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2.1 Le trouble du déficit de l’attention/hyperactivité

2.1.4 Facteurs de risque et de protection

Dans son état actuel, la littérature scientifique n’appuie pas l’hypothèse que le TDAH soit un produit de facteurs biologiques, sociaux, scolaires ou environnementaux. Il est clair que l’hérédité joue un rôle important (Larsson et al., 2014). Les parents atteints de TDAH ont plus de 50 % de risque d’avoir un enfant qui en sera atteint, et environ 25 % des enfants atteints de TDAH ont des parents qui satisfont aux critères diagnostiques officiels de ce trouble (Faraone et Doyle, 2001). Toutefois, quelques études montrent que certains facteurs tels qu’une mauvaise intégration sociale et un encadrement scolaire déficient pourraient exacerber les symptômes du TDAH (Roberts et al., 2018). Ces facteurs de risque peuvent assombrir le portrait de l’élève qui présente un TDAH et influencer l’âge d’apparition du trouble et l’intensité des symptômes (Dumas, 2013). Cependant, leur influence diffère selon leur nature, la durée de leur action, l’âge des personnes, leur sexe et leur situation, et surtout, ils peuvent être atténués par la présence de facteurs de protection qui font contrepoids (Letarte et Lapalme, 2018).

Les facteurs de risque et de protection comprennent les caractéristiques de l’individu, celles des milieux de vie où il évolue (p. ex. la famille, l’école), les relations entre ces milieux de vie (p. ex. la collaboration entre la famille et l’école), les éléments de l’environnement qui exercent une influence indirecte sur l’individu, ainsi que les caractéristiques culturelles ou politiques qui exercent une influence sur les autres systèmes (Massé et al., 2020). Dans le cadre de ce mémoire, les facteurs liés à l’individu, à l’environnement familial, aux pairs ainsi que les facteurs scolaires seront abordés.

Dans la littérature, différents termes sont utilisés pour qualifier les facteurs de risque et de protection. À cet égard, les facteurs de risque, de vulnérabilité, précipitants, déclencheurs, de maintien et d’aggravation sont distingués par Letarte et Lapalme (2018). Pour ces auteures, les facteurs prédisposants, réfèrent aux facteurs de vulnérabilité « d’ordre personnel qui apparaissent tôt dans le développement du problème » (p. 30). Par exemple, être un garçon

est un facteur prédisposant à développer un TDAH. En outre, les facteurs précipitants « accélèrent le développement d’un problème d’adaptation qui était déjà en émergence » (p. 30) et les facteurs déclencheurs « entrainent soudainement l’apparition d’un problème qui

n’avait pas été anticipé » (p. 30). Par exemple, un élève qui présente des manifestations d’impulsivité (facteur prédisposant) pourrait présenter des comportements oppositionnels à la suite du divorce de ses parents (facteur précipitant) (Massé et al., 2020). D’autres facteurs peuvent contribuer au maintien ou même à l’aggravation d’un problème d’adaptation déjà présent chez un individu (facteurs de maintien et facteurs d’aggravation). Dans le cas de l’élève présentant des manifestations d’impulsivité, de mauvaises pratiques parentales de la mère pourraient contribuer au maintien des comportements d’opposition et l’aliénation parentale pourrait devenir un facteur d’aggravation (Massé et al., 2020).

D’autre part, certains facteurs, à l’inverse des facteurs de risque, influenceront favorablement l’adaptation du jeune présentant un TDAH (Letarte et Lapalme, 2018). Certes, pour qu’un facteur dit positif soit considéré comme un facteur de protection, il doit « atténuer l’impact des facteurs de risque sur l’individu et favoriser son adaptation en dépit du risque » (Letarte et Lapalme, 2018, p. 35). À cet égard, un facteur de protection peut agir de trois façons : (1) en simplifiant un problème déjà présent, (2) en interagissant avec le facteur de risque pour en diminuer l’effet ou (3) en empêchant l’apparition du facteur de risque (Letarte et Lapalme, 2018).

Dans un esprit de synthèse, le Tableau 3 présente les principaux facteurs de risque et de protection généralement associés au TDAH, et ce selon les données probantes les plus récentes.

