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MODELE HEDONISTE SPATIAL

Encadré 4.7 – Les statistiques de test du multiplicateur de Lagrange et leur version robuste

3.1.2. Analyse des résultats

3.1.2.2. Effet aménité naturelle

Nous distinguons deux catégories d’aménités, celles offertes par le littoral et celles relatives au zonage des POS. Ces aménités n’ont pas le même effet sur les prix des logements et sur les préférences des ménages.

3.1.2.2.1. Aménités littorales

L’impact des aménités littorales (paysagères, récréatives…) sur les prix des logements est perceptible à travers la variable relative à la distance aux plages (océane, du Bassin d’Arcachon et d’un lac). Nous obtenons un signe négatif175 de cette variable dans le modèle de prix hédonistes. Les aménités littorales jouent donc positivement sur les prix : les ménages seraient prêts à payer un logement plus cher pour bénéficier de plus d’aménités offertes par le littoral. Cela nous permet alors de supposer qu’ils accordent peu176 ou pas d’importance aux risques naturels (tempêtes, érosion et submersion marines par exemple) (Bin et al., 2008) encourus à proximité de la plage et notamment de l’océan et du Bassin d’Arcachon.

L’effet littoral sur les prix est accentué pour les logements proches du Bassin d’Arcachon (coefficient de la variable dichotomique DIST_BA positif). Cela signifie qu’à équidistance d’une zone d’eau, un logement près du Bassin d’Arcachon est plus cher qu’un logement proche d’une plage océane ou d’un lac. Cet « effet Bassin d’Arcachon » suscite trois commentaires :

• cela confirme le caractère atypique des communes littorales du BHBA par rapport aux autres communes de l’échantillon. Cette différenciation a en effet été illustrée précédemment dans la dynamique démographique et d’occupation du sol et dans la distribution spatiale des prix marquée par de l’autocorrélation spatiale positive ;

• des prix plus élevés à proximité du Bassin d’Arcachon soulignent les préférences des ménages à profiter des aménités littorales et récréatives offertes près du Bassin plutôt que celles de l’océan ou d’un lac, pouvant s’expliquer par le caractère exceptionnel du site arcachonnais ;

175 Ce résultat est conforme aux conclusions des travaux français sur le littoral comme ceux de Travers (2007) et Brossard et al. (2006).

181 • on peut aussi suspecter la présence d’un effet de snobisme à habiter autour du Bassin d’Arcachon. Comme le précisent Lacour et Peyrefitte (1995), il existe un « effet Bassin » marqué par un sentiment d’appartenir à une culture spécifique permettant de se distinguer des territoires alentours comme Lacanau au nord et Biscarrosse au sud. On peut donc en conclure que les communes du BHBA (essentiellement littorales177) sont structurées par un processus de littoralisation due aux aménités littorales mais aussi artificielles liées à la notoriété de la zone (notamment au sud du Bassin) rendant ainsi ce territoire très attractif.

3.1.2.2.2. Aménités du zonage

L’effet du zonage du POS sur les prix des logements dépend non seulement de l’usage foncier de la zone, de son statut juridique en matière de construction mais aussi des préférences et des anticipations des ménages.

Les coefficients estimés des distances du logement aux quatre zones des POS étudiées sont tous significatifs au seuil de 1%. Les usages fonciers de chaque zone influent donc les prix des logements. Néanmoins, le signe de cet effet n’est pas le même pour les quatre zones. Par exemple, la proximité aux aménités naturelles offertes par les espaces de grande qualité environnementale (zone ND) a un effet appréciatif sur les prix alors que la proximité à une zone agricole et forestière (NC) est capitalisée négativement dans les prix.

En ce qui concerne les zones NC de notre aire d’étude, elles sont largement constituées d’espaces sylvicoles178 et dans une moindre mesure, d’espaces agricoles. L’effet répulsif de la proximité des logements aux terres sylvicoles et agricoles peut s’expliquer par les nuisances causées par les activités d’exploitation sur ces terres (Cotteleer et al., 2008) : passages fréquents d’engins agricoles, épandage du lisier, stockage du fumier, risque d’incendie de forêts, etc. Cet effet néfaste des espaces agricoles179 sur les prix des logements s’oppose aux résultats de nombreux travaux. Par exemple, Cavailhès et al. (2003) posent comme hypothèse dans leur modèle de ville périurbaine180 que tous les ménages apprécient les aménités

177 C'est-à-dire les plus proches du Bassin.

178 Les forêts exploitées (en zone NC) présentes en Gironde et dans les Landes diffèrent des forêts protégées non exploitables de la zone ND.

