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Section II : une position claire quant à la création des juridictions pénales internationales

Paragraphe 2 : Les contrariétés ou diversité de jugements La Cour internationale de justice a fortement influencé de

C- Les effets des contrariés de jugements

Le XIXe siècle a été le siècle du développement du droit et de l’arbitrage international. La justice internationale est née au XXe siècle avec la Cour permanente de justice internationale, devenue en 1945 la Cour internationale de justice. Les tribunaux internationaux se sont multipliés depuis lors. Ce phénomène traduit une confiance accrue dans la justice et permet au droit international de s’enrichir dans des domaines de plus en plus divers. Il n’en fait pas moins courir des risques de course aux tribunaux, parfois dénommée « forum shopping » et de contrariété de jurisprudence232.

Les chevauchements juridictionnels internationaux augmen-tent en outre les risques de contrariétés de jugements, deux tribu-naux pouvant être saisis concurremment d’une même question et rendre des décisions contradictoires. C’est le cas notamment dans l’Affaire relative à l’application de la Convention pour la préven-tion et la répression du crime de génocide du 26 février 2007233. La Cour, bien qu’ayant attentivement examiné les arguments dé-veloppés par la Chambre d’appel au soutien de la conclusion qui précède, n’est pas en mesure d’adhérer à cette doctrine. Tout d’abord, elle observe que le TPIY n’était pas appelé dans l’affaire Tadic, et qu’il n’est pas appelé en règle générale, à se prononcer sur des questions de responsabilité internationale des Etats, sa ju-ridiction étant de nature pénale et ne s’exerçant qu’à l’égard des individus. Le Tribunal s’est donc, dans l’arrêt précité, intéressé à

231 G. GUILLAUME, Discours devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 30 octobre 2001.

232 G. GUILLAUME : Discours devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 30 octobre 2001.

233 CIJ, Arrêt du 26 février 2007, Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro.

une question dont l’examen n’était pas nécessaire pour l’exercice de sa juridiction. Ainsi qu’il a été dit plus haut, la Cour attache la plus haute importance aux constatations de fait et aux qualifica-tions juridiques auxquelles procède le TPIY afin de statuer sur la responsabilité pénale des accusés qui lui sont déférés et, dans la présente affaire, tient le plus grand compte des jugements et ar-rêts du TPIY se rapportant aux événements qui forment la trame du différend. La situation n’est pas la même en ce qui concerne les positions adoptées par le TPIY sur des questions de droit inter-national général qui n’entrent pas dans son domaine spécifique de compétence, et dont la résolution n’est d’ailleurs pas toujours nécessaire au jugement des affaires pénales qui lui sont soumises.

Par ailleurs, avec la multiplication des juridictions spéciali-sées ou régionales en matière de droits de l’homme, il est en fait logique que chaque juridiction ne devrait régler que des litiges survenant à propos de l’interprétation ou de l’application du traité ou de la charte constitutive liant les Etats parties à cette juridic-tion. C’est le sens de l’article 292 du Traité instituant la Commu-nauté européenne qui dispose que « Les Etats membres s’engagent à ne pas soumettre un différend relatif à l’interprétation ou à l’ap-plication du présent traité à un mode de règlement autre que ceux prévus par celui-ci ».

Toutefois, la difficulté survient lorsqu’un traité reconnaît plusieurs juridictions compétentes en cas de litige, ou encore lorsqu’il y a institutionnalisation d’une juridiction internationale dans un domaine de compétence est exercé déjà par une autre.

C’est le cas comme nous l’avons vu de la création du Tribunal international du droit de la mer, alors même que la Cour internationale de justice exerce dans ce domaine de compétence234.

234 T. TRVES, Le Tribunal international du droit de la mer et la multiplication des juridictions internationales, Rivisita di diritto internazionale, 2000, p. 726-746.

Les systèmes de droits nationaux ont depuis longtemps eu à faire face à de tels problèmes. Ils les ont résolus pour l’essentiel en créant des instances d’appel ou de cassation. Le système inter-national est à cet égard fort dépourvu. Ainsi, comme nous l’avons vu, le tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie, en statuant au fond de l’affaire Tadic, a récemment écarté la jurisprudence dégagée par la Cour internationale de justice dans le différend ayant opposé devant elle le Nicaragua aux Etats-Unis d’Amérique.

