’animal lors du vêlage, le mois de vêlage, la durée de tarissement précédant le vêlage, l’éventuelle gestation en cours sont des facteurs reconnus comme ayant un impact sur la production journalière et constituent donc des éléments nécessaires à la prédiction individuelle de la production sur la lactation.

De nombreuses études ont été consacrées à l’analyse des effets environnementaux ayant un impact sur la courbe de lactation principalement au cours des années 1970 et 1980, parmi lesquelles nous pouvons citer Danell (1982), Wilmink (1987) et Pérochon et al. (1996). La plupart du temps, ces études ont été consacrées à la quantité de lait, n’abordant le taux butyreux que ponctuellement (Danell, 1982). Elles ont mis en évidence l’importance des effets d’environnement tels que le troupeau, l’année, la région, le mois de vêlage sur les performances laitières enregistrées, mais aussi des effets physiologiques tels que le rang de lactation, l’effet de la gestation ou des effets de conduite du troupeau tels que l’âge au vêlage ou la durée de la période de tarissement précédent la lactation. Malgré leurs origines différentes, ces effets sont généralement regroupés sous le terme d’« effets environnementaux ».

Selon les études, deux finalités peuvent être distinguées : le développement de facteurs correctifs en vue d’une évaluation génétique dont les effets sont estimés de façon globale sur la lactation (Danell, 1982 ; Wilmink, 1987) ou bien en vue du développement d’outils d’appui technique afin de prédire la production en fonction des effets d’environnement prévisibles. Dans ce cas, la production est modélisée en fonction du stade de lactation de l’animal généralement à l’échelle de la semaine (Pérochon et al., 1996). Pour les évaluations génétiques, les effets sont estimés à partir une population très vaste, généralement à l’échelle nationale, ce qui permet de distinguer de multiples facteurs de variation et d’en étudier les nombreuses modalités définies par des classes d’amplitude limitée. Pour l’appui technique, les données proviennent le plus souvent de troupeaux expérimentaux dont les conditions de milieu sont contrôlées et les performances enregistrées plus fréquemment, mais dont les effectifs sont limités et restreignent l’étude à l’analyse de quelques modalités de facteurs de variation sélectionnés. Toutefois, dans le cadre de la mise en place d’une évaluation génétique basée sur les contrôles élémentaires, il devient possible de concilier ces deux objectifs à travers une modélisation fine de la production.

L’évaluation génétique basée sur les contrôles élémentaires consiste à estimer la valeur génétique additive d’un animal à partir de l’ensemble des contrôles de performances enregistrées par le contrôle laitier (environ 10 contrôles par lactation) plutôt que par les seules variables composites que sont les productions totales sur une lactation. Comme dans l’évaluation génétique basée sur les données de lactation, le modèle contrôles élémentaires inclut de nombreux effets fixes (race, année, région, âge au vêlage, mois de vêlage…) modélisés sous forme de constantes, mais sa principale particularité est de modéliser l’interaction de la plupart de ces effets avec le stade de lactation. Ces interactions se matérialisent par des courbes dont la forme et le niveau varient suivant les différents effets. Les effets dits aléatoires qui dépendent de l’animal tels que l’effet génétique ou l’effet de l’environnement permanent (effet non transmissible qui permet de tenir compte de la répétabilité de la performance) sont aussi modélisés sous forme de courbes dont l’effet varie avec le stade de lactation. Le modèle contrôles élémentaires permet donc une modélisation beaucoup plus fine de la production laitière sur la lactation, notamment grâce aux effets environnementaux décrits finement.

L’objectif de cette étude est de montrer, pour les trois principales races laitières françaises, l’impact des différents facteurs environnementaux analysés sur la quantité de lait, les taux butyreux et protéique ainsi que la numération cellulaire, à partir des résultats obtenus sur l’ensemble de la population française dans le cadre de l’évaluation génétique basée sur les contrôles élémentaires.

1 / Données

Dans le cadre des évaluations génétiques nationales, nous avons à notre disposition les données collectées dans l’ensemble des élevages adhérents au contrôle laitier stockés dans la base de données du Système d’Information Génétique (SIG). Ainsi, fin 2007, nous disposions de près de 34.0, 5.7 et 5.2 millions de lactations en races Holstein, Montbéliarde et Normande respectivement. Dans le cadre du contrôle laitier, les troupeaux sont généralement contrôlés 11 fois dans l’année sur une période de 24 heures. En moyenne, nous disposons donc de 10 contrôles par lactation complète, les lactations en cours disposant de moins de 3 contrôles n’étant pas prises en compte dans le modèle contrôles élémentaires. A partir de ces fichiers, seules les données collectées pendant la période figurant dans le tableau 1 au cours de l’une des 3 premières lactations et ayant un stade de lactation compris entre 7 et 335 jours ont été analysées. Pour être inclus dans l’analyse, l’enregistrement devait avoir une production

minimum de 2.0 kg, conformément au règlement technique du contrôle laitier et des taux compris entre 15 et 90 g/kg pour le taux butyreux (TB) et entre 10 et 70 g/kg pour le taux protéique (TP) afin de répondre aux recommandations internationales du Comité International pour le Contrôle des Performances en Élevage (ICAR). Les données de comptages cellulaires (CCS) sont transformées en un score de cellules somatiques (SCS), afin de normaliser leur distribution suivant la formule décrite par Rupp et Boichard (1997) :

2 CCS SCS log 3 100 000      

  . Ainsi, un CCS de 12 500 équivaut à un score de 0, celui de 25 000 à un score de 1… toute augmentation du SCS de 1 correspondant à un doublement de la valeur de CCS précédente.

Outre les données relatives aux caractères de production, le SIG dispose également des informations relatives aux inséminations artificielles, aux naissances, aux vêlages... Il est ainsi possible de déterminer la date de fécondation pour chaque gestation. Pour les vaches dont la gestation est théoriquement encore en cours au moment de l’extraction du fichier pour l’évaluation génétique, la dernière insémination est considérée comme fécondante sauf si la date du terme prévu à partir de la durée de gestation de la race est dépassée. Lorsque les lactations sont terminées et qu’elles ont donné lieu à un nouveau vêlage, la date de fécondation est calculée à partir de la date de vêlage suivante et de la durée de gestation moyenne de la race (282 jours en race Holstein, 287 jours en race Normande et 288 jours en race Montbéliarde).

Concernant l’autre facteur essentiel affectant la production laitière que constitue la conduite du troupeau, nous ne disposons pas d’un relevé précis des conditions de conduite des animaux, notamment de l’alimentation et du statut sanitaire. Ces informations ne sont généralement disponibles que dans les troupeaux expérimentaux ou dans certaines bases de données gérées par les organismes de contrôle laitier mais qui n’ont jamais pu, jusqu’à présent être harmonisées ni centralisées au niveau national. Pour palier à cette absence, le modèle définit un effet spécifique au troupeau pour un jour de contrôle donné (appelé HTD pour Herd – Test day) à partir des observations recueillies le même jour dans un même troupeau (sur un minimum de 5 vaches). Cet effet permet de tenir compte de l’environnement de production du jour donné et notamment de la météorologie, facteur rarement intégré aux études visant à modéliser la courbe de production.