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Partie 3 : Mobiliser les acteurs de l’entreprise dans le déploiement d’une

2 Favoriser l’appropriation, par les acteurs de l’entreprise, des enjeux d’une démarche

2.4 Trois enseignements

De l’ensemble de ces travaux sur le déploiement effectifs de la RSE au sein des organisations, il est possible de retenir trois enseignements :

1°) Le niveau de déploiement des dispositifs d’apprentissage respecte systématiquement un ordre précis, récurrent dans le temps. Ceci constitue un « cheminement » structuré dans le processus d’apprentissage organisationnel de la RSE : 1° formalisation, 2° formation, 3° gestion des connaissances, 4° culture d’entreprise, 5° dispositifs RH.

2°) L’engagement responsable des organisations rencontrées reste généralement superficiel, en boucle simple. A quelques exceptions près, valorisation des initiatives, culture d’entreprise et dispositifs RH ne sont pas encore suffisamment matures pour permettre une évolution significative des valeurs et modes de fonctionnement de l’organisation. L’écart entre le discours responsable et les pratiques perdure, au risque de démobiliser les acteurs.

3°) Tant sur le plan théorique que dans la réalité des organisations rencontrées, il apparaît que seul un apprentissage en double boucle permet de pérenniser l’engagement responsable et amorcer un cycle d’amélioration continue. Nos recherches font émerger une série d’écueils, mais aussi des facteurs de réussite d’un apprentissage profond de la RSE : obligation de maîtrise des risques via l’application de référentiels ‘DD’ ; pertinence du couple ‘commanditaire-maître d’ouvrage’ ; efficacité de l’apprentissage par projets et en équipe ; besoins d’outils d’évaluation monétaire des coûts et bénéfices des démarches responsables; nécessité d’inscrire les enjeux environnementaux et sociaux dans la continuité de la vie de l’employé-citoyen.

Conclusion

Cette troisième phase est centrale dans l’ensemble de nos travaux de recherche que nous articulons selon une proposition de méthodologie de mise en œuvre de démarches responsables en quatre temps. L’implication des acteurs de l’entreprise, à tous les niveaux, de la direction générale à la base, est la condition sinae qua non de la mise en œuvre effective d’une politique responsable cohérente. Dans cette troisième partie, nous avons, tout d’abord, insisté sur la nécessité de bien appréhender les perceptions a priori des acteurs vis-à-vis de la démarche responsable. Sur cette base, il s’agissait de comprendre comment adapter aux spécificités d’une entreprise donnée le guide générique d’une démarche responsable qu’est l’ISO 26000. L’enjeu de ce travail d’adaptation est d’en faire un outil d’apprentissage organisationnel. Puis, dans un second temps, nous nous sommes concentrés sur les mécanismes de l’apprentissage organisationnel de la RSE afin de faire ressortir les dispositifs à déployer, selon un ordre précis, afin de favoriser la « métabolisation » de la démarche responsable par l’ensemble des personnels.

Dans d’autres travaux, que nous n’aborderons que très brièvement ici, en conclusion de cette troisième partie, nous avons étudié différents cas particuliers de mise en œuvre de démarches responsables : dans le secteur bancaire (Baret, Chivot, 2013), dans le secteur hospitalier (Baret, Renaud, 2014), à partir d’une démarche d’ancrage territorial (Baret,

Gauthier, 2013) ou via un Système de Management Environnemental (SME) (Baret, 2010b).

