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Off-line, repères

6/ Figures de l’utilisateur

L’utilisateur est la traduction simple du user omniprésent dans les ter- mes courants des programmes fonctionnels rédigés en anglo-américain. C’est la figure générique qu’impose l’usage et c’est sans doute une donnée centrale du numérique qui confronte des systèmes régulés et programmés avec feed-

back face à une personne en action. Le terme s’impose sans doute dès les

premiers essais de couplages qui s’opèrent au MIT, au tout début des an- nées 80, entre le lecteur de disque laser et l’ordinateur. En 1981, en visite au Media Lab, Bob Stein nous raconte avoir découvert avec intérêt l’avenir du

livre dans une notice de maintenance technique de ce nouveau genre:

Les utilisateurs du manuel de maintenance automobile du MIT pou- vaient lancer et interrompre la vidéo à volonté, répéter les conseils jusqu’à les avoir bien compris et se déplacer dans le programme instanta- nément, sans attendre que la bande se rembobine2 1 1.

Utilisateur donc, celui qui suit et pratique les recommandations d’usage d’un appareillage. Mais l’importance des actions effectuées sur les- quelles la nouveauté du multimédia fonde le terme d’interactivité ne doit pas faire oublier les autres formes de participation, plus conventionnelles. Elles se combinent toutes ou se succèdent plus qu’elles ne s’excluent.

2 1 1

« Des livres sans frontières », National Science Digital Magazine, 2004, cf. texte traduit en annexe, p. 544.

Lecteur-Spectateur-Auditeur

La première triade proposée: lecture, observation, écoute correspond à trois attitudes classiques, habituelles, anciennes, disons éprouvées que l’ir- ruption des gestes et diverses commandes des accès et contrôles rendus pos- sibles par l’informatique auraient relégués ou balayés. Est-ce si simple ? Au contraire de cette focalisation trop étroite et exclusive, il semble essentiel d’articuler ces différents registres, les plus habituels avec ceux de l’action, en définissant la nouvelle condition multimédia des dispositifs numériques dits

interactifs. Mettre temporairement de côté l’action, oublier l’utilisateur, per-

met d’insister sur les continuités entretenues par l’édition numérique avec l’univers de l’audio-visuel. À ce premier niveau, les ressources sémiotiques ne diffèrent pas fondamentalement du cinéma:

Le discours cinématographique inscrit ses configurations signifiantes dans des supports sensoriels de cinq ordres: l'image, le son musical, le son phonétique des “paroles ”, le bruit, le tracé graphique des mentions écri- tes.2 1 2

… nous rappelle Christian Metz, pour initier son étude sémiologique du cinéma par l’inventaire des matières de l’expression. Par nature, celles-ci recoupent les ressources de l’édition numérique, images, son, texte de façon exhaustive. Seule la hiérarchie en est assez différente ainsi que leurs condi- tions d’apparitions. Par souci de précision, on pourrait annoncer les caracté- ristiques des images: fixes ou animées, dessinées ou photographiques, le son lui fait l’objet d’une répartition en trois types de sources sonores qui est va- lide, elle différencie ses origines, par contre on a aujourd’hui quelque diffi- culté à ne pas entendre le mot texte sous le détour évoquant le « tracé graphi- que des mentions écrites. » Il y a là comme une stratégie d’évitement, un contournement fondés par la méthode sémiologique même. On se souvient que pour la sémiologie, celle du cinéma et en particulier dans cet ouvrage même, le texte:

2 1 2

sera pris ici au sens de Louis Hjelmslev, pour nommer tout déroule-

ment signifiant (“procès” chez l'auteur danois), qu'il soit linguistique, non

linguistique ou mixte… (le film parlant se rattache au troisième de ces cas).2 1 3

À l’heure de l’hypertexte, cette définition trans-sémiotique est moins commode à adopter, et le texte sera plutôt considéré dans le sens restrictif, et plus ordinaire refusé par C. Metz. On lui donnera le sens retenu en prag- matique textuelle, « de chaîne linguistique parlée ou écrite formant une unité communicationnelle. »214

