• Aucun résultat trouvé

L’hétérogénéité des organismes d’accompagnement en Languedoc- Languedoc-Roussillon et de l’accompagnement à la pluriactivité

a) Des organisations nombreuses et peu coordonnées

En Languedoc-Roussillon, 250 organisations jouant un rôle dans le parcours de création d’activité d’un individu ont été identifiées, sans que cette liste soit exhaustive (Bernardini et Perez Chueca, 2009). Ce recensement met en évidence une « nébuleuse » de

71

Bernard C., 2009. Quelle est l’incidence des caractéristiques et des ressources du territoire dans la stratégie des pluriactifs ? Mémoire de master 2 « Gestion des Espaces Ruraux Aménagement et Développement Local". Montpellier: Université Montpellier 3. 122 p. ;

Bernardini S. & Perez Chueca A., 2009. Analyse de l’émergence de dispositifs d’accompagnement aux systèmes d’activité pluriactifs sur la région du Languedoc Roussillon. Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme d’ingénieur agronome (Sandra Bernardini) et du diplôme Master 2 "Innovation et développement des territoires ruraux" (Alberto Pérez Chueca). Montpellier, Rennes (France): AgroCampus Ouest, Université de Montpellier 3, INRA, Région Languedoc Roussillon. 171 p. ; Dubien A., 2010. Identification de registres de justification de la pluriactivité pour l'accompagnement. Application au territoire du Haut-Languedoc héraultais. Dijon: AgroSup. 182 p. ;

D'Aldéguier G., 2010. La question du genre dans la pluriactivité. Comprendre les positions des femmes pluriactives dans le milieu rural en Languedoc Roussillon pour améliorer les dispositifs d'accompagnement locaux. mémoire. Toulouse: Ecole d'agriculture de Purpan. 113 p. ;

Terrier M., 2009. Contribution à l’élaboration d’un outil d’évaluation ex ante de la durabilité des systèmes d’activités des ménages agricoles pluriactifs dans l’Aude. Mémoire présenté pour l’obtention du diplôme d’ingénieur agronome de Montpellier Supagro et du Master 2 recherche « Innovation et Développement des Territoires Ruraux ». Montpellier: Supagro - UM3. 97 p.

143

l’accompagnement, au sens entendu par Maela Paul (Paul, 2004). Les organisations recensées sont très diverses (figure 17 ci-dessous) : organismes consulaires, organismes de développement territorial (CBE, Pays, Parcs Naturels Régionaux, Conseils généraux, Conseil régional), structures d’accompagnement sectorielles, couveuses ou pépinières d’entreprises, organismes de financement, de gestion, de formation ou d’insertion, syndicats, mutuelles, etc. Les associations représentent un peu plus de la moitié de ces organisations, et les établissements publics un quart. Le quart restant est constitué d’organisations privées, banques, centres de conseils ou de gestion, etc. L’échelle d’action la plus représentée est le département (47%), suivie par les échelles locale (32%) et régionale (19%).

Échelle d’action Statut 47% 32% 19% régionale locale départementale 22% 24% 54% association Établissements publics autres Type de structures •Chambres consulaires • Collectivités territoriales

• Structures d’accompagnement sectorielles • Couveuses ou pépinières

• Organismes de financement • Organismes de gestion

• Organismes de formation ou d’insertion • Syndicats

• Mutuelles

Figure 17: Caractéristiques générales des 250 organisations de soutien recensées en région Languedoc-Roussillon, Tallon, 2011, d’après Bernardini et Perez, 2009

Les démarches d’accompagnement des organisations de cette nébuleuse sont différentes. Les pratiques énoncées dans les documents institutionnels ou dans le discours de leurs agents font mention de conseil, tutorat et parrainage, mais aussi de formation, d’orientation ou d’information, ou de manière plus transversale de compagnonnage. La segmentation de l’offre de conseil et d’accompagnement est très forte et se caractérise par l’espace géographique d’intervention, les secteurs d’activité (agriculture, artisanat, etc.), les cibles sociales (public RSA, chômeurs, etc.), les domaines de compétences (conseil technique, finance, etc.), les postures de principe (normative / constructiviste, attention portée au projet ou au porteur de projet, etc.), les phases des projets accompagnés (création, développement,

144

transmission), les statuts et les modes de financement (instances consulaires, associations, établissements publics, banques, etc.).

