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Enjeux actuels

Dans le document Nanobulles et nanothermique aux interfaces (Page 57-62)

I. 4.3 ´ Evaluation de la r´ esistance d’interface

I.5 Nanobulles autour de nanoparticules chauff´ ees: ´ etudes existantes 46

I.5.3 Enjeux actuels

La difficult´e `a observer des nanobulles, inh´erente aux ´echelles de temps et d’espace tr`es r´eduites, se retrouve d`es lors que l’on souhaite expliquer les conditions de leur g´en´eration et leur dynamique. La compr´ehension de ces deux ´el´ements est cependant essentielle, d’abord d’un point de vue fondamental, mais aussi afin d’optimiser les conditions de production des nanobulles pour les applications d´ecrites plus haut. En particulier, plusieurs auteurs se sont interrog´es sur la validit´e des mod`eles utilis´es habituellement aux ´echelles macroscopiques et microscopiques pour l’´etude des nanobulles. Nous avons ´

evoqu´e en d´ebut de ce manuscrit les ´etudes de Rayleigh et les mod`eles permettant de d´ecrire des bulles de taille microm´etrique. Ces mod`eles sont-ils toujours valables `a l’´echelle nanom´etrique? De mˆeme, plusieurs th´eories rendent comptent de l’´ebullition dans un fluide en volume. Certaines consid´erations issues de ces mod`eles s’appliquent-elles toujours au ph´enom`ene violent qu’est l’´ebullition explosive? Ces questions ont motiv´e plusieurs travaux de mod´elisation et d’analyse, dont nous donnerons quelques conclusions dans ce qui suit.

I.5.3.1 Seuil de production des nanobulles

L’une des premi`eres interrogations quant `a la g´en´eration des nanobulles concerne leur seuil d’apparition, `a savoir la fluence minimale permettant la vaporisation explosive dans le fluide. Si tous les auteurs s’accordent `a dire qu’un tel seuil existe, l’interpr´etation qu’ils en donnent diff`ere.

Par l’´etude de l’´ebullition autour d’un microfil de platine dans l’eau, Glod et al. donnent un crit`ere pour l’´ebulliton explosive [90]. Le nanofil dans cette ´etude est chauff´e par un pulse laser de 8 μs et de puissance variable. L’´echauffement du fil produit une variation lin´eaire de sa r´esistivit´e ´electrique, mesurable par l’application d’un courant ´electrique. Les auteurs identifient l’apparition d’une bulle autour du fil lorsque l’augmentation de la temp´erature du fil pr´esente une rupture de pente. La brusque acc´el´eration du chauffage est li´ee `a la forte diminution du flux thermique vers le fluide due `a une r´esistance d’interface solide-vapeur augment´ee. Simultan´ement, un capteur de pression et un microscope permettent de confirmer l’apparition de bulles. Les auteurs montrent que la temp´erature du fluide en surface du fil doit atteindre 303

oC pour que la nucl´eation homog`ene se produise. Ils observent cependant des bulles `a de plus faibles ´echauffements, qu’ils attribuent `a la nucl´eation homog`ene initi´ee sur les d´efauts du fil. La valeur de 303 oC (576 K, soit 89 % de la temp´erature critique de l’eau) correspond au seuil de stabilit´e de l’eau m´etastable.

le chauffage de nanoparticules d’or dans l’eau. Il s’int´eresse uniquement `a l’´equation d’´evolution de la temp´erature de la nanoparticule, en n´egligeant la temp´erature ´electronique et en supposant un profil de temp´erature variant comme 1/r dans l’eau. Il donne en premier lieu des arguments qualitatifs sur les conditions permettant le meilleur chauf-fage de la nanoparticule: le rayon de la nanoparticule devrait ˆetre assez grand pour augmenter le temps caract´eristique de diffusion τ = R2

npl (o`u αl est la diffusivit´e de l’eau) au del`a de la dur´ee du pulse, mais assez petit pour que l’´echauffement dˆu au pulse soit maximal. Les r´esultats de Wen l’am`enent `a la conclusion que l’hyperthermie n’est pas un m´ecanisme viable pour une application biom´edicale, en raison d’une trop faible ´

el´evation de temp´erature dans le fluide sur des distances cons´equentes. En revanche, il souligne la possible production de nanobulles, suivant une nucl´eation vraisemblablement homog`ene. Il consid`ere le seuil de nucl´eation comme la puissance laser minimale pour que la temp´erature dans une coquille de 2 nm d’´epaisseur autour de la particule soit chauff´ee au del`a de 600 K, soit 92% de la temp´erature critique de l’eau. Sa description des caract´eristiques d’une nanobulle ainsi form´ee reste cependant assez sommaire, bas´ee essentiellement sur des arguments dimensionnels.

