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3. La protéine prion

3.2 Fonctions de la PrPc

Actuellement, la ou les fonctions de la PrPc restent encore imprécises. L’invalidation du gène Prnp chez différentes souches de souris a fourni des résultats contrastés. Sur trois lignées de souris transgéniques indépendantes, deux présentaient un phénotype quasi normal et étaient parfaitement viables (Bueler et al., 1992 ; Manson et al., 1994) et la troisième présentait des symptômes neurologiques de type ataxie ainsi qu’une dégénérescence des cellules de Purkinje (Sakaguchi et al., 1996). Ce dernier phénotype résulte en fait de l’expression ectopique dans le cerveau d’un gène codant pour la protéine Doppel (Moore et al., 1999). Doppel et PrPc pourraient avoir des effets antagonistes car la réexpression de PrPc est capable de bloquer la dégénérescence induite par Doppel.

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Pour les autres souris PrP 0/0, il existe toujours des controverses concernant des anomalies mineures comme des troubles de l’inhibition GABAergique, de la potentialisation à long terme et de l’alternance veille/sommeil (Collinge et al., 1994 ; Tobler et al., 1996).

Alors que cette protéine joue un rôle de première importance, eu égard à la conservation de son gène et à son implication dans les ESST, il reste que la délétion du gène n’entrave pas significativement le comportement des souris suggérant que la PrPc n’exerce pas de fonction vitale et/ou que les fonctions exercées peuvent être compensées par d’autres molécules.

3.2.1 Signalisation cellulaire

Plusieurs études ont conduit à l’hypothèse que la PrPc pourrait jouer un rôle dans la transduction du signal en interagissant avec d’autres molécules, cela dans la survie, la différenciation ou l’adhésion cellulaire.

A. Survie cellulaire neuronale

La PrPc pourrait avoir un rôle neuro-protecteur en raison de son interaction avec Grb2 impliqué dans l’activité des MAP kinases Erk1,2 (Mouillet-Richard et al., 2000 ; Spielhaupter et Schatzl, 2001 ; Tari et Lopez-Berestein, 2001).

La liaison de la PrPc avec des anticorps, des peptides ligands ou bien le ligand de surface STI-1 (Stress inductible protein) mène à l’accroissement de l’AMPc et à l’activation des voies de signalisation Erk (Chiarini et al., 2002) conduisant à un effet cytoprotecteur.

Des cellules neuronales primaires isolées de souris PrP 0/0 comparativement à des neurones Prnp +/+ sont fortement sensibles au stress apoptotique. Une surexpression de PrP ou de Bcl-2 par ces cellules supprime cet effet apoptotique mitochondrial (Kuwahara et al., 1999). De plus, au niveau de neurones primaires humains, PrPc pourrait jouer cet effet protecteur de la mort cellulaire médiée par Bax à des niveaux équivalents à la fonction neuroprotectrice de Bcl2 (Bounhar et al., 2001).

Dernièrement, il a été prouvé que la délétion de PrPc entraîne une diminution de l’effet anti-apoptotique de la cascade de la phosphatidylinositol 3-kinase/Akt. Cela augmente l’activité de la capase 3 induisant de ce fait une aggravation des lésions neuronales suite à des ischémies cérébrales induites (Weise et al., 2006).

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Néanmoins, d’autres études sur culture cellulaire ont montré que la surexpression de PrPc sensibilise les cellules traitées à la staurosporine et augmente l’activité de la caspase-3, enzyme impliquée dans la cascade apoptotique. Il a été suggéré que cet effet serait uniquement dû aux formes intracellulaires de PrPc car la séquestration de PrPc à la surface cellulaire inhiberait cet effet sensibilateur de la PrPc (Zhang et al., 2006 ; Paitel et al., 2002).

La PrPc jouerait ainsi un rôle dans la survie cellulaire mais étant tantôt anti-apoptotique, tantôt pro-apoptotique.

B. Différenciation neuronale

Selon de récentes études, la PrPc serait impliquée dans la neurogenèse. Le taux d’expression de la PrPc est influencé par la différentiation neuronale de cellules souches multipotentes en cellules matures (Steele et al., 2006). Ensuite, en plus de l’effet neuroprotecteur induit par la liaison de STI-1 à PrPc, cette liaison induirait également une croissance neuritique (Lopes et al., 2005).

La PrPsc serait aussi capable d’induire in vitro une différentiation axonale et neuritique de neurones ainsi qu’une augmentation des contacts synaptiques (Kanaani et al., 2005).

C. L’adhésion cellulaire

La PrPc semble jouer un rôle par son interaction avec des molécules impliquées dans l’adhérence cellulaire neuronale (N-CAM) (Schmitt-Ulms et al., 2001), le précurseur de la laminine (LRP), du récepteur de la laminine (LR) ou la laminine (Graner et al., 2000).

La laminine ainsi que les N-CAM affectent à la fois l’adhésion cellulaire neuronale mais aussi la formation de neurites. Liesi et al. (1989) ont mis en évidence la liaison de peptides à un domaine connu de la laminine capable de médier la croissance de neurites. D’autre part, l’interaction entre PrPc et les protéines membranaires LRP/LR induirait l’internalisation de la PrP activant la voie de signalisation via la tyrosine kinase p59fyn (Mouillet-Richard et al., 2000) mais contribuerait également à la communication intercellulaire et à la survie.

Le complexe LRP/LR d’une cellule ainsi que la PrPc pourraient servir de récepteur à la PrPres et permettre la transconformation de PrPc (Gauczynski et al., 2001). Cette interaction entre ces partenaires s’établit par l’intermédiaire des GAG et notamment les héparanes sulfates (Hundt et al., 2001) qui ont été largement décrits pour intervenir dans l’adhésion cellulaire.

