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La genèse de l’aversion postmoderne vis-à-vis de la religion

L’influence des changements des notions de base sur la compréhension de la culture et de la religion

2.2.2. Parler à personne : une notion postmoderne de la religion

2.2.2.1. La genèse de l’aversion postmoderne vis-à-vis de la religion

Pourquoi la religion se situe-t-elle en opposition à la maladie ? D’où vient cette comparaison postmoderne ? Avant de répondre à ces questions, il faut d’abord mentionner brièvement les œuvres des postmodernes consacrées à cette problématique.

Le texte de base est celui de la Revue du séminaire philosophique de Capri. Le livre Religion rédigé par Jacques Derrida et Gianni Vattimo comporte sept interventions. Derrida publie son discours dans ce livre, mais aussi séparément dans Foi

et Savoir (suivi de l’entretien avec Michel Wieviorka). Cependant, le thème de la

religion revient plus souvent chez Vattimo dans les ouvrages suivants : Avenir de la

religion (avec R. Rorty), Belief, Christianity, Après le christianisme et Après la mort de Dieu. Un autre philosophe, Michel Foucault, analyse les rapports entre la religion et la

sexualité en consacrant à cette question une place importante dans le premier volume d’Histoire de la sexualité. Chez Bauman et Rorty220

, on ne trouve pas d’œuvre entièrement consacrée à la religion. Le premier livre des notes sur ce sujet en prévenant de l’intégrisme et du fondamentalisme dans La modernité comme une source des

souffrances ; le deuxième se réfère quelques fois au christianisme dans Contingence, ironie et solidarité, par exemple, mais à part cela il n’existe qu’un entretien avec Rorty

et Vattimo qui traite de la religion. L’avenir de la religion réalisé par Antonio Zabala concerne deux discours des postmodernes et l’interview Quel futur pour la religion

220

En décrivant ce qu’est l’Etre absolue, Rorty s’appuie sur les théories de Kant, James, Brandom et Tillich. Le postmoderne prouve, à partir du caractère théorique de la notion de Dieu, que ce terme a été remplacé par un autre, plus adapté à notre temps, celle de « l’utopie démocratique ». Grâce à cette substitution nous avons un choix. Chacun décide aujourd’hui s’il veut croire ou pas et sa décision dépend de l’efficacité de la prière dans la vie quotidienne de l’individu. Cf. R.RORTY, Philosophy as Cultural Politics [La philosophie comme la politique culturelle], Cambridge, Cambridge University Press, 2007, p. 20-50.

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après la métaphysique ? Outre ces publications, les postmodernes reprennent la

question religieuse dans quelques articles sur l’analyse de la relation entre la politique, la technique, la société et la religion. En général, ils répètent leurs thèses annoncées dans des œuvres évoquées ci-dessus.

Selon Derrida, les mots « religion » et « maladie » sont des antonymes. A notre l’époque de rejet de la religion, nous nous trouvons en état de maladie : nous cherchons les meilleures solutions pour récupérer la santé. Si nous voulons guérir, les théories fondatrices de la postmodernité nous proposent de supprimer la religion du discours de la réalité. D’un côté, parce que ces théories luttent contre la thèse théiste : Nietzsche proclame « la mort de Dieu », Feuerbach « la création de Dieu par l’homme », Freud met en évidence le lien entre la religion et les pathologies psychiques, Heidegger nie la métaphysique classique, Marx réduit la réalité à la matière en évolution221. Ces philosophes inspirent la pensée postmoderne en excluant la thèse théiste. D’autre côté, parce que la religion n’a plus sa place dans la vision du monde en raison de la présence du naturalisme dans la théorie de la réalité. Celui-ci est étroitement lié à la négation de l’existence de Dieu à cause du combat postmoderne contre toute forme du totalitarisme, y comprend le fondamentalisme religieux. Chacune de ces causes est un paradigme de la philosophie de la postmodernité.