179 C’est le signe de l’existence d’un syndrome NIMBY (not in my back yard).

180 Dans ce modèle, les ménages son incités à réduire les coûts des migrations entre la ville (CBD) et la couronne périurbaine et à augmenter la surface de terrains résidentiels et d’aménités agricoles entretenues par les agriculteurs.

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agricoles présentes dans le périurbain. Cette valorisation de la proximité des logements aux espaces agricoles se retrouve aussi dans l’analyse conjointe menée par Roe et al. (2004). Pour la proximité aux forêts, les résultats empiriques sont plus mitigés181. Tyrävinen et Miettinen (2000), Kestens et al. (2001) ou encore Cavailhès et al. (2009) montrent que cette proximité influe positivement sur les prix. Brossard et al. (2007) ne confirme ce résultat que pour une distance inférieure à 75 mètres du domicile dans la couronne périurbaine lyonnaise. Dumas et

al. (2005) montrent que la forêt immédiate n’est pas valorisée dans le prix des maisons. Nos résultats corroborent notamment ceux de Smith et al. (2002) puisqu’ils mettent en évidence un effet négatif sur les prix des logements de la proximité (et de l’adjacence) de parcelles agricoles et forestières en Caroline du Nord (Etats-Unis). Dans notre étude, les désaménités des espaces agricoles et forestiers surpassent donc les aménités naturelles traditionnellement offertes par ces espaces.

Contrairement aux zones NC, les zones ND ne sont pas exploitées et ne génèrent pas ou peu de nuisances et de désaménités. Le caractère exploité ou non de ces deux zones peut en partie expliquer que la proximité aux premières est capitalisée négativement dans les prix et positivement en ce qui concerne la proximité aux zones ND.

Par ailleurs, nous observons, contrairement à Brueckner et al. (1999), un effet positif de la distance à la zone NC et du revenu des ménages. Dans ce cas, les ménages riches ne recherchent pas une localisation proche des aménités agricoles et forestières et donc d’un zone NC.

L’effet du zonage du POS sur les prix des logements dépend non seulement de l’usage foncier de la zone mais aussi de son statut juridique en matière de construction. Si l’on considère les zones NC exploitées pour l’agriculture et la sylviculture comme privées et les zones ND protégées comme publics dont l’accès est souvent autorisé, alors l’espace public est davantage apprécié par les ménages que les zones privées, contrairement aux travaux de Irwin et Bockstael (2001).

Par ailleurs, le caractère constructible ou non des zones influe sur les prix des logements. On observe notamment un effet positif de la proximité à la zone ND, zone ayant un caractère inconstructible. Comme Geoghegan (2002) ou Irwin (2002), nous montrons que les logements sont valorisés par leur proximité aux espaces ouverts inconstructibles. En d’autres termes,

183 l’état de servitude des zones naturelles (réserves naturelles, sites inscrits et classés…) a un effet positif sur les prix des logements environnants.

Enfin, l’effet sur les prix de la proximité des logements aux zones du POS peut s’expliquer par les anticipations des ménages. Concernant les zones d’urbanisation future, la distance du domicile à une zone à urbaniser à caractère d’activités (commerciales, industrielles) affecte positivement la valeur des prix des logements182. Par contre, on montre que les logements situés à plus de 800 mètres d’une zone d’urbanisation à future à caractère d’habitat sont plus chers que ceux situés à moins de 800 mètres lorsque le modèle est estimé par la méthode des MCO et des GMM pour le SEM. Par contre, cette variable n’est plus significative (au seuil de 10%) avec les modèles bayésiens et le SEM estimé par la méthode du maximum de vraisemblance. Dans ce cas, les prix de vente des logements ne sont pas affectés par la proximité d’une zone future d’habitat. En d’autres termes, les ménages tiennent compte, dans leurs préférences et dans leurs choix de localisation, des anticipations qu’ils établissent en matière d’urbanisation future des terrains non urbanisés mais urbanisables aux alentours de leur domicile, uniquement dans le cadre d’usages d’activités. Ils sont indifférents en ce qui concerne les usages liés à l’habitat. Ce dernier résultat va à l’encontre de celui de Irwin (2002) qui met en évidence que la conversion de terres en terrains résidentiels à faible densité a un impact négatif sur le prix des logements environnants, en soulignant que l'un des aspects le plus attirant de l'espace ouvert est ce qui n'est pas construit. Enfin, soulignons que le coefficient, estimé par la méthode des MCO, de la distance à la zone à urbaniser à caractère d’activités étant inférieure à celle de la zone à caractère d’habitat, nous confirmons la conclusion de McMillen et McDonald (2002) qui montrent que l’affectation de l’espace par le zonage à un usage résidentiel accroît plus fortement les valeurs foncières qu’un zonage commercial.