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3.2.2 Fonction synaptique

La protéine prion est exprimée majoritairement à la surface des neurones au sein de rafts et plus précisément au niveau de terminaisons pré-synaptiques (Fournier et al., 1995 ; Herms et al., 1999). La PrPc est co-localisée avec la synapsine I, protéine associée aux vésicules synaptiques (Spielhaupter et Schatzl, 2001).

Ces résultats indiquent que la PrPc pourrait transiter entre des vésicules synaptiques et la membrane pré-synaptique et jouer ainsi un rôle dans le recyclage de vésicules ou plus directement dans la transmission synaptique (Kretzschmar et al., 2000). De plus, la capacité de la PrP à activer la protéine kinase fyn, trouvée abondamment dans les vésicules synaptiques et impliquée dans la potentialisation à long terme (Grant et al., 1992), semble confirmer son rôle dans la fonction synaptique.

3.2.3 La PrP et le métabolisme du cuivre

La PrPc peut lier jusqu’à 4 ions cuivre avec une faible affinité et de manière pH dépendante au niveau des octapeptides répétés de son extrémité N-terminale (Wells et al., 2006).

La quantité de cuivre liée par cette région est directement proportionnelle au nombre de répétitions (Viles et al., 1999 ; Brown DR et al., 2000) et dépend du niveau d’expression de la PrPc (Brown DR, 1999).

La partie N-terminale, hautement flexible, semble stabilisée par la présence de cuivre (Miura et al., 1996 ; Stöckel et al., 1998 ; Leclerc et al. 2006). Ce changement conformationnel pourrait induire une structure tridimensionnelle fonctionnelle de la PrPc qui pourrait permettre notamment sa liaison avec certains récepteurs cellulaires, tels le récepteur à la laminine interagissant avec la région octapeptidique (Hundt et al., 2001).

Un autre site de fixation du cuivre a été décrit par Jackson et ses collaborateurs (2001) aux environs des histidines 96 et 111 de la PrPc. La PrPc fixerait également le zinc, le manganèse, le fer et le nickel avec une affinité moindre (Brown DR et al., 2000 ; Jackson et al., 2001).

Le fait que l’expression de la PrPc augmente la résistance des cellules à la toxicité du cuivre et du zinc (Brown DR et Besinger, 1998) permet de proposer une activité d’enzyme anti-oxydante de la PrPc. La PrPc semblerait ainsi participer à l’homéostasie cuivre en modulant

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l’activité de certaines enzymes dépendantes du cuivre telle l’enzyme SOD-1 (superoxyde dismutase Cu/Zn) et/ou à une activité SOD-like de la PrPc (Brown DR, 1999).

La PrPc pourrait également jouer un rôle d’agent chélateur du cuivre extracellulaire pour son transport vers des cibles intracellulaires. En effet, le cuivre favorise l’endocytose et la redistribution de la PrPc à la surface cellulaire (Pauly et Harris, 1998). Cette observation prend toute son importance au niveau de la régulation du taux de cuivre dans les synapses où la PrPc modulerait l’internalisation des ions cuivre dans les neurones présynaptiques (Kretzschmar et al., 2000) et protégerait ainsi les neurones de la toxicité induite par cet ion (Haigh et al., 2006).

3.2.4 La PrP et le système immunitaire

La PrPc est largement exprimée par les cellules du système immunitaire (Fournier et al., 1998 ; Thielen et al., 2001a) laissant y supposer une activité physiologique. Plusieurs équipes ont étudié les implications fonctionnelles de la PrPc au niveau du système immunitaire. C’est d’abord Cashman et ses collaborateurs (1990) qui ont démontré que l’expression de PrPc est accrue à la surface des lymphocytes suite à une activation cellulaire et que le blocage de la PrPc par des anticorps polyclonaux annule cette activation.

Ensuite, d’autres ont montré une augmentation de l’expression de la PrPc à la surface de lymphocytes T, suite à des stimulations mitotiques spécifiques (Mabbott et al, 1997 ; Kubosaki et al., 2003 ; Bainbridge et Walker, 2005 ; Ballerini et al., 2006), et de cellules dendritiques (Burthem et al., 2001 ; Ballerini et al., 2006).

De plus, la surexpression de la PrPc induisant un effet anti-oxydant par chélation d’ion cuivre entraînerait des altérations de la maturation des lymphocytes T dans le thymus (Jouvin-Marche et al., 2006).

La PrPc serait capable de moduler la phagocytose. In vitro, les macrophages issus de souris PrP 0/0 présentent une activité de phagocytose plus importante que ceux de souris PrP +/+.

De même in vivo, en condition physiologique ou inflammatoire, la phagocytose est plus efficiente chez les souris PrP 0/0 (de Almeida et al, 2005).

Récemment, des chercheurs ont postulé une implication fonctionnelle de la PrPc dans l’interaction lymphocyte T/cellule dendritique. Les cellules dendritiques seraient capables de rassembler PrPc dans les sites de contact avec les lymphocytes T à savoir des synapses immunologiques. Il semble que la PrPc y agisse comme facteur de signalisation plutôt que

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comme molécule d’adhésion. Notons que l’absence d’expression de la PrPc n’affecte pas la maturation des cellules dendritiques (Ballerini et al., 2006).

Donc, au niveau du système immunitaire, la PrPc semble stimuler des cascades d’activation impliquées dans la stimulation lymphocytaire, les synapses immunologiques ou dans la phagocytose. Des signaux de transduction impliquant des MAP/kinase et une élévation du taux d’ions calcium intracellulaire ont été observés au niveau des lymphocytes T. La mobilisation de la PrPc, au niveau de rafts de type reggie rassemble des molécules de transduction importantes telles Thy-1, TCR/CD3, fyn, mck, LAT (Stuermer et al., 2004).