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Etude de l’impact de la publication de recommandations de bonne pratique sur l’utilisation des antipsychotiques chez les sujets âgés

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Antidepressant treatment patterns in younger and older adults from the general population in a real-life setting

3. Partie Impact de la publication par les autorités de régulation des recommandations de bonne pratique concernant l’utilisation des psychotropes

3.2 Etude de l’impact de la publication de recommandations de bonne pratique concernant la prescription d’antipsychotiques chez les personnes âgées d’au

3.2.1 Etude de l’impact de la publication de recommandations de bonne pratique concernant la prévalence de l’utilisation d’antipsychotiques chez les

3.2.1.1 Etude de l’impact de la publication de recommandations de bonne pratique sur l’utilisation des antipsychotiques chez les sujets âgés

atteints de démence en France

Une étude quasi-expérimentale a été menée sur la période 2003-2011, avec pour objectif d’évaluer les tendances d’utilisation des antipsychotiques chez les sujets âgés et atteints de démence en France, notamment après les alertes lancées par les autorités de santé françaises [139]. La base de données utilisée par cette étude est l’EGB. Pour cette étude, seul le régime général a été considéré (voir description EGB chapitre 1.6.1). Afin d’être considérés comme atteints de démence, les personnes devaient remplir au moins l’un des trois critères suivants : (i) recevoir au moins deux remboursements de médicaments indiqués pour traiter la démence sur une période de douze mois, (ii) bénéficier d’une reconnaissance en affection de longue durée pour la maladie d’Alzheimer ou pour une maladie apparentée, (iii) bénéficier d’une hospitalisation dont le diagnostic principal ou secondaire est identifié par un code CIM10 correspondant à la maladie d’Alzheimer ou à une démence apparentée. La date de référence était définie par la première date d’apparition d’un de ces trois événements. Etaient exclus les patients identifiés comme souffrant d’une maladie psychiatrique chronique avant la date de référence. Ainsi, l’antipsychotique était susceptible d’être prescrit pour des troubles psychologiques ou du comportement associés à la démence. Les patients devaient être âgés d’au moins 65 ans et bénéficier d’un suivi d’au moins 31 jours dans la base de données. Un groupe de patients ne souffrant pas de démence a également été constitué ; les patients de ce groupe devaient avoir au moins 65 ans et être présents dans la base au moins 31 jours.

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123 Les alertes considérées dans cette étude datent de mars 2004 pour la première alerte (concernant l’olanzapine et la risperidone) [140], février 2005 pour la deuxième alerte (concernant l’aripiprazole) [141] et décembre 2008 pour la troisième alerte (extension de l’alerte à tous les antipsychotiques) [22]. Les analyses ont consisté en des régressions segmentées pour séries chronologiques interrompues. Trois périodes de temps ont été comparées en privilégiant les deux alertes principales (2004 et 2008) : la période précédant la parution de la première alerte (1er janvier 2003 au 29 février 2004), la période entre les deux alertes principales (1er avril 2004 au 31 novembre 2008) et la période postérieure à la

dernière alerte (1er janvier 2009 au 30 juillet 2011). Le modèle compare les variations du niveau d’utilisation le mois précédant et suivant l’alerte, ainsi que les tendances évolutives de l’utilisation pour chacune des périodes de temps considérées. Des analyses ont également comparé les trois, six ou douze mois précédant et suivant l’alerte, afin d’écarter un éventuel effet « diffus » de l’alerte.

Au total, 7169 patients atteints de démence et 2714 patients ne présentant pas de démence ont été identifiés comme utilisateurs d’antipsychotiques. Après une augmentation de la prévalence mensuelle d’usage d’antipsychotique jusqu’en septembre 2003, celle-ci n’a par la suite pas cessé de diminuer de manière graduelle jusqu’en 2011, passant de 14,2% en 2003 à 10,2% en 2011. Concernant les antipsychotiques depremière génération, sur la période globale de l’étude, le taux mensuel d’utilisation a progressivement diminué. Le taux mensuel d’utilisation des antipsychotiques de seconde génération a lui augmenté fortement durant l’année 2003, puis de manière plus modérée entre janvier 2004 et janvier 2007. Il s’est ensuite stabilisé, correspondant à environ la moitié du taux global d’utilisation des antipsychotiques.