Trois groupes quantifient le seuil d’apparition des nanobulles autour de nanoparticu-les chauff´ees par laser. Pour Plech et al. [1] et Hashimoto et al. [91], ce seuil varie avec le rayon des particules selon l’´evolution pr´esent´ee sur la figure 28. Les deux groupes men-tionnent le franchissement de la temp´erature spinodale comme crit`ere pour l’´ebullition explosive.

Plech et al. utilisent la r´esolution des ´equations de diffusion thermique par les trans-form´ees de Laplace, qui donne une expression pour l’´evolution temporelle de l’´echauffement de la nanoparticule et du fluide. Ce mod`ele suppose de connaˆıtre l’´echauffement initial de la nanoparticule, qui peut ˆetre reli´e `a une fluence laser donn´ee. Appliquant ce mod`ele Plech et al. parviennent `a un bon accord avec leurs observations exp´erimentales. Cepen-dant, ils ne pr´ecisent pas la position dans le fluide `a laquelle la temp´erature spinodale est franchie dans leur mod`ele, ni s’ils tiennent compte ou non d’une possible fusion des nanoparticules. Notons ´egalement que ce mod`ele suppose que le transfert thermique de la particule au fluide d´ebute apr`es le chauffage de la particule par le laser. Il ne permet donc pas de consid´erer des pulses autres qu’ultracourts.

Hashimoto et al. d´eveloppent un mod`ele dans lequel ils supposent qu’une couche de fluide entourant la particule, d’une certaine ´epaisseur, doit ˆetre chauff´ee `a une temp´ era-ture moyenne ´egalant la temp´erature spinodale. Ils obtiennent ainsi un bon accord avec leurs r´esultats exp´erimentaux. Leur mod`ele manque cependant de bases th´eoriques, en ce qu’il n´eglige les tr`es forts gradients de temp´erature dans le fluide `a proximit´e de la nanoparticule.

Lapotko et al. ´evaluent le seuil de vaporisation autour de nanoparticules uniques, de clusters de particules et de particules de type cœur-coquille d’or et de silicium, pour un pulse de dur´ee 0,5 ns [92]. Ils obtiennent des fluences seuil dix fois sup´erieures `a celles report´ees par Plech et al. et Hashimoto et al.. Sans proposer r´eellement de mod`ele, ils estiment que le seuil de vaporisation devrait correspondre au chauffage de la

nanoparti-20 40 60

Rayon (nm)

50

100

150

200

Fluence seuil (J/m

2

)

Plech et al. Hashimoto et al.

Figure 28: Fluence seuil mesur´ee exp´erimentalement pour l’´ebullition explosive en fonction du rayon des nanoparticules, report´ee par Plech et al. [1] (carr´es violets) et Hashimoto et al. [91] (triangles verts). Le laser pompe employ´e est un laser femtose-conde dans les deux cas.

cule `a la temp´erature critique de l’eau. La diff´erence entre cette estimation et les seuils exp´erimentaux est d’un ordre de grandeur, pour tous les types de particules ´etudi´es. Les auteurs justifient cette diff´erence par la tr`es forte pression de Laplace appliqu´ee `a des bulles de rayon nanom´etrique. Pour surpasser cette pression, toujours selon les auteurs, la vapeur devrait ˆetre amen´ee `a des temp´eratures bien sup´erieures `a celles estim´ees par leur mod`ele.

Il existe donc plusieurs mani`eres d’envisager le seuil de g´en´eration des nanobulles. Le franchissement de la temp´erature spinodale est celui qui b´en´eficie de la plus forte occurence, mais la description fine de la vaporisation explosive souffre encore de quelques lacunes.

I.5.3.2 Optimisation de la taille et de la dur´ee d’existence des bulles

Dans un article de 2009, Lapotko mesure le temps de vie des bulles et montre qu’elle augmente avec la fluence employ´ee et avec la taille des nanoparticules, avec toutefois une saturation observ´ee aux larges fluences et attribu´ee `a un processus optique unique-ment [30]. Il confirme ´egalement que la formation de nanobulles est un processus `a seuil: il existe une fluence laser minimum, pour une dur´ee de pulse pompe donn´ee, telle qu’une nanobulle soit produite. Suivant un argument ph´enom´enologique, Lapotko estime que la dur´ee du pulse devrait ˆetre assez longue pour que l’´energie ne soit pas imm´ediatement dissip´ee sous forme d’onde de choc, mais assez courte pour permettre le confinement thermique n´ecessaire `a la vaporisation et ´eviter les pertes thermiques par diffusion dans le fluide.

