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CHAPITRE I : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

2. Ciment avec ajout de fumée de silice

2.1. Fumée de silice

2.1.1. Production et historique

La fumée de silice est un sous-produit de l’industrie du silicium et des alliages de ferrosilicium. Ces produits sont fabriqués dans un four à arc, en réduisant le quartz par un apport approprié de carbone, à une température d’environ 2 000 °C [TAY 97]. La fumée de silice est extraite en surface du four de réduction par des ventilateurs principaux et résulte de la condensation du gaz SiO, intermédiaire réactionnel du procédé de carboréduction. Elle est ensuite récupérée et filtrée dans un filtre à manches, avant d’être densifiée pour en faciliter la manipulation.

La fumée de silice a été testée pour la première fois dans du béton en Norvège au début des années 1950. De bons résultats de résistance mécanique ont été obtenus dans le béton [BER 51] [BER 52] et plus tard, il a été établi que ces bétons résistent mieux aux attaques sulfatiques externes [FIS 71]. Toutefois, à l’époque, la production industrielle était impossible car à ce moment aucune méthode pour retenir de grandes quantités de particules ultrafines n’était disponible. Ainsi, ces résultats satisfaisants ont vite été oubliés.

Et puis, dans le début des années 1970, le gouvernement norvégien a annoncé des exigences environnementales strictes vis-à-vis de l’industrie de la fonte. Et c’est grâce à cet événement que de grands progrès ont été réalisés dans la technologie de filtrage et en quelques années seulement, des quantités importantes de fumée de silice ont été disponibles. Afin d’utiliser une aussi grande quantité de fumée de silice, des efforts considérables de recherche ont été déployés par les principales

entreprises de fonderie norvégiennes. Ces gros travaux, réalisés à l’époque à Trondheim (3ème

grande ville du Norvège), ont formé la base de la technologie de la fumée de silice et sont à l’origine de l’utilisation importante et croissante de la fumée de silice dans le monde entier.

2.1.2. Caractéristiques de la fumée de silice non-densifiée

La fumée de silice est initialement produite sous forme de poudre grise, non-densifiée et principalement composée de particules ultrafines. Ces particules contiennent au moins 85 à 98% de

silice SiO2 amorphe et se présentent sous la forme de microsphères vitreuses dont le diamètre moyen

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[BRU 38] varie entre 13 000 et 30 000 m2/kg [MAL 87], et leur densité se situe entre 2,00 et 2,25

[REG 83].

Figure I-13: Particules individuelles de FS vues au Microscope Electronique à Transmission [HEW 98]

Grâce à sa très grande finesse, sa forte teneur en silice et sa structure essentiellement vitreuse, la fumée de silice constitue un produit hautement pouzzolanique [AIN 84], fréquemment utilisé pour la fabrication des bétons à ultra hautes performances.

2.1.3. Mécanisme et mode d’action de la FS

La FS dans un matériau cimentaire agit selon un mode d’action double : physique (effet filler ou granulaire) et chimique (effet pouzzolanique).

2.1.3.1. Effet granulaire

La relation entre la granularité et la porosité d’un mélange de grains est une question assez ancienne.

Caquot en 1937 [CAQ 37] a établi de façon empirique une loi exprimant la porosité minimale pmin

d’un assemblage de grains, comme une fonction de la dimension minimale, d, et maximale, D, des grains qui le constituent :

𝑝𝑚𝑖𝑛 = 𝑝0√𝑑 𝐷⁄

5

(Eq. I-5)

Avec p0 un coefficient de proportionnalité qui dépend de la maniabilité du béton.

Cette approche montre que pour diminuer la porosité minimale, il faut augmenter l’étendue granulaire [d-D]. En ajoutant de la FS dans un matériau cimentaire, ses particules fines (d très faible

donc pmin faible), lisses et sphériques pénètrent et s’empilent dans les espaces interstitiels restés vides

entre les grains de ciment de diamètre 100 fois plus grand (30 à 100 µm). En effet, pour un dosage de 10% de fumée de silice par masse de ciment, environ 50 000 à 100 000 microsphères sont ajoutés pour chaque grain de ciment (Figure I-14). Dans ce cas, le mélange sera suffisamment « imprégné » de fines particules et cette addition entrainera une augmentation de la surface spécifique interne d’à peu près un ordre de grandeur.