Pour évaluer l’impact de la première alerte, les auteurs ont comparé les périodes avant sa parution (1er janvier 2003 - 29 février 2004) et après (1er avril 2004 - 31 novembre

2008), tout en se situant avant celle du deuxième avertissement étudié. La pente de la tendance évolutive de l’utilisation des antipsychotiques en globalité et des antipsychotiques de deuxième génération était significativement plus faible durant la deuxième période par rapport à la première (mais négative pour les antipsychotiques en globale et positive pour les antipsychotique de deuxième génération). Pour les antipsychotiques de première génération il n’y a pas eu d’évolution de la tendance de la pente ; celle-ci restant faiblement négative sur les deux périodes. Ainsi, une tendance à la baisse de la prévalence mensuelle d’usage des antipsychotiques considérés dans leur totalité est survenue, tandis que la tendance à la croissance s’est ralentie pour les antipsychotiques de seconde génération. Pour ces derniers, même si la tendance à la croissance s’est ralentie, le taux d’utilisation a continué à augmenter jusqu’en janvier 2007 pour ensuite stagner. Concernant les antipsychotiques de

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124 première génération, la tendance à la baisse est restée constante. Après la publication du dernier avertissement, aucune diminution n’a été constatée par rapport à la période précédente. De plus, pendant la période postérieure au deuxième avertissement étudié, la diminution observée depuis 2003 concernant l’utilisation globale des antipsychotiques et pour les antipsychotiques de première génération a pris fin, et l’utilisation d’antipsychotique de première génération a stagné entre 2009 et 2011.

De manière synthétique, entre 2004 et 2011, chez les patients âgés atteints de démence, la consommation totale d’antipsychotiques a diminué (de 14,2% à 10,2%). Cette réduction avait déjà commencé avant l’année 2004 et n’a pas été affectée par les différents avertissements ; on observe même une diminution de la tendance de décroissance. Les antipsychotiques de première génération ont vu leur prévalence mensuelle d’usage diminuer durant la période d’étude puis stagner à la fin, et les antipsychotiques de seconde génération ont connu une tendance d’utilisation à la hausse jusqu’en 2007 puis une stabilisation [139]. Ainsi, ces évolutions semblent peu en rapport avec les alertes ; celles-ci ne semblent pas avoir eu d’effet sur la consommation des antipsychotiques chez les patients âgés atteints de démence. La quantité d’antipsychotiques délivrée a été étudiée en nombre de Defined Daily

Doses (DDD ou doses définies journalières) d’antipsychotiques. Il s’agit de la moyenne du

nombre de DDD par mois. La DDD représente la dose moyenne de médicament prescrit pour l’indication principale en pratique courante et calculée selon les guidelines de la WHO

Collaborating Centre for Drug Statistics Methodology [142]. Le nombre moyen de DDD pour

les antipsychotiques de seconde génération était toujours supérieur à celui des antipsychotiques de première génération. Le nombre moyen de DDD d’antipsychotique de première génération par mois est resté constant et celui des antipsychotiques de seconde génération a diminué, passant de 0,61 DDD par mois en 2003 à 0,46 DDD par mois en 2011.

3.2.1.2 Etude de l’impact de la publication de recommandations de bonne pratique sur l’utilisation des antipsychotiques chez les sujets âgés d’au moins 65 ans au Canada

Une étude de cohorte a été conduite sur une base de données de remboursement de l’assurance santé d’une région du Canada, en Ontario : Ontario Drug Benefit (ODB) [143]. L’objectif était d’étudier l’impact des recommandations concernant l’usage des antipsychotiques de seconde génération chez les sujets âgés atteints de démence ; ces dernières étant parues en 2002 concernant la rispéridone, 2004 concernant l’olanzapine et 2005 concernant l’ensemble des antipsychotiques de seconde génération. La population de l’étude était composée des sujets âgés d’au moins 66 ans lors de la délivrance d’un antipsychotique et atteints de démence. Afin d’identifier les patients atteints de démence, les

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125 auteurs ont chainé deux bases de données. Celle du Régime d’assurance maladie de l’Ontario (ODB) a permis d’identifier les remboursements de médicaments antipsychotiques de seconde génération pour les délivrances ambulatoires et celle de l’Institut canadien d’Information sur la Santé les diagnostics de démence via les compte-rendus de sortie de l’hôpital dans les cinq ans précédant la date de remboursement. Etaient également considérés comme patients atteints de démence les personnes qui avaient reçu un remboursement pour un médicament inhibiteur de la cholinestérase dans l’année précédant le remboursement d’un médicament antipsychotique.