Le naturalisme nie l’existence d’une raison d’être extérieure au monde. La réalité peut avoir sa raison d’être en soi, mais cette raison reste toujours inconnue et inaccessible. En raison de ce caractère mystérieux du principe de la réalité, on peut penser qu’à vrai dire le monde n’a aucune raison d’être. Ainsi, le naturalisme, propre à la postmodernité, est à l’origine de la négation de Dieu et de la théorie du créationnisme. En s’appuyant sur l’explication naturaliste du monde, Rorty commente le développement et l’évolution sans se référer à un être créateur qui transcende la réalité crée :

221

H. de Lubac caractérise la pensée de ces philosophes. De Feuerbach, il dit : « Dieu n’est donc, pour Feuerbach, que l’ensemble des attributs qui font la grandeur de l’homme. (...) Homo homini Deus ! » [p.27], puis il continue : « Sans doute Feuerbach n’a jamais approfondi les problèmes économiques. (...) Il ne peut donc absolument pas être considéré comme le fondateur du marxisme avant la lettre. Néanmoins, il en est vraiment le ‘père spirituel’. » [p.33]. A propos de Nietzsche, de Lubac constate : « Nietzsche suppose acquis que Dieu ne peut vivre ailleurs que dans la conscience des humains. » [p.43]. H. DE LUBAC, Le drame de l’humanisme athée, Paris, éd. Spes, 1959.

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Pour nous résumer, le progrès poétique, artistique, philosophique, scientifique ou politique résulte de la coïncidence accidentelle d’une obsession privée et d’un besoin public.222

Les thèses postmodernes (antirationalisme, anti-essentialisme, négation des notions de vérité et de personne) excluent, quelle qu’elle soit, la possibilité d’existence de la transcendance, à moins que la source de cette transcendance se trouve dans l’homme lui-même. Mais cela signifierait que la transcendance n’a pas le droit d’exister de manière autonome et qu’elle est dépendante de l’homme. En effet, depuis le début de la modernité, le processus visant libérer le monde de la transcendance influence l’histoire de la pensée et la culture. Ainsi, il stimule et oriente le progrès de l’humanité toute entière223.

Après avoir étudié la problématique du naturalisme et de la négation de Dieu dans le premier chapitre224, nous évoquerons à présent la troisième raison pour laquelle la religion est bannie du monde postmoderne. C’est le combat contre le totalitarisme, la domination et la violence. Il y a deux arguments qui motivent les postmodernes à entrer dans ce combat. Le premier est que tous les cinq postmodernes ont survécu au temps des systèmes totalitaires ou en ont ressenti les conséquences. Ils étaient directement ou indirectement concernés. Dans les années 1960, Bauman a dû quitter la Pologne à cause du régime communiste. En même temps, Foucault était engagé dans l’aide humanitaire et diplomatique pour la Pologne, puis pour les autres pays. La deuxième raison pour laquelle la postmodernité rejette la religion est le désir de libération, central pour ce courant. Nous pouvons ajouter que ce même combat contre toutes sortes de discrimination et les systèmes répressifs est à l’origine de la fluidité de la réalité postmoderne.

La domination commence dans la tête de l’homme, comme l’action est précédée par la pensée, même si elle n’est pas tout à fait consciente. Dans l’ordre

222

R. RORTY, Contingence, ironie, solidarité, p. 66.

223

La discussion sur la différence entre les mots : « superstition » et « religion », marque l’histoire des idées depuis le XVIe

siècle, après la Réforme. Elle conditionne fortement tous les domaines de la vie humaine. On peut même dire que « vu dans la long durée, ce n’est pas tant la modernité qui a libéré les modernes de la religion que l’éclatement de la religion qui a permis la modernité. » Voir : C. TAROT, Le symbolique et le sacré. Théories de la religion, Paris, éd. la Découverte, 2008, p.164.

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Dans le cadre des changements philosophiques dans la compréhension de la réalité (1.1.1.2.), ainsi que dans le point traitant de la vision théologique du monde (1.2.2.).

