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Des pays et des systèmes de protection sociale très divers

Les pays européens ont des systèmes de protection sociale inégalement développés et basés sur des principes de fonctionnement très différents, pour des raisons qui tiennent à de multiples facteurs qui renvoient à leur histoire, à leur démographie, à leur niveau de vie et au fonctionnement socio-économique et institutionnel de leurs sociétés.

On classe habituellement les pays en deux groupes : d’une part ceux de tradition « bismarckienne » où le système repose essentiellement sur des mécanismes d’assurance, souvent sur une base professionnelle, et sur un financement par des cotisations, et d’autre part ceux de tradition « beveridgienne » où le système a pris originellement la forme d’une aide universelle avec un financement davantage fondé sur l’impôt. Le premier comprend la France, la Belgique, les Pays-Bas, l’Alle-magne et Autriche ; dans le second on retrouve les pays scandinaves, l’Irlande et le Royaume-Uni.

Toutefois, une telle distinction ne peut suffire à expliquer la diversité des systèmes nationaux de protection sociale en Europe, qui fonctionnent souvent selon des logiques hybrides et qui varient selon les risques et les fonctions sociales considérées. Il convient en outre de distinguer au sein de l’Union européenne (UE) les membres « historiques » et les « nouveaux entrants », tant leurs systèmes sont différents. À partir des quinze anciens membres (UE 15), l’UE s’est élargie le 1ermai 2004 à dix nouveaux États : Chypre, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie et la Slovénie. Au 1er janvier 2007, la Bulgarie et la Roumanie ont rejoint l’UE, qui atteint 27 membres (UE 27).

Les comptes de la protection sociale, qui répondent à un cahier des charges mis en place dans le cadre de l’Union Européenne, autorisent des comparaisons chiffrées entre les systèmes de protection sociale. Des données par pays sont publiées par Eurostat, chaque État membre de l’UE fournissant des statistiques conformes au Système européen de statistiques intégrées de protection sociale (Sespros) : ainsi, les comptes de la protection sociale sont-ils à la fois des comptes satellites des comptes nationaux réalisés par l’INSEE, et des comptes articulés au système Sespros.

Les comparaisons entre pays doivent cependant être faites avec précaution car ces données ne tiennent pas

compte des impôts ou charges sociales susceptibles d’être prélevés sur les prestations, ni des transferts réalisés au moyen d’allégements ou d’abattements fiscaux.

Le poids des prestations de protection sociale dans l’Union européenne est stable de 1990 à 2007

La part des prestations de protection sociale dans le PIB s’élève en 2007 à 25,2 % en moyenne dans l’ensemble de l’UE (UE 27), en baisse de 0,6 point par rapport à l’année précédente. Concernant les quinze anciens membres de l’Union européenne, c’est en Irlande que la part des prestations de protection sociale est la plus faible (17,6 %) et en Suède qu’elle est la plus élevée (29,0 %). À l’exception de l’Irlande et du Luxembourg, les pays du nord de l’Europe et la France se situent plutôt au-dessus de la moyenne européenne, alors que les pays du sud de l’Europe (Espagne, Grèce, Italie, Portugal) consacrent généralement une part moins importante de leur PIB à la protection sociale.

Concernant les douze nouveaux entrants ayant rejoint l’UE depuis 2004, c’est en Lettonie que la part des presta-tions de protection sociale est la plus faible (10,7%) et en Hongrie qu’elle est la plus élevée (21,9%), se rapprochant de la moyenne européenne (25,2%). La plupart des pays nouveaux entrants dans l’UE sont issus de l’ancien bloc soviétique, dont le système de protection sociale était caractérisé par des prestations universelles d’un niveau réduit mais dans lesquels les citoyens bénéficiaient en contrepartie d’avantages significatifs résultant de prix administrés faibles. Malgré la redéfinition des systèmes de couverture sociale, la part des prestations dans le PIB s’est maintenue à son niveau initial parmi les dix pays entrants, contrairement à d’autres composantes des budgets publics1.

Ces différences entre pays sont liées, pour une part significative, à leur niveau de développement, les plus riches consacrant en général une plus grande place à la redistribution. Cette règle n’est cependant pas systéma-tique et d’autres facteurs influent sur le niveau des prestations sociales : ainsi le Royaume-Uni a en 2007 un niveau de PIB par tête supérieur à celui de la France (117 SPA2, avec pour référence EU 27 = 100), mais consacre 4,2 points de PIB de moins à la protection sociale. La France se caractérise donc par un niveau de protection sociale relativement élevé.

1 • Cohu S., Lequet-Slama D., Strobel P., 2004, « Protection sociale : un aperçu de la situation des dix nouveaux membres de l’Union européenne », DREES, Études et Résultats, n° 336, août.

2 • SPA (Standard de pouvoir d’achat) : unité indépendante des monnaies nationales qui gomme les distorsions dues aux diffé-rences de niveaux de prix. Les SPA sont calculées sur la base des parités de pouvoir d’achat (PPA), obtenues sous la forme d’un prix moyen pour un panier homogène de biens et services.