Cette diversité est cependant peu visible et peu repérable pour le public concerné tout d’abord, mais aussi pour les acteurs de l’accompagnement eux-mêmes. Ce phénomène traduit sans doute une situation de faible coopération entre organisations (Tallon, et al., 2010).

La pluralité des pratiques revendiquées rend difficile le classement de ces organisations en catégories bien délimitées. Leurs pratiques se recoupent partiellement, révélant finalement « des angles d’approche complémentaires » (Bernardini et Perez Chueca, 2009), sans que cette complémentarité soit perçue par les acteurs individuels. En particulier, l’aide, l’apprentissage, la formation, la socialisation, l’insertion, le développement personnel, constituent souvent des pratiques étroitement articulées, quand elles ne sont pas assimilées les unes aux autres. Les énoncés des documents de présentation semblent suivre ici une logique paradigmatique, en s’appropriant les termes courants dominants des discours politiques ou les injonctions de leaders institutionnels capables de communiquer à large échelle (syndicats professionnels ou Chambres consulaires par exemple) (Tallon, et al., 2010).

Contrairement à ce à quoi on aurait pu s’attendre, la sectorialisation n’est pas marquée. En effet, dans cet ensemble, 74% des structures proposent un accompagnement indifférencié, agricole et non agricole ; 15% se limitent au secteur agricole et seules 11% d’entre elles ne font pas d’accompagnement agricole72. Enfin, l’examen des documents produits montre qu’aucune de ces organisations ne propose un accompagnement exclusivement dédié à la pluriactivité. On comprend aisément la difficulté, pour un porteur de projet pluriactif, de repérer les organisations auxquelles s’adresser pour trouver les réponses adaptées à sa situation et à ses questions spécifiques. On comprend aussi les interrogations des acteurs de l’accompagnement sur leur propre visibilité et la cohérence de leurs réseaux au vu des attentes d’un public si diversifié.

72

Cependant la méthode d’identification utilisée induit peut-être une sur-représentation du secteur agricole, puisqu’elle s’est notamment appuyée sur les listes établies par le Service gestion de l'espace rural et littoral du Conseil régional et sur un premier réseau d’information interne au projet Intersama, privilégiant les organismes agricoles.

145

Pour déterminer les logiques à l’œuvre dans ces organisations d’accompagnement, nous avons placé les 250 structures recencées en Languedoc-Roussillon dans le graphe de Maela Paul précédemment présenté (figure 15). Les liens entre la posture d’accompagnement et la finalité de l’accompagnement apparaissent alors (figure 18 ci-dessous) :

Ex: Peuple et culture, Adear, Civam, Solidarité paysan, Terres vivantes, Bienvenue à la Ferme, FRAB LR

SECTEUR 3 : Insertion

(questionnement sur la place de l’individu)

SECTEUR 4 : Performance

(optimisation de l’action)

Orienter le développement du projet par le dialogue et la co construction en fonction des valeurs

Interprétation, appropriation par

les individus

Vision techniciste, normative

Action concrète, dans les faits Action réflexive socialisation autonomisation 17,6% 15,6% 53,6% 13,2%

Résoudre les problèmes par l’expertise, la norme et la spécialisation professionnelle (conseil juridique, technique, …)

Lier le sens personnel au sens

professionnel du projet par la formation, l’implication, le parrainage

Mobiliser les moyens nécessaires à l’atteinte des objectifs du projet par l’appui technique ou financier

SECTEUR 2 : Litige (résolution de problèmes)

SECTEUR 1 : Orientation

(selon des valeurs)

Ex: Chambres consulaires, CER, Points info, DDTEFP, Caisse d’épargne, etc.

