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179Figure 120 : Comportement rhéoépaississant en élongation à 180°C pour 10, 20 et 35% de

triacétine à différentes vitesses

Le même constat est réalisé à partir des mesures d’élongation réalisées sur les échantillons plastifiés par le DEP (Figure 121).

Figure 121 : Comportement rhéoépaississant en élongation à 180°C pour 10, 20 et 35% de DEP à différentes vitesses

Ce comportement en élongation n’est pas cohérent avec celui de chaînes linéaires. Il est plutôt celui de polymères branchés. Ce rhéoépaississement implique l’existence de fortes interactions

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intermoléculaires entre les chaînes d’acétate de cellulose étirées, quel que soit le plastifiant pour les échantillons peu plastifiés. Ce constat va également dans le sens d’une dynamique particulière des chaînes et rejoint donc les résultats des essais oscillatoires.

Afin de quantifier le rhéoépaississement et de s’affranchir des effets de vitesse de sollicitation du polymère plastifié, la viscosité normalisée a été représentée en fonction de la déformation en Hencky. Cette viscosité normalisée correspond à :

𝜂𝑛𝑜𝑟𝑚𝑎𝑙𝑖𝑠é𝑒 = 𝜂𝐸

3𝜂(𝑡) (Équation 52)

Le cas de la triacétine est mis en avant car les résultats montrent une meilleure répétabilité. Il est possible de constater que l’intensité du rhéoépaississement n’est pas forcément liée au taux de plastifiant introduit. En effet, les effets observés à 35% de triacétine sont dans les mêmes ordres de grandeur que ceux à 10%. Quelques essais à 20% donnent des valeurs légèrement inférieures. Dans tous les cas, l’apparition du rhéoépaississement est brusque (Figure 122). Outre l’intensité du phénomène, c’est davantage l’existence d’une déformation limite aux alentours de 1 Hencky pour l’ensemble des échantillons qui est remarquable. Cette déformation limite correspond à une striction et une rupture de l’échantillon. Elle est identique quel que soit le taux de triacétine. Une déformation critique du réseau intervient et entraîne le rhéoépaississement qui démarre entre 0,4 et 0,6 Hencky.

Figure 122 : Suivi de la viscosité normalisée selon la déformation pour différents taux de triacétine à 180°C

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Ces résultats en élongation confirment que le comportement est bien similaire entre 10 et 35% de plastifiant. Ils permettent également de constater qu’une extension maximale des chaînes apparait lors de ce type de sollicitation puis qu’il y a une rupture du réseau formé par les chaînes d’acétate de cellulose.

4.1.2 Comparaison avec les échantillons produits par évaporation

Ce constat a également été fait sur les échantillons produits par évaporation de solvant. Pour 10 et 35% de triacétine, le rhéoépaississement est visible pour l’ensemble des vitesses d’élongation exploitées (Figure 123). Une vitesse d’élongation plus faible de 0,01s-1 a été utilisée afin de laisser davantage de temps aux chaînes de se réorganiser lors de la sollicitation mais le rhéoépaississement reste toujours visible. Pour 35% de triacétine, les démarrages sont assez proches de ceux des échantillons extrudés. Le comportement est identique pour 10% de triacétine mais un décalage est constaté. Toutefois comme les échantillons extrudés et évaporés sont comparés à iso-température et comme il a été montré auparavant, la reprise en eau des échantillons à 10% de triacétine produits par évaporation oblige un étuvage avant expérience. Cet écart de viscosité peut alors être lié à une variation de la distance à la Tg qui n’est pas la même lorsque la comparaison est réalisée à iso-température (voir 3.1.2).

Figure 123 : Comparaison des essais d’élongation selon la méthode de mise en œuvre par extrusion (―) ou évaporation (….) à 10% de triacétine à 200°C (a) et à 35% de triacétine à 180°C (b)

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4.2 Hypothèse sur la nature des interactions entre les

chaînes d’acétate de cellulose

A partir des résultats des essais oscillatoires dynamiques et d’élongation uniaxiale, il est possible d’identifier quelques points communs aux différents essais et ainsi chercher la particularité structurelle pouvant être à l’origine du comportement singulier de l’acétate de cellulose plastifié.