E1.1 Prestations de protection sociale rapportées au PIB dans l’Union européenne

E1.2 Prestations de protection sociales dans les pays de l’Union européenne par groupe de fonctions en 2007

en % du total des prestations Irlande

Parmi l’Union européenne à quinze, le poids des presta-tions de protection sociale s’est généralement réduit du milieu de la décennie quatre-vingt-dix jusqu’en 2000, sous l’effet de la reprise économique, de la décrue du chômage, mais aussi des efforts d’ajustement budgé-taire consentis par les états alors candidats à l’entrée dans l’Union monétaire européenne (1erjanvier 1999).

Les années suivantes s’accompagnent d’une relative stabilité des dépenses de protection sociale ramenées au PIB : dans l’Europe des 25, les dépenses de protec-tion sociale représentent la même part de PIB en 2000 et en 2007 (25,2 %). Deux pays se distinguent : la Grèce, avec une croissance continue de 1991 à 2001, puis une légère décroissance avant de gagner près d’un point en 2005 ; et le Portugal avec une croissance de 1996 à 2006 et une légère diminution en 2007. Ces deux excep-tions pourraient s’expliquer par un phénomène de

« rattrapage » lié à la maturation de leur système de protection sociale.

Des risques sociaux inégalement assurés Les prestations au titre de la fonction vieillesse-survie constituent la part la plus importante des dépenses de protection sociale : 46,2 % du total des prestations (UE 27). Parmi l’UE 15, c’est en Italie que cette part est la plus importante (61,1 %) en raison, notamment, de la forte proportion de la population âgée de 60 ans et plus.

Parmi les nouveaux entrants, c’est la Pologne qui a la part la plus importante (60,2 %), mais qui a inversement le plus faible taux de soins de santé (22,1 % pour une moyenne dans l’UE 27 à 29,1 %). À l’inverse, en Irlande, pays où la population est la plus jeune d’Europe, l’ensemble des prestations vieillesse et survie représen-tent 27,3 % de l’ensemble des prestations sociales.

Le risque maladie – soins de santé arrive en deuxième position avec 29,1 % des prestations. Les parts des fonctions famille-enfants et chômage sont plus faibles et très variables d’un pays à l’autre. Le montant des prestations « chômage » n’est à cet égard pas unique-ment lié au taux de chômage dans les différents pays.

En effet, des différences sensibles existent concernant la couverture, la durée d’indemnisation et le montant des prestations de chômage. Ainsi la Belgique et l’Italie,

avec des taux de chômage proches en 2007 (respecti-vement 7,5 % et 6,1 %) consacrent respecti(respecti-vement 11,7 % et 1,8 % de leurs prestations sociales à la fonction « chômage ». Concernant les douze nouveaux pays entrants, hormis la Pologne, leur structure par fonctions est globalement plus homogène que celle de l’UE 15 ; elle se caractérise par une part relativement faible des prestations chômage.

Une structure de financement en convergence lente

En 2007, les cotisations sociales ont représenté, en moyenne, 58,5 % du financement de la protection sociale dans l’Union européenne, ratio quasi-identique pour l’ex UE 15 et celle élargie à 27. Cette part est assez variable d’un pays à l’autre, notamment selon le type du système social « bismarckien » ou « beverid-gien ». Les autres ressources se composent principale-ment des contributions publiques et des impôts et taxes affectés. Entre 2000 et 2007, la part des cotisations a diminué de 2,4 points dans l’ensemble des pays de l’Union européenne (UE 25). Au sein des cotisations sociales, la part des cotisations versées par les employeurs reste prépondérante, malgré un mouve-ment de recul dans la majorité des pays, traduisant l’objectif d’alléger les coûts de la main-d’œuvre pour favoriser l’emploi.

Depuis plusieurs années, les systèmes européens de protection sociale semblent toutefois en voie de rappro-chement3. La part de la fiscalité dans le financement s’accroît dans les pays où prédominent les cotisations.

C’est particulièrement net pour la France où la part des cotisations, tout en restant supérieure à la moyenne européenne, a diminué de près de 9,5 points entre 1996 et 2007, à la suite notamment du transfert vers la Contri-bution sociale généralisée (CSG) de la part salariée relative au risque maladie4. À l’inverse, au Danemark, l’introduction en 1994 de nouvelles cotisations pour alimenter des fonds du marché du travail a contribué à réduire la part largement prépondérante des contribu-tions publiques et des impôts et taxes affectés : leur poids dans les recettes est passé de 80,1 % en 1990 à 61,9 % en 2007.

E1

n

La protection sociale dans les pays de l’Union européenne en 2007

3 • Delautre G. et Bourgeois A., 2010, « Comparaison européenne de l’évolution des dépenses et des ressources de la protection sociale » dans Les Comptes de la protection sociale en 2008, DREES.

4 • Hennion M., 2010, « Cinquante ans de financement de la protection sociale » dans Les Comptes de la protection sociale en 2008, DREES.

E1.3 Ressources de la protection sociale dans les pays de l’Union européenne en 2007

en % du total des ressources

Sources •Eurostat-Sespros.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100

Contributions publiques, impôts et taxes affectés Autres recettes

Cotisations personnes protégées Cotisations employeurs

Danemark Irlande Portugal

Royaume-Uni

Suède Luxembourg

Finlande Italie Grèce

Europe 27 pays Europe 15 pays Allemagne

EspagneFrance Autriche Pays-Bas

Belgique Chypre Pologne

Hongrie RoumanieBulgarie

Lituanie Malte Lettonie Slovaquie Slovénie

République tchèque Estonie

n

1 - Éclairage méthodologique : statut, objectifs,