Les auteurs ont étudié l’impact des trois avertissements sur les taux de prescription d’antipsychotiques de première et seconde générations (en distinguant l’olanzapine, la quétiapine et la rispéridone). Quatre périodes ont été étudiées : (i) la période précédant la première alerte (de mai 2000 à septembre 2002), (ii) la période suivant la première alerte (d’octobre 2002 à février 2004), (iii) la période suivant la deuxième alerte (de mars 2004 à mai 2005), (iv) la période suivant la troisième alerte (de juin 2005 à février 2007). La méthode utilisée est la méthode de régression segmentée pour l’analyse de séries chronologiques interrompues.

Les trois recommandations étaient suivies d’un ralentissement de la croissance du taux de prescription d’antipsychotique de seconde génération chez les patients âgés présentant une démence. Toutefois, le taux de prescription d’antipsychotique de seconde génération a continué à augmenter. De manière plus spécifique, on note que le premier avertissement, ciblant la rispéridone, a été associé à une diminution significative de la croissance attendue de sa prescription. Ce premier avertissement a également été associé à une diminution significative de la croissance attendue de l’usage de l’olanzapine, tandis qu’il était suivi d’une augmentation significative de la croissance attendue de l’usage de la quétiapine. De façon globale, il était associé à une diminution significative de la croissance attendue de l’usage de ces antipsychotiques de seconde génération. Ce premier avertissement était également associé à un ralentissement de la baisse attendue concernant l’utilisation des antipsychotique de première génération. Le deuxième avertissement, concernant l’olanzapine, était lié à une diminution significative de la croissance attendue de son usage. Il était également associé à une diminution significative de la croissance attendue de l’usage des antipsychotiques de seconde génération, ainsi que des antipsychotiques en globalité. Le troisième avertissement, concernant tous les antipsychotiques de seconde génération, était suivi d’une diminution de la croissance prédite concernant l’utilisation de la quétiapine et des antipsychotiques de seconde génération, ainsi que d’une diminution significative de la prescription des antipsychotiques dans leur totalité. Le taux de prescription d’antipsychotique dans leur totalité chez les patients âgés atteints de démence a augmenté

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126 de 20% entre septembre 2002 et février 2007. Ainsi ces recommandations semblent avoir eu un impact assez limité puisqu’elles ont globalement fait diminuer la tendance à l’accroissement du taux de prescription d’antipsychotiques de seconde génération chez les patients âgés atteints de démence sans pour autant en diminuer le taux global de prescription.

Une autre étude canadienne, plus récente, s’est intéressée à l’usage des médicaments psychotropes en population âgée canadienne, au regard des alertes et des recommandations de bonnes pratiques publiées, ainsi qu’aux caractéristiques associées à un mauvais usage des psychotropes chez les personnes âgées [144]. Elle n’avait pas pour objectif d’évaluer l’impact des recommandations mais d’observer les changements de prescription entre deux périodes de temps ; elle n’a pas considéré de manière spécifique les patients atteints de démence [144]. Les données de l’étude ont été issues de la base de données administratives de l’assurance maladie de la région de Manitoba, au Canada. Les données venant du système de santé ambulatoire, du système hospitalier ou des maisons médicalisées et les délivrances pharmaceutiques étaient enregistrées. A l’aide d’un numéro d’identification crypté, la base pouvait être chainée avec d’autres bases de données comme le registre de population, les comptes-rendus hospitaliers. Cette étude a inclus tous les habitants de la région de Manitoba, âgés de 65 ans et plus, sur la période 1997/1998 à 2008/2009. Des comparaisons dans le temps ont été effectuées entre la période 1997/98 et la période 2008/09. Deux groupes de population ont été pris en compte : (i) les sujets âgés vivant à domicile, (ii) les sujets âgés vivant en maison de soins. Les nouveaux utilisateurs de médicaments psychotropes étaient définis comme ceux qui n’avaient pas reçu de délivrance du médicament concerné durant l’année précédant l’inclusion dans l’étude.

