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5.1 Influence des connaissances primaires et secondaires dans la résolution de problèmes

5.1.7 Expérience 5

5.1.7.1 Participants et procédure

Les participants sont 204 étudiants (25 hommes, 179 femmes) d’âge moyen 19.06 ans (±1.68) recrutés sur les groupes Facebook universitaires français. La passation est faite en ligne grâce au logiciel Qualtrics et dure environ 20 minutes. Tous les participants ont un niveau de français suffisant. Le niveau moyen estimé en mathématiques des participants est de 47.29/100 (±29.43) et ils déclarent aimer faire des jeux de logique à 70.22/100 (±26.20).

Le matériel, la procédure et les analyses sont similaires à ceux de l’expérience 5 mais le matériel a été corrigé. Concernant la répartition par modalités croisées, 98 participants ont été exposés à des problèmes à habillage de connaissances primaires en premier (49 avec une charge cognitive forte, 49 avec une charge cognitive faible) et 106 participants ont été exposés à des problèmes à habillage de connaissances secondaires en premier (55 avec une charge cognitive forte, 51 avec une charge cognitive faible). Un item permet aux participants de nous informer qu’ils ont fait une pause de plus de 30 secondes pendant leur passation : 177 participants n’en ont pas fait, nous avons donc exclu des analyses les 27 autres lorsque la variable testée est la vitesse.

5.1.7.2 Résultats et discussion

Par rapport aux connaissances secondaires, les connaissances primaires entraînent une performance, un plaisir à répondre aux questions, une confiance dans les réponses données plus importants ainsi qu’une charge cognitive perçue plus faible (Table 9 et Figure 9).

Tableau 9 : Résultats des modèles linéaires complets à effets mixtes concernant l’influence des deux types de connaissances sur les variables dépendantes de l’expérience 5. Les analyses sont décrites avec les moyennes (M) et les écarts-types (σ).

Connaissances primaires Connaissances secondaires χ² p

M σ M σ

Performance 64.46 35.86 47.49 33.41 90.87 <.001 Aimer répondre aux questions 59.67 26.39 56.40 26.38 7.55 .006 Envie de trouver les bonnes réponses 67.10 23.96 65.08 24.58 3.21 .07 Confiance dans les réponses données 55.84 27.88 52.89 28.36 6.26 .01 Charge cognitive perçue 40.43 22.00 42.99 20.48 7.66 .006 Vitesse (pb/min) (n=177) 5.77 10.95 4.83 9.97 0.21 .64

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Figure 9 : Résultats des modèles linéaires complets à effets mixtes concernant l’influence des deux types de connaissances sur les variables dépendantes de l’expérience 5. Les moustaches représentent 95% de l’estimate et l’intervalle de confiance (IC) (la modalité de référence est « connaissance secondaire »).

Les syllogismes non conflictuels (M=74.57±26.25) sont mieux réussis que les syllogismes conflictuels (M=37.38±34.12) (estimate=-1.14, ES=0.09 ; χ²=445.01, p<.001). L’interaction entre le type de syllogisme et la charge cognitive manipulée est marginalement significative (χ²=2.92, p=.08) : face à des syllogismes non conflictuels, la charge cognitive n’influence pas la performance (MCC faible=75.62±26.34 vs. MCC forte=73.56±26.20) (estimate=-0.07, ES=0.10 ;

χ²=0.50, p=.48) alors que face à des syllogismes conflictuels, une charge cognitive manipulée forte (M=33.41±33.44) a tendance à diminuer les performances par rapport à une charge cognitive manipulée faible (M=41.50±34.40) (estimate=-0.22, ES=0.12 ; χ²=3.28, p=.07) (Figure 10a). L’effet d’interaction entre le type de syllogisme et le type de connaissances (χ²=13.36, p<.001) rend compte d’un impact plus important du type de connaissances sur la performance des syllogismes non conflictuels (MK1=86.27±20.20 vs. MK2=62.87±26.43) (estimate=-0.89,

ES=0.08 ; χ²=133.38, p<.001) que sur celle des syllogismes conflictuels (MK1=42.65±34.84 vs.

MK2=32.11±32.61) (estimate=-0.31, ES=0.06 ; χ²=27.08, p<.001) (Figure 10b). Les syllogismes

non conflictuels sont mieux réussis qu’il s’agisse de connaissances primaires (Mnon conflit=86.27±20.20 vs. Mconflit=42.65±34.84) (estimate=-1.22, ES=0.08 ; χ²=242.26, p<.001) ou

secondaires (Mnon conflit=62.87±26.43 vs. Mconflit=32.11±32.61) (estimate=-0.92, ES=0.07 ;

104 n’est ni significative dans le cadre d’un habillage de connaissances primaires (p=.14), ni dans celui d’un habillage de connaissances secondaires (p=.43) (Figure 10c).

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Figures 10 : Expérience 5. Interactions entre le type de syllogisme et a) la charge cognitive manipulée, b) le type de connaissances et c) la charge cognitive manipulée et le type de connaissances sur la performance des participants. Les boîtes représentent la moyenne et 95% de l’intervalle de confiance.

Plus particulièrement, concernant les problèmes à habillage de connaissances primaires uniquement, les syllogismes non conflictuels (M=38.89±21.46) entraînent une charge cognitive perçue plus faible que les syllogismes conflictuels (M=41.96±22.47) (estimate=0.14, ES=0.05; χ²=6.98, p=.008). Concernant les problèmes à habillage de connaissances secondaires, les syllogismes conflictuels favorisent le plaisir à répondre aux questions (Mnon conflit=54.53±27.50 vs.

