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4 DISCUSSION

4.3 COMPARAISON AVEC LES DONNEES DE LA LITTERATURE

4.3.2 Eléments peu ou pas retrouvés dans la littérature

Les possibles répercussions psychologiques de l'exercice libéral ont freiné plusieurs des médecins de notre échantillon à s'installer en libéral. Ils ont ressenti du stress au cours de cet exercice. Les urgences et la permanence des soins semblent être en grande partie responsables de ce stress. Cela peut dissuader certains médecins d’exercer ce type d'activité malgré une attirance pour la médecine générale. Cela a été le cas du profil 13 pour qui gérer les urgences étaient trop difficiles en raison de l’isolement du médecin généraliste dans certaines prises en charge. Le travail en équipe fait d'ailleurs partie des raisons pour lesquelles il a choisi l'exercice salarié. Un des médecins urgentiste a suggéré le risque de burn-out en médecine générale. La permanence des soins est également retrouvée comme facteur de stress en raison du rythme de travail imposé par la nécessité de travailler le lendemain des gardes. Toutes ces

difficultés semblent d'autant plus importantes que l'exercice se situe en milieu rural.

Le stress lié aux urgences en zones rurales est décrit dans la thèse de S. Hugé où certains médecins considèrent leur formation insuffisante pour y faire face (65).

Le stress au travail peut également être la conséquence des difficultés face à la gestion du cabinet. Le fait de se sentir incompétent dans ce domaine semble en grande partie être à l'origine du stress occasionné. Les profils 6 et 10 décrivent bien cet aspect puisque leurs discours mettent en évidence une relation de cause à effet entre leur incapacité à résoudre ces problèmes et l'anxiété qui en résulte.

4.3.2.2 Se former davantage

La possibilité de se former davantage au cours de son exercice professionnel a motivé plusieurs médecins de notre étude à choisir leur mode d'activité. Plusieurs médecins sont séduits par la nécessité d'entreprendre en permanence des formations complémentaires afin d'accroître leurs connaissances. Ces formations complémentaires permettent de diversifier l'activité.

4.3.2.3 Instabilité des conditions d'exercice

Un des médecins a été freiné par l'exercice libéral en raison d'un manque, selon lui, de stabilité des conditions d'exercice dans ce secteur d'activité. Il pense que la sécurité sociale ou les pouvoirs publics modifient ces conditions trop fréquemment et se dit ravi d'exercer une activité mixte de manière à pouvoir plus facilement passer d'un secteur à l'autre en fonction de l'évolution de la situation. Il s'agit de la même raison qui le freine à une éventuelle installation en centre de santé.

Une autre étude montre des résultats similaires, l'instabilité perçue des conditions d'exercice est un frein à une installation libérale (5). Il s'agit des conditions d'exercice à venir, jugées incertaines.

4.3.2.4 Des revenus réguliers

Un des aspects recherché par les médecins lors de l'installation a été la régularité des revenus. Avoir des revenus plus réguliers que lors des périodes de remplacement est retrouvé comme

facteurs influençant l'installation dans d’autres études (35, 69). L'activité mixte permettrait d'obtenir un salaire fixe, en complément de la part libérale (11, 51). Cependant, on retrouve peu d'études sur la régularité des revenus comme facteur influençant les choix d'installation. Un facteur s'en rapprochant et décrit dans une étude pourrait être la sécurité de l'emploi. Ce facteur est jugé important pour 40 % des salariés interrogés dans une étude, alors que ce n'est le cas que pour 11 % des libéraux (5).

4.3.2.5 Les visites à domicile

Les visites à domicile ont été évoquées au cours de plusieurs entretiens comme ayant influencé l'installation aussi bien dans le secteur libéral que le secteur salarié. Un des médecins généralistes a d'ailleurs choisi de s'installer en zone rurale pour en effectuer davantage car il juge que cela rend son travail encore plus intéressant.

Pour des internes et jeunes médecins en médecine générale, les visites sont perçues comme un acte éthique si les patients ne peuvent se déplacer (70). Connaître leurs conditions de vie réelles en se rendant à leur domicile accentue encore l'utilité de ces visites (70).

Dans une autre étude, les visites à domicile ont été davantage citées comme frein à une installation en zone rurale : les visites sont mal considérées en cas d'exercice rural (65). Se déplacer sur des territoires à la campagne peut poser problème à certains médecins (65). Les visites à domiciles augmenteraient la charge de travail des médecins (51). L'importance des distances dans ces territoires serait chronophage (61). Des internes souhaitaient limiter les visites aux seuls patients le nécessitant vraiment (73).

4.3.2.6 Une comparaison père/fils

Un médecin urgentiste a été freiné dans l’installation en libéral par la comparaison faite par les patients entre son exercice et celui de son père. Il semble ne pas avoir apprécié cette situation vécue lorsqu'il a remplacé son père, installé en médecine générale.

4.3.2.7 Conduire pour se rendre au domicile des patients

Les visites à domicile peuvent poser un problème aux médecins en raison de la nécessité de conduire un véhicule pour se rendre chez les patients. Ce n'est donc pas directement les visites à domicile qui constituent un frein mais la conduite automobile.

4.3.2.8 La personnalité, les convictions personnelles

Des convictions personnelles au sujet de la médecine générale libérale sont apparues au cours des entretiens réalisés avec les médecins. Un médecin interrogé a rapporté que le choix du mode libéral était une question idéologique : pour lui, médecine générale implique forcément un exercice libéral. La personnalité est également intervenue dans le choix des médecins. Certains d'entre eux considèrent qu'ils sont faits pour exercer en libéral alors que pour d'autres, ils considèrent que ce n'est pas dans leur tempérament.

Certains médecins seraient ainsi “faits” pour exercer en libéral, d’autres pas. Dans les représentations de certains, les généralistes seraient forcément des gens ayant « une mentalité de libéral ».

Ce facteur se rapproche de la conviction personnelle de certains étudiants interrogés dans le cadre de la thèse de C. Chandez et F. Chiron (70). La médecine générale libérale est pour eux une vocation. Cela est cependant contredit par d’autres travaux. Dans une thèse réalisée en 2005, seuls 23 % des internes en médecine générale n'ayant pas de projet professionnel avant les ECN, ont le projet de s'installer en libéral après leurs études (10). Ceux dont le projet était initialement de faire de la médecine générale, sont 27 % à souhaiter s'installer en libéral. L'activité salariée est envisagée principalement par ceux qui ne souhaitent pas faire de la médecine générale avant les ECN, à savoir 40 % d'entre eux. Quelque soit leur projet professionnel initial, c'est l'activité mixte qui est davantage plébiscitée par les étudiants (10). Plus qu’une vocation ou un état d’esprit, il semblerait que vouloir initialement faire de la médecine générale et préparer un projet professionnel d’installation en amont de ses choix définitifs, soient des facteurs facilitant l’installation en médecine générale libérale.

4.3.2.9 La perception d'une grossesse dans son entourage professionnel

La grossesse a également influencé un des médecins vers le salariat en raison d'un élément non retrouvé dans la littérature. Il s'agit de l'acceptation de la grossesse par ses collègues. Il faut souligner que ce médecin exerce en PMI, les professionnels de santé y travaillant sont peut-être plus enclins à accepter cette situation. Les autres médecins salariés n'en ont pas parlé. Être enceinte permet également de se projeter dans l'avenir avec un désir d'avoir suffisamment de temps libre pour s'occuper de l'enfant à naître. Cela a freiné un des médecins à s'installer en libéral.