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5.1 Champ des vitesses

5.1.2 Ecoulement en entrée du coude

5.1.2.1 Champs moyens des vitesses et intensité turbulente

La Figure 5.2 illustre un exemple de champ des vitesses mesuré par PIV sur la Section 1. Il s’agit de contours de vitesse axiale mesurée dans la configuration où la vitesse débitante imposée est de 2 m/s et la grille utilisée est la plus fine des trois grilles (Grille 1). La vitesse est normalisée par la vitesse débitante réelle, qui est obtenue au moyen de l’in- tégrale du profil de vitesse mesuré sur la section située à 𝑙/𝐷 = −1. On peut remarquer que l’écoulement commence à gagner de la vitesse environ à 1 diamètre en amont de la section d’entrée du coude. Avant d’être modifiés par la proximité avec la courbe, les profils trans- versaux de vitesse sont plats dans la région centrale du conduit et révèlent la présence d’une très fine couche limite en proche-paroi. Ce résultat peut être mieux observé sur la Figure 5.3, qui présente une comparaison entre les profils moyens de vitesse obtenus pour chaque configuration mesurée par PIV 2D-2C en amont du coude avec des mesures réalisées par Laufer (204) et Barbara (18).

Figure 5.2 - Contours de vitesse axiale moyenne sur la Section 1 (section horizontale amont), normalisée par la vitesse débitante réelle, U0.

Laufer a employé l’anémométrie à fil chaud pour étudier les caractéristiques de vitesse et intensité turbulente retrouvées dans les écoulements turbulents développés en conduit circulaire. Barbara réalise des mesures de vitesse de l’écoulement en amont et aval d’un coude à rayon de courbure 𝑅𝑐 = 1.5𝐷 avec la technique de l’Anémométrie Laser Dop-

pler (LDA) ; le but de ces travaux était d’étudier l’influence des conditions de l’écoulement aval sur la topologie résultante dans l’aval du coude. Le Tableau 5.2présente les conditions d’essais retrouvés dans les références qui sont utilisées pour comparaison des mesures de vitesse en amont du coude.

Tableau 5.2 – Conditions d’essais pour mesures en écoulement de conduit développé

Les mesures de Laufer sont réalisées en conduit droit alors que Barbara se place 1.5𝐷 en amont de son coude. Les mesures de la présente étude, à leur tour, sont effectuées 1𝐷 en amont de la section d’entrée du coude. Les vitesses sont normalisées par rapport à la vitesse débitante réelle, calculée à partir de l’intégrale du profil des vitesses axiales. Les mesures de Laufer à différentes vitesses débitantes montrent que le profil de vitesses axiales tendance à s’aplatir à mesure que l’on augmente le Nombre de Reynolds de l’écoulement. Pour toutes les configurations mesurées par PIV dans la présente étude, l’écoulement pré- sente une couche limite plus fine (avec une pente plus abrupte) que celles mesurées par

Auteur Technique de mesure 𝑹𝒆

Laufer Fil chaud 5 × 10

4

5 × 105

Barbara LDA 1 × 105

Figure 5.3 - Profils de vitesse axiale moyenne mesurés en amont du coude (l/D = -1) et profils mesurés par Lau- fer (204) en conduit droit et par Barbara (18) en amont d’un coude (à l/D = -1.5).

Laufer et Barbara. Indépendamment de la grille de contrôle de turbulence ut ilisée, les pro- fils mesurés par PIV se superposent, ce qui indique que le régime d’écoulement n’est pas modifié de manière sensible dans la gamme de nombre de Reynolds considérée.

Les profils de vitesses axiales de la présente étude s’approchent ainsi de la confi- guration turbulente pleinement développée, caractérisée par une topologie plate avec une fine couche de mélange. En outre, la Figure 5.4 illustre que les configurations mesurées dans cette étude contiennent un niveau plus important d’énergie cinétique turbulente que les essais réalisés par Barbara et Laufer. L’image présente les niveaux d’intensité turbulente normalisés par la vitesse de frottement à la paroi, 𝑢𝜏. Barbara propose la valeur 𝑢𝜏= 0.047 𝑈0 pour des écoulements de conduit à nombre de Reynolds aux environs de 𝑅𝑒 = 105.

Dans la présente étude, la valeur de 𝑢𝜏 a été calculée pour chaque configuration à partir des profils de vitesses axiales, considérant le point de mesure le plus proche de la paroi (voir Equation 3.15).