Redevenu une suite orale ou écrite de signes phoni- ques ou graphiques en situation de lecture ou d’écoute, notre lecteur est con- firmé dans son rôle, il annonce même un auditeur. Dans l’édition numérique, la situation de lecture est loin d’être aussi subsidiaire qu’elle ne l’est en gé- néral au cinéma narratif ou les mentions écrites concernent soit un plan d’in- sert, soit une inscription dans le plan, ou simplement le générique lui même, sans oublier d’éventuels sous-titrages. Toutes situations particulières et le plus souvent marginales.215

L’observation, activité principale du spectateur reste aussi une clé fondamentale mais la plus discutée parmi les figures de l’utilisateur multimé- dia. Parfois il arrive que ses actions soient interdites ou inefficaces. Si le mode conversationnel, l’enchaînement successif des requêtes et des mo- ments d’usages fonctionnels est la norme, alors l’utilisateur est dans ces mo- ments là réduit à l’état de spectateur. Les exemples sont nombreux où une durée contrainte s’insère dans des séries mobiles et variables. Séquences vi- déos, animations diverses ou encore continuités sonores.

On ne fera pas de différence entre les deux dernières situations, celle du spectateur filmique, en état de rêverie et l’auditeur sur le mode radiopho- nique. Car il y a aussi des moments où l’utilisateur multimédia est encore un

spectateur-poisson, pour continuer à s’inspirer de lectures metziennes, dans

leur phase psychanalytique :

2 1 3

Idem., p. 66.

2 1 4

Oswald Ducrot & Jean-Marie Schaeffer, Nouveau dictionnaire encyclopédique des scien-

ces du langage, Paris, Le Seuil 1995, p. 594.

2 1 5

Du point de vue quantitatif s’entend, mais pas nécessairement négligeable sur le plan narratif.

Spectateurs-poissons, qui absorbent tout par les yeux, rien par le corps: l'institution du cinéma prescrit un spectateur immobile et silen- cieux, un spectateur dérobé, constamment en état de sous-motricité et de sur-perception, un spectateur aliéné et heureux, acrobatiquement raccro- ché à lui-même par le fil invisible de la vue, un spectateur qui ne se rat- trappe comme sujet qu'au dernier moment, par une identification parado- xale à sa personne propre, exténué dans le regard pur.2 1 6

Ces moments sont rares face à un écran d’ordinateur, mais si l’on suit les recommandations de Laurie Anderson, et que l’on utilise un casque et se tient dans l’obscurité,217

on est assuré que des moments d’attention proche du spectateur médusé du cinéma auront lieu, brièvement. Dans ce titre, Lau- rie Anderson ménage des séquences temporelles contraintes assez nombreu- ses au cours desquelles elle nous raconte des histoires. Rehearsal of memory en imposant une grande image assez étrange de corps scannés à une échelle proche de la taille normale produit un effet spectaculaire. Le générique de

Ceremony of Innocence joue les codes du cinéma, programmant une entrée

dans la fiction. Beyond impose de courtes séquences filmiques. Des mo- ments s’approchent de cette immersion cinématographique, mais ils n’en n’ont ni l’ampleur ni la durée. Bref, si la comparaison est ténue, il n’est pas paradoxal de noter qu’il y a aussi des zones de temps contraints, des dérou- lements réglés qui imposent, plus légèrement qu’au cinéma, leur tendance à l’immersion fictionnelle.

Il est vrai que la situation spectatorielle est moins puissante que celle de la salle de cinéma publique, par les dimensions de l’écran, le contexte de détente physique et l’institution de l’immobilité. Devant l’écran d’ordina- teur, la sous-motricité est relative au corps, car la main sur la souris ou le trackpad s’active en activité plus ou moins compulsive. Mais les facteurs de l’habitude jouent, et il est flagrant de voir que la pratique des petits écrans

2 1 6

« Histoire/discours: note sur deux voyeurisme », Le signifiant imaginaire, Paris, UG10/18, 1977, p. 119. paru initialement dans Pour Emile Benveniste, Seuil, 1975.