Le seuil en fluence pour des particules nanom´etriques diminue lorsque la taille des particules augmente, observation attribu´ee `a une diminution de la pression de Laplace et des effets visqueux, contrairement `a ce qui est observ´e pour des particu-les microm´etriques. En dessous de ce seuil, la r´eponse optique du syst`eme montre une forte d´ecroissance en intensit´e, signature d’un ´echauffement global du fluide proche de la particule. De mani`ere ´etonnante, la production de nanobulles annule ce signal dˆu `a l’´echauffement, qui n’est pas pr´esent avant leur g´en´eration ni mˆeme de mani`ere r´esiduelle `

a l’effondrement de la bulle, alors que l’on pourrait s’attendre `a ce que l’effondrement d’une nanobulle produise un fort ´echauffement.

Lapotko souligne qu’il n’observe aucun ph´enom`ene utilisant l’´energie emmagasin´ee par la bulle `a sa g´en´eration: oscillations dues `a la viscosit´e ou ondes de pression.

Il formule plusieurs hypoth`eses pour expliquer l’absence de chauffage r´esiduel du fluide apr`es l’effondrement d’une nanobulle:

• La bulle diffuse la lumi`ere du laser pompe, entraˆınant une diminution de la fluence effectivement re¸cue par la nanoparticule et de son ´echauffement.

• Seule une partie (typiquement moins de 1%) de l’´energie de la nanoparticule est effectivement convertie en ´energie m´ecanique dans la bulle. Cette faible quantit´e, une fois dissip´ee par la bulle, n’est pas suffisante pour chauffer le fluide.

• La nanobulle agit comme un isolant thermique pour la nanoparticule et empˆeche par ce biais le chauffage du fluide environnant.

• Apr`es l’effondrement de la nanobulle, l’´energie de la nanoparticule est dissip´ee sous forme de chaleur principalement, mais une partie pourrait ˆetre consomm´ee par ´

emissions acoustiques ou optiques, bien qu’aucune observation d’un tel ph´enom`ene ne vienne appuyer ce point.

Ces derni`eres hypoth`eses, certaines contradictoires entre elles, sont int´eressantes en ce qu’elles montrent la n´ecessit´e de mieux comprendre les m´ecanismes physiques r´egissant l’apparition des nanobulles et le comportement du fluide avant la g´en´eration d’une nanobulle et pendant sa dur´ee d’existence.

Chapitre II

Mod`ele

L’´etude de la formation et de la croissance des nanobulles exige de d´ecrire des ph´enom`enes tr`es localis´es ayant une port´ee `a longue distance par rapport aux longueurs caract´eristiques du probl`eme. En effet, si les effets thermiques ne se font ressentir que dans l’environnement proche de la particule, la formation d’une nanobulle s’accompagne de la g´en´eration d’une onde de pression que le syst`eme ´evacue sur une longue distance. Ce ph´enom`ene est d’ailleurs `a la base du m´ecanisme de destruction des cellules qui fait l’int´erˆet des nanobulles dans le domaine m´edical, comme expliqu´e en introduction de ce manuscrit. La prise en compte de ces effets `a une ´echelle spatiale plus ´etendue que le rayon des particules et l’´etude de nanoparticules de diam`etre coh´erent avec l’exp´erience limite l’utilisation de m´ethodes telles que la dynamique mol´eculaire. Notre choix s’est port´e sur un mod`ele continu d´ej`a appliqu´e par le pass´e pour simuler le transport thermique interfacial et l’´ebullition `a l’´echelle nanom´etrique [93, 94].

Dans ce chapitre nous d´etaillerons le mod`ele que nous avons employ´e. Une premi`ere partie sera consacr´ee `a la mod´elisation du fluide. On y d´ecrira ses propri´et´es thermody-namiques bas´ees sur l’´equation de van der Waals, puis la prise en compte des interfaces liquide-vapeur et fluide-solide, pour finir avec la mod´elisation de la dynamique dans le fluide. Dans une seconde partie nous donnerons les ingr´edients que nous avons employ´es pour rendre compte de l’´evolution ´energ´etique de la nanoparticule et son couplage ther-mique avec le fluide, `a travers les flux thermiques conductif et balistique notamment. La troisi`eme partie sera consacr´ee `a une ´etude dimensionnelle, qui permet d’une part de discriminer a priori les effets physiques pr´edominants dans le fluide et d’autre part de bˆatir un syst`eme d’unit´es propre au code. Enfin, la derni`ere partie donnera plus de pr´ecision sur les difficult´es num´eriques que nous avons rencontr´ees et la fa¸con dont nous les avons contourn´ees. En particulier, un paragraphe sera consacr´e aux conditions aux limites.

II.1 Description du fluide

Dans cette premi`ere partie, nous pr´esentons le mod`ele que nous avons employ´e pour d´ecrire le fluide. Apr`es avoir donn´e des ´el´ements concernant sa thermodynamique, nous nous int´eressons plus particuli`erement `a la mod´elisation des interfaces liquide-vapeur et fluide-solide. Une derni`ere partie est consacr´ee `a la prise en compte de la dynamique.

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