Les profils d’intensité turbulente mesurés par PIV, ainsi que ceux obtenus par les références, montrent une tendance de l’écoulement de conduit à gagner de l’énergie turbu- lente dans la région de proche-paroi, où les gradients de vitesse sont importants. La confi- guration qui s’approche le plus de celles de Laufer et Barbara est le cas avec la grille la plus fine (Grille 1) et vitesse débitante 𝑈0 = 2 𝑚/𝑠. Ce résultat semble indiquer que les grilles moins fines engendrent la création de structures tourbillonnaires plus grandes sur toute la section transversale du conduit ; ces structures sont convectées par l’écoulement moyen et, notamment pour des vitesses débitantes plus importantes, elles n’auront toujours pas dissipé leur énergie par viscosité lorsqu’elles arrivent dans la section de mesure

Figure 5.4 - Profils d’intensité turbulente normalisés par la vitesse de frottement mesurés à l/D = -1 et profils mesurés par Laufer (204) en conduit droit et par Barbara (18) en amont d’un coude (à l/D

(𝑙/𝐷 = −1). A l’arrivée sur le coude, toutefois, la topologie de la turbulence est affectée par la proximité de la courbe, avec l’apparition d’une région de forte intensité turbulente là où l’écoulement est accéléré. La Figure 5.5 illustre le champ d’intensité turbulente (adi- mensionné ici par la vitesse débitante) sur la section d’entrée du coude (𝜃 = 0°) pour toutes les configurations testées par la Stéréo-PIV.

Les profils de vitesse et intensité turbulente en amont du coude permettent de si- tuer les configurations testées dans les conditions d’écoulement souhaitées vis-à-vis des objectifs de cette étude (les champs moyens et RMS de chaqu e composante de vitesse me- surée sur chaque section sont illustrés en détails dans les Annexe A.1- A.3). Les différentes grilles de contrôle de turbulence et les vitesses débitantes imposées permettent de modifier légèrement les niveaux turbulents en entrée du coude sans modifier le régime d’écoulement. Les conditions d’essais rendent également les mesures réalisées comparables à d’autres études de référence retrouvées dans la littérature pertinente.

Figure 5.5 - Champ d’intensité turbulente sur Section 0° pour U0 = 2 m/s (haut), U0 = 5 m/s (mi- lieu) et U0 = 10 m/s (bas), avec Grille 1 (gauche), Grille 2 (centre) et Grille 3 (droite).

Conformément à ce qui a été montré dans le Chapitre 4, les mesures PIV sur les sections planes de l’écoulement ont fourni une base de données convergées, du point de vue statistique, permettant une représentation de l’écoulement instationnaire qui satisfait au cri- tère d’ergodicité. Pour cette raison, la technique de la Snapshot-POD a pu être appliquée à cette base de données, sur chaque section mesurée, afin de permettre quelques considéra- tions sur l’organisation de l’écoulement en structures cohérentes et sur les caractéristiques des modes principaux de l’écoulement. C’est pourquoi nous nous concentrons par la suite sur l’étude de la décomposition orthogonale de l’écoulement amont avant de passer à l’ana- lyse de l’écoulement en sortie du coude et ses comparaisons avec la littérature de référence.

5.1.2.2 Modes POD

La Snapshot-POD a été appliquée aux clichés des vitesses obtenus pour chacune des configurations testées par la PIV 2D-2C sur les sections situées en amont du coude. Pour chaque combinaison de grille et vitesse débitante testée, 1000 champs instantanés des vitesses bidimensionnels ont été utilisés pour la décomposition orthogonale. Cette décom- position a été appliquée à chaque section séparément, afin de permettre d’étudier l’organi- sation en structures cohérentes de l’écoulement capturé au sein des sections planes. En outre, la décomposition est réalisée sur les données de vitesse fluctuante, de manière à ce qu’aucun mode POD ne corresponde à l’écoulement moyen.