2 1 7

« Puppet Motel est un endroit sombre. Parfois, certains détails difficiles à voir sont es- sentiels pour se déplacer d'une pièce à l'autre. Vous parviendrez à repérer davantage de ces détails et à mieux vous plonger dans cette expérience si vous baissez les lumières de la pièce où vous vous trouvez et réglez votre moniteur de façon adéquate (…)

Il convient d'utiliser de bons haut-parleurs ou une paire d'écouteurs. » Fichier “Guide de Puppet Motel” /dossier “ documentation”.

nomades déplace aujourd’hui les conditions nécessaires à l’immersion dans des situations jugées hier improbables. Le son n’est sans doute pas indiffé- rent à ces rééquilibrages perceptifs et sensoriels susceptibles de produire des effets de la relative perte de repères temporels au profit d’un monde fictif.218

L’auditeur est la dernière de ces figures qui coexistent avec les deux re- gistres du lecteur et du spectateur en arrière plan des rôles plus attendus, di- rectement actifs, déclinés à partir de l’utilisateur. Passagen, Puppet Motel ou encore, Portrait n°1 ou Things Spoken de Agnes Hegedüs, nombreux sont les titres passionnants qui comprennent des temps de discours aux formes

radiophoniques, des objets temporels sonores, construits pour de courtes

durées, mais limitant ou refusant les interruptions. Nous n’y voyons à nou- veau pas un paradoxe, mais au contraire la condition pour que les coupures, raccords et montages imprévus liés à la réactivité des programmes garantis- sent la possibilité de construire un sens. Sur fond de continuités discursives, même brèves et fragmentées, les liaisons disruptives ont une chance de s’in- tégrer dans un tout cohérent. Le son a cette propriété temporelle de liant particulièrement fort. Une seconde série de situations doit être envisagée, elle mêle ces positions où l’action est suspendue avec d’autres situations qui au contraire la suscitent, l’activent, la relancent.

Visiteur-Interacteur-Opérateur

La seconde série ternaire décrit une présence liée au parcours, à l’enga- gement actif et au contrôle. Le terme de visiteur, choisi pour nommer les spectateurs-utilisateurs de ses installations, est sans doute surdéterminé par le contexte et les thèmes des dispositifs de Luc Courchesne. Et peut-être n’a-t-il pas de valeur universelle pour qualifier d’autres expériences dans le domaine plus limité de l’édition. À cet égard, la pièce Portrait N° 1 fonction- nerait comme une première amorce décisive, maintenue pour les autres ins- tallations qui se sont développées à partir de cette réussite initiale, Portraits

2 1 8

C’est l’enjeu du couplage des clips vidéos avec les musiques commerciales sur les bala- deurs aujourd’hui.

de famille219

et le Salon des ombres220

, mais sa portée générative est restée plus limité dans le contexte privé du CDrom. Si la première souffre de la transposition éditoriale, selon Erkki Huhtamo,221

l’adaptation des suivantes sur CDrom serait quasiment impossible, pour en restituer ses quatre person- nages dans l’espace. Après Portrait n°1, les installations de L. Courchesne sont orientées multi-user, utilisateurs-multiples. Il commente cette filiation:

Tout comme dans les précédentes installations avec les portraits, j’ai fait se refléter les images sur de grandes plaques de verre pour donner l’impression que les visiteurs et les personnages virtuels occupaient la même galerie dans le musée. (…) Tout environnement immersif est par nature interactif, il transforme le spectateur en visiteur.2 2 2

Le cadre muséal dans lequel se sont inscrites ces installations justifie sans doute la proposition du terme assez surprenant de visiteur qui induit des liens possibles avec l’architecture. La référence au portrait comme genre, du portrait peint ou photographique, est revendiquée explicitement par L. Courchesne. Si elle conforte l’idée de déambulation dans un espace, il s’agit en effet du musée ou de la galerie. Le projet de circuler dans ces lieux, n’im- plique pas à priori la possibilité d’actions effectives, mais indique plutôt une simple liberté de parcours, une possible promenade.

Le choix du terme participant, était déjà une proposition de Frank Popper dans le catalogue Electra, succédant à « spectateur actif », elle restait encore à valider.223

Employé aujourd’hui par Marie-Laure Ryan, elle lui ajoute à cette première idée d’immersion celle de communauté,224

et se réfère 2 1 9 Produit à Marseille, en 1993. 2 2 0 Produit au ZKM, n 1996. 2 2 1

«…à qui il manque la sorte de présence spectrale ( qui rejoue l’illusion célèbre des fan- tasmagories du XIXe

siècle ) » « …it loses the haunting sense of presence (re-enacting the famous 19th century Pepper’s Ghost illusion ) », Hardware Software Artware, op. cit., p. 179.