Quelle que soit l’appréciation que l’on puisse porter sur cette solution, la contradiction ainsi relevée démontre à l’évi-dence les risques que l’unité du droit international court du fait de la multiplication des instances juridictionnelles. Le juge Gil-bert GUILLAUME estime, pour éviter ces contradictions qu’avant de créer une nouvelle juridiction, le législateur international de-vrait se demander si les fonctions qu’il entend confier au juge ne pourraient pas être avantageusement remplies par une juridiction existante. Quant aux magistrats eux-mêmes, ils doivent prendre conscience du danger de fragmentation du droit, voire d’incohé-rence jurisprudentielle née de la multiplication des tribunaux.

Nous pouvons encore prendre un autre exemple de contra-riété de jugement : il s’agit de l’affaire Loizidou c. Turquie de la Cour européenne des droits de l’homme du 23 mars 1995 (excep-tions préliminaires). Dans cette affaire, la Cour européenne s’est écartée de la position de la Cour internationale de justice en ce qui concerne les réserves territoriales aux déclarations de juridiction obligatoire235. Il est vrai que la décision de la Cour européenne peut être considérée comme relevant de la lex specialis dans le sens où elle est basée sur des éléments spécifiques du système

235 C’est le cas de l’avis consultatif du 28 mai 1951 sur les Réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948 (CIJ, Rec. 1951). Voir aussi la Sentence arbitrale sur le Plateau continental de la mer d’Iroise du 30 juin 1977, ou encore la décision sur le Plateau continental de la mer Egée du 19 décembre 1978.

européen de protection des droits de l’homme. Toutefois, cette décision se réfère tout de même à la Convention de Vienne sur le droit des traités et diverge donc à cet égard à la jurisprudence de la CIJ236.

Cependant, dans le souci de favoriser la cohérence jurispru-dentielle, certaines juridictions régionales et spécialisées s’inspi-rent davantage des décisions rendues par la CIJ, c’est le cas des affaires Barcelona Traction, Détroit de Corfou, la Licéité de l’emploi ou de la menace des armes nucléaires, Lotus ou encore celle de la Compétence en matière de pêcheries devant le Tribunal pénal in-ternational pour l’ex Yougoslavie237. De son côté, l’Organe de rè-glement de différends de l’OMC dans sa jurisprudence sur Les me-sures de la Communauté européenne en matière d’hormones, s’est aligné sur la jurisprudence du Projet Gabcikovo Nagymaros en ce qui concerne le principe de précaution238.

La CIJ de même de se réfère de plus en plus à la jurisprudence des autres juridictions internationales, c’est le cas dans l’affaire du Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/

Honduras) où la Cour cite un arrêt de 1917 de la Cour de Justice Centraméricaine239 ; dans l’affaire de l’Ile de Kasikili/Sedudu, op-posant le Botswana et la Namibie, la Cour s’est appuyé sur la sen-tence arbitrale rendue entre le Chili et l’Argentine dans l’affaire de la Laguna del desierto240.

236 Loizidou v. Turkey (ECHR, Series A, vol. 310), at 29, §. 83-85, 20 EHRR, at 136, cité par J.I. Charney, “Is International Law Threatened by Multiple International Tribunals?”, RCADI, vol.271, 1998, pp. 162-163.

237 TPIY, Kupreskic et consorts, Chambre de première instance II du 24 janvier 2000, § 510-748.

238 Décision du 16 janvier 1998, § 123.

239 Arrêt de la Chambre du 11 septembre 1992, C.I.J. Recueil 1992, p. 351.

240 Arrêt du 13 décembre 1999, § 20.

De manière générale, la multiplication des instances judi-ciaires internationales entraîne un certain désordre dans les pro-cédures juridiques internationales, au détriment de la Cour in-ternationale de justice. L’absence de hiérarchie dans le système normatif international favorise à bien des égards les contrariétés de jugements, par exemple dans un avis consultatif du 1er octobre 1999 de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, saisie par le Mexique à propos de l’affaire LaGrand on trouve d’une part l’idée qu’une éventuelle priorité de compétence pourrait être accordée à la juridiction saisie la première, et d’autre part l’affirmation qu’il n’y a pas de prééminence de la CIJ. La Cour interaméricaine s’es-time en effet totalement autonome, unique et rejette l’hypothèse d’une autolimitation au profit de la CIJ241.