156 épistémologique, le désir de dominer qui est une des raisons du totalitarisme, est une conséquence des notions fortes, telles que « Dieu », « vérité » et « être ». Ces termes, maintenus au cours des siècles par la métaphysique classique, disparaissent du vocabulaire actuel ou, au moins, changent leur définition pour rendre possible la victoire sur la domination et le totalitarisme. D’après Rorty et Vattimo, la sécularisation est le processus qui sert à déconstruire les fondements du totalitarisme et à faire oublier les notions fortes. Celle-ci est une histoire des notions faibles et surtout de l’affaiblissement de la notion de Dieu225

parce que l’intelligence humaine est trop faible, donc incapable à le connaître226. La raison perd sa place prépondérante dans le processus cognitif et dans sa capacité à changer le monde. C’est, en fait, dans la postmodernité que le rejet de la raison s’accomplit au profit de l’imagination créatrice (ce que nous avons déjà étudié dans le premier chapitre). On peut donc dire que les notions faibles et la sécularisation sont la réponse à la dictature de la raison, à la mentalité rationaliste et à la théorie des notions fortes dont la position a été fermement établie par les Lumières. Par leurs thèses, les postmodernes fortifient la base théorique de la sécularisation en luttant contre le totalitarisme dont ils ont fait expérience durant leur vie et qui risque toujours de se reproduire.

La critique postmoderne de la religion dépasse l’ordre épistémologique et touche le problème du fondamentalisme et du totalitarisme227 dans la vie quotidienne. Il s’agit

225

Les postmodernes se référent aussi aux autres théories philosophiques pour argumenter l’erreur de la thèse théiste. Au cours du séminaire de Capri, Maurizio Ferraris, professeur de philosophie à Turin, évoque Heidegger et Kant pour montrer la possibilité de la définition de la religion sans le recours à Dieu, et même sans aucun recours à la thèse théiste. D’après lui, ce sont les dieux qui ont besoin de l’être et l’être, à son tour, a besoin de l’homme. Voir. Maurizio FERRARIS, « Le sens de l’être comme trace ontique déterminée », in J. DERRIDA, G. VATTIMO, Religion, p. 195.

226

Voir : R. Rorty, G. Vattimo, The future of religion, New York, Columbia University Press, 2005, p. 11.

227

Elizabeth McIntyre a réalisé un film Five steps to tyranny dans lequel elle organise en cinq points toutes les expérimentations psychologiques qui révèlent les schémas de comportements menant au totalitarisme, à l’autoritarisme et à la tyrannie. La responsabilité scientifique en a été confiée au professeur Philip Zimbardo et les faits s’appuient sur les recherches d’Amnesty International and Human Rights Watch. McIntyre distingue cinq étapes à franchir pour créer le système d’extermination. La première étape est la séparation entre « nous » et « eux » [Us and them] ; la deuxième étape est l’obéissance à l’autorité : « obéir aux demandes » [Obey orders] ; la troisième étape consiste à montrer « la supériorité des uns sur les autres » [Do them harm]. Pour arriver à la quatrième étape il faut susciter « l’attitude de l’indifférence dans la société » pour que personne ne s’oppose au plan totalitaire [Apathy]. Après tout cela, il ne reste qu’un pas à faire : « l’extermination des autres », y compris aussi celle de l’opposition qui lutte contre le système [Extermination]. Cette étude peut s’appliquer au processus de création des groupes fondamentalistes et à leurs activités. Le film en anglais est disponible sur le site internet : http://www.youtube.com/watch?v=68GzOJQ8NMw (le 21.02.2011)

157 ici de créer les comportements des hommes pour qu’ils soient conscient du danger et puissent y réagir.

Le totalitarisme comprend la subordination complète des individus à l’ordre social qui repose entre les mains d’un gouvernement ou d’un gouverneur dictateur. Si nous ajoutons les caractéristiques proposées par Hannah Arendt, nous élargissons cette définition à l’aide de quelques éléments significatifs : la combinaison de trois types de pouvoir, l’existence d’un parti, le contrôle par la police, l’existence d’une base idéologique et d’actions de masse qui engagent la société et manifestent la force du pouvoir228. Dans leur analyse Totalitarian Dictatorship and autocracy (New York, 1956) Z. Brzezinski et C. Friedrich révèlent encore un autre élément constitutif du totalitarisme, celui du monopole du gouvernement sur les armes.

