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3.1. Buts cliniques et de dépistage

Notre image s’adresse d’une part, aux patients présentant des difficultés phasiques consécutivement à une lésion gauche (LG). La description réalisée par le patient LG offre une appréciation globale du langage fonctionnel. Elle permet aussi d’observer les difficultés langagières plus fines (manque du mot, paraphasies, transformations phonétiques et phonémiques, agrammatisme) et ainsi de mettre en évidence certaines caractéristiques de la sémiologie aphasique8. Notre image a pour but de mettre en évidence, de manière rapide et peu coûteuse, des difficultés dans l’élaboration des inférences. Elle s’adresse donc d’autre part, à des patients LD.

Comme introduit au point 2.2, ces patients présentent des difficultés à générer une macrostructure nécessaire à l’élaboration des inférences.

La description semi-induite par notre image devrait permettre de mettre en évidence simplement et rapidement différentes symptomatologies neuropsychologiques. Ce dépistage clinique devrait permettre d’orienter plus spécifiquement la suite du bilan, en fonction des déficits mis en évidence lors de la description de l’image. L’annexe 4 propose une liste des troubles neuropsychologiques qui pourraient être observés à l’aide de notre nouvelle image.

3.2. Contenu théorique

Lors de l’élaboration d’une grande image, à visée de dépistage clinique, il faut tenir compte de différents éléments, afin d’éviter de pénaliser certaines populations par des facteurs externes et biaisant l’évaluation. Les différents inconvénients relevés dans les images existantes, nous permettent de réfléchir aux aspects à améliorer afin que notre image soit un outil nouveau, valide et sensible. Ainsi, il est primordial que le dessin soit suffisamment grand, que les traits soient visuellement simples et que les éléments dessinés soient clairs et non ambigus afin que des troubles visuels (non liés à des déficits neuropsychologiques) ne biaisent pas l’analyse de l’image.

Il s’agit donc d’éviter des détails trop petits et de s’assurer de la clarté des éléments pertinents afin de permettre l’élaboration des inférences. En effet, les tests pour patients cérébro-lésés s’adressent en grande partie à une population âgée, présentant des risques accrus de presbytie et de différentes maladies de l’œil (glaucome, cataracte). Le but de notre image est bien d’évaluer des déficits neuropsychologiques et de perception visuelle consécutifs à une atteinte cérébrale et non les

8 Les différentes formes d’aphasie présentent des caractéristiques sémiologiques spécifiques. Par exemple, l’aphasie de Broca est caractérisée par une sémiologie non fluente avec une expression orale réduite, un manque du mot, des troubles arthriques, une dissociation automatico-volontaire, des paraphasies phonémiques, sémantiques, un agrammatisme et peu de troubles de la compréhension.

difficultés visuelles courantes liées à l’âge (telle que la diminution de l’acuité visuelle). Nous avons choisi de créer une image en couleur car plusieurs études ont montré que les couleurs permettent une meilleure reconnaissance des objets et favorisent la dénomination (Laws et Hunter, 2006 ; Reis, Faisca, Ingvar et Petersson, 2006 ; Rossion et Pourtois, 2003 ; Chainay et al., 1998).

De plus, les couleurs permettent de réduire les ambiguïtés visuelles (Mapelli et Behrmann, 1997), améliorant l’identification visuelle des éléments et donc d’obtenir une meilleure interprétation des inférences visuelles.

De plus, il est important que l’image illustre une scène de vie quotidienne et « actuelle » afin d’être accessible et familière à tous. Une scène de la vie de tous les jours permet également de tester l’adéquation du patient au monde environnant. L’image s’adressant à tous les âges, il est donc important de la rendre attrayante pour tous. Un dessin de type humoristique dont les personnages ressemblent à des personnages de bandes dessinées permet de rendre l’image gaie et actuelle. Il est également primordial que cette nouvelle image ne présente pas de biais en faveur d’un milieu socio-économique plutôt qu’un autre contrairement à ce qui a été montré pour l’image du Cookie Theft (Powell, 2006).

La division de l’image en 4 quadrants identiques permet de rendre compte d’une éventuelle négligence. Ces quadrants contiennent différentes quantités d’éléments et ainsi l’élaboration d’inférences de complexité variable. Ceci permettra une identification plus fine des difficultés à élaborer des inférences en fonction de la complexité inférentielle (Myers et al., 94 ; 96).

