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Chapitre I. Introduction Générale

3. Etat des lieux de la taxonomie du genre Sargassum

3.4. Synthèse de la classification actuelle

3.4.4. Le sous-genre Sargassum

Ce sous-genre regroupe la majorité des espèces du genre et sa classification en quatre sections (Acanthocarpicae, Malacocarpicae, Phyllocystae et Zygocarpicae) présente de nombreuses ambiguïtés. Seules de rares études se sont intéressées à la taxonomie de ce sous-genre bien qu’il soit reconnu comme le plus divers et le plus abondant dans le monde (Phillips 1995). Le placement des espèces dans l’une ou l’autre des sections qui le composent est souvent difficile et les phylogénies moléculaires disponibles montrent qu’il est nécessaire de réévaluer les caractères morphologiques ayant traditionnellement valeur taxonomique. D’après la clef d’identification de Tseng et Lu (1988a), les espèces appartenant à la section Zygocarpicae sont reconnues principalement sur la base de réceptacles composés carpophylliques ou pseudo-carpophylliques pouvant être malacocarpiques ou

acanthocarpiques (Tseng et Lu 1988a). Cette clef d’identification montre que certains des critères utilisés pour discriminer les sections Malacocarpicae et Acanthocarpicae se retrouvent dans la section Zygocarpicae. La synthèse présentée dans le Tableau I.2 montre la redondance de certains caractères morphologiques des réceptacles attribués aux différentes sous-divisions des sections du subgen. Sargassum. A titre d’exemple, des espèces dioïques à réceptacles femelles acanthocarpiques et à réceptacles mâles malacocarpiques se trouvent aussi bien dans la ser. Plagiophyllae (sect. Acanthocarpicae sous-sect. Bisserulae) que dans les groupes d’espèces Tenuia (sect. Zygocarpicae, sous-sect. Holozygocarpicae, ser. Carpophyllae) et Cinerea (sect. Zygocarpicae, sous-sect. Pseudozygocarpicae, ser. Cinerea). La seule différence entre ces sous-divisions serait la présence dans la section Zygocarpicae de réceptacles complexes (ou) zygocarpiques, c’est-à-dire ayant des feuilles et/ou des vésicules intercalées entre les ramifications fertiles portant les conceptacles. Ce caractère semble toutefois inconstant au regard de descriptions et d’illustrations de certaines espèces attribuées à la section Malacocarpicae (Tseng et Lu 1988a, 1992b, Ajisaka et al. 1995) qui montrent de manière évidente la présence de vésicules attachées aux réceptacles. Ceci illustre les problèmes

taxonomiques liés à l’utilisation d’une classification instaurée au 19ième siècle, avec des notions

limitées quant à la polymorphie des taxons. De nouveau, il apparaît essentiel de réviser la classification du sous-genre en prenant en compte la variabilité intrinsèque de chaque taxon.

9 La section Zygocarpicae

La section Zygocarpicae est traditionnellement reconnue par la présence de réceptacles zygocarpiques, c'est-à-dire associés à des feuilles et des vésicules (J. Agardh 1889, Setchell 1935c, Tseng et Lu 1988a). J. Agardh (1889) lui attribue une seule sous-division (tribu Carpophyllae). Grunow (1915, 1916a,b) reconnaît cette même sous-division et propose une seconde tribu, plus tard confirmée et élevée au rang de sous-section par Setchell (1935c). Setchell (1935c) propose ainsi deux sous-sections, la subsect. Holozygocarpicae Setchell, incluant et transférant la tribu Carpophyllae J. Agardh au rang de série, et la subsect. Pseudozygocarpicae Setchell. Chacune des deux sous-sections (Holozygocarpicae et Pseudozygocarpicae) contient une unique série composée de groupes d’espèces. La distinction entre Holozygocarpicae et Pseudozygocarpicae repose sur des caractères ambigus. Dans le cas des Holozygocarpicae, les pédoncules des réceptacles peuvent être absents (signifiant ainsi qu’ils peuvent également être présents) alors que pour les Pseudozygocarpicae ils sont généralement présents (signifiant ainsi qu’ils peuvent également être absents). De la même manière, les réceptacles des Holozygocarpicae ont soit uniquement des feuilles, soit à la fois des feuilles et des vésicules, alors que dans le cas des Pseudozygocarpicae, ils présentent toujours un seul type d’organe végétatif (feuilles ou vésicules). Avec de tels critères, il apparaît difficile, par exemple, de classer une espèce à réceptacles pédonculés et feuillés, laquelle pourrait être attribuable à l’une ou l’autre de ces deux sous-sections. D’après l’étude de 17 taxons de Chine et de 10 taxons du Japon Tseng et Lu (1988a) et Ajisaka et al. (1995), respectivement, confirment les deux sous-sections de Setchell et incluent

plusieurs nouveaux groupes d’espèces. Les groupes d’espèces sont souvent monospécifiques (ex. Vietnamensa et Denticarpa) et au maximum représentés par quatre espèces (ex. Tenuia). On peut s’interroger alors sur l’intérêt de ces groupes d’espèces qui compliquent la taxonomie du genre et n’ont, par ailleurs, aucun statut au regard du CINB. Il est évident que les groupes d’espèces et les sous-sections appartenant à la section Zygocarpicae sont définis sur des caractères morphologiques ambigus et par conséquent de faible valeur taxonomique. Une étude précise des spécimens types des espèces de la section, une analyse de leur variation morphologique des divers organes et une étude phylogénétique sont nécessaires avant toute révision taxonomique des Zygocarpicae.