Ex: Boutiques de gestion, CAE, Airdie, Ifad, JA, Cigale, CFPPA, ADEFA, IFAD,

Ex: PFCA, MSA, FR Cuma, CG, PNR, Pays, CRES LR

Maison des initiatives, CGPME, Greta, Pôle emploi, AFPA, IRFA Sud, Geiq,

SOCAMA, CIDFF,

CAPEB, CAFOC, etc.

Figure 18: Répartition des structures de soutien à la création d’activité recensées en Languedoc-Roussillon, Tallon, 2011, d’après (Bernardini et Perez Chueca, 2009)

Les tableaux de répartition de l’ensemble des structures dans les secteurs identifiés sont présentés en annexe 4.

C’est la logique de socialisation qui regroupe le plus de structures de notre échantillon, tous groupes confondus (à 69,2%, dont 134 pour le secteur 3 et 39 pour le secteur 4). Ceci peut traduire en partie la priorité accordée au niveau régional à la recherche de solutions aux difficultés d’accès à l’emploi, un des problèmes majeurs de la région. Les pratiques d’accompagnement sont largement dominées par des registres d’insertion et d’apprentissages croisés. Cette logique de « sociabilité » travaille sur la place de l’individu dans la sphère

146

identitaire et normative de l’activité professionnelle et sur celle qu’il occupe au milieu de ses pairs, en insérant l’individu dans un contexte économique, social et institutionnel donné. Dans les structures du secteur 4, l’enjeu d’adéquation des projets individuels des porteurs aux objectifs du projet porté par la structure sont importants (projet des territoires, projet des secteurs professionnels, etc…). En effet, une organisation territoriales comme un Parc ou un Pays définit préalablement ses objectifs et met en place les instruments opérationnels qui permettent d’y arriver. L’accompagnement de projet est clairement inféodé aux buts de l’organisation.

La logique de l’autonomisation est moins représentée. Le secteur 1 regroupe 33 structures et le secteur 2 en regroupe 44. Mais il est important de noter que c’est dans cette logique que nous retrouvons la plupart des structures d’accompagnement agricole. Une séparation est visible entre structures d’accompagnement à l’installation progressive, telles les Adear ou Terres Vivantes (secteur 1), et les structures accompagnant une agriculture plus conventionnelle, telles le Point Info Installation ou les CER (Centre d’Economie rurale). Elle se retrouve dans la posture d’accompagnement, posture ouverte qui amène à construire pas à pas un système d’activité dont la définition même est à l’étude pour le secteur 1, et posture experte pour le secteur 2, le but de l’accompagnement étant de permettre au porteur d’adapter au mieux son projet aux normes, réglementations et possibilités de développement en vigueur.

b) La timide émergence d’un accompagnement à la pluriactivité, observable par l’évolution des pratiques et des outils

Ce même recensement montre que seule une organisation sur cinq signale l’accompagnement à la pluriactivité dans ses missions. Il s’agit de l’ensemble des structures du groupe 1 dans l’annexe 4. Ce résultat confirme les observations faisant état de la place accessoire et de la faible valorisation de la pluriactivité dans le dispositif régional d’accompagnement. Il met d’autre part en évidence le lien entre pluriactivité et agriculture : la quasi-totalité des organisations de conseil agricole, soit 15% du total des organisations recensées reconnait la pluriactivité comme une problématique se traduisant en stratégie de communication spécifique (Chambres d’agriculture, Adear, Civam, Adasea, FRCuma, etc.). L’expérience d’accompagnement dans le secteur agricole est en effet ancienne et diversifiée. La tradition d’aide au secteur agricole peut avoir eu comme conséquence de créer un espace