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Figure I-14 : Image d’un béton frais en présence de FS [HEW 98]

Cet ajout permet aussi d’améliorer les propriétés rhéologiques du mélange frais (matériau plus fluide, pratiquement pas de ségrégation, ni de ressuage) et permet ensuite l’obtention d’une pâte plus dense et de très forte compacité.

2.1.3.2. Effet pouzzolanique

Au premier jour de la prise, la fumée de silice est considérée comme inerte et joue plutôt un rôle physique [DET 89]. Mais au fur et à mesure de l’avancement d’hydratation, après 1 à 2 jours du commencement des réactions d’hydratation du ciment [LUP 93] [ZHA 91] [VER 92] [TOR 92], la fumée de silice réagit avec l’hydroxyde de calcium pour produire des C-S-H selon la réaction pouzzolanique suivante :

n’ CH + SiO2 + (3,9 – n’) H Cn’SH3,9 (Eq. I-6)

Parmi tous les produits d'hydratation, la CH est considérée comme étant le seul composé qui peut être déterminé avec précision et par conséquent, sa détermination représente l'un des moyens pour suivre le développement du processus d'hydratation du ciment Portland et de l’avancement de la réactivité pouzzolanique. La figure I-15 [YOG 91] montre la teneur en portlandite en fonction du pourcentage de FS ajouté au fur et à mesure de l’avancement de l’hydratation. La quantité de

Ca(OH)2 mesurée est le résultat de l’hydratation du ciment Portland qui génère de la portlandite et de

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On remarque que la quantité de portlandite diminue avec l’ajout de FS dès les premiers jours de l’hydratation. Cette diminution, liée à la consommation de la portlandite par la silice, est plus importante pour des dosages à 5 voire à 10% de FS, tandis que cette consommation « freine » et devient plus faible pour des dosages supérieurs à 10% de FS.

Une légère différence de la teneur de portlandite observée entre 3 et 180 jours d’hydratation (entre 28 et 180 jours pour des teneurs en FS > 10%) signifie que toute la portlandite produite par l’hydratation du ciment pendant ce temps a été consommée par la FS. Cependant la plus grande quantité de CH se consomme dès les premiers jours ce qui prouve la grande réactivité de la FS au jeune âge. La fumée de silice est parmi tous les ajouts (laitiers de hauts fourneau, cendres volantes), le matériau le plus réactif grâce à sa surface spécifique très élevée et sa teneur importante en silice réactive [REG 83] [GLA 84]. Grâce à cette réaction pouzzolanique, la quantité de C-S-H augmente dans le matériau, ce qui permet à la fois d’augmenter la résistance et de réduire la perméabilité en densifiant la matrice cimentaire.

En plus des rôles physique et chimique, l’ajout de FS semble stimuler et accélérer l'hydratation initiale des silicates de calcium [AND 86] [SEL 82] pendant les premières heures qui suivent le gâchage (Figure I-16) et, par voie de conséquence, accroit la quantité de portlandite formée. Mais en même temps, par réaction pouzzolanique, la fumée de silice la consomme. Ceci est sans doute dû à une précipitation favorisée de produits d’hydratation du ciment sur les particules fines de FS qui constitueraient des sites de nucléation pour la cristallisation [MEH 81] [MOR 92] [LAR 90], en

particulier pour les cristaux de Ca(OH)2, ce qui réduit la taille moyenne de ces cristaux et les rend

plus finement distribués dans la microstructure [DET 89].

Aux stades ultérieurs, il semble que l’hydratation soit plutôt retardée en présence de FS, dans des conditions normales d’alcalinité.

Figure I-15 : Quantité de Ca(OH)2 dans les pâtes à différentes teneurs en

FS (E/Liant = 0.28) [YOG 91]

Figure I-16 : Influence de la FS sur la vitesse d’hydratation des mortiers (E/L= 0,32 - 4% SP)

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2.2. L’influence de l’ajout de fumée de silice sur la microstructure