Mconflit=58.28±25.14) (estimate=0.14, ES=0.06; χ²=6.14, p=.01) et l’envie de trouver les bonnes

réponses (Mnon conflit=63.68±24.96 vs. Mconflit=66.48±24.17) (estimate=0.11, ES=0.06; χ²=4.02,

p=.05).

Une charge cognitive manipulée forte a tendance à diminuer les performances (MCC faible=58.56±35.04 vs. MCC forte=53.48±36.11) (estimate=-0.13, ES=0.07 ; χ²=3.23, p=.07). Cet

effet est notamment observable pour les syllogismes à habillage de connaissances secondaires (MCC faible=50.87±33.47 vs. MCC forte=44.23±33.10) (estimate=-0.18, ES=0.09 ; χ²=3.66, p=.05).

Les participants ont une meilleure performance globale lorsque les problèmes à habillage de connaissances primaires sont présentés en premier (MK1premier=59.18±34.88 vs.

MK2premier=53.01±36.16) (estimate=-0.18, ES=0.07; χ²=5.95, p=.01). Particulièrement, concernant

les syllogismes à habillage de connaissances primaires, le plaisir à effectuer la tâche (MK1premier=64.74±22.57 vs. MK2premier=54.99±28.75) (estimate=-0.39, ES=0.13; χ²=8.61, p=.003)

et l’envie de trouver les bonnes réponses (MK1premier=70.67±20.42 vs. MK2premier=63.79±26.44)

106 (estimate=-0.30, ES=0.13; χ²=5.37, p=.02) sont plus importants lorsque ces problèmes sont présentés en premier. Concernant les syllogismes à habillage de connaissances secondaires, la performance est meilleure quand les connaissances primaires sont présentées en premier (MK1premier=51.27±34.32 vs. MK2premier=43.98±32.23) (estimate=-0.23, ES=0.10; χ²=5.75, p=.02)

(Annexe E, Tableau E9, deuxième ligne).

Plus le niveau estimé en mathématiques est important, plus la performance (r=0.12; p<.001) et l’envie de trouver les bonnes réponses (r=0.14; p<.001) sont fortes (0.004<estimates<0.005, 0.001<ESs<0.002; 6.83<χ²s<9.82, .002<ps<.01) (Annexe E, Figure E3).

Les résultats concernant les derniers problèmes ABC ne rendent pas compte d’influence significative de l’ordre de présentation des types de connaissances. La charge cognitive manipulée influence la charge cognitive perçue sur les problèmes ABC (MCC faible=55.47±26.92

vs. MCC forte=44.70±22.33) (F(1,198)=9.54, p=.002, η²p=0.04) : les participants considèrent que

les problèmes ABC sont moins difficiles et demandeurs en termes de mémoire de travail que les syllogismes avec des mots inversés. Par contre, il n’y a pas d’effet sur la charge cognitive globale. Plus le niveau estimé en mathématiques est important, plus la performance aux problèmes ABC (r=0.15, p<.001), le plaisir à répondre aux questions (r=0.13, p<.001) et l’envie de trouver les bonnes réponses (r=0.20, p<.001) sont élevés.

L’expérience 5 confirme l’influence positive des connaissances primaires sur la plupart des variables d’intérêt. Encore une fois, une charge cognitive manipulée forte diminue uniquement les performances pour les problèmes de connaissances secondaires montrant que ces connaissances nécessitent plus de ressources en mémoire de travail pour être traitées. De plus, présenter des problèmes à habillage de connaissances secondaires en premier semble bien miner la motivation des participants même sur des problèmes censés être intrinsèquement motivants (connaissances primaires).

Par ailleurs, la performance est fortement diminuée pour les syllogismes non conflictuels à habillage de connaissances secondaires (comparativement aux syllogismes non conflictuels à habillage de connaissances primaires). Cela argumente en faveur d’une sensation de conflit

107 parasite lié aux connaissances secondaires. Cependant, cette sensation de conflit n’est pas suffisante pour déclencher ou terminer l’action du système 2 et produire la bonne réponse. De plus, l’effet du type de syllogisme sur la charge cognitive ressentie est seulement observable pour les habillages de connaissances primaires : les participants ressentent « correctement » le conflit pour les problèmes conflictuels. Ce résultat sous-tendrait que pour les habillages de connaissances secondaires, la charge cognitive ressentie est toujours la même, qu’il y ait conflit ou non : les participants ont une sensation de conflit même quand elle n’a pas lieu d’être (syllogismes non conflictuels). Les participants semblent sentir une charge cognitive liée au conflit (biais de croyance) et aux connaissances secondaires. Cependant, ces deux charges ne s’additionnent pas : dès qu’il y a une sensation conflictuelle (quelle qu’en soit la source), une charge cognitive est attribuée. Enfin, le fait de percevoir un conflit semble motiver les participants : dans le cas de cette expérience, les participants déclarent aimer les jeux de logiques et semblent intéressés par le fait d’être mis au défi.

Etonnamment, tout comme les expériences 4a et 4b, cette expérience ne réplique pas l’interaction attendue (ou marginalement) entre le type de syllogisme et la charge cognitive manipulée. Cette absence d’effet peut-être lié au contre-balancement de l’effet des connaissances primaires mais également à la tâche de charge cognitive choisie. En effet, inverser l’ordre des mots dans les syllogismes est une tâche intrinsèque au problème et pourrait ne pas générer le même type ou la même quantité de charge cognitive qui entraverait l’action du système 2. L’expérience 6 propose de mettre à l’épreuve les résultats obtenus en interrogeant des participants plus jeunes et en utilisant une Dot Memory Task.