Si au niveau national ou interne, le problème de hiérarchie fut résolu par l’institutionnalisation des juridictions suprêmes, au niveau international aucune juridiction ne peut se réclamer au-dessus de toutes les autres. Toutefois, la CIJ en tant qu’organe ju-diciaire principal des Nations Unies et en vertu de l’exercice de la compétence générale et universelle que lui confère l’article 36

§ 1 de son Statut, mériterait bien d’être érigé en « cour suprême des droits de l’homme ». En effet, la CIJ est la seule instance judi-ciaire internationale reconnu par la plupart des Etats du monde.

Ainsi, en cas de conflit d’interprétation d’un traité international ou régional, ou d’une notion substantielle des droits de l’homme ; les juridictions internationales auront la possibilité d’user de la fonction consultative de la CIJ. La décision rendue par celle-ci aura force obligatoire. La CIJ pourra donc jouer un rôle de « cassation » pour les autres juridictions.

Toutefois, dans l’état actuel du droit, il faut avouer qu’il est difficile sinon impossible de hiérarchiser de telle façon le fonc-tionnement de la justice internationale en matière des droits de l’homme.

241 M. COUSTON, « La multiplication des juridictions internationales, Sens et dy-namiques », Journal du Droit International, n°1, 2002, p. 32.

La difficulté réside d’abord dans la lourdeur des procédures, dans le sens où la spécialisation de la CIJ en ce domaine remet-tra en cause le succès rencontré par les tribunaux régionaux ou spécialisés dans le cadre des délais. En plus, les parties au litige seront obligées d’attendre la décision de la «grande cour» pour en-trer dans leurs droits.

Ensuite, la deuxième difficulté résulte dans le lien de dépen-dance et surtout de subordination des juridictions internatio-nales devant la CIJ. En effet, il est inimaginable de penser que les grandes instances internationales telles la Cour européenne des droits de l’homme, la Cour interaméricaine ou encore la Cour afri-caine pourraient se laisser dicter par les décisions rendues par la CIJ. Cela porterait un coup sérieux quant au fonctionnement, qu’à l’indépendance de ces juridictions internationales, en plus il n’est pas évident que les Etats pourront facilement consentir à un tel accord.

Enfin la troisième difficulté réside sur le plan financier. Le fait de consacrer la CIJ comme étant une « cour suprême des droits de l’homme » ou même de créer en son sein une chambre spécialisée en la matière, demande un apport financier considérable. Le bud-get souvent alloué à la CIJ ne pourra pas lui permettre de faire face à la donne envisagée. Déjà, les budgets des deux principaux tribu-naux pétribu-naux internatiotribu-naux sont largement supérieurs à celui de la CIJ, par exemple pour l’exercice 2010-2011, le budget de la Cour était arrêté à 51 010 200 de dollars américains242, par contre celui du TPIY était estimé à 290 millions 923 100 de dollars et celui du TPIR à 244 millions 615 400 de dollars243. Or la mise en œuvre d’un projet de spécialisation implique le recrutement des traduc-teurs, juristes et personnel administratif supplémentaires. La sou-mission d’un différend à la Cour occasionne diverses dépenses à

242 http://www.icj-cij.org/presscom/files/8/16208.pdf

243 http://www.droits-fondamentaux.prd.fr/codes/modules/articles/article.

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savoir : honoraires des agents, conseils, avocats et experts; pré-paration et reproduction des mémoires et de leurs annexes ainsi que des cartes géographiques; frais afférents à la procédure orale;

voire dans certains cas dépenses nécessaires à l’exécution d’un ar-rêt (par exemple pour la démarcation d’une frontière fixée par la Cour). La Cour devra par ailleurs renforcer la modernisation de son système informatique244.

