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3. La protéine prion

3.5 Glycosylation de la PrP

3.5.1 N-Glycosylation

La PrP possède deux sites potentiels de N-glycosylation (Asn181IleThr et ASn197PheThr chez l’homme), plusieurs sites potentiels de O-glycosylation et une ancre GPI (glycosylphosphatidylinositol) (Figure 9).

Seuls les sites de N-glycosylation ont été décrits comme étant variablement occupés. Aucun O-glycane n’a été détecté ni dans la PrPc extraite de cerveau de hamster syrien, ni dans la PrPres isolée à partir cerveau de hamster infecté par scrapie.

Néanmoins, ces résultats n’excluent pas la possibilité qu’une population mineure de PrPc O-glycosylée ne soit détectée un jour.

La glycosylation se fait après clivage du peptide signal dans le reticulum endoplasmique par l’ajout de N-glycanes riches en mannose (Glc3-Man9-GlcNAc2). Au même moment, un pont disulfure est formé et une ancre GPI est ajoutée après clivage du peptide signal C-terminal.

Les deux sites de N-glycosylation sont variablement occupés (Stimson et al., 1999) permettant l’expression de trois glycoformes de la protéine : non glycosylée, monoglycosylée (29-30 kDa) et diglycosylée (33-35 kDa). Le ratio de ces trois formes varie selon le type cellulaire ou selon les tissus étudiés (Moudjou et al., 2001 ; Beringue et al., 2003 ; Monnet et al., 2003).

Plus de 50 motifs glycaniques sur les deux sites de N-glycosylation aussi bien sur la PrPc que sur la PrPsc extraite de cerveau de hamster ont été observés (Rudd et al., 1999 ; Pan et al., 2002).

Figure 9 : Représentation de la position des N-glycanes et de l’ancre GPI sur la PrP (d’après Rudd et al., 2001)

Ancre GPI

N-glycanes

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Ces motifs contiennent du galactose, de la N-acétylglucosamine, du fucose et de l’acide sialique. Par ailleurs, l’étude de Rudd montre une plus forte proportion de glycanes complexes tri- et tétraantennés dans la PrPres comparativement à la PrPc. Cette modification indique une altération du mécanisme de glycosylation de la PrP en présence de la protéine mal conformée, associée, selon les auteurs, à une diminution de l’activité de l’enzyme GnTIII (N-acétylglucosaminyltransférase III) (Rudd et al., 1999 ; Stimson et al., 1999).

La N-glycosylation de la PrP peut avoir différents impacts comme une action sur la structure, la localisation membranaire ou le trafic de la protéine. Elle pourrait influencer la transconformation de la PrPc, la propagation de l’agent infectieux ainsi que l’affinité entre PrPres et PrPc, la matrice extracellulaire et d’autres ligands. Ces glycosylations seraient également responsables de la diversité de souches de prions.

3.5.2 La glycosylation et le repliement de la PrP

L’addition de N-glycanes permet généralement un bon repliement des protéines in vivo et in vitro (Imperiali et Rickert, 1995). La PrPc glycosylée est co-immunoprécipitée avec des protéines comme la PDI, grp94, la calnexine, la calreticuline, les protéines chaperonnes associées au reticulum endoplasmique intervenant dans le repliement. La PrP non glycosylée est retrouvée associée uniquement avec grp94, ce qui semble indiquer que les résidus sucres et les chaperonnes exercent un rôle dans le repliement conformationnel de la PrP (Capellari et al., 1999).

La N-glycosylation influence aussi la topologie de la PrP. En effet, les formes N-terminales ou tronquées sans GPI sont non glycosylées, ce qui semble indiquer que l’ancre GPI et l’ancrage C-terminal à la membrane sont nécessaires à la N-glycosylation de la PrP (Walmsley et al., 2001).

3.5.3 Glycosylation et conversion de la PrPc en PrPres

En général, la glycosylation augmente la stabilité des protéines (Wormald et Dwek, 1999).

Ceci impliquerait que la forme diglycosylée de la PrP soit plus stable que les formes monoglycosylées et non glycosylées et ainsi l’occupation des deux sites de glycosylation augmenterait la barrière d’énergie libre pour atteindre l’état intermédiaire nécessaire pour la conversion. La forme diglycosylée de la PrPsc extraite du vMCJ est largement prédominante

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alors que la forme non glycosylée est minoritaire comparée aux autres souches de MCJ (Figure 11). Ceci pourrait expliquer partiellement le caractère exceptionnel de cette variante.