La notion de religion au sens classique et surtout la religion comme institution qui monopolise la vérité rend possible la formation des attitudes totalitaires et fondamentalistes et donc l’émergence de la société totalitaire. Bauman décèle la réalisation d’une telle possibilité quand il étudie le rapport entre l’Eglise catholique et la nation juive229. Au début de son existence l’Eglise utilise la religion et la culture des Juifs pour définir son identité. C’est le cas durant les premiers siècles après le Christ, quand l’Eglise distinguait entre l’ordre ancien et l’ordre nouveau. D’après les psychologues ce genre de distinction est le premier pas vers la tyrannie qui consiste à diviser entre « nous » et « eux ». « Nous » disposons de la vérité et « nous » avons raison, tandis qu’« eux » se trompent et il faut corriger leurs erreurs. Bauman constate que l’Eglise a, de cette manière, développé l’antisémitisme. Ainsi s’accomplit le deuxième et le troisième pas vers la tyrannie : l’obéissance à l’autorité provoque la souffrance des autres (d’« eux »). Par cet exemple, Bauman montre que le christianisme, comme toute autre religion, peut être utilisé pour construire l’attitude fondamentaliste230.

En même temps, il faut être conscient – comme nous avertit Pascal Engel dans l’interview avec Rorty – que la lutte postmoderne contre le totalitarisme peut devenir

228

Totalitarisme, Le petit Larousse, 2010, p. 1019.

229

Georges Corm pense que le fait d’holocauste de la nation juive au XXe siècle est un fait fondateur du retour du religieux dans notre époque. Voir: G. CORM, La question religieuse au XXIe siècle, Paris, éd. La Découverte, 2006, p. 76 – 80.

230

La description de ce processus se trouve dans : Z. BAUMAN, Nowoczesność i zagłada [La modernité et l’holocauste], Cracovie, éd. Literackie, 2009, p. 92 – 100.

158 totalitaire. Cette lutte pourrait établir un autre paradigme fort qui élimine une vérité et en privilégie une autre. Engel écrit :

Ceux qui attaquent la vérité et la raison parce que ce sont des valeurs oppressives (mâles, par exemple, dans les polémiques des féministes) finissent par être aussi puritains que ceux auxquels ils s’opposent. En fait ce ne sont pas les rationalistes qui font régner la terreur et la censure. Ce sont ceux qui nourrissent un soupçon systématique pour des mots comme « vérité », « raison », ou « objectivité » (« Cachez avec des guillemets ces mots que je saurais voir »). Les mêmes opposants au rationalisme prennent des postures de victimes injustement attaquées par un establishment dogmatique et réactionnaire.231

Foucault a la même conception de la liberté à défendre232. Après la lecture de Surveiller

et punir, on peut ajouter aux caractéristiques du totalitarisme, un autre élément, celui de

la punition. Chaque punition aide le pouvoir à conserver le pouvoir par la surveillance et la possibilité de réagir contre toutes les manifestations de l’opposition. Dans le premier chapitre de son œuvre, Foucault mentionne le changement opéré dans le processus de la punition. Le point de gravité est déplacé du corps à l’âme, cela veut dire que jusqu’au XVIIIe siècle, la punition a consisté en des souffrances corporelles. Dorénavant c’est l’esprit humain (le psychisme de l’homme) qui est soumis à la douleur233

. Mais on peut comprendre « cette punition de l’âme » d’une manière beaucoup plus vaste. Cette façon de punir est depuis toujours employée par des systèmes religieux qui ne se servent pas d’une punition terrestre, mais éternelle, celle qui ne peut avoir d’autre caractère que spirituel. Ainsi, partant de là, rien de plus simple que de créer le système totalitaire et fondamentaliste de la religion, même de celle qui lance les appels les plus nobles.

231

P. ENGEL, R. RORTY, A quoi bon la vérité?, Paris, éd. Gasset Fasquelle, 2005, p. 16.

232

Par exemple, dans le dernier volume d’Histoire de la sexualité (qui n’était jamais publié à cause de demande de Foucault noté dans son testament), Michel Foucault analyse les influences mutuelles entre le christianisme de premiers siècles, la moralité et la sexualité.