Concernant la population âgée vivant à domicile, l’effectif de l’étude était de 143 491 sujets en 1997/98 et de 153 189 en 2008/09. Dans cette population, la prévalence d’utilisation d’antipsychotiques de seconde génération a augmenté de 0,06% à 1,35%, alors que la prévalence d’utilisation des antipsychotiques de première génération a diminué de 1,28% à 0,59%. Le taux d’incidence trimestrielle de la consommation d’antipsychotiques de seconde génération a augmenté de manière significative sur la période d’étude considérée, tandis que celui des antipsychotiques de première génération a diminué de manière significative. Un âge supérieur à 85 ans était associé à une incidence significativement plus élevée d’utilisation d’antipsychotique de première et seconde générations par rapport à la tranche d’âge 65-84 ans. La prévalence d’utilisation a également été étudiée à l’aide du nombre de DDD pour 1000 patients par jour. Concernant la quantité d’antipsychotique de seconde génération utilisée (exprimée en nombre de DDD), celle-ci a tout d’abord augmenté

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127 de 0,2 DDD/1000 individus en 1997/98 jusqu’à 6,5 DDD/1000 en 2004/05 avant de redescendre à 4,9 DDD/1000 en 2008/09.

L’effectif du groupe des patients vivant en maison médicalisée était de 8516 en 1997/1998 et 8818 en 2008/2009. Dans cette population, la prévalence d’utilisation des antipsychotiques de seconde génération a augmenté de 1,5% à 26,9%, tandis que celle des antipsychotiques de première génération a diminué de 16,9% à 4,8%. Le taux d’incidence trimestrielle concernant les antipsychotiques de seconde génération a augmenté de manière significative sur la période de l’étude, tandis que celui des antipsychotiques de première génération a diminué de manière significative. Un âge compris entre 65 et 84 ans était significativement associé à une incidence plus élevée d’utilisation d’antipsychotiques de première et de seconde génération par rapport à la tranche d’âge de 85 ans et plus. La quantité des antipsychotiques de seconde génération a augmenté de 5,5 DDD/1000 patients en 1997/98 jusqu’à 85,5 DDD/1000patients en 2003/04 puis a rediminué jusqu’à 70,7 DDD/1000 patients à la fin de la période d’étude.

3.2.1.3 Etude de l’impact de la publication de recommandations de bonne pratique sur l’utilisation des antipsychotiques chez les sujets âgés d’au moins 65 ans, atteints de démence, aux États-Unis

Une étude de cohorte a été conduite à partir du registre national des vétérans aux États-Unis, afin d’étudier l’impact des alertes de la FDA sur l’utilisation des antipsychotiques chez les patients âgés atteints de démence durant la période allant de 1999 à 2007 [145]. Afin d’être inclus dans l’étude, les sujets devaient être âgés d’au moins 65 ans et avoir reçu un diagnostic de démence entre le 1er avril 1999 et le 30 septembre 2007. L’effectif total de l’étude était de 254 564 patients. Les trois périodes étudiées étaient les suivantes : (i) période précédant les avertissements de la FDA (d’avril 1999 à juin 2003), (ii) période d’alerte « précoce » (de juillet 2003 à mars 2005), (iii) période suivant l’inclusion des alertes dans l’emballage des médicaments (black box warning) (d’avril 2005 à septembre 2007). La méthode de régression segmentée pour l’analyse de séries chronologiques interrompues a été utilisée pour comparer les différentes périodes.

L’usage d’antipsychotiques (toutes classes confondues) a diminué de manière significative au cours de la première période, en l’absence de tout avertissement puis entre la deuxième et la troisième période. L’usage d’antipsychotique de seconde génération a augmenté durant la première période, puis a diminué de manière significative entre la première et la deuxième période et a poursuivi une diminution plus franche durant la troisième période. L’usage des antipsychotiques de première génération a fortement diminué durant la première période, puis une très légère hausse a été constatée de manière

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128 significative entre la première et la deuxième période. Ainsi, l’usage des antipsychotiques de seconde génération a commencé à diminuer durant la période de pré-alerte en 2003, puis cette diminution est venue s’accélérer avec la diffusion des avertissements [145].

Ainsi, en France et au Canada, les alertes semblent avoir eu un impact assez limité, tandis qu’aux États-Unis, il semble que les black box warnings de la FDA aient permis d’accentuer le mouvement, déjà initié, de diminution d’utilisation des antipsychotiques chez les sujets âgés atteints de démence.

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