4.2.1 Mise en évidence à partir des essais dynamiques

Le plastifiant modifie l’environnement de la chaîne polymère mais pas sa « structure ». Plus il y a de plastifiant, plus la chaîne va relaxer ou se déplacer aisément lorsqu’elle sera mise en mouvement à une température donnée. En revanche, des longueurs de corrélations qui ne sont pas influencées par Φplastifiant pilotent la dynamique des chaînes et déterminent la valeur de GN0 jusqu’à un taux critique de 35% de plastifiant. Ces longueurs peuvent être vues comme des distances constantes entre points d’interaction forte entre les chaînes d’acétate de cellulose extrêmement rigides. Le taux de plastifiant va influencer la durée de vie des points de « collage » qui créent ces longueurs de corrélation mais pas la distance qui les sépare. À iso-température, les masses entre enchevêtrements sont indépendantes du taux de plastifiant jusqu’à 35% pour les deux plastifiants et elles sont identiques. Pour aller dans le sens des hypothèses précédemment émises, il se pourrait donc que ces valeurs de Me ne soient pas créées par des enchevêtrements mais plutôt par ces points d’interactions fortes. Ce sont ces points de « collage » qui définissent le plateau GN0 et ils ne seraient pas influencés par le taux de plastifiant jusqu’à un taux critique. En revanche, cette masse augmente légèrement pour les échantillons très plastifiés. A partir d’un certain taux de triacétine, celle-ci pourrait alors parvenir à écarter suffisamment les chaînes pour écranter les interactions fortes à l’origine des points de « collage ». Ces points d’interaction forte seront nommés « stickers » dans la suite de ce manuscrit. La masse étudiée n’est donc pas une masse entre enchevêtrements mais plutôt une masse entre stickers (Ms).

À iso-distance de la Tg, l’évolution de λn selon le taux de plastifiant est modifiée. Une indépendance des temps de relaxation par rapport au taux de plastifiant est constatée pour les échantillons peu plastifiés obtenus par extrusion ou par évaporation de solvant. La nature du plastifiant ne semble pas avoir une influence notable malgré les différences d’interaction avec les chaines

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d’acétate de cellulose. La conformation locale, liée à la nature du plastifiant, n’a pas d’effet sur le comportement de la chaîne entière. C’est l’effet de la distance entre les points de « collage » qui pilote la dynamique moléculaire. Cette distance est constante et identique pour les deux plastifiants.

Le plastifiant pourrait être stocké dans des « cavités » inter-chaînes existantes en raison de la rigidité des chaînes d’acétate de cellulose et de la distance entre stickers (Figure 124). La longueur de persistance des chaînes d’acétate de cellulose (env. 10nm) peut contribuer à l’espacement des stickers et à la formation de ces « cavités » inter-chaînes. Ce plastifiant peut contribuer à modifier localement l’environnement des monomères et faciliter la reptation lorsqu’un sticker cède mais il ne va pas modifier l’organisation structurale à l’échelle des chaînes jusqu’à un taux critique.

Figure 124 : Hypothèse des interactions fortes existantes entre les chaînes d’acétate de cellulose

La nature de ces stickers reste à définir. Plusieurs possibilités peuvent être avancées. Il pourrait s’agir de liaisons hydrogènes résiduelles entre des groupes hydroxyles de deux unités AGU de chaînes d’acétate de cellulose voisines. Le procédé d’acétylation ne garantit pas forcément une répartition homogène des unités mono, di ou tri-substituées selon certains auteurs de la littérature (voir 1.3.4.2). Par conséquent, deux OH libres peuvent former ce type de liaison. Les interactions pourraient également être des liaisons dipolaires ou encore des micro-domaines cristallins. Ces possibilités vont être analysées dans la suite de ces travaux.

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