233

Tout au début de sa réflexion, Foucault évoque les descriptions des exécutions du XVIIe siècle. Il met en évidence le changement dans la manière de punir. « Si ce n’est plus au corps que s’adresse la pénalité sous ses formes les plus sévères, sur quoi établit-elle ses prises? La réponse des théoriciens – de ceux qui ouvrent vers 1760 une période qui n’est pas encore close – est simple, presque évidente. Elle semble inscrite dans la question elle-meme. Puisque ce n’est plus le corps, c’est l’ame. A l’expiation qui fait rage sur le corps doit succéder un châtiment qui agisse en profondeur sur le cœur, la pensée, la volonté, les dispositions. » M. FOUCAULT, Surveiller et punir, éd. Gallimard, 1975, p. 24.

159 2.2.2.2. Qu’est-ce qu’est donc la religion ?

Nous répondrons à la question qu’est-ce que la religion, en deux temps ; d’abord en s’appuyant sur les propos des postmodernes eux-mêmes et puis, en se référant aux philosophes qui coopèrent avec les postmodernes (pendant le séminaire de Capri, par exemple) ou aux commentateurs de la condition postmoderne du monde.

Pour définir la religion de manière descriptive, Jacques Derrida évoque, dans son discours à Capri, les approches philosophiques de ce phénomène. Il se réfère à Kant, Nietzsche, Marx, Hegel et Heidegger pour formuler la question ultime de la religion : « Comment penser alors – dans les limites de la simple raison – une religion qui, sans

redevenir « religion naturelle », soit aujourd’hui effectivement universelle? »234 En réponse, Derrida distingue trois concepts : celle de la foi, de la théologie et de la religion. En décrivant cette dernière, il continue :

La religion, c’est la réponse235

.

La religion, comme réponse à double détente et à double entente, est alors

ellipse : l’ellipse du sacrifice. Pourrait-on imaginer une religion sans sacrifice et

sans prière ? (...) Violence du sacrifice au nom de la non-violence. Le respect absolu commande d’abord le sacrifice de soi, du plus précieux intérêt. (...) Le sacrifice de soi sacrifie donc le plus propre au service du plus propre.236

Cette dimension sacrificielle de la religion dont parle Derrida rejoint le respect religieux pour la vie237. La religion protège la vie, lutte contre la mort et apprend à la vivre. Marc Goldschmit238, spécialiste de l’œuvre de Derrida, prouve que la postmodernité voit, dans le cas de la protection de vie, une parallèle entre la religion et la technique. Les deux domaines s’engagent pour maintenir et sauver la vie : la religion défend la vie, la technique permet de prolonger la vie et d’accomplir cette vie dans différents domaines de réalité (virtuelle, par exemple).

234

J. DERRIDA, Foi et savoir, éd. Du Seuil, 1996, p. 25.

235

Ibid., p. 44.

236

Ibid., p. 80.

237

Cette fonction de la religion s’oppose directement à la notion de « malade ».

238

On peut noter que Goldschmit ne cite que le discours Foi et savoir dans son introduction à la conception derridienne de Dieu, de la religion et de la théologie (à l’exception d’une note où il évoque l’intervention de Derrida à Jérusalem en 1987). Cf. M. GOLDSCHMIT, Jacques Derrida, une introduction, éd. La Découverte, 2003, p. 140 – 151.

160

La religion et la technique partagent en commun cette logique du « sur-vivant », elles s’allient puissamment pour servir la vie et pour la détruire, pour accorder foi en sa valeur absolue et en même temps pour la « spectraliser ».239

Derrida déconstruit la religion en la pensant comme une étape de la libération de l’homme. Ce processus de libération se déroule selon le principe de la dialectique hégélienne : la thèse (la religion), l’antithèse (khôra240) et le développement dans lequel s’engendre et apparaît une thèse nouvelle qui a besoin d’une antithèse nouvelle pour que le procès dure sans cesse.

A son tour, Rorty aborde le thème de la religion du point de vue pragmatiste. Il commence par supprimer de la culture toutes les références à l’éternité. Il inscrit également la religion dans l’histoire du développement de la pensée.

Tout comme les Lumières qui affirmèrent qu’à la religion succèderait quelque chose de meilleur, le pragmatiste veut faire le pari que la culture positiviste scientifique des Lumières sera suivie de quelque chose de meilleur.241

Commentant ainsi la théorie rortienne, Marc van der Bossche explique que la transition d’une époque à l’autre ne requiert pas l’abandon de la précédente : la gloire des héros