147

adéquat au développement d’un discours élaboré sur l’accompagnement. Dans le secteur agricole, les problématiques de pérennisation des exploitations et de saisonnalité ont été travaillées de manière spécifique, amenant à des réflexions sur la diversification, les combinaisons d’activités, le travail extérieur, etc., sur fond de reconnaissance des fonctions complémentaires de l’agriculture en zone rurale. Autant de débats et de politiques menant à prendre en compte la question de la pluriactivité. Quant aux organisations non agricoles reconnaissant la pluriactivité, il s’agit de CAE (Coopératives d’Activité et d’Emploi), outil par essence parfaitement adapté à la prise en compte de situations de pluriactivité (quasiment toutes les CAE se retrouvent dans ce groupe), des PFCA (Plate-Forme pour la Création d’Activité), intégrant la pluriactivité dans leur mission d’information et d’orientation des entreprises, et ponctuellement des organismes ayant participé de près aux expérimentations régionales concernant la pluriactivité (expérimentation de la Région, Intersama, ERP).

Pour aller plus loin dans l’analyse, les documents de communication de ces organisations ont été confrontés aux actions qu’elles déclarent conduire. Un protocole de pondération de ces actions a permis de caractériser la nature et l’intensité du lien que l’organisation entretient avec la pluriactivité. Ainsi l’organisation d’un séminaire sur la pluriactivité a eu par exemple plus de poids que la participation à une réunion sur la pluriactivité convoquée par le Conseil régional. De même que la mise en place d’une formation à la pluriactivité a eu plus de poids qu’une simple rubrique « pluriactivité » sur le site web de la structure, etc. Cette qualification de l’intensité du lien de l’organisation à la pluriactivité révèle de manière tout à fait surprenante de fortes divergences entre l’affichage et la pratique : 60% des organisations qui affichent un lien fort avec la question de la pluriactivité dans leur documents de communication entretiennent en pratique des liens « faibles » avec elle (elles n’ont pas d’actions véritablement ciblées). Paradoxalement, près de 60% des organisations n’affichant pas de lien spécifique avec la pluriactivité ont dans les faits un lien « fort » avec elle, qui se traduit par exemple par des actions d’intérêt dédiées aux pluriactifs (Bernardini et Perez Chueca, 2009). La pluriactivité est en définitive loin d’être absente des préoccupations des organisations d’accompagnement mais il n’y a pas de lien direct entre l’affichage de sa reconnaissance dans les écrits institutionnels et les actions effectives qui lui sont destinées. La nature de ces résultats pose de nombreuses questions : sur quels éléments se fonde la reconnaissance de la pluriactivité ? Afficher clairement une reconnaissance de ce phénomène est-il la marque d’un positionnement politique déterminé

148

par des entités administratives plutôt que par un réel engagement dans la problématique ? L’absence d’affichage public découle-t-il simplement du fait que, la pluriactivité du porteur de projet étant commune et son accompagnement implicite, il n’est pas nécessaire d’en faire état (ibid.) ?

Dans la figure suivante (figure 19 ci-dessous), nos organisations ont été positionnées selon les quatre registres identifiés, l’objectif étant de repérer si nous pouvions constater ou non des différences entre les organisations portant une attention particulière à la pluriactivité dans leurs pratiques (groupe 1 dans la figure) et celles n’y faisant pas référence (groupe 2), ou en d’autres termes, de voir si accompagner la pluriactivité modifiait les pratiques des accompagnateurs. Interprétation, appropriation par les individus Vision techniciste, normative

Action concrète, dans les faits Action réflexive SECTEUR 1

Orientation(selon des valeurs)

SECTEUR 2

Litige (résolution de problèmes)

SECTEUR 3

Insertion(questionnement sur la place de l’individu) SECTEUR 4 Performance (optimisation de l’action) socialisation autonomisation Groupe2 15,3% Groupe1 15,1% Groupe2 15,7% Groupe2 59,4% Groupe1 26,4,1% Groupe1 26,4,1% Groupe 2 9,6% Groupe1 31,1%

Groupe 1 : groupe affichant une reconnaissance de la pluriactivité Groupe 2 : groupe n’affichant pas de reconnaissance de la pluriactivité

Figure 19: Poids des organisations de la région Languedoc-Roussillon dans les quatre registres de pratiques de l’accompagnement de Maela Paul (Paul M. 2004), en % de chaque

groupe. Tallon, 2010, d’après (Bernardini et Perez Chueca, 2009)

La reconnaissance de la pluriactivité semble induire des différences notables dans les logiques d’accompagnement.