2 2 2

« As in the previous portrait installations, I reflected images on large glass plates to give the impression that both visitors and virtual characters inhabited the same museum gallery. (…) Any Immersive medium is thus by nature interactive and transforms the spec- tators into visitors. » Luc Courchesne, « The construction of experience », in Martin Rie- ser & Andrea Zapp, New Screen Media: Cinema/Art/Narrative, Londres-British Film Ins- titute, Karlsruhe-ZKM 2002, pp. 263-266.

2 2 3

Frank Popper, « L'électricité et l'électronique dans l'art au XXe siècle », catalogue Elec-

tra, Musée d'art Moderne de la Ville de Paris, 1983, p. 77.

2 2 4

« Narrative as puzzle !? », mars 2000:

ainsi directement à une activité en marge de l’édition, qui renvoie précisé- ment au théâtre virtuel ou drame interactif dont le modèle est le jeu de rôle en réseau.225

Le point de vue du participant, par les multiples présences vir- tuelles agissantes, est adopté par le joueur au sens fort, situé en immersion virtuelle. Plus modestement, dans l’hypertexte ou l’édition de CDrom, «interactor» et «experiencer», l’interacteur et l’expérimentateur sont deux néologismes plus fréquents qui se substituent au user généralisé.226

Avec cette terminologie, on se situe avec plus de précision dans une expérience non pas multi relationnelle, mais dans le quasi-dialogue, une relation d’inter- locution impliquant un programme interactif.

L’opérateur et l’utilisateur partagent de nombreux points communs. Ils alternent dans les premiers compte rendus scientifiques de 1983 concer- nant les modes d’emploi du MIT décrits par Bob Stein.227

C’est aussi le terme utilisé par A.-M. Duguet pour expliquer la mutation subie par le spectateur mis en situation d’agir dans des œuvres pour lesquelles l’interac- tivité est comme un paramètre constitutif:

Qu’il s’agisse d’un simple principe de déclenchement ou de l’explora- tion d’une base de données complexe, elle transforme le spectateur en opérateur et change les données habituelles de la conception et de la pro- duction de l’œuvre.2 2 8

Les opérations sont des séries réglées de gestes et d’actions produites en vue d’une finalité, ici ce terme et réversible. Il s’applique aussi bien aux procédures acquises par l’apprentissage de l’utilisateur expert, qu’il n’évo- que par symétrie les routines qui opèrent aussi dans la machine par le biais du programme.

2 2 5

À l’exemple du récent World of Warcraft, dont les propriétés addictives semblent effec- tives. Il appartient à la catégorie des MMORPG, Massivement Multi-player Online Role Playing Game, « Engloutis dans un monde virtuel », Nathalie Brafman, Le Monde, 10/05/2006.

2 2 6

« Narrative as puzzle !? », op. cit. p. 2. et Marie-Laure Ryan, Narrative as virtual rea-

lity: Immersion and Interactivity in Literature and Electronic Media, Baltimore & Lon-

dres, Johns Hopkins University Press, 2001, p. 267.

2 2 7

Richard A. Bold, « Les images interactives », La recherche N°144, La révolution des

images, mai 1983, pp. 678-686.

2 2 8

Exécutant-Interprète-Joueur

Cette symétrie entre des fonctions attribuées à l’utilisateur et les opé- rations machiniques s’accorde aussi avec la terminologie musicale. Le code informatique s’exécute, il est parfois interprété et plus métaphoriquement, il est «joué», tout comme l’exécution musicale demande à l’interprète le con- trôle de son jeu. L’exécution précède l’interprétation, le jeu en résulte. Ces trois termes forment une série homogène en particulier dans le modèle musi- cal. Modèle qui est en question tout au long du texte fameux de Umberto Eco, « La poétique de l’œuvre ouverte ».229

Il n’est pas utile de s’attarder longtemps sur les caractéristiques de ces œuvres en mouvement: structure imprévisible, inachèvement constitutif, elle requièrent un « exécutant (le mu- sicien qui joue une partition, ou l’acteur qui récite un texte). »230