De manière générale, si l’on peut déterminer les contours d’un droit international « universel », alors on peut considérer qu’il est envisageable et surtout qu’il est souhaitable qu’il existe une juridiction suprême, la CIJ constituant évidemment une base possible car elle constitue le dernier « rempart naturel » contre les effets éventuellement négatifs de la multiplication des juridictions internationales245.

Alors qu’une infime proportion des affaires portées devant la Cour européenne est interétatique, toutes celles dont la Cour internationale a été saisie dans le cadre d’une procédure conten-tieuse le sont. L’article 34 du Statut de la CIJ dispose que seuls les Etats peuvent ester devant elle. Bien qu’elle examine les affaires dont elle est saisie sous l’angle des relations entre Etats, la Cour internationale de justice, à l’instar de sa devancière la Cour per-manente de justice internationale, a rendu des arrêts qui revêtent une portée considérable à l’égard des droits dont les individus peuvent se prévaloir en vertu du droit international. Au cours de ses premières années d’existence, dans les avis consultatifs qu’elle a rendus concernant le Sud-Ouest africain, la Namibie et le Sahara occidental, la Cour internationale de justice a joué un rôle majeur et essentiel dans le développement de la notion d’autodétermina-tion. La Cour européenne, quant à elle, a pour le moment donné

244 G. GUILLAUME, Discours prononcé à l’Assemblée générale des Nations Unies le 29 octobre 2002.

245 M. GOETSCHY, Les multiplications des juridictions internationales, Mémoire de Maîtrise à l’IEP de Lyon de mai 2004.

un sens différent à cette notion, qu’elle définit sous l’angle de la fa-mille et de la personne. Sa jurisprudence souligne que le principe de l’autodétermination constitue la base des garanties offertes par l’article 8 de la Convention européenne (droit au respect de la vie privée et familiale)246.

Bien évidemment, c’est sur le terrain de la Convention euro-péenne des droits de l’homme, et non du droit international hu-manitaire, que sont essentiellement axés les travaux de la Cour de Strasbourg. Cependant, les deux Cours sont parfois amenées à analyser les rapports entre les droits de l’homme et le droit hu-manitaire international. C’est même plutôt chose courante devant la Cour de La Haye. Dans l’avis consultatif qu’elle a rendu sur les Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, la Cour internationale a estimé qu’il y avait lieu d’examiner l’une et l’autre de ces branches du droit, tenant le droit humanitaire international pour lex specialis247. A la lecture de son jurisprudence, la Cour européenne n’a pas encore bien défini le rôle qui, à ses yeux, doit être le sien à l’égard du droit international humanitaire. Et il a été remarqué que, dans l’affaire Korbely c. Hon-grie de 2008, pour déterminer si un fait pour lequel le requérant avait été condamné était constitutif d’un crime contre l’humanité au sens donné à cette notion en 1956248, la Cour européenne s’est référée à la Convention (IV) de Genève, au Protocole additionnel (I) et au Protocole additionnel (II)249, avant de procéder ensuite à une analyse très directe du droit humanitaire international.

246 Pretty c. Royaume-Uni, n° 2346/02, CEDH 2002-III ; Van KÜCK c. Allemagne, n° 35968/97, CEDH 2003-VII.

247 CIJ Recueil 2004, § 106.

248 R. HIGGINS, «La Cour internationale de justice et la Cour européenne des droits de l’homme : des partenaires pour la protection des droits de l’homme », Dis-cours prononcé à l’occasion de la cérémonie d’ouverture de l’année judiciaire, le 30 janvier 2009, in Dialogue entre juges, 50 ans de la Cour européenne des droits de l’homme vus par les autres cours internationales, Conseil de l’Europe, Strasbourg, 2009, p. 79.

249 Korbely c. Hongrie [GC], n° 9174/02, à paraître dans CEDH 2008. Voir la partie II consacrée aux éléments pertinents de droit international et de droit interne.