L’effet répulsif du voisinage immédiat de parcelles agricoles et forestière des zones NC peut aussi s’expliquer par le fait que les ménages craignent la conversion de ces terrains en terrains urbains (Smith et al., 2002) ayant des usages fonciers indésirables (centre commercial, zone industrielle…).

182 La plupart des études de prix hédonistes intégrant la proximité des logements aux zones d’activités soulignent l’effet négatif de ces zones sur les prix des logements environnants. C’est le cas de Dumas et al. (2005) ou encore de Rouwendal et Van der Straaten (2008). Ces derniers estiment que le pourcentage d’espace industriel à l’intérieur d’un cercle de 500 mètres de rayon aux alentours du logement a un effet dépréciatif sur le prix de ce dernier. Par contre, Song et Knaap (2003) mettent en évidence que la proximité ou la présence plus importante de zones commerciales près des logements influe positivement leur valeur.

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3.1.2.2.3. Consentements marginaux à payer

Grâce aux résultats obtenus sur l’effet aménité naturelle, nous pouvons calculer le prix marginal implicite pour une modification du zonage à proximité du logement, c'est-à-dire le consentement marginal à payer (MWTP pour Marginal Willingness To Pay) d’un ménage pour une telle modification.

Pour se faire, nous multiplions le coefficient estimé du modèle BSEM des trois variables significatives liées au zonage (DIST_NAA_I, DIST_NC et DIST_ND) par le prix moyen d’un logement vendu de notre échantillon (soit ici P =139 871,55 euros) (Kim et al., 2003 ; Mueller et Loomis, 2008).

Plus généralement, le consentement marginal à payer pour une modification d’une caractéristique k est obtenu de la manière suivante :

MWTP P

k

k p

x =

β

ˆ × avec k=1,...,K . (4.14)

Les résultats des calculs des consentements marginaux à payer pour les variables de zonages DIST_NAA_I, DIST_NC et DIST_ND sont exposés dans le Tableau 4.7 ainsi que la part que représente ce MWTP dans le prix de vente d’un logement. Y est également indiqué le résultat pour la distance à la plage la plus proche depuis le logement (DIST_PLG_I).

Tableau 4.7 – Consentements marginaux à payer par ménage : le cas de l’immobilier

Variables MWTP % prix du logement

DIST_NAA_I - 1 398,72 -1

DIST_NC 4 615,76 3,3

DIST_ND - 5 175,25 -3,7

DIST_PLG_I 1 958,20 1,4

Parmi les variables de zonage, la distance à la zone ND est celle qui obtient le plus élevé MWTP (en valeur absolue). Un ménage moyen serait en effet prêt à payer 5 175 euros de plus pour acquérir un logement plus proche (d’un kilomètre) d’une zone ND. Cette somme est égale à 3,7% du prix d’achat d’un logement moyen. En d’autres termes, le bénéfice marginal par propriétaire de logement pour une baisse d’un kilomètre de la distance à une

185 zone ND depuis le logement (soit de 1,75%183) (et donc pour une préservation des espaces naturels) est ainsi de plus de 5 000 euros (soit 3,7 5% du prix moyen d’un logement).

Par contre, ce ménage serait prêt à payer 4 615 euros de moins à l’achat d’un logement plus proche (d’un kilomètre) d’une zone NC et 1 400 euros d’une zone d’urbanisation future à caractère d’activités. Cela représente respectivement 3,3% et 1% du prix d’achat d’un logement moyen.

Un autre résultat intéressant est que les ménages accordent plus d’importance (en valeur absolue) à la proximité d’une zone NC et ND qu’à une plage puisque le consentement à payer est de 1 948 euros pour se rapprocher d’une plage d’un kilomètre (soit 1% du prix du logement).