149

Les organisations qui reconnaissent la pluriactivité (groupe 1 dans la figure) ont des pratiques diverses, bien réparties dans les quatre secteurs. Cette vision générale nous permet de voir que la pluriactivité, par essence multisectorielle, s’appuie sur des pratiques d’accompagnement transversales à de nombreux domaines professionnels. Une typologie basée sur la nature de ces organisations, leur échelle territoriale, leur champ de compétence permettrait d’affiner la compréhension que nous pouvons avoir du positionnement observé. La légère prédominance du registre de l’« insertion » peut s’expliquer par le fait que l’accompagnement des porteurs de projet pluriactifs est souvent intégré à un dispositif d’insertion économique. La logique de l’autonomisation, permise par les activités réflexives développées dans l’accompagnement, est majoritaire. La reconnaissance de la pluriactivité passe ici par une posture considérant le porteur de projet comme sujet-acteur, capable d’identifier et de mobiliser ses propres ressources pour construire son autonomie, et devenir ainsi maître de sa démarche créative, à savoir le développement de son activité. La quasi-totalité des organismes d’accompagnement agricole se retrouve dans ce groupe.

Les structures n’affichant pas une reconnaissance directe de la pluriactivité ont des pratiques d’accompagnement largement dominées par des registres d’insertion et d’apprentissages croisés. Ce résultat s’explique par le fait que ce groupe comprend les structures de formation professionnelle, nombreuses dans la région. Les organisations de ce groupe sont en revanche faiblement présentes dans le registre de l’orientation, qui permet à l’individu d’agir en affinant ses valeurs propres.

Ces logiques d’accompagnement émanent directement des visions de la pluriactivité que peuvent avoir les accompagnateurs ou leurs organisations. Pour pouvoir associer les figures de la pluriactivité avec les figures de l’accompagnement qui leur correspondent, nous avons croisé les définitions de la pluriactivité mobilisées par les accompagnateurs73 avec les démarches d’accompagnement que ces derniers déclarent mettre en œuvre.

73

L’analyse s’est faite sur la base d’un échantillon de 21 accompagnateurs. Pour plus de précision quant à la méthodologie, voir Bernardini S. & Perez Chueca A., 2009. Analyse de l’émergence de dispositifs d’accompagnement aux systèmes d’activité pluriactifs sur la région du Languedoc Roussillon. Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme d’ingénieur agronome (Sandra Bernardini) et du diplôme Master 2 "Innovation et développement des territoires ruraux" (Alberto Pérez Chueca). Montpellier, Rennes (France): AgroCampus Ouest, Université de Montpellier 3, INRA, Région Languedoc Roussillon. 171 p.

150

Le tableau ci-dessous (tableau 5) souligne le « polymorphisme » de l’accompagnement à la pluriactivité et révèle, au travers des postures d’accompagnement, des visions tranchées du pluriactif qui conditionnent logiquement les outils et démarches privilégiés par les accompagnateurs. Nous voyons apparaître ainsi quatre grandes figures de la pluriactivité, associées à six figures d’accompagnement du pluriactif :

151

La pluriactivité est… Figures de

l’accompagnateur Caractéristiques principales

Figure du pluriactif associée

la figure du caritatif

Il subventionne et/ou offre un accompagnement dans un souci éthique, pour que les porteurs de projets puissent « s’en sortir ». L’accompagnement concerne des projets de petite envergure.