L’image doit également contenir des éléments pertinents et non pertinents, afin d’évaluer la capacité du patient à intégrer les informations visuelles nécessaires à l’élaboration d’une signification. Dans cette optique, il est intéressant de glisser des éléments drôles ou bizarres afin d’observer dans quelle mesure le patient est capable de les identifier et de les interpréter. Les personnages dessinés expriment différentes émotions. Les expressions faciales permettent d’évaluer la façon dont le patient en tient compte et comment il les interprète. Pour terminer, il faut également faire attention aux différences de cultures, de milieux socio-économiques, d’âges, de sexes et de niveaux cognitifs prémorbides parmi les patients. Notre grande image doit éviter les sujets socialement ou culturellement connotés, qui n’auraient du sens que pour une petite proportion de la population.

3.3. Présentation et description de l’image du Quai de Gare

L’image que nous avons choisi de créer est vive et colorée. Elle est dessinée aux traits et peinte en couleur. Elle illustre une scène se déroulant sur un quai de gare. Cette image est découpée en quatre quadrants représentant différentes scénettes avec des personnages effectuant tous une action bien précise. Chaque quadrant9 contient un ou plusieurs éléments visuels interdépendants permettant d’élaborer une ou plusieurs inférences. Nous avons opté pour une image divertissante, humoristique, non rébarbative, permettant de susciter un discours narratif enjoué.

Image du Quai de Gare

Quadrant 2 Quadrant 1

Quadrant 3 Quadrant 4

Notre image baptisée le Quai de Gare comporte les éléments suivants :

La notion de gare peut être inférée à l’aide des voies de chemin de fer, du train en gare, du panneau des départs, des bagages, de l’horloge et du contrôleur avec un sifflet, etc. L’annexe 5 présente l’image du QG en formant A4.

Au centre, on aperçoit le panneau des départs avec une poubelle.

Quadrant 1

Un couple ou deux personnes qui s’embrassent. Ils se retrouvent ou se séparent. L’un part ou les deux, ou alors l’un arrive et l’autre est venu l’attendre. L’inférence est induite par les valises posées à côté d’eux. La femme est heureuse (sourire). Il faut donc être en mesure de comprendre ce que font les personnages, où ils sont (sur le quai d’une gare), où ils vont (en vacances). On aperçoit le numéro du quai (2) ainsi que le secteur du quai (B). Ce quadrant contient également la

9 Le découpage de l’image correspond au découpage usuel des quadrants mathématiques numérotés de 1 à 4 dans le sens anti-horaire, à partir de celui situé dans le quart de plan supérieur de droite.

rampe d’escaliers menant sur le quai. On aperçoit une partie des rails. Pris individuellement, ce quadrant contient tous les éléments permettant de situer le lieu de l’action.

Quadrant 2

Ce quadrant met en scène un monsieur au visage inquiet (des gouttes de sueur giclent de son front et il a la bouche grande ouverte) qui court pour prendre son train car il est sûrement en retard. Il porte une mallette (inférence du travail). Un contrôleur de train siffle le départ du train et fait une gestuelle pour indiquer que le train s’en va. Les portes sont effectivement déjà fermées. Une note de musique s’échappe de son sifflet indiquant qu’il siffle. Son visage est peu expressif/peu enjoué.

Ce quadrant contient également une horloge, permettant de vérifier si le patient peut lire l’heure (6h06/18h06) et également s’il peut faire une inférence quant à la période de la journée représentée par la scène. On peut lire le mot « départs » qui aide également à situer le lieu. La présence d’un mot écrit permet d’évaluer si le patient peut le déchiffrer. Ce quadrant, pris individuellement, contient tous les éléments permettant de situer le lieu de l’action.

Quadrant 3

On voit une scène humoristique bien connue de tous : un monsieur, malchanceux, glisse sur une peau de banane. Il semble apeuré et surpris (la bouche grande ouverte, les yeux grands ouverts). Il va tomber et sa valise s’ouvre. Ses affaires vont être éparpillées sur le quai. L’inférence se fait par l’interaction du monsieur, de la peau de banane et de la valise qui s’ouvre. Il y a un non mot

« zip » ou onomatopée écrite. On remarque la présence de la poubelle, considérée comme un élément non pertinent. Ce quadrant, à lui seul, ne permet pas de déterminer précisément le lieu de l’action.

Quadrant 4

Une dame âgée/une grand-maman est assise sur un banc. Elle lit de manière concentrée, en attendant le train. Elle a son sac à commissions à côté d’elle. On voit également un homme, coiffé d’un bonnet, qui traverse tranquillement les voies en tirant sa valise à roulettes, alors qu’il y a un panneau d’interdiction derrière lui. Il semble distrait et il siffle. Il représente l’élément étrange et non conventionnel de la scène. Ce quadrant pris individuellement, contient tous les éléments permettant de situer le lieu de l’action.

Notre objectif, en construisant cette nouvelle image, est véritablement de créer quelque chose de nouveau, sans forcément rester dans le cadre de ce qui a été fait précédemment par d’autres auteurs.