La Figure 5.6 illustre la distribution énergétique des 20 premiers modes POD de l’écoulement sur la Section 1 (section horizontale amont), pour toutes les configurations mesurées. Les barres bleues représentent le pourcentage de l’énergie cinétique turbulente contenu dans chaque mode tandis que la ligne pointillée rouge illustre la somme cumulée de ces contributions individuelles. Les 20 premiers modes POD contiennent, pour chaque cas, environ 60% de l’énergie du système, dont presque la moitié se trouve dans les 2 pre- miers modes. En effet, tandis que le premier mode de l’écoulement contient environ 20% de l’énergie à chaque fois, les modes supérieures au 10ème représentent une contribution de

moins de 2% chacun. Ce résultat est généralisé pour toutes les configurations testées ; tou- tefois, la distribution est encore plus inégale pour les grilles les moins fines, notamment pour la vitesse débitante 𝑈0= 2 𝑚/𝑠.

La topologie de ces modes peut être visualisée en considérant leurs formes mo- dales non-pondérées par leur contenu énergétique. Les formes modales des 15 premiers modes associées aux fluctuations de vitesse axiale sur la Section 1 sont illustrées par la Figure 5.7. Cette représentation cache le fait qu’en réalité les premiers modes portent plu- sieurs fois le pourcentage d’énergie contenu dans les modes illustrés en bas de la Figure 5.7 ; la normalisation des formes modales permet, toutefois, d’évaluer le rapport entre le con- tenu énergétique et la distribution spatiale de la cohérence dans la section considérée.

Sur l’image l’on peut constater que ce sont les grandes structures cohérentes si- tuées en proche-paroi qui contiennent la plupart de l’énergie de l’écoulement amont. Les premiers modes présentent souvent une espèce de symétrie les uns par rapport aux autres (voir modes 2 et 3, ainsi que 4 et 6). Ce résultat s’approche des conclusions issues des travaux de Hellström et al. (27). Ces auteurs ont appliqué la POD à des champs des vitesses mesurés par Stéréo-PIV sur de longueurs allant jusqu’à la dizaine de diamètres dans un

conduit circulaire soumis à un écoulement pleinement développé à 𝑅𝑒 = 1.2 × 104. Ils ont pu visualiser que les premiers modes de l’écoulement en conduit correspondent à des struc- tures cohérentes très allongées, situées en proche-paroi. Une reconstruction de l’écoulement avec les 4 premiers modes produit des structures jusqu’à 5𝐷 de longueur.

Néanmoins, pour le Nombre de Reynolds testé par Hellström et al., le premier mode ne concentre que 3% de l’énergie cinétique du système, un pourcentage très inférieur aux 20% atteints par le premier mode POD des mesures à Nombre de Reynolds de l’ordre de 105 de la présente étude. Il semblerait ainsi que l’écoulement turbulent a tendance à s’organiser davantage en de grandes structures cohérentes de proche-paroi à mesure que le

Figure 5.6 - Contenu énergétique de chaque mode POD (barres) et somme cumulée des énergies (ligne rouge) pour la Section 1. Haut : U0 = 2 m/s ; bas : U0 = 5 m/s. Gauche : Grille 1 ; centre : Grille 2 ; droite : Grille 3.

Nombre de Reynolds augmente. Cependant, il est pertinent de remarquer que la décompo- sition en modes orthogonaux réalisée par Hellström et al. comprend les 3 composantes de vitesse de l’écoulement (mesurées par Stéréo-PIV) tandis que la POD réalisée par cette

Figure 5.7 - Formes modales non-pondérées associées aux fluctuations de vitesse axiale sur la Sec- tion 1, Grille 1 et vitesse débitante U0 = 2 m/s.

étude considère les vitesses contenues dans un plan mesuré par PIV 2D -C ; cette différence peut contribuer aussi pour une différente distribution énergétique des modes POD. En outre, l’introduction des grilles de contrôle de turbulence peuvent affecter l’organisation de l’écoulement et, par conséquent, la répartition des énergies modales.

Les modes les moins énergétiques illustrés sur la Figure 5.7 correspondent à des structures de plus en plus petites, situées d’abord sur la paroi et allant vers la turbulence aléatoire dans le centre du tuyau pour des modes à nombre encore plus élevés (qui ne sont pas illustrés ici). Cependant, la contribution relative de ces modes à l’énergie cinétique totale du système est négligeable. Un comportement semblable peut être observé sur la Section 2 (section verticale amont).

Figure 5.8 - Profils des vitesses axiales (haut), vitesses transversales (centre) et intensité turbulente (bas) sur la Section 4.

Figure 5.9 - Profils des vitesses axiales (haut), vitesses transversales (milieu) et intensité turbulente (bas) sur la Section 5.