Le pluriactif est un individu « dans le besoin »

…une nécessité économique

la figure du pragmatique

Il accompagne le porteur de projet dans une visée d’efficacité et de fonctionnalité. L’accompagnement est encadré avec un cahier des charges et suit les réglementations institutionnelles mises en place.

Le pluriactif est un individu défini par son statut juridique, fiscal et social

la figure du développeur

Il accompagne dans le but de développer le territoire rural et les liens sociaux. L’approche du projet est globale, l’orientation du projet et de l’individu n’est pas déterminée par avance.

Le pluriactif est un entrepreneur innovateur …un modèle d’activité économique à part entière La figure du politique

Il accompagne l’individu vers son insertion dans le monde économique et social. Le public visé est souvent en situation sociale affaiblie que l’on cherche à faire entrer dans un système de développement défini pour le territoire.

Le pluriactif est un agent économique du territoire …un épanouissement de soi et de son activité La figure du solidaire

Il accompagne le porteur de projet dans un but d’exploration de lui-même, de ses capacités et de son projet d’activité. Il utilise des outils collectifs, centrés sur l’individu qui facilitent la mise en œuvre de son projet. Le public cible est souvent spécifique nécessitant une aide soutenue (femmes, jeunes, RMIste.)

Le pluriactif est « une mine de talent »

…un droit auquel on peut prétendre

La figure du revendicateur

Il accompagne le porteur de projet en tant qu’individu faisant partie d’une sphère d’appartenance collective. L’accompagnement vise la construction identitaire de l’individu, elle n’est pas imposée au porteur de projet mais travaillé avec lui pour accéder à cette sphère d’appartenance sociale. L’accompagnement prône des valeurs collectives, sociale, parfois politiques (syndicalistes)

Le pluriactif a une identité à part entière

Tableau 5 : Figures d’accompagnement à la pluriactivité en Languedoc-Roussillon

(Bernardini et Perez Chueca, 2009)

Pour l’accompagnateur « caritatif » ou « pragmatique », la pluriactivité est une nécessité économique. Le pluriactif doit être accompagné pour sortir de la situation difficile dans laquelle il se trouve. Cette finalité prime sur le projet. Pour l’accompagnateur « développeur » ou « politique », la pluriactivité est un modèle d’activité économique à part

152

entière et le pluriactif est un acteur important dans son territoire, qu’il s’agit d’accompagner pour qu’il valorise au mieux son potentiel innovateur. Pour l’accompagnateur « solidaire », la pluriactivité est une voie d’épanouissement de soi et de son activité, et l’accompagnement a pour but d’aider l’individu à exprimer sa « richesse intrinsèque », dans une visée de reconnaissance réflexive de ses propres compétences et capacités. Enfin, pour l’accompagnateur « revendicateur », la pluriactivité est un droit auquel on peut prétendre. L’objectif de l’accompagnement est de soutenir l’individu dans la reconnaissance de ses droits et dans son insertion dans des démarches collectives fédératives. Nous retrouvons dans ces quatre finalités assignées à la pluriactivité en Languedoc-Roussillon, les quatre stratégies d’accompagnement relevées en Rhône-Alpes (Laurent, et al., 2006), dont nous avons parlé précédemment.

Ces figures du pluriactif et de son accompagnateur font ressortir nettement différentes approches du métier d’accompagnateur : accompagnateur expert, à l’avis souvent décisif ; accompagnateur conseiller ou facilitateur, qui fournit des pistes de réflexion pour l’action ; accompagnateur formateur qui permet la prise en main et l’utilisation d’outils ; accompagnateur animateur et médiateur des relations entre porteur de projet et autres acteurs (administrations, banques, collectifs de travail, coopératives de matériel, etc.). Ces approches hétérogènes sont complémentaires et souvent intégrées, les accompagnateurs combinant en général, consciemment ou non, plusieurs de ces postures. Elles montrent dans la pratique que la conception d’une démarche d’accompagnement n’a rien de normatif et d’établi, et que,