La situation de liberté de l’exécution, limitée par les contraintes de l’auteur, concerne en premier lieu la création musicale ou dramatique mais sert de paradigme pour définir également dans le champ des arts plastiques des œuvres dont la ma- nifestation est variable. Ce texte est le lieu d’une tension entre ces deux ter- mes: exécution et interprétation. Le premier niveau, celui de l’activation est le modèle de l’utilisateur que l’on cherche à définir. Il produit dans le temps, il «performe» une série d’instructions. Alors c’est un exécutant. Peu impor- tent les connotations serviles, son manque spéculatif car le terme a aussi une valeur productive, il s’engage dans le temps.

Pour passer progressivement au stade de l’interprète, U. Eco ménage un passage intermédiaire, en précisant que toute œuvre d’art

… reste ouverte à une série virtuellement infinie de lectures possibles chacune de ces lectures fait revivre l’œuvre selon une perspective, un goût, une “exécution” personnelle. »2 3 1

Ce qui est, pour l’esthétique, la condition générale de tout interprè- tation, devient ici un véritable programme d’action. L’“ouverture”cons- titue dès lors la possibilité fondamentale de l’interprète et de l’artiste 2 2 9

L’œuvre ouverte, « La poétique de l’œuvre ouverte », Paris, Le Seuil, 1965, p. 25. Tra- duit de l’italien Opera Aperta, Milan, Bompiani, 1962.

2 3 0

La première note du texte cherche à éviter la confusion du terme interprétation qui ren- voie à une position de réception, L’œuvre ouverte, op. cit., p. 38.

2 3 1

contemporain.2 3 2

Il est délicat d’affirmer ici, dans une traduction, à partir de ce qui est déjà un commentaire de Luigi Pareyson, qui est véritablement cet interprète. Est-ce définitivement un exécutant investi qui engage une interprétation en jouant ou un spectateur construisant mentalement sa lecture ? Cette pre- mière exécution, entre guillemets, associée à lecture nous semble une forme de réception, opposée au programme d’action comme production. L’ambi- guïté, le flottement du texte de U. Eco entre ces deux instances interprétati- ves est peut-être ce qui en a fait le succès, puisqu’il conclut malicieusement, en abîme, que cette problématique, celle de son texte même, instaure une si- tuation « ouverte et en mouvement…»233

L’interprète qu’appelle J.-L. Boissier ne souffre pas de ces retourne- ments discrets ou mobiles. Il s’agit pour lui d’emprunter la voie du pro- gramme d’action, c’est là son esthétique:

Le travail esthétique de l’interactivité, s’exprime dans une partition, un livret, un argument. C’est dire qu’il ne saurait se dispenser d’interpré- te, interprète désigné d’ailleurs lui-même, d’ordinaire, comme artiste, dans le sens où, pour le public, les artistes, ce sont d’abord des interprètes. (…) Une image interactive serait donc une image à partition, une image interprétative et à interpréter.2 3 4

Appliqué à l’image, le rôle attribué à l’interprète est clairement celui d’un exécutant, même s’il est habile et adroit, on reste surpris que la ques- tion de son statut se pose en termes artistiques et que le public en soit la ré- ponse. Pourquoi lui donner cette qualité d’artiste ? Ici l’évocation du public est étrange, cet interprète là en a-t-il besoin, le public a-t-il une place ? Ou bien n’est-il pas le plus souvent son propre public dont la fonction a dispa- rue ? On s’en rendra compte, il peut y avoir des compétences propres à ac- tiver correctement un programme, mais de là à le faire valoir… comme per- formance observée esthétiquement, il y sans doute un seuil à franchir.

2 3 2

Idem,., p. 37.

2 3 3

Idem., p. 37.

2 3 4

« Dramaturgie de l’interactivité », La relation comme forme : l'interactivité en art, Genève-Paris, Centre pour l'image Contemporaine, Université Paris 8, 2004. p. 24.

Que l’utilisateur soit parfois considéré comme joueur, on le sait depuis l’avènement de l’informatique dans le grand public. À nouveau, le concep- teur de l’exposition Electra fait figure de pionnier. F. Popper s’explique sur