Tableau 3. Facteurs de risque et de protection associés au TDAH

Facteurs de risque Facteurs de protection

Liés à l’individu

• Être un garçon (ratio de 3 pour 1)

• Prédispositions biologiques (quand un parent a le trouble, 57 % de risque de le transmettre à sa descendance ; 25 à 30 % des pères ont le TDAH ; 15 à 25 % des mères ; 20 à 25 % de la fratrie et 78 à 92 % pour les vrais jumeaux). • Dommages cérébraux

• Tempérament difficile

• Consommation de colorant alimentaire • Manque de sommeil

• Présence d’une comorbidité

• Interprétation lacunaire des situations sociales • Comportements agressifs

• Alimentation saine

• Prise de médication recommandée pour le TDAH

• Sommeil adéquat

• Activités physiques cardiovasculaires • Tempérament facile

• Quotient intellectuel élevé • Bonnes habiletés sociales • Estime de soi positive

Liés à la famille

• Problèmes d’adaptation chez les parents • Tempérament difficile chez les parents • Conflits conjugaux, divorce ou séparation • Usage abusif des punitions, de la coercition ou du

contrôle excessif

• Instabilité, indiscipline ou manque de supervision parentale

• Monoparentalité ou absence du père ou de la mère • Faible scolarité des parents

• Parents diplômés • Stabilité familiale

• Pratiques parentales constantes, cohérentes et appropriées à l’âge de l’enfant

• Discipline positive et affirmée • Capacité à résoudre les conflits • Temps d’écran limité

• Attentes parentales claires, positives et réalistes

• Collaboration avec l’école et suivi avec l’enseignant et les autres intervenants scolaires

Liés aux pairs

• Pairs antisociaux • Rejet social

• Relations d’amitié de qualité • Soutien émotionnel

• Présence d’amis

Liés à l’enseignant

• Pratiques réactives punitives, coercitives ou autoritaires

• Faible collaboration avec les parents

• Sentiment d’autoefficacité personnelle faible • Manque de formation

• Attitudes et croyances envers l’inclusion scolaire

• Relation enseignant-élève de qualité • Ajustement pédagogique pour compenser

les déficits du TDAH

• Sentiment d’autoefficacité personnelle fort Sources : (Adeyemo et al., 2014; Backman et al., 2018; Bagwell et Bukowski, 2018; Brumley et Jaffee, 2016; Ellison-Wright et al., 2008; Gatt et al., 2015; Kauffman et Landrum, 2018; Massé et al., 2014; Neudecker et al., 2019; Nigg et al., 2012; Owens et al., 2009; Pauzé et al., 2017; Song et al., 2016).

À première vue, les enseignants semblent avoir une influence moindre sur les facteurs liés à l’individu. Cependant, le fait de pouvoir identifier et reconnaître l’effet de certains facteurs biologiques permet d’améliorer la compréhension du vécu de ces derniers et d’ajuster les interventions scolaires à certaines limitations afin de renforcer l’effet des facteurs de protection (Massé et al., 2020). Du côté des facteurs liés à la famille et aux pairs, les enseignants devraient reconnaître que certains comportements de l’élève peuvent être teintés par les expériences qu’il a vécues ou qu’il vit. En outre, la prise en considération de ces facteurs d’influence devrait inciter l’enseignant à s’engager dans une démarche collaborative centrée sur la réussite éducative de l’élève en offrant du soutien ou en proposant des ressources adaptées aux besoins de l’enfant.

Il convient de jeter un œil d’autant plus attentif aux facteurs liés à l’enseignant. Le personnel éducatif doit être conscient du fait que ses attitudes, ses croyances et ses pratiques influencent de façon considérable les comportements des élèves. À cet effet, la recension des écrits de Sherman, Rasmussen et Baydala (2008) montre que les enseignants sont un facteur d’influence très important pour le rendement scolaire ainsi que l’adaptation socioaffective des élèves présentant un TDAH. Plus précisément, selon Weisz et ses collaborateurs (2017), cettedite influence se reflèterait dans l’utilisation d’interventions et de stratégies probantes ainsi que dans la capacité des enseignants favoriser un environnement structuré et prévisible où les règles, les objectifs, les attentes et les conséquences sont clairs. Donc, les enseignants doivent tout mettre en œuvre pour intervenir sur les facteurs scolaires qu’ils contrôlent afin de maximiser l’effet des facteurs de protection et minimiser celui des facteurs de risque présents (Massé et al., 2014).

Certes, force est d’admettre que l’influence positive des enseignants est fortement dépendante de leur SEP (Noell et al., 2002). En fait, les enseignants qui se sentent peu compétents ou qui ne se sentent pas aptes à mettre en œuvre les interventions nécessaires à l’adaptation et à la réussite des élèves présentant un TDAH ne seront pas en mesure d’exercer l’influence positive décrite précédemment. La section subséquente vise à décrire, définir et analyser le concept de SEP en contexte scolaire.