• Aucun résultat trouvé

QUI SONT LES ENFANTS ET ADOLESCENTS EN SITUATION DE RUE DU CIRCO BAIXADA ?

INNOVATIONS EDUCATIVES : PROJET CIRCO BAIXADA

JOSÉ CÂNDIDO BOFF

2. QUI SONT LES ENFANTS ET ADOLESCENTS EN SITUATION DE RUE DU CIRCO BAIXADA ?

2.1. Contexte de l’enfance au Brésil

L’inégalité sociale due à l’injuste distribution des revenus au Brésil est publique et notoire. En 2005, le Brésil a été présenté, selon le Rapport du Développement Humain (RDH) du Programme des Nations Unies pour le

1

Le cirque social utilise les arts du cirque dans le processus éducatif, dans une perspective de promotion de la citoyenneté et de transformation sociale.

2 Réseau Cirque du Monde, articulation d’ampleur nationale entre 22 projets sociaux qui utilisent la pratique du

Développement (PNUD), comme « référence d’inégalité dans le monde », occupant l’avant dernière place parmi les pays d’Amérique Latine en terme de distribution des revenus.

En 2006 le Rapport du Développement Humain du PNUD signale une amélioration dans la réduction des inégalités dans le pays. Ce progrès cependant ne suffit pas à diminuer la situation révoltante dans laquelle les 10% les plus riches de la population s’approprient une part des revenus nationaux d’environ 46%, tandis que les 10% les plus pauvres n’en détiennent que 0,8% (PNUD, 2006).

Le tableau de cette situation pour la population brésilienne, et en particulier pour les enfants et adolescents est préoccupant étant donné que presque la moitié des familles comptent au moins un de leurs membres entre 0 et 14 ans (IBGE 20053). Or, dans la mesure où l’Etat ne garantit pas de façon universelle l’accès aux services de base tels que santé, éducation et habitation, le revenu per capita devient une variable déterminante pour le bien-être des enfants. En tenant compte, donc, du revenu per capita, près de 40% des enfants de moins de 15 ans vivent dans des familles dont le revenu per capita ne dépasse pas ½ salaire minimum, soit environ 3 dollars US$ par jour (IBGE 2005).

A ce tableau des inégalités sociales qui commencent dès la plus tendre enfance, vient s’ajouter le tableau des inégalités régionales. Les régions Nord et Nord-est du Brésil, socio-économiquement plus défavorisées ont un indice de Développement Infantil (IDI) plus bas que la moyenne nationale (UNICEF – Situation de l’Enfance au Brésil 2006). Ces régions, devant les difficultés rencontrées, maintiennent une tendance historique à la migration vers les grands centres urbains. Les villes de São Paulo et Rio e Janeiro sont celles qui reçoivent le plus gros flux d’immigrants (70,7% selon l’IBGE, 2003). Et c’est à la périphérie de ces villes qu’ils s’installent, formant de grandes poches de misère et subissant les effets de la violence à cause du trafic de drogues et d’armes.

2.2. Contexte de Rio de Janeiro et de la Baixada Fluminense4

Le constat, au niveau de l’Etat de Rio de Janeiro ne se différencie pas beaucoup de la situation nationale. Une partie seulement de 10% de la population détient la moitié des revenus de l’Etat et environ 1,6 millions d’enfants et de jeunes vivent au dessous du seuil de pauvreté (FGV 2000). 43% des enfants entre 10 et 14 ans ont moins de 4 ans d’étude et seulement 38% des adolescents entre 15 et 17

3

Institut Brésilien de Géographie et de Statistique.

4

ans suivent les classes de seconde, première, terminale, c’est à dire le niveau de scolarité normal pour cet âge (IPEA 2000).5

Située à près de 50 km de Rio de Janeiro, la Baixada Fluminense a une histoire fortement liée à ces immigrants. C’est un lieu occupé par des familles qui ont laissé derrière elles leur terre et leurs coutumes, quittant leurs racines à la recherche d’une vie meilleure. Elle abrite une population, en majorité noire, jeune et féminine, qui dispose en moyenne d’un revenu familial allant jusqu’à deux salaires minimums. Dans les communes qui la composent, la situation des services publics concernant la garantie des droits fondamentaux est précaire dans tous les domaines.6 C’est une zone de villes dortoirs d’où une grande partie de la population va à la recherche d’opportunités à Rio de Janeiro.

Au niveau familial cette situation se reflète dans la fragilisation des liens interpersonnels qui, associée au manque de politiques publiques et à la misère inter-générations, crée la toile de fond de l’exploitation sexuelle, du travail des enfants et du passage des enfants et adolescents à la rue.7 Ceux-ci vont le plus souvent dans les rues de Rio de Janeiro et y développent des relations, des références et des modes de survie spécifiques. L’étude réalisée par Rede Rio Criança8 en 2001 a montré qu’environ 49% des EASR viennent de cette région. Cette étude a orienté l’installation du Circo Baixada dans la région. Aujourd’hui, selon des institutions qui font partie de ce même réseau, ce pourcentage est d’environ 40%. Au Circo Baixada environ 70% des enfants suivis sont en situation d’exploitation de leur travail dans les rues et 30% y vivent.

On peut dire que le Circo Baixada est né d’une action en réseau. C’est en réseau qu’il s’articule aujourd’hui. D’ailleurs, il ne pourrait en être autrement pour travailler dans la région face aux difficultés rencontrées et à la précarité de la situation. La participation aux Conseils Municipaux des Droits de l’Enfant et de l’Adolescent et d’Assistance Sociale, les initiatives au niveau régional comme le Réseau Criança Baixada,9 et au niveau national à travers la participation au Réseau Cirque du Monde, apportent un éclairage sur combien le travail en réseau est imbriqué dans la proposition d’intervention du Circo Baixada, en vue de

5 AZEREDO, B. et MARQUES, R. in Da arte de compartilhar: uma metodologia de trabalho social com as famílas

/ Mariana de Castro Moreira (organizadora). – Rio de Janeiro, Mauad: Instituto Desiderata; Teresópolis, RJ: Compartilharte, 2006.

6

Données recueillies par la FASE (www.fase.org.br)

7 Plan Stratégique du Circo Baixada 2005-2007.

8 Réseau composé de 15 ONGs qui travaillent avec les EASR dans la ville de Rio de Janeiro. 9

changements structurels et d’amélioration des conditions de vie des enfants à long terme.

3. LA PERSPECTIVE DE TRAVAIL DU CIRCO BAIXADA –