9 La section Malacocarpicae

La taxonomie de cette section a été peu étudiée du fait probablement que le genre Sargassum a été étudié principalement dans les pays asiatiques (Chine et Japon) où le sous-genre Sargassum, et donc la section Malacocarpicae, sont peu représentés. La section Malacocarpicae constitue la seconde des deux séries proposées par J. Agardh (1889) qui la divise en trois tribus (Fruticuliferae, Cymosae et Racemosae) différenciées par la morphologie des réceptacles. La tribu Racemosae est elle-même divisée en trois sous-séries (Acinariae, Glandulariae, Siliquosae) soulignant la diversité morphologique de la section. Afin de respecter l’article 4.1 du CINB, Abbott et al. (1988) ont élevé la série Malacocarpicae au rang de section et Tseng et Lu (1992a) ont transféré les tribus et les sous-tribus (sous-divisions reconnues comme supra-génériques par du CINB) au rang de sous-sections et séries. L’historique du placement des espèces de Sargassum subgen. Sargassum sect. Malacocarpicae au sein de ces sections et séries est complexe et plusieurs espèces ont été transférées d’une sous-section à une autre (cf. Tseng et Lu 1992b pour exemples).

9 La section Acanthocarpicae

D’après Setchell (1931), la plupart des espèces traditionnellement attribuées à la sect. Acanthocarpicae avaient dans un premier temps été attribuées au genre Carpacanthus Kützing. Par la suite, J. Agardh (1848) décrit la tribu Acanthocarpa J. Agardh avec huit espèces qu’il attribue à la section Sargassum, puis transfère la tribu au rang de série Acanthocarpicae (J. Agardh 1889), et finalement Abbott et al. (1988) élèvent la série au rang de section par conformité au CINB. Cette section est traditionnellement reconnue par la présence de réceptacles épineux (acanthocarpiques). Les espèces attribuées à cette section sont largement citées dans la littérature disponible sur la région Indopacifique, notamment S. crassifolium, S. cristaefolium, S. echinocarpum, S. ilicifolium, S. oligocystum et S. swartzii. Certaines de ces espèces ont fait l’objet de plusieurs études dans le but de résoudre des ambiguïtés d’identification liées principalement à des variations morphologiques des feuilles (Ajisaka et al. 1997, Ajisaka 2006).

9 La section Phyllocystae

La section Phyllocystae Tseng (1985) est caractérisée par la présence de vésicules foliacées appelées phyllocystes. Elle a été placée par l’auteur au sein du subgen. Bactrophycus. Sur la base d’analyses ADN du marqueur nucléaire ITS-2 effectuées sur deux de ses espèces (S. mcclurei et S. quinhonense), Stiger et al. (2000, 2003) proposent le transfert de la sect. Phyllocystae du subgen. Bactrophycus au subgen. Sargassum. Ce transfert crée des ambigüités taxonomiques puisque les espèces de la section Phyllocystae exhibent des réceptacles épineux, lesquels, au sein du sous-genre Sargassum, sont traditionnellement caractéristiques de la section Acanthocarpicae. Le caractère ‘réceptacles épineux’ a pu apparaître, ou réverser, independemment plusieurs fois au cours de l’évolution, et ne devrait donc pas être considéré comme ayant une valeur systématique. Selon Yoshida et al. (2002), la position taxonomique de la section Phyllocystae au sein du subgen. Sargassum doit être revue, et les auteurs recommandent l’analyse de plusieurs marqueurs ADN en considérant plusieurs espèces issues des trois sections traditionnelles du subgen. Sargassum (Malacocarpicae, Acanthocarpicae et Zygocarpicae). Il apparaît également essentiel d’inclure dans ces analyses l’espèce-type de la section Phyllocystae (S. phyllocystum) et de compléter le travail par des études morphologiques.

9 La place de Schyzophycus

La tribu Schizophylla J. Agardh (1848) était composée de cinq espèces. Lors de son élévation au rang de sous-genre, J. Agardh (1889) a transféré trois espèces au subgen. Phyllotrichia, une espèce au subgen. Bactrophycus, et n’a conservé que S. patens dans le subgen. Schizophycus. De facto, S. patens représente l’espèce-type du subgen. Schizophycus. Plus tard, Womersley (1954) a proposé son transfert au sein du subgen. Phyllotrichia sur la base de similitudes morphologiques (Womersley 1954, Yoshida 1983). Sur la base d’une séquence ADN de l’espèce-type (S. patens), Stiger et al. (2000) et Yoshida et al. (2004) ont proposé de fusionner les sous-genres Schizophycus et Sargassum. Malgré ces résultats et sur la base de caractères morphologiques, Goldberg et Huisman (2004) ont préféré opter pour la proposition de Womersley (1954). Les vues divergentes de ces auteurs soulignent la nécessité de nouvelles études considérant à la fois des analyses morphologiques et des marqueurs ADN supplémentaires.