Ainsi, nous avons examiné comment les Principes Equateurs pouvaient être utilisés comme outil d’apprentissage pour permettre à une banque d’évoluer vers un modèle « durable » (Baret, Chivot, 2013). Sur la base des travaux existants, nous avions catégorisé l’engagement responsable des banques et identifié les actions et dispositifs permettant de passer d’un stade de responsabilité à l’autre. De là, nous avions construit un enchaînement de propositions destiné à appréhender la capacité des Principes Equateurs à accompagner les banques vers ce modèle durable. Enchaînement que nous avions testé avec le cas d’un important groupe bancaire. Nos résultats avaient montré que les Principes Equateurs pouvaient constituer un outil intéressant d’apprentissage et de mobilisation des personnels pour accompagner une banque « classique » vers un comportement plus responsable (que nous qualifions d’« offensif ») sur le volet ‘financement de projet’. Mais, en l’état –notre recherche portait jusqu’en 2012-, leurs limites étaient trop importantes pour permettre de franchir la marche qui permet d’atteindre le stade « banque durable ». Notons, ici, que nous amorçons une nouvelle étude, à partir du cas d’un autre groupe bancaire, pour examiner si suite à l’application de Bâle III et au processus de révision des Principes Equateurs entre 2013 et 2015, ceux-ci sont devenus un outil d’apprentissage plus efficace quand à un financement de projet responsable.

Dans le cas du secteur hospitalier (Baret, Renaud, 2014), nous avions complété les approches en termes d’apprentissage organisationnel de la RSE par celles portant sur l’engagement organisationnel autour des valeurs du service public. L’enjeu était d’examiner comment fidéliser les médecins anesthésistes-réanimateurs au sein des CHU, dans un contexte où la concurrence du secteur privé -beaucoup plus attractif en termes de salaire et, souvent, de conditions de travail- constitue une réelle menace pour la pérennité du bon fonctionnement des hôpitaux publics. Notre recherche mettait en avant la nécessité de valoriser les valeurs socialement responsables qui sous-tendent la logique du secteur hospitalier public, pour favoriser l’engagement et la fidélité organisationnelle des médecins anesthésistes-réanimateurs, eux même porteurs de ces valeurs. De même, l’implication de ces médecins autour de valeurs responsables était favorisée par les relations de confiance avec les autres personnels des hôpitaux portant aussi ces valeurs.

Dans une autre série de recherches, nous avions également montré que la mobilisation des acteurs autour des enjeux du développement durable au sein des organisations pouvait être renforcée par une démarche responsable d’ancrage territorial (Baret, Gauthier, 2013). Les enjeux d’un ancrage territorial, pour l’entreprise, sont multiples. Il en va de même en ce qui concerne la définition du « territoire » de l’entreprise. Mais si l’on considère l’une des acceptions possibles du territoire de l’entreprise comme étant l’espace de vie de ses salariés, on comprend que les salariés seront sensibilisés à une démarche responsable pour de nombreuses raisons, qui seront autant de motivation pour eux de s’impliquer (contribution à l’amélioration du cadre de vie via le respect de l’environnement, le développement d’infrastructures, d’emplois induits, de pépinières d’entreprises, de dispositifs de formations locaux, etc.). Nos recherches mettaient clairement en avant les possibilités dont dispose une entreprise pour renforcer l’attractivité territoriale et, ce faisant, donner du sens à l’engagement des acteurs de

l’entreprise dans une démarche responsable (et plus précisément, dans le cadre de la question centrale « Communauté et développement local » de l’ISO 26000).

Nous avons également examiné comment un système de management de l’environnement (SME) pouvait participer de la mobilisation des acteurs de l’entreprise autour d’une démarche responsable (Baret, 2010b). Au delà de l’enjeu édicté par l’ISO selon lequel « le SME est la composante d’un système de management d’un organisme

utilisé pour développer et mettre en œuvre sa politique environnementale (…) » (Norme

NF EN ISO 14001 :2004), nous avions souligné l’importance, pour l’organisation, de se doter des dispositifs d’apprentissage et d’appropriation du SME par l’ensemble de ses personnels. Ainsi, nous avions identifié toute une série de différentes bonnes pratiques permettant cet apprentissage (Cf. Baret, 2000b, p.219-220).

Après avoir examiné comment la direction peut être impliquée pour légitimer et impulser la démarche responsable, vu comment il était possible de hiérarchiser les priorités afin de définir une approche cohérente et, dans cette troisième partie, des moyens possibles pour impliquer les acteurs de l’entreprise ; il importe désormais, au travers d’une autre série de travaux, d’étudier comment l’évaluer et la piloter.

Partie 4 : Evaluer, piloter et rendre compte

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