La transconformation de la PrPc en PrPsc semble facilitée par une inhibition de la N-glycosylation (Lehmann et Harris, 1997). Il en est de même lorsque les deux sites de glycosylation sont délétés (Korth et al., 2000). Aussi, certaines mutations au niveau du gène PRNP (Hill et al., 2006) entraînant notamment une substitution du codon 183 (Grasbon-Frodl et al., 2004) déterminent une altération de la glycosylation à cet endroit et engendrent une forme familiale de la maladie (Nitrini et al., 1997).

Cependant ces résultats doivent être considérés avec précaution car l’équipe de Capellari et al. (2000) a montré que l’origine de la maladie était imputée à des substitutions d’acides aminés et non à la perte des glycanes.

L’impact des glycanes dans la transconformation a été mis en évidence in vitro dans un système acellulaire où l’élimination des carbohydrates de la PrPc a permis une meilleure conversion en PrPres (Priola et Lawson, 2001).

Une étude réalisée in vivo a montré que des mutations d’un ou des deux sites de glycosylation n’influencent pas la susceptibilité à l’ESB et à la scrapie. La diglycosylation n’est pas mandataire de la transconformation (Neuendorf et al., 2004).

De même Cancellotti et al. (2005) ont constitué un même type de souris transgéniques et ont montré que le manque de glycanes n’influence pas la maturation ou la stabilité de la PrP. Il a aussi été observé que l’expression d’une seule chaîne de glycanes permet l’expression en surface cellulaire et que la forme non glycosylée est cantonnée à la zone intracellulaire sans transconformation en PrPsc.

3.5.4 Glycosylation et typage de souches

La mise en évidence de différences précises et reproductibles dans la période d’incubation, les signes cliniques, la vacuolisation et les dépôts de PrPres dans le cerveau a conduit à la notion de souche de prions (Bruce et Fraser, 1991).

Certains auteurs ont tenté de classer les souches en fonction du profil de migration électrophorètique de la PrPres après digestion à la protéinase K. En effet, les différentes conformations stériques de la PrP exposent différents sites de coupure à l'action des enzymes protéolytiques ce qui a pour conséquence la formation de fragments de masses moléculaires

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différentes. Combinée à la différence de ratio existant entre les formes de PrP non, mono-, et diglycosylées, cette approche a permis de définir quatre types de conformation selon John Collinge (type I, II III et IV, voir Figure 10) et deux types reprenant les formes sporadiques selon Piero Parchi (type 1 CJD, MM1; type 2 CJD MM2, MV2, VV2, voir Figure 11).

Le conflit de classification des MCJ humaines a été relancé dernièrement. En effet, selon Polymenidou et ses collaborateurs (2005), différentes souches sont présentes simultanément Figure 10 : Caractérisation des différents types de PrP pathologiques humaines (d’après Collinge et al., 1996b).

Figure 11 : Profil électrophorétique des deux types de MCJ sporadiques décrits par Parchi et al (1996) : type 1 CJD MM1; type 2 CJD MM2, MV2, VV2. Le traitement à la PNGase réduit le profil à une seule bande correspondant à la PrPres non glycosylée.

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dans certains extraits de cerveaux de patients. La coexistance de plusieurs types de MCJ a été révélée grâce des anticorps spécifiques d’un type de MCJ sporadique particulier. Quoiqu’il en soit, même si cette classification ne rend pas compte de la complexité des souches de scrapie, elle a été un argument important pour établir la filiation entre vMCJ et ESB (Collinge et al., 1996b ; Parchi et al., 1996 ; Hill et al., 1999).

De nouvelles souches d’ESB et de scrapie ont également été identifiées suite à l’analyse du profil électrophorétique et du ratio des glycoformes de la PrPres (Benestad et al., 2003 ; Biacabe et al., 2004 ; Klingeborn et al., 2006).

La très bonne conservation chez chaque espèce même après passage de la barrière d’espèce des profils de lésion et le maintien des profils électrophorétiques de la PrPres pour chaque souche supportent l’hypothèse qu’une glycosylation associée pour chaque souche dirige la PrPres vers des sous-populations neuronales portant une PrPc possédant un profil de glycosylation très proche (Collinge et al., 1996b).

D’autre part, l’équipe de Priola a montré que la glycosylation de la PrPc pouvait fortement orienter la formation interespèce de PrPres en influençant la quantité de PrPc liée à PrPres tandis que la séquence en acides aminés influence la quantité de PrPres générée durant l’étape de transconformation (Priola et Lawson, 2001).