L’opposition entre les règles de droit international coutumier en matière d’immunité et l’idée qui se développe selon laquelle aucune impunité ne doit exister en cas de violation des droits de l’homme est un autre problème d’ordre juridique qui se pose aujourd’hui pour l’une et l’autre des Cours. Dans trois arrêts de Grande Chambre rendus à la fin de l’année 2001, la Cour euro-péenne a dit que l’application du principe de l’immunité souve-raine, qui fait concrètement obstacle à ce que les Etats étrangers soient traduits devant les tribunaux, ne portait pas atteinte au droit à un procès équitable découlant de l’article 6 de la Conven-tion européenne250. En2002, dans l’affaire du Mandat d’arrêt, la Cour internationale a été saisie de la question de l’existence ou non en droit international coutumier d’une exception à l’immuni-té fondée sur les droits de l’homme251. Elle a conclu de son examen de la pratique des juridictions régionales et nationales que, en l’état actuel du droit international général, il n’existait pas encore d’exception, sous une forme quelconque, à la règle accordant l’im-munité en matière pénale aux ministres des Affaires étrangères en fonction, fussent-ils soupçonnés d’avoir commis des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité. Il s’agit toutefois d’un do-maine du droit qui évolue rapidement et que les deux Cours ne manqueront certainement pas de surveiller de près.

Le champ d’application territorial de certaines obligations en matière de droits de l’homme est une question récurrente aussi bien à La Haye qu’à Strasbourg. Devant la Cour européenne, cette question se pose généralement lorsqu’il s’agit de savoir si les obli-gations découlant de la Convention européenne s’appliquent à un Etat contractant qui agit hors de son territoire. Au vu des affaires

250 McElhinney c. Irlande [GC], n° 31253/96, CEDH 2001-XI ; Al-Adsani c.

Royaume-Uni, [GC], n° 35763/97, CEDH 2001-XI, et Fogarty c. Royaume-Uni [GC], n° 37112/97, CEDH, 2001-XI. Voir également M. Emberland, « Internatio-nal Decisions », AJIL, vol. 96, 2002, p. 699.

251 Mandat d’arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo c.

Belgique), CIJ, Recueil 2002.

Banković, Loizidou, Issa et Ilaşcu252, l’avenir nous en dira peut-être encore davantage sur ce point. A La Haye, cette question a été soulevée de deux manières. Premièrement, il y a le principe géné-ral voulant qu’un Etat soit responsable des actes commis sous son autorité à l’étranger. Ainsi, dans l’affaire Congo c. Ouganda, la Cour internationale a déclaré que l’Ouganda devait à tout moment être tenu pour responsable de l’ensemble des actes et omissions de ses forces armées sur le territoire de la République démocratique du Congo253. Deuxièmement, elle est parfois amenée à examiner si un Etat est astreint, hors de son territoire, aux obligations qui s’impo-sent à lui en vertu d’un traité. C’est de l’interprétation de ce traité lui-même, selon son contexte et à la lumière de son objet et de son but, que dépend la réponse.

Dans l’affaire récente Géorgie c. Russie254, les parties diver-geaient quant au champ d’application territorial des obligations d’un Etat partie à la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. La Géorgie estimait que cette convention ne posait aucune limite quant à son application territoriale, tandis que la Fédération de Russie soutenait que les dis-positions de ce traité ne pouvaient régir le comportement d’un Etat à l’extérieur de ses propres frontières. Dans l’ordonnance qu’elle a rendue au mois d’octobre dernier, la Cour internationale a fait ob-server que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ne prévoyait aucune limitation générale de son champ d’application territorial et que les disposi-tions en cause (les articles 2 et 5) étaient généralement applicables aux actes d’un Etat partie lorsque celui-ci agit hors de son territoire.

252 Banković et autres c. Belgique et autres (déc.) [GC], n°52207/99, CEDH 2001-XII ; Loizidou c. Turquie (exceptions préliminaires), 23 mars 1995, série A n°310; Issa et autres c. Turquie, n°31821/96, 16 novembre 2004, et Ilaşcu et

252 Banković et autres c. Belgique et autres (déc.) [GC], n°52207/99, CEDH 2001-XII ; Loizidou c. Turquie (exceptions préliminaires), 23 mars 1995, série A n°310; Issa et autres c. Turquie, n°31821/96, 16 novembre 2004, et Ilaşcu et